AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Claude Lévi-Strauss (421)


«  Le savant n’est pas l’homme qui fournit les vraies réponses ,c’est celui qui pose les vraies questions » ….
Commenter  J’apprécie          190
Dans la savane obscure, les feux de campement brillent. Autour du foyer, seule protection contre le froid qui descend, derrière le frêle paravent de palmes et de branchages hâtivement planté dans le sol du côté d'où on redoute le vent ou la pluie ; auprès des hottes emplies des pauvres objets qui constituent toute une richesse terrestre ; couchés à même la terre qui s'étend alentour, hantée par d'autres bandes également hostiles et craintive, les époux, étroitement enlacés, se perçoivent comme étant l'un pour l'autre le soutien, le réconfort, l'unique secours contre les difficultés quotidiennes et la mélancolie rêveuse qui, de temps à autre, envahit l'âme nambikwara. Le visiteur qui, pour la première fois, campe dans la brousse avec les Indiens, se sent pris d'angoisse et de pitié devant ce spectacle de cette humanité si totalement démunie ; écrasée, semble-t-il, contre le sol d'une terre hostile par quelque implacable cataclysme ; nue, grelottante auprès des feux vacillants. Il circule à tâtons parmi les broussailles, évitant de heurter une main, un bras, un torse, dont on devine les chauds reflets à la lueur des feux. Mais cette misère est animée de chuchotements et de rires. Les couples s'étreignent comme dans la nostalgie d'une unité perdue; les caresses ne s'interrompent pas au passage de l'étranger. On devine chez tous une immense gentillesse, une profonde insouciance, une naïve et charmante satisfaction animale, et, rassemblant ses sentiments divers, quelque chose comme l'expression la plus émouvante et la plus véridique de la tendresse humaine. p345
Commenter  J’apprécie          190
Claude Lévi-Strauss
Ce n'est pas seulement pour duper nos enfants que nous les entretenons dans la croyance du Père Noël : leur ferveur nous réchauffe, nous aide à nous tromper nous-mêmes et à croire, puisqu'ils y croient, qu'un monde de générosité sans contrepartie n'est pas absolument incompatible avec la réalité
Claude Lévi-Strauss (Tristes tropiques)
Commenter  J’apprécie          181
"Chaque homme, écrit Chateaubriand, porte en lui un monde composé de tout ce qu'il a vu et aimé, et où il rentre sans cesse, alors même qu'il parcourt et semble habiter un monde étranger."
Commenter  J’apprécie          180
Les mendiants : «  Mais c’est évident, cela crève les yeux, ne suis-je pas là, à mendier devant toi, ayant de ce seul fait , sur toi, une créance ? A quoi penses-tu donc ? Où as-tu la tête ? »
L’acceptation d’une situation de fait est si totale qu’elle parvient à dissoudre l’élément de supplication. Il n’y a plus que la constatation d’un état objectif, d’un rapport naturel de lui à moi, dont l’aumône devait découler avec la même nécessité que celle unissant , dans le monde physique, les causes et les effets.

