Citations de Françoise Houdart (41)
Secouer l'impalpable poussière des mots séchés entre les pages.
Un médaillon de lune brille dans l'étroit décolleté de nuages.
"Tu fuis, Laura!" J'avais crié sur le trottoir. Elle s'était retournée vers moi. "Non, Sarah, je me sauve."
L'homme qui l'accompagne a posé un bras possessif autour de ses épaules nues. Elle se tient très droite, comme une reine. Ou un violoncelle. Il préfère le violoncelle ; il sourit béatement à l'évocation de l'archet qui en joue.
— Je hais Internet, Facebook et tout le reste. Les gens s'y réinventent à loisir. Tu ne sais plus si la personne qui te contacte est un être de chair et d'esprit ou son avatar.
Délicatement, Sacha ôta le muselet qui emprisonne le bouchon de la bouteille. C'est comme enlever le porte-jarretelle d'une jolie femme, ne peut-il s'empêcher de penser, avant de se traiter de goujat. Trois ou quatre pressions, et le champagne jaillit d'un trait fulgurant qui retombe en cascade mousseuse le long du col de la bouteille.
La grossesse n'était pas très avancée, avait-elle expliqué à Mado qui s'inquiétait de sa pâleur. On m'a fait un curetage. C'est curieux, avait-elle reconnu, comme le mot lui-même fait mal avant qu'il fouille la chair pour en arracher le fruit.
Mais que peut la plus belle des photos ou la séquence la mieux filmée contre ce que ses yeux lui donnent à voir, juste ses yeux grands ouverts, sans mise au point complexe, sans autre filtre que la très légère buée d’une émotion fugace.
p.12
Oh! Ma fille... Jusqu'à quand pourrai-je te garder dans le berceau de ma tête ? Jusqu'à quand ? ... Tu t'echapperas un jour. Tu t'eclipseras...Tu deviens une femme, et l'enfant sacrée ne reviendra jamais. Moi non plus, jamais revenue. Morte, l'enfant. Je le sais. Tout a une fin. Tout... Pas ma peur... Mal en moi, mal de moi.
"Ces derniers temps"...Quels temps? Il n'y a ni premiers ni derniers temps. Tout le monde sait ça. Il y a le temps. Rien de moins, rien de plus. Le temps qui lui saute à la gueule quand il se regarde dans le miroir de la salle de bains. Le temps qui creuse des cernes noirâtres autour de ses yeux fatigués de ne pas se fermer. Le temps qui dévale les trois volées d'escalier et qui les remonte en s'accrochent à la rampe. Temps atone, désespérément plane que la succession des jours et des nuits ne fait que survoler sans que jamais rien n'en trouble la constance.
Sacha prend soudain conscience qu'il ne baisse plus les stores des fenêtres de l'appartement. La lumière blanchâtre des lampes du boulevard suffit pour éclairer son chemin de ronde entre des meubles devenus masses inertes et indifférentes à ses déambulations insensées. Seule la clarté lunaire fait danser d'évanescentes ombres sur la scène figée de ce clair-obscur.
Mado, elle, a choisi de s’inventer une fille. C’est un sujet de roman, ça. Un enfant dans le placard. Ça donne froid dans le dos de penser que la fiction s’inspire parfois de la réalité. Dans le fond, elle aurait pu l’écrire, ce roman. Écrire, c’est aussi donner la vie. C’est vivre par procuration.
Qu’ai-je compris de toi pendant toutes ces années ? Qu’ai-je préféré ne pas savoir, ne pas comprendre ? Pourquoi est-ce cette autre femme qui me fait entendre ce que toi, tu me criais au visage, ton cri muet, ce mal de toi qu’aucun mot n’aurait pu traduire ?
p. 118
C'est...C 'était si simple à comprendre. L'âge n'écrit pas son histoire de la même façon dans le corps des femmes que dans celui des hommes. Les mots se vident de leur sang pour se charger d'indicible silence.
A ses parents qui l'avaient regardée partir sans autre bagage qu'un amour étranger, la Maddalena avait promis de revenir un Noël. Entre Enna et Bruxelles, les lettres échangeaient leurs promesses et leurs larmes. Puis les promesses s'étaient espacées, les larmes s'étaient taries. Mado Simoni n'était plus jamais retournée au pays. Plus osé.
- [...Ton thé est une merveille mais venons-en à ce qui m'amène chez vous.
- O.K., Sacha. Bien sûr. Mais beaucoup de choses m'échappent, tu dois en convenir. Je suis un esprit rationnel, même si je suis une femme et si je ne déroge pas aux traditions qui m'ont n
- [...] Ton thé est une merveille mais venons-en à ce qui m'amène chez vous.
- O.K., Sacha. Bien sûr. Mais beaucoup de choses m'échappent, tu dois en convenir. Je suis un esprit rationnel, même si je suis une femme et si je ne déroge pas aux traditions qui m'ont nourrie.
- [...Ton thé est une merveille mais venons-en à ce qui m'amène chez vous.
- O.K., Sacha. Bien sûr. Mais beaucoup de choses m'échappent, tu dois en convenir. Je suis un esprit rationnel, même si je suis une femme et si je ne déroge pas aux traditions qui m'ont n
Il entend leurs rires et leurs voix à travers les trop minces parois qui séparent leurs appartements respectifs ; et c'est là, sans doute, cette brusque rafale de vie qui a réveillé sa conscience : quelques bruits de vaiselle du côté de la cuisine, les petits pas pressés de Fadia, le son de la télévision... La vie toute proche, toute chaude. Si étrangement lointaine cependant, comme d'une rive à l'autre d'un fleuve impossible à traverser.
Il faut me dire ce qui tient une femme debout quand tout est vide au-dedans de son ventre.