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Critiques de Fabienne Verdier (106)
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Passagère du silence : Dix ans d'initiation e..

Ce livre est un témoignage exceptionnel, qui a les apparences de la vérité la plus authentique. A 22 ans, suivant son envie irrésistible de découvrit l’art et la culture chinoises, Fabienne Verdier a renoncé à la formation qu’elle avait commencée à Toulouse. Elle est partie en Chine et est devenue la seule étudiante étrangère à l’Institut des Beaux-Arts de Chongqing (Sichuan). Sa plongée dans la Chine profonde est bien plus qu’exotique: la jeune Française, d’abord isolée, découvre un monde absolument opposé au nôtre, où tout individu est surveillé et embrigadé, où la promiscuité est omniprésente. En 1983 la Révolution Culturelle était finie, certes, mais elle laissait exsangue toute la nation chinoise. Comment trouver sa place, parmi ces étudiants soumis et misérables et en face d’une bureaucratie tatillonne ? Fabienne Verdier a un caractère très fort: elle résiste aux contraintes et au découragement, même après des incidents graves. Elle effectue avec sérieux le cursus chinois normal. Mais c’est surtout quelques maîtres - rescapés de la rage de destruction systématique semée par les Gardes Rouges - qui vont lui faire découvrir peu à peu l’esprit de la peinture chinoise. En outre, elle a l’occasion de voyager au Tibet, de rencontrer les minorités ethniques Yi et Miao, de faire des pèlerinages à des temples. Des expériences extraordinaires, à l’époque ! Pendant ce temps, Fabienne ne cesse d’écouter l’enseignement de Maître Huang… Elle obtient son diplôme en 1989, juste au moment des événements tragiques de Tien Anmen, et doit revenir en France. Plus tard, elle accepte un poste d’attachée à l’ambassade de France à Pékin, mais comprend vite que ce n’est pas sa véritable vocation, qui est de se réaliser en tant qu’artiste.

Ce livre est passionnant. Il permet de suivre l’itinéraire de la narratrice, de savoir par où la Chine est passée et d’approcher la culture chinoise, à travers la peinture et la calligraphie notamment. Je ne connaissais pas Fabienne Verdier (qui est pourtant devenue une artiste reconnue en France). Mais je constate que beaucoup de lecteurs ont signalé sur Babelio leur lecture de ce livre. Je le recommande vivement.

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Fabienne Verdier Écho: Carnets

Premier volume d’une série consacrée aux célèbre carnets d’atelier de l’artiste Fabienne Verdier. Cette édition établie par Alexandre Vanautgaerden, qui a conçu plusieurs expositions et publié trois livres avec l’artiste, procède comme un compte à rebours, en débutant par les quatre plus récents carnets parmi ceux qui accompagnent chacun des grands projets de Fabienne Verdier depuis 1998. Un prélude explique la manière dont l’artiste travaille, peignant le matin traversée par l’énergie particulière du début de journée, composant ses carnets l’après-midi comme une méditation analogique où s’hybrident idées et images. Viennent alors les carnets intitulés « Chant des étoiles » (2022), « Atelier nomade » (2019), « Ainsi la nuit » (2018) et « Vide / Vibration » (2017).



Initialement agencées dans des carnets de croquis Daler-Rowney Ivory, ces compositions éclectiques illustrant le cheminement de pensée créatrice de l’artiste ont ensuite été construits comme des planches grand format. Chacune de ces planches ou doubles pages réunit des citations, des photographies et collages, des croquis, des observations ou réflexions personnelles notées sur papier calque d’une écriture noire et serrée. On y croise Grünewald et Nietzche, Cézanne et Goethe, Hugo et Rimbaud, de Vinci et Malraux, Shitao et Novalis, Keats et Baudelaire, tant d’autres, des peintres, philosophes, écrivains, astrophysiciens, naturalistes… L’artiste puise dans la poésie et les essais, les textes mythologiques ou cosmogoniques, elle se nourrit des arts et des sciences, abreuve son inspiration à toutes les sources imaginables, dialogue avec son esprit au-delà du langage et des symboles, à la recherche de l’énergie pure en mouvement. Entre plongée sémiologique et kabbale fertile, ces carnets invitent le lecteur à pénétrer dans l’univers de l’artiste, à comprendre son processus créatif, la manière dont s’agencent les principes et les forces avant de prendre forme sur les toiles et dans les pigments.