j’aurai donc du succès avec le blanc et le noir. Le jaune et le rouge forment souvent pour eux
une seule catégorie linguistique en raison des variations de la teinture d’urucu qui, selon la
qualité des graines et leur état de maturité, oscille entre le vermillon et le jaune-orangé ; le
rouge garde pourtant l’avantage, par son chromatisme intense que certaines graines et
plumes ont rendu familier. Quant au bleu et vert, ces couleurs froides se trouvent surtout
illustrées à l’état naturel par des végétaux périssables, double raison qui explique
l’indifférence indigène … »
Commenter  J’apprécie          170
Pour les villes européennes, le passage des siècles constitue une promotion, pour les américaines, celui des années est une déchéance. Car elles ne sont pas seulement fraîchement construites : elles sont construites pour se renouveler avec la même rapidité qu'elles furent bâties, c'est-à-dire mal.
Commenter  J’apprécie          170
Si les Celtes ont emprunté certains de leurs mythes à cette civilisation sub-arctique, dont nous ne connaissons presque rien, on comprendrait comment il se fait que le cycle du Graal présente avec les mythes des Indiens des forêts de l'Amérique du nord une parenté plus grande qu'avec n'importe quel autre système mythologique. Et ce n'est pas non plus un hasard si les Lapons dressent toujours des tentes coniques identiques à celles de ces derniers.
Commenter  J’apprécie          160
Lorsque les hommes commencent à se sentir à l'étroit dans leurs espaces géographique, social et mental, une solution simple risque de les séduire: celle qui consiste à refuser la qualité humaine à une partie de l'espèce. Pour quelques dizaines d'années, les autres retrouveront les coudées franches. Ensuite il faudra procéder à une nouvelle expulsion. Dans cette lumière, les évènements dont l'Europe a été depuis vingt ans le théâtre, résumant un siècle au cours duquel son chiffre de population a doublé, ne peuvent plus m'apparaître comme le résultat de l'aberration d'un peuple, d'une doctrine ou d'un groupe d'hommes. J'y vois plutôt un signe annonciateur d'une évolution vers le monde fini, dont l'Asie du Sud a fait l'expérience un millénaire ou deux avant nous et dont, à moins de grandes décisions, nous ne parviendrons peut-être pas à nous affranchir. Car cette dévalorisation systématique de l'homme par l'homme se répand, et ce serait trop d'hypocrisie et d'inconscience que d'écarter le problème par l'excuse d'une contamination momentanée.
Commenter  J’apprécie          160
J’aperçois un péril plus grave encore à confondre le progrès de la connaissance avec la complexité croissante des constructions de l'esprit.
Commenter  J’apprécie          151
Quant aux créations de l'esprit humain, leur sens n'existe que par rapport à lui, et elle se confondront au désordre dès qu'il aura disparu,
Commenter  J’apprécie          150
Il faut beaucoup de naïveté ou de mauvaise foi pour penser que les hommes choisissent leurs croyances indépendamment de leur condition. Loin que les systèmes politiques déterminent la forme d'existence sociale, ce sont les formes d'existence qui donnent un sens aux idéologies qui les expriment.
Commenter  J’apprécie          150
Quand nous commettons l'erreur de croire le sauvage exclusivement gouverné par ses besoins organiques ou économiques, nous ne prenons pas garde qu'il nous adresse le même reproche, et qu'à lui son propre désir de savoir paraît mieux équilibré que le nôtre.
Commenter  J’apprécie          152
Claude Lévi-Strauss
Un jour viendra où l'idée que, pour se nourrir, les hommes du passé élevaient et massacraient des êtres vivants et exposaient complaisamment leur chair en lambeaux dans des vitrines inspirera sans doute la même répulsion qu'aux voyageurs du XVIe ou du XVIIe siècle les repas cannibales des sauvages américains, océaniens ou africains.
Commenter  J’apprécie          150
Le barbare, c'est d'abord l'homme qui croit à la barbarie. (p. 22)
Commenter  J’apprécie          140
Puisque être homme signifie pour chacun de nous appartenir à une classe, à une société, à un pays, à un continent et à une civilisation; et que pour nous, Européens et terriens, l'aventure au cœur du Nouveau Monde signifie d'abord qu'il ne fut pas le nôtre et que nous portons le crime de sa destruction et ensuite, qu'il n'y en aura plus d'autre : ramenés à nous mêmes par cette confrontation, sachons au moins l'exprimer dans ses termes premiers en un lieu, et nous rapportant à un temps où notre monde a perdu la chance qui lui était offerte de choisir entre ses missions.
