600 000 exemplaires vendus en Allemagne, une adaptation en série prévue par Netflix, une présélection pour l'International Booker Prize au Royaume-Uni... "Tyll" (titre de la version originale publiée en Allemagne en 2017) fait figure de véritable phénomène littéraire en Europe, aujourd'hui traduit dans une vingtaine de langues. Il vient enfin de paraître en février chez Actes Sud, sous le titre "Le Roman de Tyll Ulespiègle", dans une traduction française de Juliette Aubert. Son auteur Daniel Kehlmann n'en est pas à son premier succès. Celui qui confie ne "pas aimer les romans historiques, propulse la figure folklorique médiévale de Tyll l'Espiègle dans une Europe du XVIIe siècle terrassée par la Guerre de Trente ans (1618-1648).
La Grande table Culture d'Olivia Gesbert émission du 5 mars 2020
À retrouver ici : https://www.franceculture.fr/emissions/la-grande-table-1ere-partie/saison-26-08-2019-29-06-2020
Abonnez-vous pour retrouver toutes nos vidéos : https://www.youtube.com/channel/¤££¤23Guerre de ¤££¤17Facebook6khzewww2g/?sub_confirmation=1
Et retrouvez-nous sur...
Facebook : https://fr-fr.facebook.com/franceculture
Twitter : https://twitter.com/franceculture
Instagram : https://www.instagram.com/franceculture
+ Lire la suite
Tant qu'à être sur cette terre - de toute façon, on n'avait pas le choix - autant essayer d'accomplir quelque chose.
Il n'y a rien qui plaise davantage aux gens, rien qui les fasse rire davantage, mais l'imitation doit être réussie car, si elle n'est pas bonne, tu deviens pitoyable. Pour imiter quelqu'un, espèce d'idiot, gamin stupide, caillou borné et sous-doué, il ne suffit pas que tu lui ressembles, il faut que tu lui ressembles plus qu'il ne se ressemble à lui-même car lui, il peut se permettre d'être comme il veut, mais toi, tu dois devenir lui en tout point et, si tu n'en es pas capable, alors abandonne, laisse tomber, retourne au moulin de ton papa et ne gaspille pas le temps de Firmin !
Il s'agit d'observer, tu comprends ? C'est là l'essentiel: regarde bien ! Comprends les gens. Ce n'est pas si compliqué. Ils ne sont pas difficiles. Leurs désirs ne sortent pas de l'ordinaire, seulement chacun veut ce qu'il désire de façon un peu différente. Une fois que tu as compris en quoi, il te suffit de vouloir les choses de la même manière pour que ton corps suive, que ta voix s'adapte d'elle-même et que ton regard soit le bon.
(page 283)
Au-delà des cataractes, le fleuve était encore très étroit et des rapides projetaient le bateau en tous sens. L'écume imbibait l'air, des rochers passaient dangereusement près, à toute vitesse. Les moustiques étaient sans pitié : on aurait dit que le ciel n'existait plus et qu'il avait été remplacé par des insectes. Bientôt, les hommes renoncèrent à les tuer. Ils s'étaient habitués à saigner continuellement.
Humboldt lui demanda s'il n'avait donc jamais lu Kant.
Un Français ne lit pas les auteurs étrangers.
Ici, il n'y avait pas d'heure matinale ou tardive, murmura Humboldt. Ici, il n'y avait que du travail à faire, et il serait fait. [...]
[...] celui qui ne connaissait pas l'angoisse métaphysique ne serait jamais un Allemand.
Qu'est-ce au juste, mesdames et messieurs, que la mort? Ce n'est pas seulement la vie qui s'éteint et les quelques secondes de transition, mais déjà le long déclin qui précède ; la période où l'homme est toujours là sans l'être vraiment et peut encore prétendre qu'il existe, même si sa gloire s'est évanouie depuis longtemps. Telles sont les précautions, mesdames et messieurs avec lesquelles la nature a prévu notre disparition!
L'homme n'est pas un animal, dit Humboldt.
Parfois si, répliqua Bonpland.
C'était étrange et injuste, dit Gauss, et une illustration parfaite du caractère lamentablement aléatoire de l'existence, que d'être né à une période donnée et d'y être rattaché, qu'on le veuille ou non. Cela donnait à l'homme un avantage incongru sur le passé et faisait de lui la risée de l'avenir. (...) Même une intelligence telle que la sienne, reprit Gauss, n'aurait rien pu concevoir aux premiers âges de l'humanité ou sur les rives de l'Orénoque, tandis que dans deux siècles le premier imbécile venu pourrait se moquer de lui et inventer des absurdités sur son compte.
Un temps infini ne peut pas se terminer.Donc il a bien dû commencer.Mais avant ça ? Un avant avant le temps? C'est à vous donner le vertige.
( p.37)