A parcourir comme une promenade spirituelle, à feuilleter dans l’ordre ou le désordre comme une invitation à l’errance, à picorer pour le plaisir de la pensée ou simplement des yeux…
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Entretien avec Fabienne Verdier

Puiser aux sources de la créativité, capturer l’instant de grâce où l’énergie du geste jaillit du vide, saisir l’extase du trait d’encre qui prend vie sur le châssis et exprime un peu du sens de l’univers, sens décrypté par une conscience, un cœur, une sensibilité humaine à l’œuvre… Fasciné par le parcours artistique de Fabienne Verdier, admiratif de sa personnalité et de sa conception de la peinture, j’ai pris plaisir à lire la retranscription de cet entretien entre cette femme qui se définit elle-même comme une artiste martiale, et Charles Juliet, poète et écrivain français, auteur notamment de « L’année de l’éveil » et de « Lambeaux ».



Après une courte introduction visant à définir l’approche de l’écrivain face à l’artiste-peintre, vient l’entretien à proprement dit, composé de questions, le plus souvent courtes, et des réponses de Fabienne Verdier. Mais plutôt que des réponses, ce sont des réactions, des observations, parfois même des digressions que l’artiste propose. Car Fabienne s’exprime rarement par affirmations ou négations. Elle préfère l’ellipse zen, l’association d’idées et d’images, le cheminement créatif à travers les mots tout comme par le truchement du pinceau gigantesque suspendu au plafond de son atelier monumental, véritable fosse à création. Par ce dialogue, l’artiste nous amène à comprendre l’état d’esprit et l’émoi interne qui précèdent l’acte de peindre. Elle nous familiarise avec la discipline du corps et de l’esprit qu’elle a fait sienne depuis plusieurs décennies, apprise des derniers grands maîtres calligraphes et peintres ayant réchappé à la Révolution culturelle chinoise.



Le texte est poétique, philosophique même, ponctué de références qui viennent nourrir la réflexion et les images intérieures de l’artiste. Aux questions plus pratiques, Fabienne Verdier ne verse pas dans le pragmatique, ne révèle que peu d’éléments relevant de la technique picturale. Elle préfère disserter sur le flux de pensée, le flot de l’encre, la flamme mouvante du pinceau nomade. Et saisir l’instant, toujours, afin de le contempler dans sa plénitude.
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Une séance de peinture entre cerveau, art et ..

Étant moi-même chercheur en neurosciences du comportement, artiste et grand amateur de l’art syncrétique de Fabienne Verdier, je ne pouvais pas passer à côté de cet ouvrage singulier. Tout à la fois expérimentation artistique, méditation scientifique, dialogue transdisciplinaire, découverte de l’autre et du mouvement créateur, cet ouvrage passionnant mais exigeant ouvre une fenêtre compréhensive sur le processus créatif de Fabienne Verdier. Artiste-peintre française, elle a été formée en Chine pendant près de dix ans par les derniers grands maîtres de peinture et de calligraphie ayant survécu à la Révolution culturelle. Alain Berthoz est un neurophysiologiste renommé qui s’est spécialisé dans le contrôle multisensoriel du regard, de l’équilibre, de la locomotion et de la mémoire spatiale. Daniel Bennequin est mathématicien et l’un des fondateurs de la topologie de contact. Il a aussi travaillé sur la planification des mouvements. Quant à Valérie Hayaert, elle est historienne et chercheuse.



Au cœur de l’atelier de Fabienne Verdier, véritable fosse à création où les châssis en bois posés horizontalement deviennent des « tatamis de combat » propices à la déambulation et à l’entrechoquement des forces créatives, Alain Berthoz va devoir enfiler chaussons et combinaison protectrice pour s’emparer à bras-le-corps des monumentaux pinceaux suspendus et douilles à encre imaginés par l’artiste avec son époux. Ensemble, ils vont arpenter les châssis avec leurs corps-pinceaux-pensants, expérimenter les forces gravitationnelles, linéaires et angulaires, distiller leur culture et leur mémoire, pour habiller de mots et de pensées l’élan créatif. C’est passionnant car les idées se dispersent comme l’encre, dans l’ordre et le désordre, laissant surgir l’imprévu, le fascinant, tentant de l’expliquer sans jamais trahir le mystère inhérent à la création.



Une lecture peut-être un peu ardue pour les profanes, mais très dynamique et spontanée, qui s’efforce de rendre compréhensible les domaines de spécialité de chacune et chacun.
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Passagère du silence : Dix ans d'initiation e..

