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Julie Étienne (Traducteur)Jean-René Étienne (Traducteur)
EAN : 9782846260886
439 pages
Au Diable Vauvert (22/08/2005)
3.87/5   52 notes
Résumé :
Vingt-trois nouvelles, un garçon paralysé par la peur en haut d'un plongeoir, in poète satisfait se prélassant au bord de sa piscine, un jeune couple face à ses doutes sur sa vie sexuelle, une femme déprimée cherchant le réconfort... Entre dans l'univers incomparable de David Foster Wallace !
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Critiques, Analyses et Avis (8) Voir plus Ajouter une critique
Cet ensemble de textes courts est décoiffant et a l’énorme avantage de nous offrir 23 David Foster Wallace pour le prix d’un. Certains textes sont proches de l’expérimental avec une inventivité lexicale débordante et sont parfois difficiles à suivre ; d’autres sont moyennement réussis mais on trouve dans le lot d’excellentes nouvelles, étranges mais excellentes.

Il est impossible de résumer un tel foisonnement en quelques lignes. De façon générale, on peut dire que DFW a une prédilection pour des personnages bizarres, mal dans leur peau, dont le cas relève de la psychiatrie ou peu s’en faut (comme dans le texte sur une femme dépressive). Il dépeint un monde de solitudes, où la communication et la compréhension entre les gens est une épreuve permanente et source de tension, un monde où les émotions submergent les individus et les empêchent de trouver la sérénité. Certains textes font penser au Houellebecq de l’extension du domaine de la lutte. Ses personnages noyés dans leur mal-être s’expriment dans une forme de logorrhée obsessionnelle, parfois délirante tout en restant tout à fait cohérente néanmoins, dans laquelle ils interrogent la représentation qu’ils ont d’eux-mêmes, des autres et le regard supposé des autres sur eux. DFW s’interroge sur les sentiments humains dans les circonstances étranges ou extrêmes (comme le viol ou le face à face avec un père exhibitionniste). Il décrit des mondes intérieurs.

