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Critiques de Bernhard Schlink (881)
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Olga

Olga attend. Icône d’amour et de fidélité.



Bernhard Schlink a le talent des magnifiques portraits de femme. On ne peut oublier son «Liseur» (1995), jeune homme fasciné par le destin d’une ancienne nazie.

En découvrant la vie d’Olga, c’est encore l’histoire de l’Allemagne du 20e siècle qui s’impose dans une société entraînée vers le pire par ses rêves de grandeur, entre deux guerres mondiales et un empire colonial tenu de main de fer. Un pays où les hommes font des choix funestes pour assouvir leur désir de gloire, quand les femmes s’effacent et souffrent en silence.



Olga, l’institutrice, traverse des petits bonheurs mais beaucoup de zones de turbulences où la perte et le deuil ne l’oublient pas. De son trop court amour sensuel pour Herbert, à celui protecteur pour le jeune Eik, les années ont été faites de désillusions jusqu’au seuil de la vieillesse. Avec le temps, sa surdité n’est-elle pas une métaphore du refus d’un monde qui ne la concerne plus?



Femme modeste mais volontaire, indépendante par nécessité, cultivée par ténacité, résolue dans ses choix, moderne pour son époque, Olga fascine par sa personnalité. Le narrateur nous construit son histoire en trois temps, dans sa jeunesse laborieuse et amoureuse, dans sa maturité de solitude adoucie par l’amitié, et dans les magnifiques lettres d’amour envoyées à un fantôme parti vers les espaces glacés de l’Arctique.



Un texte qui nous parle d’amour, de transmission et d’éducation, et d’une forme discrète de féminisme et d’humanisme.

Inutile de préciser que j’ai beaucoup aimé ! ;-)

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La Petite-Fille

Un roman délicat qui m'a transportée dans de nombreux questionnements.

En toile de fond, la réunification de l'Allemagne avec les incompréhensions, les laissés-pour-compte, les extrêmes et finalement l'indifférence qui en ont émergés.

C'est aussi l'histoire d'un amour difficile basé sur des cicatrices, des non-dit et un secret.

D'une plume élégante, l'auteur aborde le déracinement, les choix impossibles, les contradictions, la tolérance et le deuil.

Il est surtout question de notre capacité à accepter l'autre quand il est à l'opposé de nos valeurs.

Tout cela est complexe et le héros, confronté à ces obstacles, va devoir subtilement apprivoiser, ne pas effaroucher et respecter cette petite fille, sa petite-fille.

Va t-il réussir ?

Un roman émouvant, lucide, intelligent et poignant.



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La Petite-Fille

« La RDA ne deviendra jamais le pays dont on rêvait. Elle n’existe plus. Ceux qui sont restés ne peuvent plus se réjouir. Ceux qui sont partis ne peuvent pas y revenir ; leur exil est sans fin. D’où le vide. Le pays et le rêve sont perdus irrémédiablement. »

La petite-fille est une histoire de l’Allemagne, entre culpabilité, désespoir et détestation.

C’est aussi le récit d’une rencontre entre un homme endeuillé et une adolescente endoctrinée.

Gaspar vient de perdre sa femme et se découvre à 71 ans une petite fille par alliance. Il est originaire d’Allemagne de l’ouest, libraire, ouvert, amateur d’art et de musique.

Sigrun a 14 ans, vit en ex-RDA et est complètement soumise à son milieu familial néo-nazi, très cloisonné.

Malgré leurs différences, ils vont s’apprivoiser, se découvrir, s’aimer.

Le portrait de Gaspar tout en bienveillance et retenu, toujours dans la transmission, est magnifique. Et le livre est un bel hommage à la littérature et à la musique, de nature à abolir tous les clivages.

« Quand j'écoute Bach, j'ai le sentiment que la musique contient tout, le léger et le lourd, le beau et le triste, et qu'il les réconcilie »



Une magnifique lecture

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Le liseur

Garçon ou comment Michaël garda Hanna dans la peau toute sa vie.

L'histoire n'aurait jamais dû commencer pour ce Garçon de 15 ans, malade, qui découvre sa voisine et par la même découvre la Femme et ses 1ers émois amoureux et sexuels. Il a 15 ans, elle 35, mais elle va faire de lui un homme mais d'abord elle l'infantilisera comme une mère à son enfant puis verra en lui un homme, un amant. Un amant avec qui le rituel sera toujours le même lecture, bain, plaisirs charnels. Michaël devra faire la lecture à Hanna sinon rien ne se passa. Rituels et sautes d'humeurs Michaël se détourne d'Hanna pour vivre sa vie d'adolescent puis un jour il retourne à son appartement et elle est partie, on ne sait où sans un mot. Ce n'est que 8 ans plus tard par le plus grand des hasard que Michael reverra Hanna dans un tribunal où elle sera jugée avec d'autres femmes pour crime de guerre. Que sait-on sur Hanna? Pas grand chose au final. si ce n'est son secret que nous découvrirons dans ce roman, la honte d'être différente. Une différence qui handicape. Michaël n'oublie pas Hanna, a honte d'elle et de ce qu'ils ont vécu mais la comprend sans l'excuser. Hanna son 1er amour, celui que l'on n’oublie jamais.
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La Petite-Fille

Kaspar a aimé Birgit toute sa vie, malgré ses fuites, malgré l’alcool. Lorsqu’elle meurt accidentellement, il découvre qu’elle a écrit son histoire, sa rencontre avec lui, sa fuite de la RDA et surtout, surtout qu’elle a abandonné sa fille pour le suivre.