Un surprenant récit autobiographique de ses dix ans passés en Chine comme étudiante boursière à l' école des Beaux Arts de Sichuan, puis comme attachée culturelle à Pékin dans les années 80.

Quelle résolution il a fallu à cette jeune femme pour partir ainsi dans cette Chine complètement fermée afin d' y rencontrer les derniers maîtres de la calligraphie dans un monde encore marqué par les horreurs de la révolution culturelle...

On y découvre sa difficile intégration dans un monde aux conditions de vie extrêmement difficiles, cernée par les contraintes d'un régime totalitaire qui surveille et interdit. La connaissance de tradition ancienne de l'art lui est tout d'abord refusée, mais elle réussit à force de persévérance à suivre l'enseignement exigeant du maître Yuan... C 'est alors un long et humble apprentissage, avec la découverte du Tibet, des monts du Sichuan, du peuple Miao et des Yi...Puis le choc des événements de Tienanmen...

On regarde différemment l'oeuvre de Fabienne Verdier après cette lecture.
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Passagère du silence : Dix ans d'initiation e..

Lu car, dans le cadre d'une formation de 6 mois en Qi Gong qui va commencer le 10 septembre, il nous a été demandé de le lire.

Et pour qui s'intéresse à la Chine, c'est absolument fascinant.

L'auteure, l'est, fascinante, incontestablement. Elle a un courage et/ou une inconscience absolument confondants, et qui forcent l'admiration.

Tout lâcher autour de ses 20 ans et partir sans connaître la langue dans un pays encore "fermé" au début des années 80, en suivant l'appel de son âme à apprendre la calligraphie, ça paraît surréaliste.

Alors oui ça n'a rien à voir avec le Qi Gong, à première vue.

Mais pourtant si.

Ce n'est pas tant le sujet du livre qui est important ici que "l'esprit" qui anime ce chemin initiatique auprès des vieux maîtres calligraphes, qui ont tant souffert de la révolution culturelle chinoise, et que Fabienne a fini par débusquer, à force d'opiniatreté, et d'abnégation.

En fait, il s'agit surtout, si on regarde bien, d'apprendre à "désapprendre" tout ce qu'on a apprit, pour laisser "l'Esprit", le "Qi", ou quel que soit le nom qu'on lui donne, couler à travers soi.

Et contrairement à ce qu'on pourrait croire, ce n'est pas facile du tout !

Et je suis très contente de m'être inscrite auprès de ce "maître" de Qi Gong, grâce à ce livre je sais qu'il a "l'esprit" que je recherche, loin d'une simple "mécanique physique" et près du "souffle de la Vie".



Pour ceux qui veulent mieux connaître ce pays mystérieux qu'est la Chine et ce qu'il s'y passait pendant la fin de ses années les plus sombres, ce bouquin est passionnant.

Et pour ceux qui veulent aller plus loin que cela, également...



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Passagère du silence : Dix ans d'initiation e..

"Son enfance, on la subit. Sa jeunesse, on la décide.

...Chacun croit que sa vie est unique, et pourtant..."

J'aime ce que je lis et le début est alléchant. Dés la première phrase, je me sens gagnée par la sagesse et la poésie émanant de ce petit livre. L'auteure y décrit ses rêves et son voyage en Chine afin de s'initier à la calligraphie asiatique.

Tout quitter pour suivre son cœur est un vrai défi pour ce bout de femme.

"La ville montagne" est un monde encore plus méconnue que Pékin. Pour une occidentale, tout paraît étrange et le choc des civilisations prend vraiment son sens.

Fabienne est abasourdie comme je l'ai été en découvrant Hanoi. J'ai également connu l'épisode des haut-parleurs avec les consignes et les chants patriotiques et traditionnels. On s'y habitue.

Le maître mot en Chine comme au Vietnam est la discerne tout et même en art. Les techniques de peinture et de calligraphie ancestrales chinoises sont dévoilées au cours du récit. L'apprentissage avec des vieux maîtres passe par des exercices pénibles qui demande de la patience et de la témérité. C'est un engagement de longue haleine, pour Mlle Fa cela prendra dix ans.

Cette lecture pousse le lecteur à réfléchir et à chercher à en savoir plus et j'ai dû recourir à mon téléphone pour comprendre et visualiser des concepts comme celui des sceaux en Chine. Je vous laisse découvrir l'utilité et l'importance de "l'œil de la peinture".