Commenter  J’apprécie          140
Quelle différence essentielle y a-t-il entre la voie orale et la voie sanguine, entre l'ingestion et l'injection, pour introduire dans un organisme un peu de la substance d'autrui ? Certains diront que c'est l'appétit bestial pour la chair humaine qui rend le cannibalisme horrible? Ils devront alors soustraire de la définition du cannibalisme d'autres cas où il s'impose comme un devoir religieux, souvent accompli avec une répugnance, une répulsion même, qui se traduit par des malaises et des vomissements.
Commenter  J’apprécie          140
Ce que d'abord vous nous montrez, voyages, c'est notre ordure lancée au visage de l'humanité.
Commenter  J’apprécie          141
J'ai appliqué une méthode analogue à l'étude de l'organisation sociale, et surtout des règles du mariage et des systèmes de parenté. Ainsi a-t-il été possible d'établir que l'ensemble des règles de mariage observables dans les sociétés humaines ne doivent pas être classées — comme on le fait généralement — en catégories hétérogènes et diversement intitulées : prohibition de l'inceste, types de mariages préférentiels, etc. Elles représentent toutes autant de façons d'assurer la circulation des femmes au sein du groupe social, c'est-à-dire de remplacer un système de relation consanguines, d'origine biologique, par un système sociologique d'alliance.
Commenter  J’apprécie          140
On refuse d'admettre le fait-même de la diversité culturelle; on préfère rejeter hors de la culture, dans la nature, tout ce qui ne se conforme pas à la norme sous laquelle on vit.
Commenter  J’apprécie          140
Le Père Noël est vêtu d'écarlate : c'est un roi. Sa barbe blanche, ses fourrures et ses bottes, le traineau dans lequel il voyage, évoquent l'hiver. On l'appelle "Père" et c'est un vieillard, donc il incarne la forme bienveillante de l'autorité des anciens. Tout cela est assez clair, mais dans quelle catégorie convient-il de le ranger, du point de vue de la typologie religieuse ? Ce n'est pas un être mythique, car il n'y a pas de mythe qui rende compte de son origine et de ses fonctions ; et ce n'est pas non plus un personnage de légende puisqu'aucun récit semi-historique ne lui est attaché. En fait, cet être surnaturel et immuable, éternellement fixé dans sa forme et défini par une fonction exclusive et un retour périodique, relève plutôt de la famille des divinités ; il reçoit d'ailleurs un culte de la part des enfants, à certaines époques de l'année, sous forme de lettres et de prières ; il récompense les bons et prive les méchants. C'est la divinité d'une classe d'âge de notre société, et la seule différence entre le Père Noël et une divinité véritable est que les adultes ne croient pas en lui, bien qu'ils encouragent leurs enfants à y croire et qu'ils entretiennent cette croyance par un grand nombre de mystifications.
Le Père Noël est donc, d'abord, l'expression d'un statut différentiel entre les petits enfants d'une part, les adolescents et les adultes d'autre part. A cet égard, il se rattache à un vaste ensemble de croyances et de pratiques que les ethnologues ont étudié dans la plupart des sociétés, à savoir les rites de passage et d'initiation.
(...) Il est bien certain que rites et mythes d'initiation ont, dans les sociétés humaines, une fonction pratique : ils aident les ainés à maintenir leurs cadets dans l'ordre et l'obéissance.
(...) la grande différence entre religions antiques et religions modernes tient à ce que "les païens priaient les morts, tandis que les chrétiens prient pour les morts". Sans doute y-a-t-il loin de la prière aux morts à cette prière toute mêlée de conjurations, que chaque année nous adressons aux petits enfants - incarnation traditionnelle des morts - pour qu'ils consentent, en croyant au Père Noël, à nous aider à croire en la vie.
Commenter  J’apprécie          139



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Claude Lévi-Strauss Voir plus

Quiz Voir plus

Lévi-Strauss et son œuvre

Lévi-Strauss est mort à l'âge de...

90 ans
95 ans
100 ans
105 ans

10 questions
12 lecteurs ont répondu
Thème : Claude Lévi-StraussCréer un quiz sur cet auteur

{* *}