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Citations de Christian Bobin (6231)


Bien avant d'être une manière d'écrire, la poésie est une façon d'orienter sa vie, de la tourner vers le soleil levant de l'invisible.
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Il y a un temps où les parents nourrissent l'enfant, et il y a un temps où ils l'empêchent de se nourrir. L'enfant est seul à pouvoir distinguer entre ces deux temps, seul à pouvoir distinguer entre ces deux temps, seul à en tirer la conclusion logique : partir. Non pas lutter. Ne surtout pas lutter - partir. Rien n'est plus redoutable pour un fils que de mener une résistance, esprit à esprit, avec son père : s'opposer à quelqu'un c'est se teinter plus ou moins de lui. Les fils qui se fortifient dans une lutte avec leur père finissent étrangement par lui ressembler au soir de leur vie.
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Dans le monde c’est comme dans le jeu, et dans le jeu c’est comme dans le journal d’il y a quelques années, cette histoire merveilleuse, un fait divers de quatre lignes en dernière page : un arbitre de football siffle la fin du jeu alors que celui-ci commençait à peine, qu’aucune faute n’était arrivée et que tout s’acheminait vers sa fin normale, ver sa fin habituelle. Il renvoyait les joueurs au vestiaire au bout de quelques minutes. Avant de disparaître, il signait un papier – une note pour ses employeurs, un billet d’excuse comme à l’école -, une phrase plus obscure encore que l’absence de toute phrases : crise soudaine d’ennui. Vous connaissez cette tentation. Souvent vous connaissez cette envie de sortir du jeu, pour aller voir la lumière blanche dans le ciel large.
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  La clef des heures
  
  
  
  
  La clef des heures, elle tourne dans mes chairs, dans le tiède
et le rouge. Elle grince dans mon crâne, jusqu'à se casser et se
rompre. Jusqu'à me rompre. Devant qui s'ouvre-t-elle, la fenêtre
peinte, la porte d'os, la page du livre ? Devant quel visiteur, qui
viendra quand, délivrer l'amour, le libérer de la vie, du mensonge
de la vie ?
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Celle qui se servait du soleil ébouriffé des pissenlits pour se faire des boucles d'oreilles s'éloigne dans une vie éteinte et confortable. La gloire des pissenlits demeure : même martyrisées par les pluies en lacets de l'automne ou broutées par les vaches enchaînées à leur faim monotone, ces fleurs irradient le langage qui sait les dire et les aimer. Le verbe est un soleil impérissable.
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Peut-être que quand on pleure et qu'on sait pourquoi, ce ne sont pas encore des larmes. Les vraies larmes sont sans raison.
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Les instants de contemplation sont des instants de grand répit pour le monde, car c’est dans ces instants-là que le réel n’a plus peur d’arriver à nous.
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Christian Bobin
J'ai vu un jour ce qu'on ne voit jamais. J'ai vu quelqu'un mourir d'amour. C'était dans un café, un automne à Paris. La jeune femme qui me parlait venait d'être abandonnée par un homme au cœur d'or. Ils avaient partagé le pain de dix années entières. Il l'a quittée comme on cesse de lire un livre, gagné en une seconde par un sommeil analphabète. Un geste avait suffi que rien n'annonçait et cette jeune femme s'était découverte aussi vaine qu'un livre jeté sur le parquet d'une chambre. Depuis elle allait comme un fantôme dans les rues surpeuplées de visages inutiles. Le couteau de la séparation s'était enfoncé dans son cœur et le manche en bougeait à chaque respiration. Elle ne maudissait ni ne geignait. Elle cherchait à comprendre ce que même les anges, affolés autour d'elle comme des abeilles ayant perdu le chemin de la ruche, ne pouvaient comprendre.
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Christian Bobin
Des nomades campent dans mes yeux. Les feux qu'ils allument, ce sont les livres que je lis.

(La grande vie)
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Christian Bobin
Le désespoir a dû venir avec l'éclat de tes seize ans, avec l'intuition qu'il n'y a jamais de répondant à l'amour, que l'amour est comme ce livre d'Émilie Brontë : un fou qui court les montagnes et dort dans les genêts, une parole déchirée par le vent, sans écho. Les hommes ne savent pas répondre à cette parole-là. Il ne faut pas trop leur en vouloir. Qui sait répondre au vent qui court dans les genêts ?