On assiste à la transformation d'un rêve en aventure puis en vocation et plus tard en métier.

Avant de lire Passagère du Silence et les instructions de maître Huang, je voyais les tableaux chinois comme des paysages beaux simplement mais là, je ressens les feuilles qui frémissent au vent et la nature qui s'agite sous le pinceau et les traits d'artistes qui ont voué leurs vies et ont tout sacrifié pour cet art.

Ce petit livre invite au voyage en soi et donne les moyens de dépasser ses peurs et de repousser ses limites et comme l'a si bien dit l'auteure artiste "Très vite, en sa compagnie, on s'embarquait..."

On est embarqué du début à la fin alors laissez-vous séduire par les mots : élans d'un cœur, relents de la nature et sagesse de l'esprit.

Un coup de cœur
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Passagère du silence : Dix ans d'initiation e..

J'avais trouvé "le rêve du papillon" il y a quelques années dans une librairie de livres d'occasion.

Mais Tchouang Tseu me semblait peu accessible à chaque tentative de lecture

Et puis je suis tombé par hasard (?) sur cette passagère du silence

Comment dire...

Récit de quête, d'initiation de ...

Non, rien

Enfin ... tout

Ineffable

Merci Fabienne Verdier
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Passagère du silence : Dix ans d'initiation e..

Voyager et vivre à l’étranger dans les années 90, tenter « l’inculturation », apprendre une nouvelle langue, rencontrer des êtres uniques et passionnants… Ça, j’ai eu la chance de pouvoir l’expérimenter dans ma vingtaine.

Étudier la calligraphie en Chine, appréhender le désastre de la révolution culturelle, subir la surveillance du parti, manquer de liberté, enchaîner les exercices artistiques monotones, perdre sa santé, vivre un amour impossible, goûter à la protection d’un maître, oser le dénuement et la solitude totale… Ça, je l’ai découvert en lisant ce magnifique témoignage de Fabienne Verdier, Passagère du silence.



Ce récit se lit comme un roman. On s’attache aux personnages; on a peur pour eux; on s’impatiente à leurs côtés; on rêve de félicitations et de reconnaissance; on admire la persévérance; on rit; on pleure; on vénère; on se tait.



Je reviens de ce voyage initiatique comblée de dépaysement, de rigueur au travail, d’art ancestral, de sagesse, d’humilité, de quête, d’intime… Mais il me reste tant à apprendre encore.



Je vais de ce pas me plonger dans les méandres d’internet pour lire la biographie de Fabienne Verdier suite à sa découverte sino-perso-artistico-humaine et de ses œuvres qui vont - je n’en doute pas - me bouleverser.
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Passagère du silence : Dix ans d'initiation e..

Voilà quelques années que je suis Fabienne Verdier. J'ai eu la chance de voir dernièrement son travail exposé au musée Unterlinden de Colmar, en résonance avec le retable d'Issenheim, magnifique. Passagère du silence nous permet de revenir à ses débuts, de comprendre un peu mieux son parcours, sa recherche. Ses années d'études sont des années d'initiation auprès des derniers grands maîtres. J'ai découvert à quel point la culture chinoise est vaste et profonde. Les grands artistes pratiquaient plusieurs techniques, mêlant la poésie, la calligraphie, la maîtrise des sceaux, la peinture de paysage. Quelle catastrophe d'avoir saboté ce patrimoine millénaire, quelle perte une fois de plus au nom d'idéologies plus que discutables. L'artiste doit apprendre à maîtriser son geste, et pour cela, il doit s'astreindre à une discipline quotidienne, pendant de longues années. Puis il doit s'oublier, il doit marier son âme au monde, aux plus petites choses. Fabienne Verdier est passé par là, avec quelle ténacité, car les étrangers ne sont pas les bienvenus dans cette Chine sous contrôle. J'ai juste perçu un certain manque d'humilité qui contredit ce qu'elle nous dit apprendre. Mais elle a en elle une telle énergie et un tel talent ! Et elle était si jeune ! Cela donne envie d'aller voir les œuvres dont elle parle, de creuser un peu cette immense culture dont on ne parle pas assez.
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Passagère du silence : Dix ans d'initiation e..

