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Critiques de David Foster Wallace (105)
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L'infinie comédie

Un livre époustouflant à lire absolument même s'il faut s'accrocher : 1486 p., style foisonnant qui passe du descriptif ( hyper réaliste, multitudes de détails) au délirant (comique, improbable) avec un vocabulaire prolifique, des phrases qui n'en finissent pas, des intermèdes....Une attention soutenue est nécessaire mais on VIT ce livre, chaque mot a son importance, tout semble aller à une vitesse grand V. Beaucoup de sujets, tous très importants : le tennis, les anxyolitiques, la drogue, l'alcool ; les addictions, la pression du sport, l'histoire géopolitique Etats-Unis/Canada/Québec, le cinėma.

Du côté délirant : le calendrier lunaire ONANiste, l'Eschaton, la filmographie de Soi-Même, les physionomies des différents personnages ainsi que leurs traits de caractère....

Aspect descriptif époustouflant : entraînement de tennis, l'Eschaton, réunion des AA, le sevrage.....

A noter que les notes de l'auteur sont un livre dans le livre, il ne faut absolument pas les passer car elles apportent des éclairages indispensables au flot d'informations (on peut passer d'une idée/situation à l'autre brutalement et les intermèdes n'aident pas toujours).

Pour conclure, l'équivalent en film à un Tarentino.
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L'infinie comédie

Voici une des sorties que j'attendais le plus, un challenge pour les éditions de l'Olivier : publier un classique américain de plus de 1300 pages et trouver un traducteur à la hauteur du défi ! Pari réussi !



Tout d'abord il faut souligner l'incroyable travail qu'il y a derrière cette sortie : cela fait des années que l'on attendait une traduction française de ce titre extrêmement connu Outre-Atlantique et c'est maintenant chose faite. Un grand bravo à Francis Kerline : cette traduction est une belle prouesse! J'ai trouvé le style de l'auteur respecté et on ressentait vraiment la complexité qui se cache derrière chaque formulation utilisée.



En dehors de cet aspect, L'Infinie Comédie est un roman dense, long, il n'est pas fait pour tout le monde. Il faut déjà aimer le côté très atypique de l'histoire et de l'univers de David Foster Wallace, il faut ensuite apprécier les romans imposants -et réussir à le transporter- mais cela vaut la peine ! D'une part parce que c'est un incontournable pour tous les amoureux de la littérature américaine, parce qu'on a de quoi être fier de tourner la dernière page (il faut se l'avouer) et d'autre part parce que ce livre regorge d'originalité !



Ce roman est une dystopie hors du commun, une suite de portraits de protagonistes étranges, une flopée de dialogues complexes et de descriptions extrêmement précises. Il y a bien sûr des passages assez longs mais toute la morale sous-jacente est extrêmement intéressante.



En définitive, c'est un roman complexe à lire mais il s'agit surtout d'un incontournable du genre !
Lien : http://leatouchbook.blogspot..
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La fille aux cheveux étranges

Petits animaux inexpressifs – Deux enfants sont abandonnés au bord d’une route. « Quand les deux gamins étaient petits, leurs parents les ont abandonnés. Il y avait la fille et son frère, Lunt. » (p. 33 & 34) Des années plus tard, dans un célèbre jeu télévisé, une jeune femme enchaîne les victoires. La raison de son succès ? Avoir été obligée d’apprendre par cœur une encyclopédie quand elle était enfant.



Par chance, l’expert-comptable pratiquait la réanimation cardio-pulmonaire – Dans le parking souterrain d’un immeuble de bureaux, un expert-comptable assiste à la crise cardiaque du vice-président. « Il appliquait la réanimation cardio-pulmonaire, frappait les douces bosses du sternum, et tous les quatre coups alternait en insufflant de l’air entre les lèvres pleines mais faiblement bleutées du vieux cadre. » (p. 73)



La fille aux cheveux étranges – Un groupe de punks se rend à un concert et se défonce au LSD. Parmi eux, « La Vrille a des cheveux uniquement au milieu de sa tête ronde et ils sont sculptés habilement pour avoir la forme d’un pénis d’homme géant en érection. » (p. 81) Mais ce ne sont pas ces cheveux qui sont l’objet de toute l’attention du groupe.



Lyndon – « Je m’appelle Lyndon Baines Johnson. Et le sol que vous foulez est à moi, bordel. » (p. 103) Ainsi s’ouvre l’entretien d’embauche que fait passer le sénateur Johnson à Dave Boyd. Alors que le sénateur devient président des États-Unis, tout le monde s’interroge sur la fulgurante ascension du jeune homme préposé au courrier, devenu le plus proche conseiller de l’époux de Lady Bird.