(La plus que vive)
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Christian Bobin
Isabelle est en miettes dans son sommeil. Elle est éparpillée en dizaines d'Isabelle qui marchent dans le noir, le long des rues de Bruges, ce qui fait qu'au réveil elle n'ouvre pas tout de suite les yeux : elle essaie d'abord de réunir ces filles qui lui ressemblent.

(Isabelle Bruges)
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Christian Bobin
Soit on adore le monde (l'argent, la gloire, le bruit),
soit on adore la vie ( la pensée errante, la sauvagerie des âmes, la bravoure des rouges-gorges).
Juste une question de goût.
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Christian Bobin
"Si je lis un livre et qu'il rend tout mon corps si glacé qu'aucun feu ne pourra jamais me réchauffer, je sais alors que c'est de la poésie. Si je sens le sommet de ma tête arraché, je sais aussi qu'il s'agit de poésie. Ce sont mes deux seules façons de le savoir. Y en a-t-il d'autre ? " Higginson ne peut répondre. Il n'a jamais imaginé que la poésie puisse être affaire vitale, l'apothéose de toutes les lucidités, l'arrachement du bandeau que la vie met sur les yeux des vivants pour qu'ils n'aient pas trop peur à cet instant dernier qu'est chaque instant passant.

(La Dame blanche)
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Nous passons notre vie à attendre quelque chose de mieux que notre vie. Nous passons, nous passons. Nous suivons le long bec de notre pensée en espérant qu'elle nous mènera loin d'ici.
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Mais le charme vient aussi des livres.Très près de là, la librairie où vous recevez les livres commandés.Ils viennent de Paris, vous les emmenez dans vos bras le long de ce boulevard, heureux de cette compagnie, comblé avant même toute lecture.
Vous achètez beaucoup de livres.Vous ne les finissez pas tous.C'est une infirmité chez vous, une maladie chronique, celle de ne pas finir une lecture, une conversation, un amour.
Ce n'est pas nécessairement l'effet d'une négligence ou d'un ennui.Ce n'est que parfois, pour une lecture, pour un entretien ou un amour, la fin arrive avant la fin.Et c'est quoi, la fin d'un livre.C'est quand vous avez trouvé la nourriture qu'il vous fallait, à ce jour, à cette heure, à cette page.


( p.42)
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Laideur de l'industrie, laideur du raisonnable et de l'utile.Aux deux extrémités du boulevard, l'usine du Creusot.Elle est ici partout chez elle.(...)
Entre les deux extrémités du boulevard, des commerces abstraits: banques mutuelles, pompes funèbres, mairie.Argent, cadavre, État.Et puis des platanes.C'est peut-être d'eux que vient le charme de ce boulevard Peut-être aussi des écoles proches.Les cris des enfants à midi et la belle écorce blanche grise des platanes suffisent à sauver ce lieu de son ennui, de l'ennui de son utilité.


( p.41)
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Le petit banc de Gertrud, la fenêtre enluminée de " Mon oncle", le jeune homme au triangle, une phrase d'André Dhôtel: la vie souvent m'envoie ce genre de cartes postales, comme si elle m'écrivait de l'étranger pour me rassurer sur son sort, la vie n'est jamais si claire que dans l'attaque de ce poème du grand Nazim Hikmet :

" La vie n'est pas une plaisanterie
Tu la prendras au sérieux,
Comme le fait l'écureuil, par exemple,
Sans rien attendre du dehors et d'au-delà,
Tu n'auras rien d'autre à faire que de vivre"


( p.58)
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Lire c'est faire l'épreuve de soi dans la parole d'un autre (...) manger ce qu'on lit, le transformer en soi et se transformer en lui.Toute lecture qui ne bouleverse pas la vie n'est rien, n'a pas eu lieu (...)

( p.96)
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(** À propos d' André Dhôtel)
Il y a, certes, des écrivains qui ont un plus beau toucher de phrase que vous, mais la plupart sont si encombrés d'eux-mêmes que leur livre ne sait comment nous parvenir: cérémonieux, pesant, il s'effondre avant de nous atteindre.Vous, vous avancez léger.

( p.56)
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Écrire c'est devenir anorexique. Écrire c'est refuser les aliments proposés par le monde et rechercher,dans la maigreur affolante d'une phrase ou dans son développement boulimique, la vraie nourriture, celle qui fera grandir, et cette recherche par elle-même est déjà nourricière.

( p.101)
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