De retour de Colmar où j’ai vu sa magistrale exposition au musée Unterlinden (bien des toiles sont inspirées du retable d’Issenheim), j’ai lu la chronique chinoise de Fabienne Verdier. Dix ans en Chine, dont quatre au fond du Sichuan avec une très modeste bourse du gouvernement chinois, deux ans à Shanghai avec une bourse d’ethnologie financée par une fondation américaine, et enfin 4 ans à Pékin comme attachée à notre ambassade. L’essentiel — en termes de récit et de formation — se passe à Chongqing dans les années 80, peu de temps après le désastre humain, économique et civilisationnel de la Révolution Culturelle. Tout est pauvre, bouleversé, suspicieux, personne ne parle le mandarin mais seulement le dialecte local, les maîtres classiques ont été exécutés, exilés ou découragés. Il faut à « Mademoiselle Fa » un courage et une patience exceptionnels pour se faire accepter par les professeurs et les élèves qui ne pratiquent que le réalisme révolutionnaire, craignent de se compromettre (on l’empêche longtemps d’apprendre la langue locale), puis pour retrouver la trace d’un maître classique mais déconsidéré, et faire admettre au commissaire politique, à la hiérarchie universitaire et au Maître lui-même de lui apprendre la calligraphie et la peinture. Elle passe des mois à graver des sceaux, former des traits, écrire des poèmes et copier des paysages anciens, pour enfin peindre à quatre mains, alternant les touches avec celles du vieux Maître, et surtout obtenir sa confiance et son amitié.



On ne s’arrêtera pas à la forme du texte. « Mademoiselle Fa » exprime son admiration pour tout ce qui est spontané et traditionnel et son aversion pour le poids des contraintes administratives et politiques. Elle ouvre des guillemets pour faire dire au Maître de longues tirades pédagogiques opposant la Chine à l’Occident, comme si l’Occident était un et que son maître le connaissait. Certains y verront le besoin d’un père et celui de souffrir, mais peu importe, il s’agit d’une initiation autant que l’apprentissage d’une discipline technique, l’admiration est sincère, l’expérience longue et courageuse, et beaucoup de peintres ont souffert, de Buonarroti à Van Gogh. « Pour lui, la calligraphie était un organisme vivant. Il fallait débuter par un apprentissage intérieur, par l’attitude mentale et physique nécessaire pour donner vie au trait. J’ai mis quelques années à m’y entraîner ». « Il était difficile de le suivre ; il disait une chose et son contraire le lendemain. Son enseignement n’était jamais un discours, une démonstration, une théorie. Il procédait par touches, à la fois opposées et complémentaires pour que, peu à peu, je parvienne de moi-même à l’équilibre. J’avais l’impression qu’il m’apprenait à marcher sur une corde raide, comme un funambule ».



Et puis on y retrouve l’artiste contemporaine, son travail sur les fonds, son usage étonnant du pinceau (toujours vertical, qui peut dépasser 30 cm de diamètre) ; la recherche d’un geste rapide après une longue réflexion ; l’inspiration mystique ou tellurique ; et mieux encore, l’étonnement devant le travail achevé, pourtant longuement préparé : « Il m’a aussi appris à charger d’encre le pinceau car, dans son manteau de crin, se trouve une réserve intérieure qu’il faut apprendre à maîtriser à la verticale. Il s’agit de prendre conscience de la pesanteur et de la gravitation universelle, le pinceau devenant alors un véritable pendule, un lien entre l’univers et le centre de la terre ».
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Passagère du silence : Dix ans d'initiation e..

Et voici Passagère du Silence à nouveau sur ma table de chevet !

Retrouvée (en gros) d'année en année depuis 2004 malgré un capharnaüm certain, et adulée un peu plus encore à chaque fois, cette oeuvre humble me suit, et s'impose à moi de façon cyclique.

" Son enfance, on la subit ; sa jeunesse, on la décide. Je savais ce que je voulais : peindre". Et effectivement, ce que Fabienne veut, elle peut. Son séjour sans nom à l'école des Beaux-arts de Chongqing, la plus reculée de Chine, nous renvoie de façon impitoyable à nous-mêmes. L'épigraphe est subtile.

Le livre époustouflant.
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Passagère du silence : Dix ans d'initiation e..

Dans les années 80, une jeune Française étudiante aux Beaux-Arts de Toulouse part en Chine poursuivre sa formation.

Elle va tout réapprendre et s’initier au patient art de la calligraphie.



Avis :

Un récit autobiographique d’une artiste aujourd’hui reconnue.