John Billy – C’est l’histoire de Chuck Nunn Junior, héros local qui a brillé du collège à la guerre du Viet-Nam. Mais toute gloire se passe. « Nunn, lui, le jour de sa déchéance, ça a été quand il a plu des moutons. » (p. 169)



Ici et là-bas – Dans une narration à deux vox, un couple évoque ses problèmes devant un thérapeute. Bruce est obsédé par son travail de recherche et son amie se sent délaissée. Mais Bruce l’aime pourtant. « Et l’endroit où vous voulez ‘emmener’ bien cette fille un jour ? Et pourquoi est-ce seulement au moment où elle est ailleurs à jamais qu’elle devient cet endroit dont la perte évoque des images de décapitation et de blessure ? » (p. 208)



Tout est vert – Un matin, Mitch annonce peu ou prou qu’il n’en peut plus de l’existence qu’il mène avec Mayfly. « Mais maintenant, j’ai le sentiment que je vais tout entier dans toi et que il n’y a plus rien de toi qui revient. » (p. 296)



Ces nouvelles sont étranges, entre langue absurde et langue hypnotique. Il est très difficile de savoir où l’on avance à mesure que l’on tourne les pages. Sans remettre en question le travail du travail, il me semble que ce livre est de ceux qu’il faut lire en version originale. Je n’ai pas fini la lecture de ce recueil. Je reprendrai peut-être plus tard les nouvelles ‘Mon image’, ‘Dire jamais’ et ‘Vers l’ouest fait route la trajectoire de l’empire’. L’impression générale que me laisse ce recueil est celle d’avoir côtoyé un génie et un très grand auteur. Et comme souvent dans ce genre de rencontre, je me suis sentie trop petite pour saisir la pleine mesure du talent qui m’était présenté. Et zut, c’est agaçant !

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Brefs entretiens avec des hommes hideux

Ces vingt-trois nouvelles écrites à l'acide zygomatique vous ouvrent un univers où se cotoient les démons que chacun de nous héberge au sein de son entrelac neuronal.



Des dépressives sollicitant leur échaffaudage émotionnel, des thérapeutes suicidaires, un jeune garçon pris de stupeur sur le plongeoir d'une piscine, des psychotiques, un couple bancal, des relations filiales pathologiques, des secrets d'alcôves. Personnages ridcules, méchants, torturés.



Slalomez entre les décors froids et métalliques et les tentures de velours pourpres, entre les monologues téléphoniques et les dialogues méditatifs



(...)

http://lelabo.blogspot.com/2005/10/brefs-entretiens-avec-des-hommes.html
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L'oubli

Dans ce recueil de huit nouvelles, toutes ne se valent pas, je retiendrais surtout L’oubli, qui donne son titre au livre, L’âme n’est pas une forge et La philosophie et le miroir de la nature, plus profondes et qui m’ont plus touchées que les autres. J’aime bien le style d’écriture de l’auteur, c’est assez basique mais ça m’a paru direct, comme s’il me racontait directement les histoires, j’aime bien car je m’implique un peu plus dans la lecture.

Les sujets traités sont souvent mélancoliques, sur des thèmes comme la folie, le regard qu’on porte sur soi-même ou encore les normes sociales et ça me parle. Les personnages trouvent souvent refuge dans l’oubli, ils n’ont rien d’atypique, ils sont tout ce qu’il y a de plus banals et c’est aussi ce qui fait leurs forces, comment Monsieur-tout-le-monde peut-il s’adapter à ce monde sans visage ? Comment peut-il ne serait-ce qu’exister ?

J’ai beaucoup aimé car ce sont des questions que je me pose au quotidien et certains personnages me font penser à Bartleby le scribe de Melville, un roman que j’avais adoré par la banalité consternante de cet homme qui un jour ose se rebeller à sa façon.

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L'infinie comédie

Un pavé de 1328 page plus 380 pages de renvoi de texte en fin de livre (et voulues par l’écrivain afin de raccourcir un pavé qui était déjà très lourd). Une pensée admirative pour le travail réalisé par les deux traducteurs.



A propos de lourdeur, je dois confesser que j’ai eu du mal physiquement avec ce livre qui a réveillé une vieille tendinite aux 2 bras, contractée après lecture d’un autre pavé…j’ai du continuer la lecture avec un livre en position horizontale et moi assise afin d’éviter la contracture. Le livre pèse 1 kilo 300 grammes et la lecture est longue…



C'est une dystopie de littérature postmoderne, un livre fleuve dans un futur proche avec une Amérique du Nord unifiée (USA, Mexique, Canada).Mais il est très peu question du Mexique dans le roman.



Ai-je aimé le livre? Mon Dieu, NON ! à aucun moment. Mais je reste admirative devant la performance: d’abord, la structure du livre, à aucune autre pareille, sans une histoire linéaire, mais au fil de pages, dégageant une vraie force avec une richesse de vocabulaire défiant toute concurrence, une rupture permanente du langage selon la personne qui parle; le langage est d’une grande précision, avec de temps en temps des raptus très drôles.



En gros, j’ai trouvé 4 pôles importants dans ce livre: 1) la famille nord-américaine Incandenza; 2) l’Académie de tennis élitiste de Boston; 3) le monde de la dépendance (drogues et alcool) et 4) les terroristes canadiens dissidents.



