"Chapeau! Félix": un livre-disque
Félix Leclerc (1914-1988). Mes souvenirs remontent, malléables et sans doute déformés au fil des ans. L’homme est, un parmi tant d’autres, fragment de mon enfance et de mon adolescence. Ses chansons dansent à nouveau sur mes tympans, me reviennent en échos lointains d’un monde autre, doucement tranquille et serein. Instants hélas effacés si Babelio, Masse Critique, La Montagne Secrète Ed. n’étaient pas passés par là. Merci à eux…
Bonjour la nostalgie.
Un temps, durant l’extrême bout des 50’s, la totalité des 60’s et un tout petit brin des 70’s, à mi-chemin des Trente Glorieuses, la télé à la maison fut exclusivement sans télécommande, diffusant à des heures bien sages des programmes gentillets en noir, blanc et gris bien baveux. Le poste n’avait que peu de boutons pour trouver les rares chaines proposées. Mon PAF d’alors épousa, les yeux éblouis, l’immobilité de la mire, le petit train d’«Interludes» et le générique d’« Histoires sans paroles ». La France entière cherchait alors en vain, sous les écrans bleutés posés sur les tables de salon, les jambes des présentatrices qui en femmes-troncs télévisuelles, souriantes et à la diction parfaite, nous invitaient à la fête à venir avant de s’afficher honteusement à la une des magazines à scandales quand elles montraient leurs genoux. Les rares émissions de variétés proposaient, entres autres désormais vieilleries alors en vogue, une race de chanteurs aujourd’hui disparus, en costard-cravate, bien mis sur eux, guitare classique en arpèges harmonieux et accords plaqués. Seuls sur scène face au micro solitaire, sans soutien rythmique, sans chorégraphie si ce n’est celle du pied battant le rythme sur le dessus d’une chaise.
Guy Beart, Georges Brassens.. et, ici, Felix Leclerc : sa haute silhouette dégingandée, sa tignasse blonde et son accent québécois. L’auteur-compositeur-interprète importait dans l’hexagone cette autre France du lointain Québec, le caribou qui n’osait pas encore laisser trainer quoi que ce soit dans son sillage sur la neige (Ôh que non, l’époque était prude), l’orignal, la neige et le froid. L’homme aimait la langue française, les mots bien choisis, soigneusement agencés au service de phrases qui avaient du sens.
Felix Leclerc (1914-1988) : un artiste québécois multifacettes de la musique aux mots, des images aux scénarios. Touche à tout radio, théâtre, télévision et chanson.
Neuf de ses chansons en CD joint et lyrics imprimés (plus « Cadet Rousselle », une chanson populaire française du XVIII e siècle) font ici tribute hommage sous le titre « Chapeau Felix », revisitent sous des orchestrations modernisées son univers enchanteur et poétique. Quatre voix féminines sont de la fête, celle des moments signés hors du temps et qu’il faut apprécier au mieux quand ils surviennent. A noter que le CD inclus propose, outre les fichiers son, les lyrics imprimables et une courte video intitulée « Felix Leclerc chante Cadet Rousselle »
Felix Leclerc était sorti doucement de ma vie par la fenêtre en noir et blanc de l’écran TV, il y est revenu, bonjour la nostalgie, via ses chansons mais aussi les illustrations en couleurs de Jean Dallaire (1916-1965), un artiste peintre cubiste, lui aussi québécois. Elles évoquent un « Cadet Rousselle » campé moqueusement dans ce que la chanson décrit de lui.
Titres à écouter en priorité : « Cadet Rousselle » ; « Le petit bonheur », l’éternel « Hymne au printemps » et à mon sens la perle qu’est « le train du nord » qui, au gré d’écoutes sans cesse réitérées, m’a beaucoup plu et inspiré le bout de rien qui suit quand, quelque part, ce luxueux et bel objet semble aussi destiné à nos chères têtes blondes :
« Swinguent swinguent les mots, dansent dansent les marmots.
Clapent clapent les mains, tandis que roule roule le train.
Tapent tapent du pied, claquent claquent des doigts.
Loco loco sans boussole, tous tous la laisse seule.
Plus personne à bord,
Qui donc pour le sifflet tirer ? »
« Chapeau ! Félix »
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