Après la chute du mur de Berlin, elle a rêvé de la rechercher, elle a rédigé des lettres jamais envoyées. Kaspar décide d’entreprendre cette quête.



Si un roman peut vous faire comprendre à quel point la réconciliation franco-allemande est un miracle, c’est bien celui-là. Certes, nous nous sommes réjouis de la réunification des deux Allemagnes, mais que savons-nous de ce que ressentaient les Allemands ? De la culpabilité qui retombait (… ou pas) sur les générations suivantes ? De la signification de la fuite de la RDA ? Nous n’avons pas vécu la même histoire, loin de là, et j’en ai appris beaucoup grâce à ce livre.



J’ai aimé le dénouement, loin d’être l’un des deux auxquels je m’attendais (aucun ne m’aurait satisfaite).


Lien : https://dequoilire.com/la-pe..
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Le liseur

Michaël Berg a quinze ans quand il devient l’amant d’Hannah, une femme de trente-cinq ans. Grâce à cette liaison, il grandit plus vite que ses camarades, mais un jour, elle disparaît.



Des années plus tard, alors qu’il étudie le droit, il assiste à un procès où il retrouve Hannah au banc des accusés. Pendant la Seconde Guerre mondiale, elle a été gardienne dans un camp de concentration.



L’histoire d’amour est fascinante puisqu’elle perdure malgré ce que Michaël apprend des actes d’Hannah. Tout au long du livre, Michaël alterne entre plusieurs interprétations, même s’il est suffisamment intelligent pour comprendre que la plus favorable des interprétations n’excuse rien. J’ai surtout été frappée par les interrogations du narrateur. Il fait partie de la génération qui a grandi après la guerre, de cette génération née de parents qui avaient soit participé aux atrocités soit les avaient ignorées.



La question qui m’a la plus marquée est néanmoins celle posée par Hannah elle-même au juge : « qu’aurais-je dû faire ? ». La non-réponse du juge est encore plus fascinante, comme si le juge aurait pu se trouver à la place d’Hannah, incapables tous les deux de comprendre ce qui s’était joué dans leur pays.



Le dénouement du livre m’a pourtant déçue, j’ai eu l’impression que l’auteur cherchait à échapper à la difficulté, à mettre un point final, là où il n’y aurait pas dû y en avoir, du moins pas tout de suite.


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La Petite-Fille

Après une courte hésitation au tout début du roman, j'ai été happée par les thèmes abordés par l'auteur allemand .



Après le décès de sa femme Birgit, Kaspar découvre un écrit d'elle relatant les années commençant juste avant sa rencontre avec Kaspar jusqu'à ses derniers jours .

Birgit a grandi en RDA et a accepté de suivre Kaspar en Allemagne de l'Ouest en 1965 , entretemps , elle met au monde une fille dont le père n'est pas Kaspar et qu'elle abandonne à la naissance avant de fuir son pays .

L'abandon de son enfant et la fuite de son pays natal sont pour Birgit un fardeau qui jamais ne la quittera et dont elle ne parlera pas à Kaspar .



On se rend compte en lisant son texte , que les allemands de l'Est étaient attachés à leur pays et que si la réunification de l'Allemagne est considérée comme un bienfait pour ces gens opprimés , ils y ont perdu, pour certains, une forme de stabilité et de sécurité dans l'absence même de libertés, une vie réglée sans anicroche ...



C'est difficile à admettre pour nous qui n'avons pas vécu directement cet événement , il y a eu en plus , et je ne suis pas sûre que cela perdure encore à notre époque , une discrimination entre allemands, ceux de l'Est étant moins bien considérés que les autres .



Une différence subie par Birgit et une certaine nostalgie de son existence antérieure qu'elle va mal supporter , accentuée par le remords et la honte d'avoir abandonné son enfant .

L’impossibilité de se confier à l'homme qui l'aime la conduit à une impasse et la découverte choquante de cette vérité va profondément affliger Kaspar.



Il décide donc de quitter Berlin et sa librairie pour partir à la recherche de la fille de Birgit. Il finit par la retrouver , en ex RDA dans une communauté de militants d’extrême droite, nostalgiques du troisième Reich, elle est mariée et a une fille de 14 ans Sigrun, élevée dans la discipline imposée d'abord par son père.

Kaspar, avec beaucoup de diplomatie obtient d'accueillir Sigrun pendant les vacances.



La confrontation entre cette adolescente pétrie dans la doctrine néonazie et son grand-père est également passionnante car Kaspar est un homme sensible, tolérant et intelligent , il n'affronte pas les principes inculpés à Sigrun, il ne juge pas , il lui fait découvrir la musique, la pratique du piano et les concerts , la littérature , la peinture , le monde en général sans la heurter , en y allant patiemment , en lui montrant une autre vision de la vie, une autre version de l'Histoire ...

Ce n'est pas de la part de l'auteur un procès abrupt contre l’extrême droite, en particulier le mouvement Völkisch, mais il m'a fait découvrir cette face sombre de l'Allemagne et qui , si elle n'est pas propre à ce pays , est profondément ancrée et active.



Les relations qui se créent entre Kaspar , le grand-père et Sigrun, l'adolescente sont fortes et belles donnant un récit lumineux malgré la noirceur qui menace la jeune fille .