La famille Incandenza est un ramassis de tarés. Le père James Incandenza est un physicien et un cinéaste expérimental assez reconnu, c’est le fondateur de cette Académie de tennis, un personnage sans profondeur dans la narration, alcoolique au dernier degré et dément à la fin de sa vie; en lisant les titres de ses réalisations et en lisant la teneur de ses scénarios, on comprend qu’il est plus que perturbé; il va se donner la mort de façon atroce et grotesque et le lecteur se demande quelles abominations il devait assumer pour en arriver là. Les choses sont suffisamment suggérées dans le roman pour que le lecteur se fasse une opinion, sinon précise, au moins proche. La mère appelée la Moms, mesure 2 mètres et à la cinquantaine est encore une femme séduisante, docteur ès lettres et sciences, d’origine québécoise, mais totalement toxique et cachottière, elle est directrice dans l’Académie. Le couple a 3 fils: l’aîné, Orin est un ancien de l’Académie de tennis, reconverti dans le football américain car il avait compris qu’il n’atteindrait pas le plus haut niveau du tennis, appelé le Show, là où les rares élus atteignent une sorte de Nirvana absolu. Le deuxième fils est Mario, un être difforme, limité en parole mais non idiot, c’est le seul qui s’intéresse au métier du père. Et le dernier fils est Hal, interne au sein de l’Académie, un adolescent destiné à être parmi les meilleurs du tennis, qui vit pour plaire à sa mère et pour se droguer en cachette. Il n’y a aucun personnage normal dans cette famille.



L’Académie de tennis est un prétexte pour nous parler du milieu du tennis et de la compétition (ce mythe de la compétition et de l’excellence qu’on inculque aux joueurs, ce mythe, ils croient toujours que l’efficacité, c’est d’aller de l’avant, de foncer. Le principe selon lequel le plus court chemin d’un point à un autre, c’est la ligne droite). Il y a une description minutieuse de ce monde où chaque pas est programmé au prix d’un effort souvent surhumain et au prix de sacrifices importants sur la vie privée de chacun. C’est un univers impitoyable, d’une compétitivité folle où les élus sont peu nombreux. On a droit aussi à une description un peu moins fournie sur le football américain que pratique Orin, un autre monde différent et aussi dur, fermé et un peu plus bestial.



Le monde de la dépendance (alcool et drogues) est représenté par le Centre de Désintoxication connu comme Ennet House situé pas loin de l’académie de tennis, où règne une ambiance surréaliste qui accueille des gens en perdition totale. J’ai trouvé intéressants les récits de ces gens pour qui la vie est un enfer et pour qui, dans la plupart des cas, en viennent à la dépendance après une enfance à problèmes. Il y a dans le lot, un rescapé de la drogue/alcool, Don Gately, reconverti en surveillant du centre qui a une histoire incroyable (comme tous les autres), mais qui se dévoue aux gens et va se voir impliqué dans une scène dantesque du livre, digne de Tarantino. C’est sur la vie de ce personnage que s’achève ce livre.



L’union de cette Amérique du Nord avec des canadiens dissidents et terroristes, est un thème assez mal approfondi. Ils sont tous estropiés, amputés des membres inférieurs car jeunes, ils jouaient à s’approcher d’un train le plus possible. Ils sont si nombreux qu’ils forment une petite armada contre les détestés états-uniens. Ils les détestent si fort qu’ils veulent s’approprier d’une cassette que James Incandenza aurait tourné, appelée Infinite Jest ou plaisir sans fin, qui rend les gens définitivement dépendants jusqu’à ce que mort s’ensuive.



Il y a par ailleurs dans ce livre une information ultra détaillée sur le tennis, les drogues dures et moins dures, les effets cliniques des dépendances, etc. J’avoue avoir sauté des pages de description technique qui ne m’intéressaient pas. Mais il y a aussi beaucoup d’autres choses à découvrir.



Ce fut une lecture épuisante (et c’est une des singularités du livre) avec un langage différent selon la personne qui parle; je n’ai pas supporté le langage de certains camés qui ramènent les échanges oraux au langage archaïque de l’âge de pierre. Une autre singularité est la surabondance d’abréviations, probablement une marotte de l’auteur.



Oui, une lecture épuisante qui d’après ce que j’ai lu, sépare les avis entre ceux qui crient au chef d’oeuvre et ceux qui proclament que c’est "wholly unreadable". Je me situe entre les deux, considérant que c’est une lecture intéressante mais fatigante et profondément triste d’un monde assez ravagé, grotesque et névrosé, malsain aussi, obnubilé par la performance, gérant le mal être et le stress par une surconsommation de psychotropes.




Lien : https://pasiondelalectura.wo..
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Brefs entretiens avec des hommes hideux

je le dis tout de suite je préfère Foster Wallace avec des romans fleuves que lorsqu'il s'exerce à l'art délicat de la nouvelle. Ici nous avons à faire à une vingtaine de nouvelles et la fulgurance habituelle n'y est pas, la patience de décrypter chaque situation, chaque psychologie ne peut être présente.

Il demeure une causticité certaine sur nombre de sujets notamment lorsqu'il y a ce regard si désabusé sur la société que nous connaissons bien lorsqu'on lit Foster Wallace.

on sent que l'auteur veut expérimenter, et peut être ai je trop eu l'impression d'être un cobaye ce qui me laissa en dehors de chaque récit. Il y a pourtant du rythme et la prose est toujours si talentueuse. Je suis diablement exigeant avec cet auteur qui m'a habitué au meilleur.
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L'oubli

L'histoire du monde moderne résumée par David Foster Wallace, avec toujours autant de lucidité, d'intelligence, d'humour noir et presque pince-sans-rire, de détachement, et de "bon les gars tout ça c'est bien joli mais la vie ça ne peut pas être aussi con ?" Et disons qu'avant de vous plonger dans L'Infinie Comédie, ce serait bien de commencer par celui-ci, comme un entrainement cérébral avant explosion littéraire. Disons qu'il a une aptitude sérieuse à faire des phrases montées si subtilement en neige qu'il vous faudra beaucoup de concentration et de volonté pour ne pas vous laisser complètement happer par les moindres détails - drôles ou pétrifiants - du monde qui vous entoure, ou vous laisser impressionner par la qualité du jeu de langage, impeccable et foudroyant, dont il fait preuve.



