Citations de Didier Daeninckx (757)
Je meurs avec la conscience tranquille, et avec toute la conviction que demain tu auras une vie, un avenir plus heureux que ta mère.
Par ces temps incertains, Emile Galande tient les idées morbides à distance en se plongeant dans les livres, en rédigeant des comptes rendus à son seul usage. il s'est réveillé tôt en ce 28 août 1944 pour achever la lecture de Zocha que signe Maurice Avéran chez Albin Michel. Il profite de la fraîcheur du matin pour coucher ses idées sur le papier comme si un rédacteur en chef n'attendait plus que son texte pour mettre les rotatives en mouvement : "Voici le titre d'un excellent roman et le nom d'un écrivain de bien grand mérite. C'est l'histoire, sous le ciel enflammé de Provence, d'un flamboyant amour tragiquement interrompu..." Il grimpe sur le tabouret pour ouvrir la minuscule fenêtre et faire circuler un peu d'air frais dans sa cellule.
Mars 1977. J'habite Strasbourg où je finis tout juste le stage probatoire d'inspecteur de police. La réussite vient couronner mes efforts la semaine qui précède les élections municipales...
Sloga avait lu L'Indépendant de Perpignan en avalant un café sans génie à la terrasse des Trois Grâces, juste avant de prendre la route. Meurtre d'enfant, purification ethnique, divorce princier, morne saison touristique, relèvement de la tévéa...L'ordure ordinaire. Seule touche d'humanité, l'éphéméride maquetté près de la météo lui rappela l'assassinat de Jean Jaurès, quatre-vingt-un ans jour pour jour, le 31 juillet 1914. Il ignorait que cette disparition avait été compensée, quelques heures plus tard, par la naissance de Louis de Funès. Une conscience bradéé pour son poids de grimaces : le siècle était sur de bons rails.
La pluie se mit à tomber vers quatre heures. Saïd Milache s'approcha du bac d'essence afin de faire disparaître l'encre bleue qui maculait ses mains. Le receveur, un jeune rouquin qui avait déjà son ordre de mobilisation en poche, le remplaçait à la marge de l'Heidelberg.
Raymond, le conducteur de la machine, s'était contenté de ralentir la vitesse d'impression et revenait maintenant à la cadence initiale. Les affiches s'empilaient régulièrement sur la palette, rythmées par le bruit sec que faisaient les pinces en s'ouvrant. De temps à autre, Raymond saisissait une feuille, la pliait, vérifiait le repérage puis il glissait son pouce sur les aplats pour s'assurer de la qualité de l'encrage.
Ce n'est pas ça...Danièle Gilbert c'était la femme de Sabbagh...
«Pendant trois jours, on a cru te perdre...», c'est ce que me disait me mère chaque fois qu'une catastrophe ravivait le souvenir des grands périls.
En ce mois d'octobre 1957, avec mes deux soeurs nous venions de nous installer au rez-de-chaussée d'un bâtiment de la cité Robespierre, à Aubervilliers, et une forte fièvre m'avait forcé à rester à la maison. Pendant une semaine, j'avais gardé le lit face à une fenêtre baignée par le soleil d'automne jusqu'à ce que les murs se mettent à se tordre, les meubles à s'étirer, le plafond à fondre comme une guimauve. Dans le même temps, le poids des draps m'était devenu insupportable, j'avais la sensation de grossir démesurément, de peser des tonnes, d'occuper tout l'espace disponible. Le docteur Saiz, dépêché d'urgence, avait fourni quelques médicaments pour apaiser la fièvre intense qui provoquait le délire. Il avait conseillé de me découvrir, de placer des linges frais sur mon front. C'est tout ce qu'il pouvait faire, et contre toute attente le miracle avait eu lieu.
L'entrefilet figurait bien sur la livraison du 9 avril 1990, et l'article d'un quart de page qui le jouxtait répondait à l'une de mes interrogations. Le titre « Fret sensible à Chateauroux-Déols », surmontait la photo d'un Transal militaire s'envolant de la piste de l'aéroport de la capitale régionale. « Jusqu'à ces dernières années, le développement de l'ancien aéroport américain de la base de l'OTAN de Déols était principalement généré par les stages de formation qu'organisaient les grandes compagnies européennes et africaines en direction de leurs pilotes et du personnel naviguant. Depuis l'allongement de la piste, qui permet maintenant aux gros porteurs de décoller à pleine charge, et l'installation d'un système de balisage ILS II autorisant les mouvements aussi bien de nuit que par mauvais temps, Déols est revenu un équipement incontournable pour le fret sensible. (...) »
Un aliéné est aussi un homme que la société n'a pas voulu entendre et qu'elle a voulu empêcher d'émettre d'nsupportables vérités.