Un excellent roman qui m'a ouvert les yeux sur ce pays voisin et certains de ses démons mais également qui met en avant une belle personne .
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Olga

Très intéressant. En fait, je ne m'attendais pas à cette histoire là. En lisant le 4ème de couverture, je m'attendais plutôt à une histoire classique, une histoire d'amour entre un homme et une femme de classe différente.



Oui, il y a de cela mais mieux encore. Olga, jeune orpheline sera élevée par sa grand-mère qui ne l'aime guère. Elle l'emmène avec elle en Poméranie. Olga va découvrir la campagne et la pauvreté. Elle se liera d'amitié avec Herbert et Viktoria, les enfants d'un riche industriel. Viktoria partira en pension et Olga et Herbert se retrouveront seuls. Ils partageront leur temps libre, leur jeux et leur passion.



Mais Olga ne se résignera pas aux injonctions de sa grand-mère et du curé qui lui serine que les études ne servent rien. Elle décide de les continuer et pour cela elle se rendra à Posen à l'école normale d'institutrice. Une enseignante la prendra sous sa coupe et lui donnera des livres. Grâce à cela, elle a pu préparer le concours et devenir à son tour, institutrice.



Viktoria, voyant l'attachement de son frère pour Olga fera tout pour qu'elle soit nommée institutrice en Prusse-Orientale, dans un village au nord de Tilsit. Olga en prendra son parti. Cela n'empêchera pas Herbert de la rejoindre dès son retour de ses pérégrinations à travers le monde.



Il ne peut rester en place. Ce sera sans cesse des allées-retours et malgré l'injonction de ses parents à se marier et à reprendre la succession de son père, celui-ci ne renoncera pas à ses voyages, ni à Olga.



Olga est donc souvent seule, mais s'en accommode. Elle va se lier avec un petit garçon, Eik qu'elle va présenter à Herbert, qui ne lui prêtera guère attention au grand dépit d'Olga, même si elle n'en montre rien.



Herbert rêve de l'Arctique et monte une expédition, épaulé par Olga, pour trouver les fonds. A partir de ce départ, Olga sera seule. Elle lui écrira souvent, mais n'aura jamais aucune réponse à ses missives. Elle va traverser les deux guerres, survivre, et après la deuxième guerre mondiale, deviendra couturière chez une famille qui la prendra sous son aile.



Elle se liera d'amitié avec le fils de la famille. Elle lui confiera certains éléments de sa vie. Ils resteront toujours en contact jusqu'au décès d'Olga et ce n'est que bien plus tard, lorsqu'il sera à la retraite, que Ferdinand partira à la recherche du passé d'Olga et de sa vie, notamment à la recherche de la correspondance qu'Olga a adressé pendant des années à Herbert, Poste restante à Tromso, en Norvège. C'est par ce biais qu'il découvrira vraiment qui était Olga.



Une histoire dense et foisonnante, passionnante, où l'on traversera les deux guerres mondiales, l'Histoire de l'Allemagne, mais aussi le choix de cette femme déterminée à vivre sa vie sans se la laisser dicter.



Un très beau portrait de femme libre qui aura eu la chance de connaître un très court grand amour qui dura toute une vie.
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Couleurs de l'adieu

Il écrit bien Bernhard Schlink. C’est fin et subtil. Avec ces neuf nouvelles, je suis partie en Allemagne, principalement à Berlin, une ville qui semble regorger de vie avec ses nombreux musées, concerts et opéras. J’ai suivi des parcours d’hommes, de femmes, d’enfants dont leur vie comme vous et moi est parsemée de bonheurs, d’épreuves, de changements souhaités, imposés ou subis, de quêtes, tout ce qui forge une personnalité, un caractère.

Ces nouvelles sont comme des petits romans, à part deux d’entre elles dont la fin m’a laissée encore un point d’interrogation dans l’esprit, mais toutes les autres m’ont fort plu et j’ai lu ce livre d’une traite en entrant dans chaque histoire immédiatement. Le couple, l’adultère et l’enfant, l’amour et la reconstruction, la trahison, la perte d’un être cher sont les sujets de ces nouvelles.

Je les ai trouvées abouties, la plume m’a enchantée. Je lirai certainement un autre livre de cet auteur.
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La Fin de Selb

La fin de Selb est le troisième et dernier volet d’une série consacrée au détective privé du même nom, tentative de Bernhard Schlink de frayer avec le roman policier. Pour être complètement honnête, je n’ai pas été vraiment enthousiasmé par cette série. Je ne l’ai pas détestée non plus, remarquez. Disons que je l’ai trouvée correcte, peut-être un peu plus, en tous cas suffisament pour me donner l’envie de persévérer dans cette série.



Il faut dire que Gerhard Selb ne soulève pas les passions. C’est un type vieillissant, esseulé, très professionnel et visiblement efficace, mais on ressent sa fatigue, le poids de l’âge. C’était très à propos, et sans doute très réaliste, pas tous les enquêteurs sont de jeunes fringants qui peuvent courir et sauter sur les toits pour rattraper un suspect. Mais cette lassitude du protagoniste est un peu contagieuse et teinte la lecture. Autre point qui m’a un peu déçu, je n’ai pas l’impression d’avoir vraiment arpenté sa ville de Mannheim, au sud de Frankfort.