Et c'est pour ça qu'on l'aime.



(voir la critique intégrale avec résumé des nouvelles sur le blog)
Lien : http://lecombatoculaire.blog..
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L'infinie comédie

Ce n'est pas vraiment une critique, juste un avis intermédiaire. J'en suis à la page 480. Ce roman-monde se lit par univers: l'on passe de la description d'un centre pour toxicos à une école de tennis pour surdoués en passant par un dialogue entre un séparatiste québecois cul de jatte et le policier espion chargé de le surveiller, dialogue dans un coin de désert d'Arizona au soleil couchant. Ce n'est qu'un bref aperçu des différents milieux et protagonistes de ce livre et si je vous dis que le lien-il y en a - est mort suicidé (je ne vous dis pas comment), qu'il est le père d'une lignée de trois fils aux comportements a-normaux. La description quasi-pathologique de chaque univers se nourrit d'un vocabulaire d'une précision inoui, d'un humour distancié qui sent le vécu. Certains passages sont un peu longuets sur le moment mais s'apprécient après, ils sont "longs en bouche", comme un bon vin et donnent les clés d'un chapitre suivant ( pas celui qui suit, celui d'après). Le livre fonctionne en quinconce, chaque partie est encastrée dans la suivante qui vous donne la clé pour la troisième et ainsi de suite.

L'ouvrage fait 1300 pages et, là où je suis, on voit se dessiner la trame générale, en creux.

Un conseil : si vous lisez ce livre, ne lisez rien en parallèle...

A bientôt pour la suite...



Suite et fin provisoire de ma lecture ou devrais-je dire, de ma quête en page 697.
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Brefs entretiens avec des hommes hideux

Livre très fort, des nouvelles étranges, pleine d'intelligence, un peu comme un Italo Calvino en forme, David Foster Wallace tape tout sauf sauvagement sur des thèmes super lourds, le viol, la haine d'un parent pour son enfant...

En quelques pages il dépeint et crée des univers à la fois réels et complètement décalés. L'écriture est en recherche permanente à travers les mains de cet auteur.

Le mec s'est suicidé dans la quarantaine, quoi de moins étonnant. Trop sensible, monde froid et violent.
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L'infinie comédie

Comme dans "Ulysse" on suit l'odyssée d'un jeune homme plus ou moins en quête de paternité (Hal/Stephen/Télémaque) et d'un homme d'âge mur (Gately/Bloom/Ulysse) dont la rencontre des trajectoires se font à la marge du roman.



(Le vrai père, lui, est mort : on le croise à l'état de fantôme, comme dans Hamlett dont est tiré le titre - "infinite jest")



Cette odyssée traverse des océans de douleurs morales et physiques, peuplées de notes de bas de page ou se déroule une liste infinie d'antalgiques et de drogues impeccablement nomenclaturées.



Tout comme "Ulysse", le premier chapitre est indigeste, et on repose le livre découragé. Puis on le reprend un an plus tard suivant les conseils d'une lectrice : à lire comme une accumulation de nouvelles, ne pas chercher la cohérence. Elle viendra plus tard. (Comme disait Proust à propos de "La recherche du temps perdu").



Et oui, c'est un livre univers, genre "la vie mode d'emploi" ou "la recherche du temps perdu" ou "Ulysse". Ca foisonne d'histoires et de portraits, de références littéraires et mathématiques, sur la vie en Amérique, sur les obsessions de DWF en particulier : la douleur, les drogues, l'addiction, le dépassement de soi, le suicide.



S'il y a des pages ch*** (c'est inévitable dans un roman de cette longueur) il y en a d'autres inoubliables : des extrêmement drôles, des extrêmement graves (ha, la détresse de Kate Gombert après sa tentative de suicide, j'en pleure encore) et des putains d'aphorismes (celle des poissons - "c'est quoi l'eau ?" - inoubliable).



Des morceaux de bravoure à encadrer et à relire jusqu'à la fin de mes jours.
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L'infinie comédie

Voici une image de la "Chronologie de l'Ère Sponsorisée" à imprimer pour servir de marque-page/pense-bête ;)



enjoy !
Lien : https://lightpics.net/i/dCsu
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C'est de l'eau

David Foster Wallace est l’auteur de l'ouvrage « Infinite Jest », un monument littéraire. Le livre « This is water » est en fait un discours prononcé en 2005 devant des étudiants. Il tente alors d’analyser la conviction selon laquelle nous pensons en toute liberté, muni de notre sens critique. Le corps professoral a ainsi l’habitude de dire aux élèves que l'université ne tient pas tant à accumuler des connaissances que d’apprendre à réfléchir. Mais David Foster Wallace rappelle que ce qui constitue la vraie liberté, ce n’est pas la capacité à réfléchir, mais la capacité de choisir consciemment ce à quoi on réfléchit. Dans la vie quotidienne, c’est en réalité un effort permanent, qui demande attention et discipline, afin de ne pas se perdre dans son « monologue intérieur ». Pour conclure, je recommande vraiment aux fans de David Foster Wallace le film « The End of The Tour » …
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Considérations sur le homard

