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Citations de Abdellah Taïa (265)


Le rêve peut alors commencer. Le cinéma montrer sa véritable puissance. L’impossible deviendra possible.
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Il n’y a pas que le sang qui lie les êtres. Les âmes se rencontrent, se reconnaissent et se parlent même quand les mers, les océans les séparent. Elles dépassent ces barrières insignifiantes. Elles marchent sur les eaux. Volent au ciel. Discutent avec les prophètes. Récitent soudain, sans jamais les avoir appris auparavant, des poèmes sacrés, soufis, écrits il y a des siècles et des siècles. Psalmodient le Coran, la Bible et Les Mille et Une Nuits.
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Elle joue, elle fait la joie, le bonheur. Elle y croit. J’y crois. Elle arrive à me convaincre, chaque fois qu’elle se laisse prendre par les caméras, que la vie n’est pas seulement la vie, il y a autre chose. Il y a ce corps, le sien, le mien, le tien, celui du monde. Il y a la beauté. Il y a les règles. Marilyn Monroe m’apprend à aller au-delà de ces apparences. Elle est le monde tout entier, son origine, son développement, ses trous, sa matière noire, son ciel et ses volcans. Elle porte tout cela en elle. Et c’est, bien sûr, lourd. Lourd pour une enfant rejetée de tous, dès le départ, dès le premier jour. Dans l’errance éternelle. Triste elle est née, triste elle sera toujours. Triste parce qu’elle sait tout, connaît tout des hommes et des femmes. Devant elle, ils n’ont plus honte, les hommes.
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Sur la télévision en couleur le film avait déjà commencé.
Une femme blonde chantait. Dansait et chantait. Autour d’elle, que des hommes, des cow-boys heureux comme des enfants.
Je ne la connaissais pas.
Ma mère, elle, oui, la connaissait bien.
Avec une adoration sincère, elle a dit :
« C’est Marilyn ! Marilyn Monroe ! »
C’était comme si elle retrouvait une sœur perdue, aimée passionnément dans une autre vie. Une preuve que l’amour avait raison d’exister, de nous imposer sa loi divine. De partir sans raison. Et de revenir un jour tranquille, sans événement particulier.
Un amour qui dépassait ma mère, son genre, son sexe, son histoire. Au-delà de sa condition et de sa réalité. Le cinéma et Marilyn Monroe sortaient ma mère de son silence, de son refus constant d’exister dans les mots dits et redits.
« C’est Marilyn ! C’est elle ! C’est elle ! »
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« La chaleur de tes cuisses fait fondre mes soucis. »
Un des soldats de ma mère ne revenait que pour cela. Dormir sur les cuisses de ma mère. Trente minutes. Pas plus. Se réveiller. Dire cette phrase. Et partir.
Il était le plus vieux. 45 ans. Il passait toujours en dernier.
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Je regardais la télévision. C’est d’elle que j’ai appris à mieux distinguer les choses, les fils entre les gens. Le mal. Le bien. Les masques. Les langues. Les illusions.
Il ne fallait pas dire aux autres que nous avions une télévision en couleur. Ni aux voisins ni aux camarades à l’école. La jalousie, encore, toujours, partout. Se méfier des autres, de tous les autres. La nudité ne signifie pas révéler son âme, ses secrets, à tout le monde.
« Le monde ne comprend pas la terre. On ne sait plus être vrai. Tu ne dois jamais te livrer complètement aux autres, mon fils, même à ceux qui t’aiment. Résiste. Résiste. Ne dis pas tout de toi, de ton histoire, de ton cœur. Ne te donne jamais totalement. Personne ne mérite cela, cet honneur. Tu as compris ? »
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Deux ans pour connaître de l’intérieur un homme, un être humain, un sexe masculin. Savoir tout de ses paroles et de ses silences. De son souffle qui s’accélère. De son cœur qui devient fou. De sa jouissance. Son râle. Et son corps, au ciel, qui tombe violemment.
Deux ans pour m’inspirer d’un homme, le copier, marcher comme lui, me tenir comme lui, tomber comme lui, inventer dans ce monde une place près de la sienne, un chemin parallèle au sien.
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Le Maroc avait soudain besoin de plus de soldats. On les formait à Salé, à Kenitra, à Meknès, et on les expédiait au sud, dans le Sahara, défendre un désert soudain devenu un territoire national, une cause sacrée. Un tabou. Un mystère. Une fiction. De la science-fiction.
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C’était le pays des bandits, les vrais, des ivrognes rejetés de tous, des tueurs, des drogués. Une zone de non-droit juste à côté de la base militaire la plus importante du Maroc. Je n’ai jamais compris comment cela était possible. J’ai posé une fois la question à notre soldat. Lui non plus n’avait pas de réponse. Il s’est contenté de dire :
« C’est le Maroc ! »
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Je sais tout. Tout. Tout du sexe.
Je ne suis gêné par rien. C’est juste du sexe. Tout le monde en a besoin. Ma mère le donne. Parfois gratuitement. Elle s’offre aux autres. Et nous mangeons. On doit manger.
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La tristesse domine le monde. La scène. Les couleurs sont pourtant chaudes, éclatantes, violemment vivantes. Elles le seront tout le temps. On aura beau crier au scandale, ces couleurs ne changeront pas de ton, ne varieront pas. On sait qu’elles sont belles, qu’elles sont une célébration de la vie. On le sait. On le comprend et on est tristes. Dieu nous entend alors et nous rejoint dans notre tristesse infinie pour cet arbre coupé, enlevé, sans pieds. Dieu a pitié de nous. De lui.
