AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Carlo Levi (139)


Carlo Levi
La mort était dans la maison ; j'aimais ces paysans, je sentais la douleur et l'humiliation de mon impuissance. Alors pourquoi une si grande paix descendait-elle en moi ? Il me semblait être détaché de toute chose, de tout lieu, éloigné de toute détermination, perdu hors du temps, en un ailleurs infini. Je me sentais caché, ignoré des hommes, comme une pousse sous l'écorce d'un arbre. Je tendais l'oreille à la nuit et il me semblait être entré, d'un coup, dans le coeur même du monde. Un bonheur immense , jamais éprouvé, était en moi, me remplissait tout entier, avec le sentiment fluide d'une plénitude infinie.
Commenter  J’apprécie          400
Une jeune femme, blonde et très belle, est agenouillée au centre de l'église, au milieu des sculptures et des sépulcres. Un voile de dentelle noire recouvre son visage à peine rose : son pardessus tombe en un pli d'une élégance suprême : c'est la Grâce même qui s'invite dans ce monde d'humilité.
Commenter  J’apprécie          380
Rome est une ville d'apparitions, mais d'apparitions réelles, vivantes, charnelles, colorées : de choses vraies qui se changent en apparitions, en raison, semble-t-il, de leur incroyable vérité, de leur qualité d'existence surabondante.
Commenter  J’apprécie          370
Le ciel était un couvercle bleu sur les bâtiments de Piazza Navona, le soleil se couchait derrière les maisons, la coquille de la place était inondée d'une ombre palpable et de la vague rumeur d'une mer lointaine.
Commenter  J’apprécie          340
A Paris, où l'air est à ce point tendre que chaque couleur resplendit avec l'intensité d'un Renoir, les toutes premières petites feuilles sur le boulevard semblent des émeraudes d'eau sur les écorces noires et humides.
Commenter  J’apprécie          320
Ici, dans l'air limpide de Rome, les apparitions possèdent en revanche la soudaine présence physique des dieux. Dans cet air éternel d'épiphanie (ce n'est pas un hasard si la fête de l'Épiphanie, qui se tient sur la Piazza Navona, est la plus importante fête populaire de l'année), Noël retrouve son atmosphère ancienne, son ciel lumineux, son étoile, la tiédeur hivernale du désert, son horizon aride, la pauvre simplicité du temps où il n'était pas encore devenu une fête des forêts et des bois remplie de pins vert sombre et de sapins, de neige immaculée et d'intimité.
Commenter  J’apprécie          290
Autour de Rome, il y a cette "chose immense et en bouillie" qu'est Rome, et qui s'étend comme un corps d'amibe. A l'intérieur, un monde vivant et précieux, pas encore accompli, pas tout à fait existant; "la race grise" qui à tout instant se colore et se décolore, qui à tout instant surgit et replonge dans la mer objective de la servitude et ne dispose d'aucune langue pour s'exprimer pleinelment; mais elle n'est pour autant ni desséchée ni morte, comme les pierres et les bâtiments que le soleil du temps teinte d'or et de lumière éphémère.
Commenter  J’apprécie          260
Pour les paysans, l'Etat est plus loin que le ciel, plus redoutable, car il n'est jamais de leur côté.
Commenter  J’apprécie          250
Ici, plus qu'ailleurs en Italie, deux mondes distincts cohabitent et s'affrontent : les puissants et le peuple.
Commenter  J’apprécie          220
Chaque révolte naît d'une volonté élémentaire de justice enfouie dans les sombres profondeurs du coeur.
Commenter  J’apprécie          200
Plusieurs années se sont écoulées, chargées de guerre et de ce qu'on appelle histoire. Ballotté çà et là par le hasard, je n'ai pu, jusqu'à présent, tenir la promesse que j'avais faite, en les quittant, à mes paysans, de revenir parmi eux, et je ne sais si je ne pourrais jamais le faire. Enfermé dans une pièce, monde clos, il m’est pourtant agréable de retourner en souvenir dans cet autre monde que resserrent la douceur et les coutumes, ce monde en marge de l'histoire et de l'État, éternellement passif, cette terre sans consolation ni douceur, où le paysan vit, dans la misère et l'éloignement, sa vie immobile sur un sol aride, en face de la mort.
« Nous ne sommes pas des chrétiens, disent-ils ; le Christ s'est arrêté à Eboli. » Chrétien veut dire, dans leur langage, homme - et ce proverbe que j'ai entendu répéter si souvent n'est peut-être dans leur bouche que l'expression désolée d'un complexe d'infériorité : nous ne sommes pas des chrétiens, nous ne sommes pas des hommes, nous ne sommes pas considérés comme des hommes, mais comme des bêtes, des bêtes de somme, encore moins que des bêtes, moins que les gnomes qui vivent leur libre vie, diabolique ou angélique, parce que nous devons subir le monde des chrétiens, au-delà de l'horizon, et en supporter le poids et la comparaison.
Commenter  J’apprécie          200
Les villes vides s'étendent sous le soleil qui partout pénètre jusqu'aux moindres anfractuosités et fissures des ruelles, donnant l'impression de saturer chaque endroit, chaque cavité.
Commenter  J’apprécie          190
Plusieurs années se sont écoulées, chargées de guerre et de ce qu’on appelle histoire. Ballotté çà et là par le hasard, je n’ai pu, jusqu’à présent, tenir la promesse que j’avais faite, en les quittant, à mes paysans, de revenir parmi eux, et je ne sais si je pourrai jamais le faire. Enfermé dans une pièce, monde clos, il m’est pourtant agréable de retourner en souvenir dans cet autre monde que resserrent la douceur et les coutumes, ce monde en marge de l’histoire et de l’État, éternellement passif, cette terre sans consolation ni douceur, où le paysan vit, dans la misère et l’éloignement, sa vie immobile sur un sol aride, en face de la mort.