Ce livre regroupe 10 articles publiés dans différents magazines ou revues américaines entre 1998 et 2005. David Foster Wallace a démontré une fois de plus dans ces textes son immense talent à produire de la littérature en toutes circonstances . Rien ne peut l'arrêter. Qu'on en juge en dressant la liste des thèmes abordés dans ces 10 articles : la cérémonie des Awards du porno à Las Vegas, une critique du roman Aux confins du temps de John Updike, l'humour de Franz Kafka, une critique d'un livre consacré au bon usage de la langue américaine, la matinée du 11 septembre 2001, la joueuse de tennis Tracy Austin, une semaine en compagnie de John McCain candidat lors des primaires des Républicains en 2000, le festival du homard dans le Maine, une critique d'un livre consacré à Dostoïevski, un talk show politique diffusé sur une radio locale en Californie.

Dans ces textes, DFW fait preuve d'une inventivité formelle et lexicale stupéfiante, d'une lucidité exacerbée et d'une sensibilité extraordinaire à son environnement. Sa puissance analytique de raisonnement complétée par des digressions plus ou moins étranges et alimentée par une acuité supranormale au monde qui l'entoure, exploite le moindre stimulus sensoriel, le moindre évènement, la moindre conversation pour produire une peinture à la fois drôle et effrayante de la société américaine et de ses produits culturels.

DFW était un grand écrivain, profondément original.
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L'infinie comédie

Le best seller de l'auteur américain a provoqué bien des soucis aux traducteurs français, d'où sa parution tardive ici. Et ce n'est pas étonnant quand on connaît l'écriture de David Foster Wallace, qui manie la langue comme on joue au tennis, avec stratégie, subtilité, coups tordus, jeu - et amour. Pour décrire le monde qui l'entoure, il se réfugie dans l'ironie avec intelligence et brio, mais surtout une grande lucidité, forcément désabusée.



Ici, il s'attaque à un projet de grande envergure : plus de mille pages, soit un bon gros pavé dans la mare - ou dans la gueule, c'est selon. Alors, évidemment, il vaut mieux ne pas commencer par ce livre-ci si vous souhaitez découvrir son oeuvre - je vous conseille plutôt La fonction du balai, pour n'en citer qu'un.



Nous nous retrouvons projeté dans des Etats-Unis fictifs - mais proches de la réalité, nous ne sommes pas du tout dans la science-fiction - où les années ont été remplacées par des marques, où les déchets sont catapultés, où l'Indépendance du Canada est discutée, où les technologies ont tellement avancé qu'elles ont du reculer, où les oeuvres de divertissement peuvent tuer aussi insidieusement qu'une arme létale. Nous suivons plusieurs personnages aussi hétéroclites que des professionnels du cinéma, des criminels en fauteuil roulant et des haut-gradés du gouvernement, mais surtout plusieurs établissements, dont une académie de tennis pour jeunes adolescents et un refuge pour anciens toxicomanes et alcooliques. Rien ne semble les relier au premier abord, et il faudra attendre le clou du spectacle pour faire le rapprochement.



Avant tout, je dirai que c'est un livre sur l'infinie tragédie des relations sociales, sur l'enfer de l'addiction, sur la comédie burlesque de la politique, sur le grotesque du marketing. Un livre assez intellectuel, parfois très technique, puis soudainement totalement anarchique, tant dans sa façon d'être relaté (vous trouverez d'assez conséquentes "notes en bas de page" à la fin du livre, dans lesquelles parfois figurent des chapitres entiers) que dans ses rebondissements. Absolument tous les personnages ont des tares, des fardeaux, des problèmes, des troubles mentaux ou sociaux, et chacun d'eux est à la fois une énigme et un livre ouvert sur les plaies visibles ou invisibles - faute à une société malade, incapable de créer encore des liens, de communiquer, qui se sent obligée de fuir dans le divertissement, la colère, la drogue, l'exercice physique, le sexe...



Bref, préparez-vous à une expérience dense, intense, profonde, caricaturale, une de ces expériences dont vous ne savez pas si elle vous donne envie de rire ou de pleurer - mais à choisir, disons que c'est bien une grosse farce, celle de la société actuelle.


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L'infinie comédie

Passer à travers cet immense pavé constitue une expérience de lecture spéciale qui, dans mon cas, a ressemblé à un parcours du combattant! Malgré certains passages géniaux, cette brique comporte d'innombrables longueurs et digressions qui m'ont quelques fois poussé à l'abandon. Mais quelque part, ce livre qui parle abondamment de dépendances, réussit en en créer une en dépit de ses côtés rébarbatifs.