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Il n’y a qu’elle, qu’Elle de vraie. La grande femme. La Berbère. La guerrière qui a combattu les Arabes, il y a des siècles, quand ils ont commencé à nous envahir, à nous obliger à changer de peau. Elle était la femme courage. La maligne. L’obstination. La liberté. La fierté. Notre déesse. Notre reine véritable. Notre Cléopâtre. Notre modèle à suivre. Tu la connais ? Tu la connais, n’est-ce pas ? Non ? Non ?
Tu dois la connaître. Demande autour de toi. Inspire-toi d’elle, de ses gestes, de sa fidélité à elle-même, à son corps, à son instinct. À son sexe.
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En guidant le zob de l’homme, en le dominant, tu serviras ton propre sexe. Tu auras des besoins. Tu sauras les satisfaire. Tu seras mauvaise aux yeux des autres. Et tellement épanouie au fond. Un soleil. Une lune. Une étoile. L’étoile.
Je le souhaite de tout cœur.
La vie est traîtresse, je le sais. Dieu est absent, nous le savons, toi et moi.
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L’homme ne connaît pas son zob, cette extrémité qui le dépasse, le démange, le dérange. C’est un être à part, le zob. Tu dois nouer avec lui un dialogue qui exclut en secret l’homme. Tu dois inventer un langage pour chaque zob, des gestes, des murmures, des regards, des façons d’être pour l’approcher, l’amadouer, le saisir, le mener jusqu’au bout de la nuit et de ses plaisirs. Le marié aura aussi, très souvent, peur. N’oublie pas la tendresse. Regarde-le tendre. Sans mollesse. Il en sera touché, reconnaissant. Il te laissera le prendre, le dompter, l’agrandir, le nourrir, lui faire goûter la salive, le sel, le sucre, le miel, la forêt, le sang. Son propre lait.
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Les hommes n’arrivent jamais à bander cette nuit-là. Ne t’inquiète surtout pas. Je te donne une technique simple et efficace pour les aider à avoir l’érection plus que nécessaire pour réussir dans ta mission. Si les mots sexuels ne suffisent pas, si tes yeux et tes fesses ne servent à rien, alors, ma fille courageuse, sans rien lui demander, tu mettras un doigt dans le trou du cul du marié.
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Les femmes sont cruelles. Je le sais. Je ne le sais que trop bien. Elles ne m’ont jamais aimée. Je les ai aidées tant et tant de fois. Elles m’ont toujours tourné le dos, ignorée, insultée même.
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La mariée doit être vierge. C’est ainsi. Ce n’est pas le moment de discuter. Ce n’est pas ton rôle de remettre cela en question. Le sang doit couler. On n’attend que cela. La preuve de cette pureté fictive.
C’est ta responsabilité.
Tu devras tricher. Demander au mari de fermer les yeux. Lui expliquer ce qui est réellement important. Lui promettre mille plaisirs. Ce n’est pas la fin du monde. Le sang peut couler de partout. La cuisse, le bras. Les mollets. Il faut se préparer à tricher, sans hésiter. Et, presque tout le temps, tu auras à le faire.
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Tu feras du bien, ma fille. Ils te donneront de l’argent, te souriront, et, dès que tu seras partie, ils te maudiront.
Ce n’est pas grave.
Ce n’est pas du tout grave.
Je ne mourrai pas. Par toi je continuerai à circuler ici-bas.
Tu prendras les zobs dans tes mains. Tu ouvriras les vagins grand.
Et, pour cela, il faudra que tu parles.
Voilà comment j’ai fait.
Voilà comment tu feras.
Tu seras la seule personne admise dans la chambre des mariés. C’est la nuit de noces. À l’extérieur tout le monde est à la fête. On danse, on boit, on chante, on entre en transe facilement. Tout est débordement. Presque personne au sein des deux familles ne sait que tu es là, sur le même lit que le couple qui s’apprête à s’unir. C’est toi qui vas les unir. Mettre un sexe dans l’autre. Pour la première fois. Lui, il n’arrivera pas à bander. Elle… elle sera pétrifiée et elle ne voudra pas enlever ses vêtements. Tu devras exciter le premier par les mots sales, sauvages, de la rue.
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Tu feras comme moi. Tu aideras les hommes et les femmes. Tu les feras se rencontrer enfin. Tu les introduiras l’un dans l’autre.
Je te l’ai dit tout à l’heure.
Les hommes ne savent rien.
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Le petit trésor que je te laisse n’est pas énorme. Une ceinture. Dix louises. Une chaîne et sa khamssa. Tout est en or. Fais-en ce que tu veux. Cela t’aidera à t’installer, à acheter une petite maison dans la vieille ville. Tu seras protégée un moment. Un an. Deux ans peut-être.
Tu as maintenant 16 ans.
Tu auras vite 18 ans.
Tu n’es pas belle.
À Azemmour tu le seras.
Je ne veux pas que tu deviennes une petite bonne, une esclave, une mendiante. Tu n’auras pas besoin d’eux. Les autres. Ils viendront jusqu’à toi. Ils chercheront ton savoir, tes gestes, ta bénédiction. Aucun mariage ne se fera sans toi, ma fille.
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