Dans tous les cas, à l’approche d’une retraite imposée par le manque d’affaires qu’on lui confie, Selb accepte la mission de Welker, propriétaire de la banque Weller & Welker : retracer le bénéficiaire anonyme qui a sauvé la banque de la faillite plusieurs décennies plus tôt. Une histoire bien simple, pensez-vous ? Eh bien, non.



Au fil des pages, l’enquête prend des proportions inouïes, il y a même mort d’homme. Ce qui s’apparentait à un travail d’historien relégué à des bibliothèques se transforme en une intrigue de corruption, de blanchissement d’argent et d’intégration de l’économie communiste de l’Allemagne de l’Est au système capitaliste. Je ne m’attendais pas du tout à cela, l’auteur m’a étonné, en bien. Puis, l’histoire semble se résoudre alors qu’il reste encore la moitié du roman à lire. Vraiment ? Cependant, tout est à nouveau chamboulé – quoique, le mot est un peu fort puisque j’avais des doutes persistants que les éléments en cachaient d’autres, différents. Il y avait bien quelques longueurs dans cette deuxième partie mais Bernhard Schlink a réussi à me tenir au moins intéressé à son enquête.



La fin de Selb clôt assez bien cette série. Ce n’est pas une lecture que je recommande chaudement, surtout pour ceux qui préfère les thrillers ou les pages turner, mais elle porte un regard différent sur le travail des détectives. De Schlink, j'ai préféré les romans et recueils de nouvelles.
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Le retour

J'avais adoré (comme beaucoup) le liseur, puis le recueil de nouvelles Amours en fuite et enfin le week end, alors c'est avec beaucoup de plaisir que j'ai retrouvé la plume de Bernhard Schlink. Ce que j'aime avec cet auteur c'est qu'on ne sait jamais vraiment vers quoi il va nous mener, il nous donne une multitude de petits détails insignifiants au fil des pages qui finalement prenne tout leur sens.



On suit le personnages sur plusieurs années puisqu'on découvre d'abord son enfance, puis sa vie d'adulte. Ce narrateur, je l'ai trouvé intéressant et attachant. C'est un personnage très travaillé comme toujours avec l'auteur.Sa quête est passionnante et nous plonge dans l'histoire de l'Allemagne.



Alors bien sur ce roman n'est pas parfait et comme d'autres lecteurs, j'ai trouvé certains passages un peu long et j'ai eu un peu de mal d'un point de vue chronologique. J'avais parfois quelques difficultés a placer un évènement dans la vie du narrateur par rapport a un autre. Mais malgré ce dernier point je ne suis absolument pas déçue. Pour tous les lecteurs qui voudraient découvrir Bernhard Schlink, je vous conseille d'abord le liseur mais pour les autres je vous invite a découvrir ce grand auteur.
Lien : http://missmolko1.blogspot.i..
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Le liseur

À quinze ans, Michaël rencontre Hanna Schmitz qui en a trente-cinq. Il devient son amant, son « Garçon ». Entre eux s'instaure rapidement un rituel amoureux très précis : « Lecture, douche, faire l'amour et rester encore un moment étendus ensemble, tel était le rituel de nos rendez-vous. C'était une auditrice attentive. » (p. 54) Hanna aime qu'on lui fasse la lecture. Ce qui semble un simple agrément dissimule en réalité un secret. Hanna disparaît un jour, sans prévenir. Pour le jeune homme, le choc est terrible. « Je m'étais certes détourné du souvenir d'Hanna, mais sans le surmonter. » (p. 100) Des années plus tard, Michaël, étudiant en droit, la retrouve. « J'ai revu Hanna en cours d'assises. » (p. 102) Hanna est accusée avec quatre autres femmes de la mort de prisonnières pendant la seconde guerre mondiale. Au cours du procès, Hanna reconnaît les faits, mais se défend maladroitement. Elle demande la justice et la justesse, mais son attitude et ses propos jouent sans cesse en sa défaveur. Michaël perce alors le secret d'Hanna à jour. Alors que la révélation pourrait aider l'accusée, Michaël choisit de se taire pour préserver l'orgueil blessé d'une femme déterminée et courageuse.



Le procès de ces cinq surveillantes de camp est le procès d'une génération qui n'a pas empêché les crimes. Hanna pose sincèrement au juge la question de la responsabilité, mais la réponse de celui-ci est sans valeur pour Hanna. « Elle aurait voulu savoir ce que, dans sa situation, elle aurait dû faire, et non s'entendre dire qu'il y a des choses qu'on ne fait pas. » (p. 128)



La lecture orale, dont on entend beaucoup parler, ne se fait jamais entendre dans le roman. L'oralité, la formulation et l'écoute sont des sujets centraux, mais aucun texte ne se fait jamais entendre pour lui-même au cours du récit. Cette absence fait écho au secret d'Hanna : on est toujours face à des textes empêchés, à des lectures entravées.



Le personnage d'Hanna est remarquablement écrit : cette femme est difficile à saisir jusqu'à la révélation de son secret. Tout s'éclaire ensuite et les contours se précisent. Le narrateur s'adresse à nous, son récit est une barrière contre l'oubli, mais aussi le portrait d'un jeune Allemand dans un pays qui ne cesse d'interroger son passé et de compter ses coupables et ses victimes.



Je m'attendais à un texte plus dense voire plus étouffant, mais Bernhard Schlink est étonnant de subtilité et de délicatesse. Les ressorts dramatiques sont présents, mais ils ne grincent pas. L'émotion se dégage sans nuire à la réflexion qui, elle-même, n'est pas pesante ni vaine. L'auteur ne prétend pas réécrire l'Histoire, ni absoudre certains crimes ou coupables : il met un visage sur une barbarie très humaine.