D'emblée ce livre débute par la fin et finit par ce qui pourrait être un début tout en étant une queue de poisson magistrale! L'écriture, souvent atypique, est aussi occasionnellement déroutante, comme lorsqu'un changement de scène apparait en plein paragraphe sans indication aucune, autre que l'intelligence du lecteur qui doit le réaliser! Et d'accord, je ne suis pas maître es lettres, mais je ne suis pas non plus habitué à consulter compulsivement le dictionnaire tellement la recherche de mots rares semble un objectif de l'auteur.

Par contre ma longue incursion dans le monde du tennis, récréatif précisons-le, m'a fait apprécier tous les passages, et ils sont nombreux, traitant de ce sport incluant les descriptions minutieuses de la beauté des lobs brossés, de la cruauté des passing-shots camouflés et toutes les autres analyses outrancièrement techniques. En prime, et plus important encore, la psychologie et les dynamiques relationnelles de tous ces ados de l'Académie de tennis sont venus m'interpeller grandement.

À mon sens, car plusieurs interprétations sont sans doute possibles, le thème principal de l'œuvre tourne autour de la dépendance aux drogues bien sûr, mais aussi aux évasions de toutes natures. Certains passages concernant les toxicomanes de la maison de désintoxication et des groupes A.A. et N.A. sont des pièces d'anthologie. Dommage que l'auteur nous assomme avec une multitude de références pharmacologiques hyper pointues qui n'apportent rien, mais vraiment rien, au propos.

Impossible de parler de ce livre sans mentionner qu'il prend place dans une Amérique unifiée (USA, Canada et Mexique) où le nord-est des É.-U. et une partie du Québec sont utilisés comme vaste dépotoir de produits toxiques catapultés par de géants mécanismes... D'où l'émergence des AFR (assassins en fauteuils roulants), sorte de terroristes québécois dont les buts politiques restent obscurs, mais dont les actions radicales inquiètent les services de sécurité dont le fonctionnement est pour le moins curieux, pour ne pas dire complètement contreproductif.

Les tribulations des membres de la famille Incandenza, incluant le père décédé, sont sans doute un point d'ancrage fort bienvenu dans tout ce salmigondis bien que leurs destins relatifs ne soient pas non plus ni typiques ni faciles à suivre. Mais reste qu'ils nous conduisent dans divers aléas de la vie tout aussi déconcertants que bienvenus. C'est en grande partie par amour de ces personnages que j'ai persévéré. Et finalement, ça valait le coup...mais je ne recommencerais pas!

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L'infinie comédie

Je veux juste critiquer la note de présentation de ce bouquin qui est une insulte à Jules Ferry.
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La fonction du balai

Sans doute, si Dieu existe, qu'Il se cache dans chaque grain de sable ou dans chaque plume colorée d'un oiseau exotique. Peut-être se demande-t-Il si ces êtres qu'il observe, dans le monde ici-bas, sont bien réels, s'ils existent vraiment parce qu'ils en ont une vague impression. Et s'Il se penche sur ce qui se passe en Ohio, peut-être pensera-t-Il, tel le lecteur lambda que nous sommes, que cette histoire n'a ni queue ni tête, que les personnages - sont-ce des êtres, s'ils pensent vraiment exister ? - sont détonants et loufoques, que l'usage de la liberté qui leur est permis de faire est peut-être un trop grand don. La fonction du balai serait un roman sans l'être. Foisonnant de personnages et de situations à la cohérence apparente, le récit de David Foster Wallace casse les codes du genre, recentrant donc le lecteur sur la seule narrativité, sur le langage. Car le langage est l'un des piliers du roman, comme source de la communication entre les personnages mais aussi de la représentation du monde. L'autre pilier est le questionnement sur l'individu, sur sa place dans un groupe social - la famille, la société - sur son utilité.



A maints égards, le foisonnement narratif de La fonction du balai rappelle les œuvres d'autres jeunes auteurs américains, de John Kennedy Toole à Jonathan Franzen en passant par Tristan Egolf. C'est une sorte de tourbillon de personnages à la fois très sérieux et loufoques, et de situations absurdes qui attendent le lecteur. Au centre de ce théâtre, Lenore Beadsman est la fille d'un magnat du petit pot pour bébé qui travaille en tant que standardiste, pour quatre dollars de l'heure, dans une maison d'édition. Elle flirte avec son patron, Rick Vigorous, dont le nom n'augure en rien de son incapacité sexuelle - il est doté d'un micro-pénis -, qui est obsédé par la possession - verbale, puisque non physique - de Lenore. Parmi la famille Beadsman, il faut encore citer LaVache, brillant étudiant unijambiste et plus gros dealer de drogue de son université ; Clarice fait front aux infidélités de son mari en organisation des thérapies familiales passant par un théâtre grotesque ; John, le frère aîné, pousse sa logique jusqu'à devenir famélique ; Lenore, l'arrière-grand-mère et matriarche ; Patrice, la mère folle à force d'avoir été humiliée, et encore Concarnadine, la grand-mère atteinte de démence. Citons également le père de Lenore, Stonecipher, un grand ponte industriel qui redoute, plus que de perdre sa grand-mère, de perdre un secret industriel. D'autres personnages, encore, doivent être cités : Andrew "Wang-Dang" Lang, étudiant bourru et comptable déprimé qui reviendra, à la faveur d'un hasard, dans la vie de Lenore ; Neil Obstat travaille pour le père de Lenore et nourrit pour cette dernière une admiration secrète ; Candy Mandible, collègue de Lenore et dont les charmes sont recherchés par les meilleurs partis de l'Ohio ; Melinda-Sue, la femme d'Andy Lang ; Peter Abbott, le réparateur des lignes téléphoniques ; Norman Bombardini, monstrueux obèse ; le docteur Jay, psychologue aux méthodes pour le moins étranges et à la déontologie douteuse. Les situations loufoques, qui s'enchaînent, donnent un caractère surréaliste au récit, depuis le repas gargantuesque de Norman Bombardini jusqu'à la scène du bar avec M. Bloemker et sa poupée gonflable en passant par l'ultime menottage de Lenore par Rick. A maints égards, La fonction du balai est un roman fou.