Un site pour suivre son œuvre : http://fabienneverdier.com/
Lien : https://delicesdelivres.go.y..
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Passagère du silence : Dix ans d'initiation e..

Paru quelques années après le massacre de la place Tiananmen, ce documentaire présente la formation de la jeune Fabienne Verdier à l’art chinois ancien, dans une Chine qui vit sous une chape de plomb. Partie sans presque rien au fin fond de la province du Sichuan, la future artiste connait la vie quotidienne des étudiants de l’école des Beaux-arts où elle s’est inscrite : misère, promiscuité, maladie, vexation et surtout l’isolement dus à la méconnaissance de la langue, mais aussi à son statut d’étrangère. En dépit de conditions matérielles difficiles et d’un contexte politique d’une rudesse sans nom, Verdier s’acharne avec ténacité et persévérance à suivre l’enseignement de maîtres de la calligraphie, alors bien oubliés des instances officielles.

Aussi passionnant pour ses aspect politiques qu’artistiques, ce récit est non seulement un témoignage indispensable sur la Chine des années 1980-1990, mais également sur les années de formation d’une artiste.

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Entretien avec Fabienne Verdier

Lorsqu'un poète rencontre une artiste peintre, cela garantit un entretien érudit et passionnant. Il est parfois douloureux, malaisé et exigeant de s'exprimer sur ce qui anime tout son être. Cet entretien entre Charles Juliet, écrivain et poète et Fabienne Verdier artiste peintre française est intimiste. La passion et la patience déplacent des montagnes. Afin de vivre sa passion, Fabienne Verdier sacrifie l'académisme des Beaux-arts français pour découvrir la calligraphie en Chine. Elle est opiniâtre et exigeante. En Chine, Fabienne nait une seconde fois au mystère de l'art.

"La peinture, c'est une belle histoire de respiration", dit elle.

C'est une adhésion pleine et entière d'elle-même.

La création picturale est tactile, est sensation. Tous les sens contribuent à imaginer, former une œuvre. C'est aussi la perception d'une réalité que l'on construit. C'est se libérer dans le mouvement de soi-même.

La calligraphie est un art abstrait. En Chine, cet adjectif n'a pas le même sens qu'en occident. L'abstraction est associé à la nature. Le trait est un prolongement de la nature.

Je ne regrette pas d'avoir emprunté ce petit d'ouvrage de moins de quatre-vingts pages. Ne reste plus qu'à découvrir les œuvres de Fabienne Verdier.
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Passagère du silence : Dix ans d'initiation e..

Cet ouvrage est arrivé par hasard dans mes mains. Ce fut une belle découverte. D'abord découvrir l'artiste et l'auteur à la trajectoire surprenante et aux oeuvres déroutantes pour moi. Puis découvrir par les yeux d'une jeune française de l'époque la Chine des années 80. Et enfin et surtout découvrir la calligraphie et d'autres arts traditionnels chinois. Et par delà, des modes de pensées, d'être au monde bien différents des nôtres. C'est en cela que j'ai trouvé ce récit très intéressant et que je le relirais sans doute.
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Passagère du silence : Dix ans d'initiation e..

Si ce livre n’est pas écrit comme du Stendhal, il est exceptionnel par le récit qu’il présente d’une aventure humaine originale, audacieuse, passionnée. Il faut se souvenir de ce qu’était la Chine il y a quarante ans. Il faut prendre en compte que l’auteur débutait à peine sa troisième décennie. Quelle aventure,quelle découverte !



Ajout ultérieur :

A la réflexion, deux choses me gênent :





Pour ceux qui se lasseraient en route : lisez quand même les toutes dernières pages…
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Passagère du silence : Dix ans d'initiation e..

Une étudiante des Beaux-Arts découvre la Chine des années 1980, avant qu'elle ne devienne une destination à la mode, elle y découvre d'abord un pays qui semble tout avoir perdu de sa culture ancestrale, puis, peu à peu parvient à retrouver, sous le vernis de la culture moderne, d'anciens maîtres de la calligraphie oubliés par le régime.
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Passagère du silence : Dix ans d'initiation e..