Le film de Stephen Daldry avec Kate Winslet et Ralph Fiennes m'avait beaucoup touchée. J'avais particulièrement aimé les scènes où le jeune Michaël fait la lecture à Hanna. Kate Winslet est étonnante de justesse dans ce rôle. Quant à Ralph Fiennes... encore un coup de maître pour le bel acteur, tout en retenue et en puissance contenue.



Les couleurs de ce film m'avaient particulièrement bouleversées, entre sépia, gris et brun. Très peu de couleurs vives et donc une atmosphère légèrement brumeuse. La représentation des camps est pudique et sans pathos.



Le film est très fidèle au livre. Un coup double réussi !
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Le liseur

Lu d'une traite, ce roman me laisse une forte impression, toutefois difficile à mettre en mots. On pourrait dire qu'il s'agit avant tout d'un roman d'amour et c'est essentiellement ce qu'est la première partie contée par l'auteur comme un fait vécu, autobiographique. Loin de la mièvrerie, on décèle déjà dans le bonheur de la découverte de l'amour par le narrateur, alors adolescent, beaucoup de sentiments mêlés : amour et culpabilité cohabitent avant même que l'on ne découvre le véritable drame qui sous-tendait les attitudes. Et c'est dans la deuxième partie surtout qu'on trouve les considérations philosophiques qui, même si elles s'Inscrivent dans un contexte sociétal bien particulier, ont une portée universelle. La troisième partie est une sorte d'épilogue qui ne laisse pas grand espoir aux jeunes qui portent les stigmates des exactions perpétrées collectivement par leurs parents sous le Troisième Reich. Si on ne peut oublier, si on ne peut non plus réparer, combien de générations faudra-t-il pour enfin en guérir?

Ce roman m'apparaît comme une œuvre majeure de la littérature allemande contemporaine et je ne m'étonne pas qu'il ait été remarqué à sa parution (Prix des libraires du Québec —lauréats Hors Québec, en 1997).
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Le liseur

Retour de lecture sur "Le liseur" de Bernhard Schlink publié en 1995. Ce livre raconte l'histoire de Michael Berg, le narrateur, un jeune adolescent de 15 ans qui fait la rencontre et tombe amoureux d'une femme beaucoup plus âgée que lui, Hanna. Ils entretiennent une relation dans laquelle la lecture a une place importante. Cette femme disparaît subitement un jour, et il la retrouve quelques années plus tard au cours d'un procès, où elle est accusée d'un crime de guerre qui a eu lieu lors de l'évacuation du camp d'Auschwitz dans lequel elle était gardienne. Ce livre traite de la culpabilité du peuple allemand par rapport à la Shoah, notamment des générations nées après la guerre et de la difficulté, voire impossibilité, de comprendre réellement ce qui s'est passé et de porter un quelconque jugement. Étant de mère allemande, née dans l'immédiat après-guerre, ce livre me parle tout particulièrement et j'y retrouve une partie du désarroi que j'ai pu ressentir chez elle. Le livre n'apporte aucune réponse, mais nous met juste en face de cette ignominie qu'ont été les crimes nazis et nous montre par l'exemple à quel point il est difficile de juger quelque chose qu'il est quasi impossible de comprendre. Cela est fait avec beaucoup de retenue, de subtilité, en ne minimisant jamais l'horreur des actes commis. Le livre est divisé en trois parties, la première raconte l'histoire d'amour, la deuxième le procès et la troisième la reprise de contact entre les deux personnages principaux. C'est un livre sur un sujet très grave, mais la première partie est plutôt légère et nous raconte une belle histoire d'amour, même si elle comporte des zones d'ombre. Au delà de la question principale de ce livre évoquée plus haut, l'auteur nous fait également réfléchir sur une multitude de petites choses de la vie auxquelles on est inévitable confronté, comme la manière de vivre rétrospectivement un grand bonheur passé, même si celui-ci n'a pas tenu toutes ses promesses, ou la position à tenir quand on peut aider un adulte qui ne souhaite pas être aidé. C'est globalement un livre très marquant et on est très touché par ces deux personnages, l'un qui essaye de comprendre quelque chose qui lui échappe constamment, et l'autre, prise dans une spirale de l'horreur et qui a perdu, à un moment donné, toute son humanité. La juxtaposition de leur histoire d'amour qui est très touchante, décrite avec beaucoup de tendresse, et le passé monstreux de cette femme, laisse une impression très étrange et nous plonge dans la même perplexité que celle de Michael, le personnage principal. Le livre nous montre avec brio que l'acte de juger n'est jamais simple, même dans ce cas, avec une personne ayant participé à la pire des horreurs. C'est donc au final un livre passionnant, complexe, très déstabilisant, un livre qui nous pousse à des questionnements que l'on sait sans réponses et qui marque l'esprit un long moment.