Mais est-ce réellement un roman ? La question mérite d'être posée. De façon évidente, David Foster Wallace casse les codes du genre. Le roman commence avec une disparition - celle de Lenore Beadsman, l'arrière-grand-mère - dont la résolution servira de fil rouge au récit. Par ailleurs, cette disparition n'est pas anodine : avec elle, Lenore Beadsman a entraîné une vingtaine de résidents de l'hospice, et la vieille dame a besoin d'une température constante de 37 degrés. Si la résolution de l'enquête paraît chose aisée en apparence - une personne âgée peu mobile, entourée de personnes comme elle, et qui a des besoins vitaux très particuliers -, rien ne le sera vraiment. Quelques indices - des dessins énigmatiques - serviront de piste à Lenore - l'arrière-petite-fille -, sans toutefois que l'enquête, au bout des 700 pages du roman, ne trouve une explication. Et cette fin, d'ailleurs, n'en est pas une. Tout l'univers du roman semble s'effondrer dans un cataclysme insensé de lignes téléphoniques folles, de tremblements de terre dus à un obèse, d'une série de questions qui demeurent sans réponse. Entre les deux points - le début et la fin -, David Foster Wallace déroule un récit d'apparence ordonnée, mais décousu, une sorte de profusion narrative que l'on pourrait voir comme un exercice de style, un enchevêtrement de situations dans lesquelles les personnages, englués dans un système d'obligations envers les autres et d'enfermement quant à eux-mêmes, ne peuvent littéralement pas avancer. Hélas pour Lenore, aucun autre personnage qu'elle ne semble porter attention à ce qui est advenu de Lenore Beadsman l'aînée, même son propre père, qui pourtant la "place" sur cette enquête, et dont le souci principal semble être la perte du secret d'une alimentation miracle pour les bébés, laquelle accélérerait l'apprentissage du langage. En réalité, tout, ou presque, est là : La fonction du balai interroge en fait le rôle du langage dans la construction de l'individu et la représentation du monde.



De fait, disqualifiant l'objet de sa narration, David Foster Wallace recentre son récit sur sa fonction langagière. Le mot, dit Wittgenstein via Lenore Beadsman, est ce qui définit le monde, et le contrôle. Ainsi le roman peut-il être compris comme un système, c'est-à-dire un ensemble de signes cohérents, bien que cela ne paraisse pas évident à nous, lecteur, mais puisque nous sommes à l'extérieur de ce système, cela ne compte pas. Le langage devient une manière de comprendre le monde, de l'appréhender. Les histoires de Rick, dans ce sens, sont très significatives. Rick raconte des histoires à Lenore, histoires qu'il est censé tirer des épreuves qui lui sont envoyées, en qualité de rédacteur en chef d'une revue littéraire, par plusieurs auteurs du pays. Ces histoires servent, en réalité, de mise en abîme, pour mieux comprendre la façon dont Rick perçoit les choses. Elles sont non seulement à l'attention de Lenore, mais également de la nôtre, en tant que lecteurs. La femme obèse et sa grenouille cachée, par exemple, est la métaphore de l'impossibilité de se départir de son milieu social ou familial. Pour Rick, ces histoires sont une manière de communiquer, et il s'agit en réalité de la seule manière de faire pour lui. Idem pour Clarice et les séances théâtrales familiales, dans lesquelles le mal-être d'une femme trompée devient scénario fictif d'une pièce qui doit agir comme thérapie. La fiction devient un moyen de dire : dire pour comprendre, dire pour contrôler. Mais des résistances apparaissent : Alvin, le mari de Clarice, ne joue pas vraiment le jeu ; Lenore réfute cette obligation de contrôle. Le langage, comme outil de la fiction, en prend alors les qualités et les défauts. Partant, ce qui concerne les personnages d'un roman - donc d'une fiction - nous concerne aussi nous, lecteurs, utilisateurs du langage. Le langage ne peut à lui seul appréhender le monde. Et l'individu, libéré d'un système langagier défaillant, peut alors appréhender sa propre liberté.



