Citations de Christine Angot (352)
La passion amoureuse, elle, est liée au surgissement. Elle brouille l’ordre, elle surprend. Il y a une troisième catégorie. Moins connue, que j’appellerai… la rencontre inévitable. Elle atteint une extrême intensité, et aurait pu ne pas avoir lieu.
[...]
Le rêve des filles de l'époque était d'épouser quelqu'un qui leur permettrait de rester chez elles. De ne pas être obligées de travailler.
[...]
Il est là mon plus beau collier. c’est les deux bras de ma petite fille.
[...] Tout le monde en a un [un père]. [...] Tout le monde en a un.
Elle m'embrasse. Pose les lèvres, enlève. Ma mère ça collait. Ca faisait baiser de putain, elle disait "je t'ai décoré", m'essuyait. M'essuyer, quel que soit mon âge, elle y tenait. Elle me décorait, m'essuyait après. C'était présenté comme de l'affection. Un truc de femme. D'affection de femme. J'ai envie d'avoir une fille avec de petites lèvres. Je ne voudrais pas mourir sans avoir eu au moins une fille.
Elle me parlait de lui. Tous les enfants avaient un père. Le mien était un intellectuel. Il connaissait plusieurs langues. Ils s’étaient aimés. Ç’avait été un grand amour. J’avais été désirée. Je n’étais pas un accident. Elle avait été fière de me porter neuf mois. Malgré les quolibets, et les phrases dites dans son dos. Maintenant j’étais là. Elle en était heureuse. Où était mon père, ce qu’il faisait, ne regardait pas les gens. Si on me posait la question, il était mort, ou en voyage.
Il est là mon plus beau collier. C’est les deux bras de ma petite fille.
... il allait dans la direction de la place Clichy. Je le regardais. Je retenais mon souffle. Je ne bougeais pas. Je le suivais des yeux. Ma respiration a pris un rythme naturel. J'ai regardé son dos qui s'éloignait jusqu'à ce qu'il disparaisse au coin de la rue. Et j'ai constaté que mon cœur ne battait plus.
p. 43: "J'ai rejoint Réjane dans un café à Pigalle. On s'y retrouvait depuis qu'on se connaissait. On y avait notre table près d'une fenêtre. On a parlé du livre qu'elle était en train d'écrire, puis elle a dit:
- Je peux te poser une question qui n'a rien à voir?
- Oui.
- Quand t'avais dix-huit ans, vingt ans, même avant, t'avais l'impression d'être comme les autres?
- Totalement oui. Je me trouvais banale, même, si tu veux savoir.
- Moi depuis toute petite je pense que je suis différente. Autour de moi, il y avait personne qui me ressemblait. Je jouais toujours toute seule.
- A quoi tu jouais?
- A la poupée. Je sais que ça fait bête.
- Non, moi aussi.
- Et sinon? Vincent t'a appelée?
- Je sais même pas s'il a demandé mon numéro à Alex.
- Il avait pas dit, après le concert, qu'il te ferait un texto dans la nuit?
- Il l'a pas fait. Tant mieux. Parce que s'il le faisait....
- Ah ouais? Ce serait compliqué pour toi?
- Très. J'ai la tête à l'envers là.
Au milieu de la nuit, j'ai senti une main qui me dénudait. Il m'a léchée. Il est entré en moi. Ç'a été comme une décharge électrique. J'ai pensé : « Sa forme est adaptée à la mienne. C'est parfait. C'est merveilleux. » Il entrait, il sortait, mon regard partait ailleurs. Dans un autre monde. On a joui. On s'est endormis dans les bras l'un de l'autre.
— Mets-toi de l'autre côté pour que je puisse caresser tes fesses.
— Ah non Vincent ! On a pris deux lits, c'est pas pour…
— Juste comme ça. Pour me faire plaisir.
Je me suis tournée. Il a mis sa main sur mes hanches. Il me caressait par-dessus les draps. J'ai pensé : « Je vais m'endormir comme ça. » Il a tiré la couverture, et plaqué sa paume entre mes jambes. J'ai pensé : « Non. Avant il faut qu'on règle la situation avec Alex. » Il a collé son bassin contre mes fesses, j'ai sursauté.