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"Je voulais à la fois comprendre et condamner le crime d'Hanna. Mais il était trop horrible pour cela. Lorsque je tentais de le comprendre, j'avais le sentiment de ne plus le condamner comme il méritait effectivement de l'être. Lorsque je le condamnais comme il le méritait, il n'y avait plus de place pour la compréhension (...) Je voulais assumer les deux, la compréhension et la condamnation. Mais les deux ensemble, cela n'allait pas."
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Olga

Olga et Herbert se connaissent depuis l'enfance et s'aiment mais dans cette Allemagne de fin de XIXème siècle, la famille bourgeoise d'Herbert voit d'un mauvais œil cette relation avec une fille d'un milieu modeste, qui, de surcroît affirme sa force de caractère en suivant des études pour devenir institutrice. Et Herbert, malgré ses sentiments, se rêve aventurier, un destin qu'il va connaître d'abord avec son service militaire, en Afrique du Sud-Ouest, à l'époque colonie allemande, puis en voyageant dans la péninsule russe du Kamtchatka, et enfin organisant une expédition pour l'exploration de l'Arctique en passant par le Nord-Est. Une expédition qui va être considérée comme perdue après plusieurs tentatives infructueuses de recherches. La vie d'Olga va continuer, malgré la plaie béante de cette disparition.



En s'inspirant de la vie d'un explorateur ayant réellement existé - Herbert Schröder-Stranz, Bernard Schlink évoque l'histoire de l'Allemagne au tout début du XXème siècle quand elle se livre dans sa colonie (l'actuelle Namibie) -, au massacre du peuple Herero qui s'était soulevé pour se libérer du joug allemand, un massacre qui sera considéré comme le premier génocide du XXème siècle. C'est également l'aventure de l'exploration du Pôle Nord, qu'il tente, mais une préparation bâclée et un départ tardif conduiront à sa disparition et celle de son équipe. Mais au delà de l'histoire avec un grand H, Olga évoque également l'histoire d'amour que la jeune fille va idéaliser pour se construire, l'acceptation de la mort d'Herbert étant trop douloureuse. Et c'est au travers du regard d'une famille pour laquelle elle travaille comme couturière, que l'on suit la vie de cette femme, qui reste d'une fidélité indéfectible à son amour disparu, un amour que l'on peut découvrir au travers de ses lettres.

Olga, avec sa construction originale, est un très beau portrait de femme, c'est également une très belle histoire d'amour sublimé et l'évocation d'évènements historiques méconnus de l'Allemagne du début du siècle dernier.
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Le liseur

Trois mots viennent pour moi en relief de cette lecture.



Anesthésie tout d'abord. Voilà une observation de l'auteur, au travers de son personnage, qui m'a beaucoup intéressée. En effet, l'histoire qui mêle romance - mais une romance bien à propos et sans mièvrerie -, holocauste et procès (je n'en dirai pas plus pour vous laissez le plaisir de découvrir par quels chemins ces sujets sont traités), aborde la question du ressenti des victimes de déportation. Et voilà ce mot qui sonne pour moi comme une révélation : anesthésie. Pour avoir lu et entendu (au travers de documentaires) pas mal de témoignages de survivants de la Shoah, j'ai pu constater en effet qu'il y avait une certaine pudeur à raconter. Je me disais que ces personnes avaient vécu de telles choses indescriptibles qu'elles ne trouvaient pas les mots assez forts pour en parler. Et finalement, ce ne sont ni la pudeur ni le vocabulaire à inventer mais l'anesthésie de ces personnes à la violence du Mal qu'elles ont subi. Car je ne comprenais pas non plus pourquoi les détenus plus anciens se montraient si cyniques avec les nouveaux arrivés au camp... L'anesthésie. Comme une protection absolument nécessaire pour se maintenir debout. Banaliser pour s'adapter et par là, vivre. L'auteur fait aussi un parallèle avec les bourreaux qui eux-mêmes s'anesthésiaient, mais se pose la question - à juste titre - si on peut comparer l'un et l'autre.



Le deuxième mot qui ressort est honte. Que nous fait faire la honte ? Porte-t-on parfois une honte qui ne nous appartient pas mais qu'on se fait le devoir de porter ? La honte nous fait-elle parfois commettre le pire et est-on prêt à tout pour la dissimuler quitte à nous léser nous-mêmes ? Doit-on briser le silence de la honte pour aider quelqu'un ?



La culpabilité enfin. Où commence-t-elle ? Parfois être coupable c'est faire mais c'est aussi ne pas faire. Peut-on se cacher derrière les circonstances comme des impossibilités à agir autrement ou dans certains cas, existe-t-il un absolu en dehors même de toutes circonstances ? Est-ce qu'on peut légitimement vouloir réparer et quémander par là le pardon ?



Tant de questions intéressantes que Le liseur soulève...

Une histoire marquante, en délicatesse, qui se penche sur la nature humaine et sur l'Histoire.
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Le liseur

Le liseur est un des plus beaux romans que j’ai pu lire.



Ce roman est exceptionnel non pas en raison de la virtuosité esthétique faciale de l’écriture mais parce qu’il s’agit d’une oeuvre qui réussit à bouleverser le lecteur en profondeur, par son regard d’une justesse incroyable sur la condition humaine.

Le charme est d’autant plus fort que le lecteur est totalement pris par surprise avec une première moitié du roman, sans grand relief, consacrée à la liaison entre un adolescent de quinze ans, Michael et une femme de trente cinq ans, Hanna. Certes, ce couple est singulier et intrigue le lecteur ; Michael est fatalement amoureux d’ Hanna. Michael prend d’autant plus conscience de cet amour qu’Hanna disparait brutalement le laissant désespéré.



L’histoire prend une toute autre dimension lorsque Michael, jeune adulte, revoit, Hanna dans un tribunal, dans le box des accusées en sa qualité d’ex-SS gardienne de camp.