Plus qu'un voyage dans la Chine des années 1990, Fabienne Verdier nous propose une initiation. Une initiation à suivre son chemin singulier, tisser les rencontres et les expériences, en faire des histoires d'amour. On se glisse dans la rudesse d'une Chine dont la politique est brutale et pourtant le livre de Fabienne Verdier est saisissant d'humanité. Son travail de recherche sur les origines, sur le trait de pinceau répété encore et encore, sur l'initiation du maître pour nous apprendre à se rencontrer soi-même, le vrai, le juste. Plus qu'un livre, Passagère du silence est une méditation.
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Passagère du silence : Dix ans d'initiation e..

Fabienne Verdier, « pinceau pensant », est une artiste peintre française née en 1962, créatrice d’oeuvres d’art contemporain.

Elle excelle notamment dans des grandes fresques colorées emplies de traits et formes dépouillés. Elle réalise ses œuvres avec des pinceaux géants qui doivent être actionnés, debout ; une énergie et surtout une dextérité incroyable pour maîtriser un pinceau et une quantité d’eau en réserve de soixante litres voire davantage.



Pour une contemplation de créations plus « classiques », on peut (re)découvrir le magnifique « petit » livre de François Cheng « Poésie chinoise », un trésor d’extraits de poésies Tang sélectionnées et ornementées de calligraphies de FV. Impossible de ne pas être sidéré par les traits qui allient l’élan et la souplesse du bambou, la floraison du lotus, le tout avec un sens époustouflant de l’équilibre, de la symétrie. La représentation de « la montagne » retracée, si on se réfère à la forme « standard » en trident, prend ainsi une autre dimension, plus de hauteur si j’ose dire, soulevée par la grâce. Après avoir contemplé a minima ces calligraphies, elles ne vous lâchent plus ; en particulier je me sens particulièrement en correspondance avec la représentation de « montagne vide ».



FV se désigne comme une « passagère du silence », cultivant la calligraphie, son art de vivre, adossé à une maîtrise technique mais d’abord et surtout irrigué par un état d’esprit.



Ce livre « Passagère du silence » est une autobiographie qui relate la construction de l’univers artistique et humain de l’auteure ; il offre une densité incroyable. Chaque page sollicite le lecteur en profondeur ; il s’agit en fait d’un trois en un. Dans ce livre, outre le propos directement lié à l’univers le plus intime de l’auteure, la sensation de lire, par séquences intercalées, une œuvre de François Cheng et d’Alexandra David Neel.

L’auteure a eu très précocement le projet de devenir peintre et de vivre de son art. Elle commence des études de « Beaux Arts » à Toulouse, où rapidement elle se rebelle en réaction au contenu et à l’esprit de l’enseignement. Parallèlement, elle découvre la calligraphie occidentale et une sorte de flagrance la gagne.

Elle obtient une bourse qui lui permet d’entreprendre des études d’apprentissage de la peinture en Chine à Chongqing dans un établissement d’études supérieures dans le Sichuan, dans la partie occidentale au nord du Yunnan, beaucoup plus proche du Tibet que des zones plus « ouvertes » de Pékin ou de la côte Pacifique.



Sa quête commence par une série de catastrophes. D’abord, en transit au Pakistan, la jeune femme est victime d’une agression sexuelle dans des conditions sordides. Ensuite à Chongqing, seule occidentale étudiante, elle est sous haute surveillance mise sous un régime quasi carcéral dans des conditions matérielles indigentes. Dans son austère pièce attribuée, elle réalise pourtant qu’elle bénéficie sur ce point d’un privilège par rapport aux étudiants chinois affectés dans des dortoirs collectifs spartiates. Et, la cerise sur le gâteau, c’est le fait de se retrouver en cours, face à face avec le buste en plâtre de Beethoven à dessiner ! Un exil à des milliers de kms pour retrouver tout ce que, d’un point de vue artistique elle fuit ! Où sont les poètes peintres dépositaires de l’art millénaire chinois, comme celui épanoui dans son livre de Shi Tao, qui sera son guide de survie pendant ces années de pauvreté et de grande solitude ?

Mais nous sommes en 1983. Si Mao est mort en 1976, on sait que la révolution culturelle a fait rage auparavant et que toute la culture millénaire a été considérée comme contre révolutionnaire. Des persécutions, des massacres ont été commis à l’encontre de tous ceux qui étaient liés à la culture traditionnelle. En réalité, tout le monde dénonçait tout le monde dans une hystérie et un fanatisme atroces, y compris au sein des familles.

