Citations de Florian Zeller (170)
Ce que j'ai compris avec Mme Morozvitch, c'est que la plupart du temps, elles sont heureuses les grand-mères. De l'autre côté de leurs paupières, elles ont des images que personne peut voir. Comme des trésors.
C'était son point faible, à ma mère, la faim dans le monde. Elle adorait ça. A cause de son côté croyant. Mais c'était pas assez crédible. Elle savait très bien que moi, la faim dans le monde, ça m'avait jamais vraiment passionné. Je préfère le tennis ou la littérature.
Marco, c'était le genre à se la raconter du matin au soir. Il lui arrivait toujours des choses incroyables, si vous l'écoutiez. Votre vie, à côté de la sienne, elle était toute fadasse.
Parce que maintenant je peux vous le dire, moi, avec Mathilde, j'étais à l'article de l'amour.
Il me faisait pensé à François. Lui aussi, c'était un cas. Je me demande où ma mère l'avait dégoté. Chez un antiquaire, à mon avis. La seule chose que je savais sur lui, c'est qu'il était noble. Avec particule et tout. De Courtois. Ça avait l'air vachement important pour lui. François de Courtois. Moi je trouvais ça assez con. A la limite, s'il avait eu un château, ou un truc équivalent. Mais là, juste une particule, il y avait pas de quoi s'enflammer. Mais lui c'était justement le genre à s'enflammer pour des conneries de ce genre. Tous les matins, il devait se regarder dans la glace et se dire qu'il avait une particule. Ce type était sans arrêt à parler de lui. Il faisait toujours le coup devant les invités par exemple. A peine installés dans le canapé du salon, les invités, qu'il commençait à parler de lui, de sa particule, de ses histoires de famille. C'était son sujet favori. Comme quoi il avait un lien de parenté avec je ne sais plus quel type qui avait fini décapité. C'était pas une raison pour nous la prendre, à nous, la tête.
Mais maintenant que j'y réfléchis, je me dis qu'en fait, c'était plutôt le contraire : elle était pas allumée, ma mère, elle était juste éteinte. Comme une bougie en plein courant d'air.
Tristan passe beaucoup de temps à l'observer. Il a l'impression qu'Amélie vit dans son monde, un monde parallèle à celui qu'ils partagent. Souvent, elle chantonne. Sa voix est d'une douce fragilité, et constitue, pour lui, la marque de ce monde intérieur auquel il n'a pas accès.
J'ai fermé les yeux , et le soleil dessinait deux papillons oranges sous mes paupières . J'ai entendu la plage de Bretagne où je passais mes étés, enfant, quand tout était simple .J'ai entendu le chahut à l'agonie des vagues, les cris d'enfants, le ronronnement des bateaux à moteur, le sifflement des planches à voile; j'ai deviné l'odeur de sel que transportait l'horizon, le sable, la sensation des pieds , nus sur le sable chaud, les goûters à la marmelade de pomme, le vent, les mouettes, et le bleu à perte de vue, ma vie à marée haute, tout cela contenu dans un rayon de soleil fuyant . Puis j'ai senti la lumière se retirer, et mes souvenirs se dissoudre. J'ai senti la nuit me recouvrir, et le gris retrouver son empire glacial . Quand j'ai ouvert à nouveau les yeux, c'était déjà l'automne. On dit que l'amour rend aveugle et que le désespoir de ne pas être aimé coupe plus certainement qu'une lame de cutter : ce n'est donc pas anodin si mes larmes laissaient derrière elle de longues traînées rouges.
On a toujours l'impression que l' Égypte est un très joli pays avec ses Pyramides et ses couchers de soleil sur le Nil , mais on oublie un peu trop rapidement que c'est aussi un pays dans lequel Madame Bovary, l'histoire de cette femme mal mariée, de son époux médiocre , de ses amants vaints, remet trop en cause l'ordre des choses pour être lu. Ici les mariages sont forcément bons, les époux jamais médiocres et les amants n'existent pas.
Le monde islamique porte aujourd'hui un regard très sévère sur l'Occident, qui représente à ses yeux tout ce qu'il y a de condamnable : la débauche, la frénésie et la décadence . Nous nous retrouvons ainsi dans une situation inversée : comme à l'époque des croisades , le thème de la luxure occidentale sert d'argument au Djihad islamiste.
Michel : - Tout le problème vient de là, mon vieux. C’est quand même la base, non ? On ne dit pas la vérité à sa femme.
Paul :- Je sais
ma vie a longtemps ressemblé à un été qui se termine. C'est étrange, mais c'est ainsi : il arrive que par des journées finissantes, ces journées sombres, vissées sous un ciel désespérément immobile, la certitude que les jours approchent où la grisaille retrouvera son empire d'automne monte en moi jusqu'à l'effroi. Ne sentez-vous pas qu'il fait déjà un peu plus frais?
Aujourd'hui, j'ai le sentiment qu'il ne me reste plus que mon passé à vivre.
Tu imagines. Ses cheveux mal coiffés sur ses épaules, cette sauvagerie du matin qui est pour toi l'image de la beauté. Tu souffres avec elle, dis-tu ? Il faut avoir un peu de cœur pour souffrir. La vérité, c'est que quand tu penses à elle, ce n'est pas à elle, mais à toi que tu penses. Ce n'est pas de l'avoir perdue que tu pleures, mais d'amour pour ton beau visage blessé. Le sien, d'ailleurs, tu ne le vois même pas.
…tu étais de ceux qui ne savent pas souffrir, étant de ceux qui ne savent pas aimer.
…ces matins cruels où l'on se rend compte qu'une fois encore le jour s'est levé, et qu'il va falloir tenter de vivre.
Car bien entendu, comme ceux qui ne savent pas vivre, il lui arrive d'être tenté par les démons de l'écriture. On dit souvent qu'il faut plus de courage pour partir que pour revenir. C'est oublier que le retour est aussi un voyage et qu'il demande autant de courage que l'aller, du moins l'implique-t-il.
Elle est entrée dans ma vie comme un voleur.
…avoir l'impression d'être passé à coté de soi.
On ferme à peine les yeux, et l'on constate, étonné, qu'on a déjà une histoire, des regrets, et des blessures aussi.
Tristan vivait dans le fantasme de se maintenir dans un monde où tout resterait éternellement possible. Il se sera débattu jusqu'à la fin. Et qu'est-ce que le vertige du rétrécissement, sinon l'odieux constat que les différentes possibilités s'épuisent une à une, que la vie se spécialise et se cantonne à des enjeux de plus en plus restreints ? Nous vivons dans le monde de la spécialité. Nous avons notre quartier, nos amis, notre appartement, notre passé, notre femme, et tout ceci est ridiculement minuscule.