Hanna est condamnée à une lourde peine d’emprisonnement et Michael, initie alors un rite pour elle, qu’il n’a jamais cessé d’aimer. Il lit des livres en enregistrant ses lectures, enregistrements qu’il envoie régulièrement à Hanna. Ce sont les seuls contacts entre les deux ex-amants. Michael devient le liseur.



Au total une magnifique histoire d’amour en dépit de l’épilogue dramatique, cette histoire a des accents de tragédie grecque .



Surtout, les questions de la vérité, de la justice vrillent l’œuvre et entrainent le lecteur dans la complexité de la condition humaine.

Il existe la vérité du juge pénal, binaire et glacée comme un scalpel, la vérité de la victime du camp, douloureuse et confuse au cas présent, la vérité d’Hanna, emmenée par un concours de circonstances malheureux du côté des bourreaux et qui n’a jamais eu le gout du sang. Une sorte de rubik's cube de vérité infernal.



Et puis la vérité de l’Amour, universelle au-delà de cette œuvre, la plus belle, celle qui permet de transcender le silence, le non dit, par pudeur, par maladresse, de percevoir la vérité de l’être aimé(e), de ne pas s’en tenir aux raccourcis faciles, aux faits accusateurs apparents



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Olga

Née à la fin du XIXè siècle dans une ville de Silésie, Olga n’est encore qu’une petite fille quand ses parents meurent du typhus. Elle est alors recueillie par sa grand-mère qui l’emmène dans son village de Poméranie. Cette enfant éveillée et curieuse, animée d’une intarissable soif d’apprendre n’est pas au goût de son aïeule et son refus obstiné de se faire appeler Helga -Olga étant jugé trop slave- marque le début d’une vie commune faite de mésentente et de conflits larvés. Mais Olga ne se laisse pas démoraliser par ce foyer sans amour et c’est à l’école qu’elle s’épanouit malgré les obstacles que dressent sur la route du savoir, l’instituteur et le pasteur. Olga est déterminée à étudier et à devenir institutrice. L’amour, elle le découvre dans les yeux puis dans les bras de son meilleur ami, Herbert. Elle n’est qu’une fille du village parmi les autres, une pauvresse orpheline, lui est l’héritier de la plus riche famille du village, des propriétaires terriens à la tête d’un empire sucrier. Ces deux-là s’aiment envers et contre tout. Olga qui rêve d’enseigner et Herbert qui ne pense qu’à parcourir le monde, à le conquérir au nom de la grande Allemagne. Cet amour jugé impossible par tous survivra aux temps, aux guerres et même à la mort. Toute sa vie, Olga sera la femme d’un seul homme…



C’est l’histoire d’une femme, d’un amour, d’un pays.

Olga, que l’on découvre se tenant à peine debout sur ses deux jambes et que l’on quitte nonagénaire morte héroïquement, est l’une de ses femmes de papier qui marque profondément un lecteur.

Olga tient à la fois du chêne et du roseau, elle ne plie pas, elle ne rompt pas. C’est une femme libre, une féministe avant l’heure, passionnée par son métier d’institutrice à une époque où les femmes ne sont pas vouées à faire des études et exercer une profession. C’est une femme amoureuse aussi. D’un homme qui n’est pas pour elle, d’un égoïste, d’un courant d’air. Mais Olga est fidèle et jusqu’au bout de sa vie, elle continuera à lui écrire, poste restante à Malmø, dans ce Grand Nord où il a disparu corps et biens. Lui contant son quotidien solitaire, son attachement indéfectible et les grandes secousses de l’histoire. Car Olga est née en Allemagne. Un petit pays qui rêve de grands espaces. De Bismarck à Hitler, ses dirigeants ont toujours vu trop grand, trop serrés dans les frontières d’une Allemagne qu’ils voulaient ‘’über alles’’. Olga a connu les deux guerres et n’en a jamais démordu, c’est la folie expansionniste instillée par Bismarck qui a conduit son pays à sa perte. Libre penseuse, Olga a résisté aux appels patriotiques et aux sirènes du nazisme, ne ressentant qu’une immense peine pour tous ces jeunes soldats sacrifiés.

Olga est une femme simple dont la vie recèle pourtant bien des secrets. C’est avec Ferdinand, jeune homme d’abord, puis vieillissant lui aussi, que nous pénétrons dans l’intimité de cette femme hors du commun. Elle a été pour lui une amie, une confidente, une conseillère, une mère, une grand-mère, et il a été fidèle à ce lien toute sa vie, curieux de son histoire et de ses secrets.

Olga est un magnifique roman, une belle leçon de vie, le parcours émouvant d’une femme forte et inspirante. Un coup de cœur.

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La Petite-Fille

Bouleversant !

J'ai rarement été aussi embarqué émotionnellement, intellectuellement par un roman.

Je n'y étais pas préparé. Je sors la tête de l'eau au cours d'un été chargé et compliqué, lis enfin un peu et ...vlam, je prends un uppercut littéraire.