Mais est-ce réellement si simple ? Doit-on prendre au sérieux une réflexion qui n'a rien de sérieux ? Et, le cas échéant, de quelle liberté parle-t-on ? L'individu peut-il être absolument libre, ou est-il soumis à des forces, des pressions, une obligation d'utilité ? Revenons au personnage central, Lenore, autour de qui tout gravite, tel le centre d'un système. Lenore, qui rappelons-le, en tant qu'héritière, travaille comme standardiste, semble très attachée à sa liberté individuelle. Son attitude démontre son envie de ne se soumettre à aucune volonté extérieure. Tout en elle interroge la place de l'individu dans un groupe social : la famille, l'entreprise, la société. Dans une société américaine individualiste, l'exemple de Lenore démontre l'impossibilité pour l'individu d'être totalement libre. Malgré sa volonté, Lenore est tiraillée par les volontés des uns et des autres : son père qui veut qu'elle retrouve l'arrière-grand-mère, Rick qui veut la posséder par les mots, Andy Lang qui aimerait lui faire l'amour, Norman Bombardini qui lui réserve une place spéciale dans son monde ingéré. La scène finale est particulièrement symbolique, où, dans un chaos sensoriel, Lenore est écartelée par les sollicitations de tout le monde, où chacun réclame son avis, lui donne des conseils, la veut pour lui-même. Chacun attend de Lenore une fonction, une utilité, qui la définirait en tant qu'individu, tel un balai dont on attend qu'il balaie, et dont on prendra alors la partie utile, c'est-à-dire la brosse. La fonction de l'être, c'est-à-dire son utilité, est donc définie par autrui, selon son intérêt, et Lenore, malgré ses revendications de liberté individuelle, qui est prête aux sacrifices financiers que cela implique, à l'absence d'amour physique que cela implique, se fait, comme tout un chacun, le maillon d'une chaîne plus grande.



Quel est donc le sens de tout cela ? Dans une société individualiste où l'individu, en réalité, n'existe pas pour lui-même, où est le sens, et y a-t-il seulement Salut ? Celui-ci est-il en ce Dieu auquel l'Amérique croit, sans connaître toutefois son visage ? Rien n'est moins sûr. Car Dieu, comme tous les autres, s'est fondu dans le paysage. Paysage commercial du Grand Désert de l'Ohio - GOD pour l'acronyme anglais - qui n'a rien de la Thébaïde biblique, mais tout du mall du Midwest, humaine création et illusion. Paysage médiatique, où Dieu est vendu en formules d'abonnement et dont la Parole est débitée par une perruche mi divine, mi gouailleuse. A moins qu'il ne faille penser qu'il n'y aucun sens à cela, comme il y a un roman sans les codes du roman, comme le dessin de Lenore Beadsman de l'homme qui monte - ou qui descend - la dune de sable, comme le langage qui aspire à être tout - comme Norman Bombardini - et qui n'est rien.
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L'infinie comédie

Sans doute un des livres les plus important de la fin du XX siècle. Le titre est mauvais. Il renvoie implicitement à Dante ce qui risque d'induire une méprise chez le lecteur. Infinite jest ce serai plutôt l'infinie plaisanterie. Il y a de l'ironie de l'autodérision épuisant à lire souvent agaçant. On saute des pages. Pourtant l'oeuvre est la. Rien moins que le premier roman post-postmoderne. Un projet de reconstruction de quête de sens mené avec désespoir. L'issue ne sera que tragique elle ne peut être que cela.
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L'infinie comédie

Tout d’abord, rendons hommage au glorieux Traducteur qui, après 15 ans de labeur incessant (il faut bien ça), nous livre mille quatre cent pages de défi littéraire américain dans la langue de Molière.

T ! Revoilà le prince de lumière ! Gloire à T, gloire à T ! Ô T c’est ici…

D’une lecture à la fois frustrante et envoûtante de bout en bout, L’Infinie Comédie est un pavé érigé en monument, ou décrié suivant ses lecteurs. La question récurrente portant si j’ai saisi sur sa portée universelle ou simplement prétentieuse.

Sans rien passer de la difficulté de lecture d’un roman dont 70% (le comptage est de moi) du contenu ne concerne pas une trame principale d’ailleurs inavouée, il est impressionnant de s’apercevoir qu’il représente dans son ensemble le rendu juste d’une manière de voir le monde au travers des faiblesses des hommes. C’est un récit qui forme la mise en abîme d’une humanité qui n’en finit pas de se chercher elle-même. Récit, aussi, qui se fait prophète sur de nombreux points en se fondant uniquement sur ces faiblesses, à partir de quelques personnages. Sans être expert en la matière, j’ai l’impression qu’il y a quelque chose de Proust dans cette démarche : la recherche de l’universel à partir des faiblesses de l’individualité. Aussi dans la manière de se cacher derrière un humour à froid, tout en décalage (et aussi, ici, derrière un zeste d’ultra-violence, ce qui laisse au moins une différence notable entre les deux).

Inversement, il y a aussi bien des choses à dire sur un livre qui, malgré sa longueur, me semble trop vite fini, ceci même en concédant qu’il ne peut fondamentalement pas se finir tout à fait (je laisse ici le sujet scabreux de la fin d’un livre). De même une absence à peu près totale de trame déclarée rend l’ensemble très indigeste. L’un et l’autre point plaidant plutôt pour la prétention de l’ensemble.

Après cet exercice de thèse et d’antithèse, il ne reste donc plus qu’à conclure, et pour cela je dirais en résumé que – ah oui quand même, que bon chef d’œuvre quand même non ? Mais aussi que ben je suis pas fâché de l’avoir fini. Y’a quoi sur Netflix au fait en ce moment ?

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