DFW a le sens de la formule comme celle-ci pour parler d’un toxicomane : « les liens diplomatiques entre R.Ecko et la réalité étaient pour ainsi dire rompus ». Ses récits sont souvent drôles. Ils sont écrits avec une précision toute chirurgicale. La richesse de votre vocabulaire s’en trouvera améliorée après avoir croisé « l’effulgence pulsatile de la cathode », « les blandices parthénopiennes » , ou encore « l’éparchie recombinante » et les « brûleuses de lingerie cataméniales à poil ras ». Bravo aux traducteurs.
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Recueil de nouvelles, très variables dans leur longueur, leur style ou leur intérêt, cependant marquées par une forte originalité dans les thèmes et dans leur composition, associant à la fois humour, causticité et propension à créer de l'inquiétude, une sorte de malaise subversif.
Cet ouvrage est traversé par diverses tendances : cynisme mêlé de délicatesse, de méticulosité, fort intérêt pour la relation humaine mâtiné d'une subtilité parfois trompeuse et d'une sérieuse affinité pour l'auto-reproche et la justification. Tout cela peut paraître fallacieux, mais aussi envoûter le lecteur, le séduire quand il s'accroche à des ratiocinations spécieuses, que l'auteur soumet à un interlocuteur silencieux dont on peut parfois deviner les réactions ou les questions, à partir des “blancs“ qu'il exprime ou des réponses à ces “blancs“.
Il se dégage de nombre de ces nouvelles un intérêt certain pour des histoires relevant de la psychiatrie ou de la sexologie. Relations conjugales, difficultés dans le couple, ruptures, drague, sexe, violence, fantasmes divers sont des thèmes souvent abordés dans un langage parlé ou avec des mots crus. Ainsi ce dialogue entre deux hommes qui voudraient refaire les genres, ne débouche finalement que sur des clichés, des poncifs, des idées reçues sur la « soi-disante émancipation féminine, un ramassis de conneries », ce qui ne les empêche pas de citer Foucault et Lacan, avant de reconnaître que « comme mères, elles sont sensass. »
Autre frustré, cet homme, exemple parmi d'autres de phallocratie, miné par la culpabilisation, qui ne peut que tomber amoureux fou des multiples femmes qu'il rencontre, jusqu'à les rendre fortement investies dans une relation qu'elles pensent sérieuse, et alors, à ce stade, patatras, « impossible de conclure… quelque chose s'emballe en moi, je panique et je fais machine arrière. » le sachant, ce Don Juan est terrorisé à l'idée de récidiver et de faire souffrir la femme qu'il tient dans ses bras et “qu'il aime“. Cet aveu, fait “le plus sincèrement du monde“, peut avoir en fait pour effet de faire fuir - à bon compte - sa “dulcinée“.
Cet autre procède toujours de la même façon : il fait la conquête d'une femme qu'il invite à trois reprises chez lui, et quand survient la troisième fois, que la confiance règne, il lui propose de l'attacher, nue, sur son lit avec des liens en satin, cela dans le plus grand respect de sa personne et de sa réponse qui peut être négative, mais l'est rarement en fait. Résultat de conditionnements familiaux dans l'enfance, ce comportement lui procure une excitation majeure qui se clôt dans des larmes.
Celui-là exprime à son interlocuteur muet une vision tout à fait existentielle du viol, qu'il condamne vivement, mais qui constitue à ses yeux une expérience qui permet d'en savoir plus sur soi, d'élargir sa vision des possibles, de donner du sens à des concepts comme celui de situation dramatique (le viol) ou de déshumanisation de l'être (comme l'enfermement en camp de concentration). Prétextes ?
Autre thème, le sujet dépressif, assez longue nouvelle, raconte l'interminable plainte d'une femme, qui a dû avoir une dure enfance de pensionnat en pensionnat, ses parents étant divorcés et en guerre pour la prise en charge du coût de soins orthodontiques. Elle manifeste une terrible dépendance vis à vis d'une part de sa psychothérapeute qui la soutient tant bien que mal, mais qui l'abandonne en passant de vie à trépas (suicide, pense le “sujet dépressif“ - qui n'a pas d'autre nom), d'autre part des amies vivant à l'autre bout du pays, qu'elle a connues dans les internats et qu'elle sollicite régulièrement par téléphone à toute heure pour placer ses jérémiades et qui constituent ce qu'elle appelle son “Échafaudage émotionnel“. L'auteur met là un soin particulier et méticuleux à relater le cheminement de cette thérapie, introduisant distance et ironie au sein d'une forte dose d'empathie et de perspicacité psychologique.
On ne peut passer sous silence une des dernières nouvelles, modèle de haine, de mépris, de dégoût d'un vieil homme mourant à l'égard de son fils, en particulier quand il était nourrisson, avec toutes ses sécrétions physiologiques, son asthme, son impétigo, ses attitudes égocentriques de “grand malade“. Quelle force dans l'acrimonie et la détestation !
Histoires expérimentales, surréalistes, fantastiques, ces nouvelles constituent un ensemble inégal, hétérogène, et ne se lisent pas toutes avec facilité ou plaisir, certaines même avec agacement, mais elles se révèlent symptomatiques d'un monde désorienté qui a perdu ses repères, d'une angoisse existentielle masquée par des attitudes péremptoires, d'une violence plus ou moins patente, et en même temps de la pensée quelque peu chaotique, mais sincère, morale, exigeante d'un auteur hors-normes.
Lien : https://lireecrireediter.ove..
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Ces vingt-trois nouvelles écrites à l'acide zygomatique vous ouvrent un univers où se cotoient les démons que chacun de nous héberge au sein de son entrelac neuronal.

Des dépressives sollicitant leur échaffaudage émotionnel, des thérapeutes suicidaires, un jeune garçon pris de stupeur sur le plongeoir d'une piscine, des psychotiques, un couple bancal, des relations filiales pathologiques, des secrets d'alcôves. Personnages ridcules, méchants, torturés.