Vous connaissez évidemment l'histoire, ce livre a été beaucoup lu et commenté:

Kaspar, libraire berlinois de 71 ans, découvre sa femme noyée dans sa baignoire. Birgit, malade de l'alcool et de la dépression, a picolé une fois de trop et avalé une boite d'anxiolytiques. Deuil compliqué pour cet homme sincère, honnête mais un peu affadi par son existence routinière. On le serait à moins...Et puis le gars découvre des documents et un texte étonnant où il apprend que Birgit, transfuge de RDA, a eu une fille avant de s'exfiltrer. Il comprend surtout qu'il ne connaissait pas sa femme, son histoire intime, ses engouements, sa vie sexuelle, sa relation à l'alcool etc.

Il comprend surtout qu'elle aimait l'amour qu'il lui donnait.

Et qu'elle voulait retrouver sa fille pour s'offrir à elle.

Fin de la première partie.

Kaspar va évidemment retrouver la douce Svenja dans une de ces communautés "völkisch" qui essaiment partout dans l'ex-Allemagne de l'Est. Il découvrira le mode de vie de ces nationalistes écolo-identitaires pour passer un deal avec Svenja et son mari ultra-teuton, Björn.

Ils ont une fille de 14 ans, Sigrun. Kaspar propose de prendre cette "La Petite Fille" pour les vacances moyennant finance et divers accommodements .

Cette deuxième partie déroule la relation de Kaspar à Sigrun et c'est à ce moment-là qu'on découvre l'extraordinaire ampleur du livre.

Je ne dirai rien de la troisième et dernière partie (aussi géniale que déroutante).



Alors évidemment le processus identificatoire a fonctionné à fond.

Je suis un peu plus jeune que Kaspar, sa tempérance m'agace , je le trouve à la fois mou et abrupte et pourtant je partage ses interrogations et ses recherches. Disons que je prends vie en même temps que lui, embarqué dans le même "conatus".

Bernhard Shlink est un géant de la littérature contemporaine et, à travers ce livre pétri d'un humanisme contagieux, nous questionne sur des sujets d'une intemporalité brulante et d'une atopie étonnante:

-Quand et comment devient-on nationaliste ?

-Pourquoi la "peste brune" se répand-elle universellement avec une rémanence désespérante.

-Peut-on vraiment faire changer l'Autre, le convaincre ? Et par quoi est-ce que ça doit passer ?

-C'est quoi "être grand-parent": un exercice d'amour, d'humour et de transmission ?

- Y-a-t'il une particularité allemande dans la production de masses nazies ?

-De quoi et de qui sommes nous responsables ethiquement, politiquement ?

Bernhard Schlink ne donnera aucune réponse mais esquissera un chemin tout en finesse et en nuance.

J'ai survolé vite fait quelques critiques et il semble que certains lecteurs buttent sur la première partie et redoute un voyage au bout de l'ennui...

Que nenni chers amis !

La Petite-Fille est une bombe à fragmentation tendre, réjouissante, inspirante et puissante...

Je retourne à mes petites affaires.
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La Petite-Fille

L’Allemagne post-2nde guerre mondiale s’est voulue irréprochable. Finies les bottes qui claquent, place aux chaussettes de tennis dans les Birkenstocks. Et ça a pas mal marché pendant plus d’un demi-siècle. Mais l’extrême-droite est à nouveau à la mode, et pas seulement en Allemagne, comme tout le monde peut s’en rendre compte. Mais plus encore qu’ailleurs, sa résurgence de l’autre côté du Rhin semble être le signal de la catastrophe à venir.

Bernhard Schlink ausculte donc cette montée de l’extrême-droite dans son pays et c’est assez souvent passionnant.

Il évoque bien entendu le thème de la réunification et le mépris des Wessis envers les Ossis. La piste est exploitée sans être approfondie, sans doute parce qu’elle n’est pas nouvelle. Plus intéressant, surtout pour nous qui en ignorons à peu près tout, est le phénomène völkisch, cette conception mystique du peuple allemand couplée à un refus de la modernité qui se trouve redynamisée par l’inquiétude écologique.

Mais l’explication la plus convaincante est sans doute le portrait de la génération des boomers qui, à force de tout intellectualiser, ne parviennent plus à passer à l’action : l’une voudrait bien rechercher sa fille mais préfère l’écrire que de le faire et ne se tue que par inadvertance ; l’autre veut s’occuper de sa petite-fille mais abandonne l’affaire à la première difficulté et confond la tolérance avec la compromission (Genre : « Ah, il est sympa votre piercing en forme de croix gammée ! »). Mais surtout les grands-parents vivent dans un entre-soi qui les coupe de ceux pour qui la vie est un combat quotidien : d’un claquement de doigt, ils trouvent le meilleur prof de musique ou le meilleur avocat, qui sont bien entendu des amis et cette connivence est encore plus choquante que l’argent qui n’est jamais un problème.

Mais aux explications sociologiques se superposent les développements individuels et ils me convainquent nettement moins. Schlink reprend avec beaucoup moins de talent les thèses d’Alice Miller sur la maltraitance exercée par les parents qui condamne les enfants à glorifier la violence. Et surtout, la petite-fille qui donne son titre au roman est un personnage improbable qui après avoir vécu 15 ans dans un environnement sectaire saute de joie à l’idée de devenir une étudiante Erasmus et qui, après avoir découvert Chopin et Satie, est prête à admettre que la Shoah a vraiment existé.

Bref, si chacun adopte un jeune facho, après deux expos, trois concerts et quelques livres bien choisis, il s’abonnera à Télérama et deviendra très fréquentable. Quelque chose me dit pourtant que si la nazification des esprits devait marquer le pas, ce n’est certes pas à Schlinck qu’on le devrait.

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