Sur mes cahiers d’écolier
Sur mon pupitre et les arbres
Sur le sable sur la neige
J’écris ton nom
Sur toutes les pages lues
Sur toutes les pages blanches
Pierre sang papier ou cendre
J’écris ton nom
Sur les images dorées
Sur les armes des guerriers
Sur la couronne des rois
J’écris ton nom
Sur la jungle et le désert
Sur les nids sur les genêts
Sur l’écho de mon enfance
J’écris ton nom
Sur les merveilles des nuits
Sur le pain blanc des journées
Sur les saisons fiancées
J’écris ton nom
Sur tous mes chiffons d’azur
Sur l’étang soleil moisi
Sur le lac lune vivante
J’écris ton nom
Sur les champs sur l’horizon
Sur les ailes des oiseaux
Et sur le moulin des ombres
J’écris ton nom
Sur chaque bouffée d’aurore
Sur la mer sur les bateaux
Sur la montagne démente
J’écris ton nom
Sur la mousse des nuages
Sur les sueurs de l’orage
Sur la pluie épaisse et fade
J’écris ton nom
Sur les formes scintillantes
Sur les cloches des couleurs
Sur la vérité physique
J’écris ton nom
Sur les sentiers éveillés
Sur les routes déployées
Sur les places qui débordent
J’écris ton nom
Sur la lampe qui s’allume
Sur la lampe qui s’éteint
Sur mes maisons réunies
J’écris ton nom
Sur le fruit coupé en deux
Du miroir et de ma chambre
Sur mon lit coquille vide
J’écris ton nom
Sur mon chien gourmand et tendre
Sur ses oreilles dressées
Sur sa patte maladroite
J’écris ton nom
Sur le tremplin de ma porte
Sur les objets familiers
Sur le flot du feu béni
J’écris ton nom
Sur toute chair accordée
Sur le front de mes amis
Sur chaque main qui se tend
J’écris ton nom
Sur la vitre des surprises
Sur les lèvres attentives
Bien au-dessus du silence
J’écris ton nom
Sur mes refuges détruits
Sur mes phares écroulés
Sur les murs de mon ennui
J’écris ton nom
Sur l’absence sans désir
Sur la solitude nue
Sur les marches de la mort
J’écris ton nom
Sur la santé revenue
Sur le risque disparu
Sur l’espoir sans souvenir
J’écris ton nom
Et par le pouvoir d’un mot
Je recommence ma vie
Je suis né pour te connaître
Pour te nommer
Liberté.
Paul Eluard
"J'ai tant rêvé de toi, tant marché, parlé, couché avec ton fantôme qu'il ne
me reste plus peut-être, et pourtant, qu'à être fantôme parmi les
fantômes et plus ombre cent fois que l'ombre qui se promène et se
promènera allègrement sur le cadran solaire de ta vie."
Robert Desnos,
"A la mystérieuse", in Corps et Biens, 1930
"Un aliéné est aussi un homme que la Société n'a pas voulu entendre et qu'elle a voulu empêcher d'émettre d'insupportables vérités. " Antonin Artaud
On doit au grand philosophe Vladimir Jankélévitch cette formule d'une limpidité exceptionnelle, qui pointe la singularité des persécutions antisémites " Entre toutes les impostures fascistes, l'antisémitisme n'est pas celle qui atteint le plus grand nombre de victimes, mais elle est la plus monstrueuse. Pour la première fois peut-être des hommes sont traqués officiellement non pas pour ce qu'ils font, mais pour ce qu'ils sont ; ils expient leur "être" et non leur "avoir", non pas des actes, une opinion politique ou une profession de foi comme les cathares, les francs-maçons et les nihilistes, mais la fatalité d'une naissance. Cela donne tout son sens au mythe immémorial du peuple maudit, du peuple émissaire, condamné à errer parmi les nations et à endosser leurs pêchés. P87
Tu vas nous manquer. Il n'y en a pas beaucoup ici qui récitent des poèmes pendant le casse croûte.
Tout en haut de la pyramide, la femme du secrétaire général, Jeannette Thorez-Vermersch, condamnait la légalisation de la pilule et de l’avortement, au nom d’une morale ouvrière aussi coercitive que la morale bourgeoise, tandis que le futur candidat à la présidence de la République, Jacques Duclos, à l’abri de sa rondeur, martelait depuis la tribune de la Mutualité que l’homosexualité était une maladie.
(page 114)
L’impression de ne pas se rendre au boulot, mais d’être en balade, de faire partie du monde des touristes. L’état de grâce suscité par la nouveauté du service était encore perceptible. On se souriait entre pédaleurs, on se faisait des signes de la main, on échangeait quelques mots aux feux rouges, avec le sentiment diffus d’appartenir à une confrérie.
(page 104)
Chacun de ses mots exprimait ma pensée, et c'était comme s'il venait les prendre sur mes lèvres.
P96
Le respect, chez nous en pays kanak, il ne que chez nous elles vient pas à la naissance comme la couleur des naire même pour yeux. Il se mérite tout au long de la vie.
P96
De quel droit mettez-vous des oiseaux dans des cages ?
De quel droit ôtez vous ces chanteurs aux blocages, aux sources, à l’aurore, à la nuée, aux vents ?
De quel droit voulez-vous la vue à ces vivants
Victor Hugo
Pour la petite histoire, je voudrais rappeler aux incrédules que les événements de mai 68 ont débuté à la faculté de Nanterre, quand on a voulu interdire aux étudiants l’accès des résidences universitaires réservées aux étudiantes.
(page 89)