Slalomez entre les décors froids et métalliques et les tentures de velours pourpres, entre les monologues téléphoniques et les dialogues méditatifs

(...)
http://lelabo.blogspot.com/2005/10/brefs-entretiens-avec-des-hommes.html
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je le dis tout de suite je préfère Foster Wallace avec des romans fleuves que lorsqu'il s'exerce à l'art délicat de la nouvelle. Ici nous avons à faire à une vingtaine de nouvelles et la fulgurance habituelle n'y est pas, la patience de décrypter chaque situation, chaque psychologie ne peut être présente.
Il demeure une causticité certaine sur nombre de sujets notamment lorsqu'il y a ce regard si désabusé sur la société que nous connaissons bien lorsqu'on lit Foster Wallace.
on sent que l'auteur veut expérimenter, et peut être ai je trop eu l'impression d'être un cobaye ce qui me laissa en dehors de chaque récit. Il y a pourtant du rythme et la prose est toujours si talentueuse. Je suis diablement exigeant avec cet auteur qui m'a habitué au meilleur.
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Livre très fort, des nouvelles étranges, pleine d'intelligence, un peu comme un Italo Calvino en forme, David Foster Wallace tape tout sauf sauvagement sur des thèmes super lourds, le viol, la haine d'un parent pour son enfant...
En quelques pages il dépeint et crée des univers à la fois réels et complètement décalés. L'écriture est en recherche permanente à travers les mains de cet auteur.
Le mec s'est suicidé dans la quarantaine, quoi de moins étonnant. Trop sensible, monde froid et violent.
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Citations et extraits (12) Voir plus Ajouter une citation
Une Histoire Ultra-Condensée de l'Ère Postindustrielle

Quelqu'un a fait les présentations, il a fait un trait d'esprit, dans l'espoir qu'on l'aimerait. Elle a ri extrêmement fort, dans l'espoir qu'on l'aimerait. Chacun est rentré seul chez soi, regardant la route droit devant, le visage contracté exactement de la même manière.
L'homme qui les avait présentés ne les aimait guère ni l'un ni l'autre, même s'il faisait comme si, soucieux qu'il était de ménager des relations cordiales en toutes circonstances. Car enfin, sait-on jamais sait-on jamais sait-on jamais.
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Le sujet dépressif partagea, tour à tour avec chacun des membres disponibles de son Échafaudage émotionnel, une portion du torrent de souvenirs affectifs sensoriels de la séance au cours de laquelle elle s'était pour la première fois ouverte à feu la thérapeute de l'incident où les hommes hilares avaient comparé l'étudiante à des toilettes, et avait confié qu'elle n'avait jamais été capable d'oublier ledit incident, et que, bien que fussent ténus, quasi inexistants, sa connexion ou son lien personnel avec la jeune femme ainsi comparée à des sanitaires, bien qu'elle ne l'eût pour ainsi dire pas connue, elle avait été, à ce match interuniversitaire de hockey sur gazon, remplie d'horreur et de désespoir compassionnel à l'idée pathétique que l'étudiante pût être la victime d'une telle dérision intersexe, d'un tel mépris hilare sans qu'elle (c.-à-d. l'étudiante dont le sujet dépressif admettait une fois encore qu'elle la connaissait à peine) le sût jamais.
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The depressed person was in terrible and unceasing pain, and the impossibility of sharing or articulating this pain was itself a component of the pain and a contributing factor in its essential horror.
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The psychological need to believe that others take you as seriously as you take yourself. There is nothing particularly wrong with it, as psychological needs go, but yet of course we should always remember that a deep need for anything from other people makes us easy pickings.
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Art
Ses paupières closes un écran de peau, les tableaux rêvés sillonnent ses ténèbres colorées. Cette nuit, un intervalle que les palpitations du temps laissent intact, Day s'en va vers ce qui semble le passé. Rapetisse, perd ses rides, son ventre et ses légères cicatrices d'acné. Echalas à l'ossature d'oiseau ; coupe au bol et oreilles en anse de tasse ; la peau aspire les poils, la face rengaine le nez ; son pantalon lui sert de e langes, il s'y recroqueville, rose, muet et plus petit encore jusqu'à se sentir scindé en quelque chose qui frétille et quelque chose qui tournoire. Le néant s'étire et épouse tout le reste. Un point noir pivote. Le point s'ouvre, déchiqueté. Son âme vogue vers une couleur.
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Videos de David Foster Wallace (43) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de David Foster Wallace
Relecture de l'oeuvre labyrinthique de David Foster Wallace, dont le regard aigu sur la société américaine nous éclaire plus que jamais. Avec Jakuta Alikavazovic, écrivaine et traductrice des "Considérations sur le homard", et Pierre Ducrozet, écrivain et auteur de la préface de "L'Oubli".
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