— T'inquiète pas. Reste là. Bouge pas.
— Si, Vincent, justement je m'inquiète.
Il a mis son sexe entre mes cuisses.
— Noooooon. Je t'ai dit non. NON NON NON.
— T'es méchante !
Il a bondi hors du lit.
Il était près de la coiffeuse, debout.
— Je pars là. Tu me verras plus jamais.
Il a commencé à remplir son sac à dos.
— Non Vincent. Pas ça, pas ça, pas ça.
Je vais pas être celui qui va te brûler sur un bûcher. Je te laisserai vivre. Je rentrerai en Martinique. T'étais avec lui avant de me rencontrer, c'est normal que je m'efface si vous voulez vous retrouver. Je sais que je peux être heureux sans être avec la personne que j'aime. Si t'es heureuse, je serai heureux…
« J'ai raté ma vie amoureuse par manque de courage. Tous ceux qui m'ont vraiment plu, je les ai fuis. J'ai essayé de compenser par l'écriture. J'ai mis toute ma libido là-dedans. Je peux plus supporter cette vie. Combien de temps ça va encore durer. »
Parce qu'une situation réparée est mieux qu'une situation qui a jamais été abîmée.
Quand on n'est pas ensemble, tu es à côté de ta vie. Il y a qu'avec moi que tu trouveras ton oxygène. Tu trouveras que du gaz carbonique ailleurs.
La vie peut être triste. Si seulement on pouvait réfléchir intelligemment tout en aimant.
Si le passé revient moi je m'en vais ! Le passé qui revient. Le passé qui revient. J'en ai rien à foutre. Le passé qui revient ! Je m'en vais moi si il revient.
J'aime Vincent. Je l'aimerai toujours. C'est comme ça. Y a des gens, dans la vie, qu'on rencontre, et qui comptent. Bon, ben Vincent, c'est quelqu'un qui a beaucoup compté. Et qui m'a beaucoup apporté. Ma vie n'a plus été la même après. Donc, quoi qu'il arrive, je l'aimerai toujours.
Il vivait à Paris depuis vingt ans, il continuait de demander son chemin. Certaines rues qu'il empruntait régulièrement, il ne les reconnaissait pas. Il lui arrivait de se perdre. À la moindre contrariété, il disait qu'il allait rentrer en Martinique.
C'est quelqu'un que j'ai beaucoup aimé Vincent. Tu le sais. Ça me ferait peut-être bizarre de le revoir. Parce que quand on aime quelqu'un, ça disparaît jamais complètement. J'ai un sentiment particulier pour lui, c'est vrai. Je vais pas te dire le contraire. Ç'a été quelqu'un de très important pour moi. Déjà parce que si je l'avais pas connu, je t'aurais pas connu. Mais mon histoire avec lui est finie.
On n'est vraiment rien. On est des toutes petites choses. On croit qu'on va bien, et en fait on n'est rien.
— Arrête de m'interrompre, je suis en train de te parler !
— Si t'avais quelque chose à dire, tu l'aurais déjà dit.
— Non, parce qu'il faut toujours que tu m'interrompes. J'arrive pas à parler avec toi. C'est un enfer. Bon, je suis obligée de tout reprendre... Tu me laisses parler... Tu comprends qu'une phrase c'est un souffle ? Chaque fois que tu m'interromps, je suis obligée de tout reprendre depuis le début. Parce que je reprends mon souffle.
Il allait à la fenêtre, il regardait le jardin. Il revenait, il repartait.
— Le souffle de ma phrase. Il y a un souffle dans une phrase. Bon, j'y vais là. Je reprends. Je peux y aller ? Tu me laisses finir ce que j'ai à dire ? Tu m'interromps pas.
L'inceste est vraiment le livre où je me présente comme une grosse merde, tout écrivain doit le faire une fois, après on verra.