« Nous ne sommes pas des chrétiens, disent-ils ; le Christ s’est arrêté à Éboli. » Chrétien veut dire, dans leur langage, homme – et ce proverbe que j’ai entendu répéter si souvent n’est peut-être dans leurs bouches que l’expression désolée d’un complexe d’infériorité : nous ne sommes pas des chrétiens, nous ne sommes pas des hommes, nous ne sommes pas considérés comme des hommes, mais comme des bêtes, des bêtes de somme, encore moins que des bêtes, moins que les gnomes qui vivent leur libre vie, diabolique ou angélique, parce que nous devons subir le monde des chrétiens, au-delà de l’horizon, et en supporter le poids et la comparaison. Mais il en est de cette phrase comme de toute expression symbolique : le sens littéral est beaucoup plus profond : le Christ s’est vraiment arrêté à Éboli, où la route et le train abandonnent la côte de Salerne et la mer, pour s’enfoncer dans les terres désolées de Lucanie. Le Christ n’est jamais arrivé ici, ni le temps, ni l’âme individuelle, ni l’espoir, ni la liaison entre causes et effets, ni la raison, ni l’histoire. Le Christ n’est pas arrivé ici, pas plus que n’y étaient arrivés les Romains qui ne suivaient que les grandes routes et ne pénétraient pas entre monts et forêts, ni les Grecs, qui florissaient sur la mer de Métaponte et de Sibari ; aucun des hommes hardis de l’Occident n’a porté ici le sens du temps qui se déroule, ni la théocratie étatique, ni cette éternelle activité qui se nourrit d’elle-même. Nul n’a touché cette terre autrement qu’en conquérant, en ennemi ou en visiteur indifférent. Les saisons coulent sur les labeurs paysans, aujourd’hui comme trois mille ans avant Jésus-Christ. Nul message, ni humain ni divin, n’a touché cette pauvreté tenace. Nous parlons un langage différent ; notre langue est presque incompréhensible ici. Les grands voyageurs n’ont pas dépassé les frontières de leur propre monde ; ils ont parcouru les sentiers de leur âme et ceux du bien et du mal, de la moralité et de la rédemption. Le Christ est descendu dans l’enfer souterrain du moralisme judaïque pour en briser les portes temporelles et les sceller dans l’éternel.

Mais sur cette terre sombre, sans péché et sans rédemption, où le mal n’est pas un fait moral, mais une douleur terrestre, qui existe pour toujours dans les choses mêmes, le Christ n’est jamais descendu. Le Christ s’est arrêté à Éboli.

(INCIPIT)
Commenter  J’apprécie          180
L'amour ou l'attrait sexuel est considéré par les paysans comme une force de la nature, d'une puissance telle qu'aucune violence n'est en mesure de s'y opposer. Si un homme et une femme se trouvent ensemble à l'abri d'un témoin, rien ne peut empêcher qu'ils ne s'étreignent. Ni les résolutions prises, ni la chasteté, ni aucun autre obstacle ne peut les retenir, et si par hasard ils ne s'unissent pas effectivement, c'est comme s'ils l'avaient fait. Se trouvaient ensemble équivaut à faire l'amour.
Commenter  J’apprécie          180
Les heures passaient, le soleil descendait, les choses s'imprégnaient de la magie du crépuscule, et les objets paraissaient briller de leur propre lumière intérieure. Une grande lune, frêle, transparente et irréelle était suspendue dans l'air rosé, au-dessus de oliviers gris et des maisons, pareille à un os de seiche, rongé par le sel, sur le rivage de la mer.
Commenter  J’apprécie          150
Sono passati molti anni, pieni di guerra, e di quello che si usa chiamare la Storia. Spinto qua e là alla ventura, non ho potuto finora mantenere la promessa fatta, lasciandoli, ai miei contadini, di tornare fra loro, e non so davvero se e quando potrò mai mantenerla. Ma, chiuso in una stanza, e in un mondo chiuso, mi è grato riandare con la memoria a quell'altro mondo, serrato nel dolore e negli usi, negato alla Storia e allo Stato, eternamente paziente; a quella mia terra senza conforto e dolcezza, dove il contadino vive, nella miseria e nella lontananza, la sua immobile civiltà, su un suolo arido, nella presenza della morte.
Commenter  J’apprécie          150
Carlo Levi
Ce visage avait un caractère archaïque très accentué, non à la manière de l'antiquité grecque ou romaine, mais d'une antiquité plus mystérieuse et plus cruelle, née sur cette terre même, pure de tout échange et de toute influence humaine, liée à la glèbe et aux éternelles divinités animales. Une sensualité froide, une obscure ironie, une cruauté instinctive, une dureté imperméable et une passivité pleine de pouvoir, lui composaient une expression à la fois sévère, intelligente et mauvaise.
Commenter  J’apprécie          140
Combien de choses remarquent les yeux des enfants, si proches de la terre!
Commenter  J’apprécie          130
C'est la coutume ici, du moins parmi les seigneurs. si le père meurt, les filles restent enfermées pendant 3 ans, un an si c'est le frère.
Commenter  J’apprécie          131
Le premier voyage que chacun fait, par lequel il acquiert une connaissance, voyage qui le conduit du non-être à l'être, à savoir sa naissance, est par nature un voyage solitaire.
Commenter  J’apprécie          120



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Carlo Levi (680)Voir plus

Quiz Voir plus

Oh, Antigone !

Comment se prénomme la sœur d'Antigone ?

Sophie
Hermine
Ismène

10 questions
3099 lecteurs ont répondu
Thème : Antigone de Jean AnouilhCréer un quiz sur cet auteur

{* *} .._..