Par un affreux parallélisme, il y avait eu un précédent à l’identique avec le premier empereur de l’histoire chinoise de l’éphémère dynastie Qin érigée en vainqueur des royaumes combattants. Mao fut la réincarnation de ce despote Shihuangdi qui voulut lui aussi dèjà faire table rase du passé. En -213 furent ordonnées la destruction des livres et la persécution et le massacre des léttrés. Seuls les ouvrages utilitaires et du taoïsme, dont le classique Tao Te King furent épargnés. Heureusement, des exemplaires des ouvrages condamnés furent dissimulés et échappèrent à l’autodafé.



De même, en 1983 des rescapés de la folie humaine, traumatisés, survivants dans l’ombre, des calligraphes, des peintres essayaient de reprendre leur souffle.



C’est ainsi que FV réussit à entrer en contact avec celui qui allait devenir son maître, Huang Yuan. Mais la partie est loin d’être gagnée. Plusieurs mois d’abnégation, d’exercices remis au quotidien sont nécessaires ; le maître finit par accepter d’enseigner, convaincu de l’authenticité de la requête singulière de la jeune française, dans le contexte de l’époque.

Et le plus dur commence ; tracer encore et encore des « bâtons », pour une maîtrise technique mais surtout pour donner une âme aux traits. A cet effet, il est aussi indispensable de s’initier aux œuvres de sagesse chinoise. La peinture n’est pas la « recherche du beau » mais un souffle doit l’animer. On ne recherche pas la dextérité en soi comme en Occident, la maladresse, le raté ont bien plus d’importance que les effets clinquants. C’est ainsi que certains traits des calligraphies dont je parlais en ouverture, peuvent paraître incomplets, mal segmentés telles des herbes folles, pourtant ces « imperfections » forment un tout magnifique, presque comme si la moindre irrégularité faisait partie d’une esquisse préétablie.



FV travaille très dur, dans la pauvreté mais avec feu et son nom prend corps et âme ; en chinois :



-fa, la régle naissante dans la recherche de la voie,

-bi, l’étude comparative,

-enne, la bonté la générosité.



Au cours de ces dix années en Chine, mille péripéties ont accompagné FV, dont chacune ou presque aurait pu être fatale. L’auteure est une vraie survivante.



En définitive, après « avoir fait ses gammes » l’essence-ciel lui est révélée au fil de ses marches en très haute altitude, au Tibet, lors de périple organisé par son établissement d’enseignement avec d’autres étudiants. Cette véritable illumination est aussi suscitée par son maitre qui initie une quête sur le Mont Emei, montagne sacrée bouddhiste dans la Sichuan, qui fut aussi un haut lieu taoïste. Là, dans l’alternance du silence de la marche et du dialogue avec le maître, dans l’atmosphère des rencontres dans les monastères perchés, tout son être s’éveille. Dans cet univers, en dépit de la dureté des conditions de vie, le risque est grand de ne plus « redescendre », mais ce n’est pas la destinée de FV.



Elle achève son cursus, dans les convulsions des évènements de 1989, métamorphosée intérieurement et mure pour faire épanouir sa sensibilité et son talent. Mais cette richesse se conjugue avec une extrême pauvreté matérielle, elle se qualifie de « clocharde céleste ». Elle doit composer en offrant ses services à l’ambassade de France à Pékin. Elle y sera pendant trois années attachée culturelle. Cette fonction lui permet de compléter son apprentissage en rencontrant des maîtres ; elle s’efforce aussi avec les maigres moyens mis à sa disposition d’aider les peintres chinois en difficulté.

Elle se doit de reprendre ses pinceaux comme son maître lui en fait injonction ; un énième souci de santé précipite sa réorientation, loin de l‘Orient, en lui imposant pour sa survie de rentrer en Occident.



Évidemment, lorsque l’on découvre les œuvres exposées les plus récentes, difficile de ne pas se dire que le souffle du Mont Emei est resté sur le seuil de la galerie, que nous sommes plus proches de Miro que de Shi Tao ..J’ai ma petite idée, mais les clés sont sans doute dans les autres livres que je n’ai pas lus.



Quoiqu’il en soit, « Passagère du silence » est un livre exceptionnel d’une femme exceptionnelle.



Pour avoir le plaisir d’entendre la belle voix (et la voie) de FV, on peut se référer à une interview avec de superbes photos dans la regrettée revue Ultraïa (n°15 avril-juin 2018) et une série d’émissions radio également avec la participation de FV https://www.franceculture.fr/emissions/series/fabienne-verdier-lenergie-en-peinture
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