Citations de Henri Troyat (1086)
L'économie politique est la plus noble nourriture dont l'esprit humain puisse se nourrir.
La révolution n'est pas une miniature qu'il faut examiner à la loupe, mais un vaste tableau qu'on doit admirer de loin.
Car, dans le ciel, il y avait tant de bonté et tant d'intelligence, que l'âme de chacun aurait dû en être apaisée pour l'éternité.
Tant que je n' avais pas connu le succès ,ma situation de
journaliste me paraissait enviable .
Cette fois, tante Madeleine demeura avec Sylvie pendant que grand-mère et le médecin retournaient au chevet de grand-père.
- il ne va pas mourir ? demanda Sylvie.
- Mais non, ma petite, dit tante Madeleine. Tu n'avais pas des leçons à apprendre, pour demain ?
- Si
- Alors, viens. je vais te les faire réciter.
Sylvie tendit son catéchisme à tante Madeleine et psalmodia :
- on reconnaît la véritable Eglise à quatre marques : elle est une, elle est sainte, elle est catholique, elle est apostolique.
- Pourquoi est-elle apostolique ?
- Parce que 'elle a pour premiers chefs les apôtres...
Ernestine passa la tête par la porte pour annoncer qu'elle allait chercher les médicaments à la pharmacie. Elle avait mis un fichu, à cause du froid. La salamandre craquait. Dans son petit cadre d'acajou, papa assistait, imperturbable, la joue sur le poing, à tous ces bouleversements.
- on devrait téléphoner à maman ,dit Sylvie.
- pour quoi faire ?
- pour lui dire que grand-père est malade.
- Peut-être... en effet, dit tante Madeleine.
Visiblement, elle n'y avait pas pensé.
Si, autrefois, elle trouvait toutes les qualités à ceux qui avaient été épargnés par la tentation corruptrice de l'argent, elle découvrait peu à peu que les laissés-pour-compte de la chance étaient souvent aussi détestables que les nantis.
« Curiosité n’est que vanité », comme l’écrivait si bien Pascal, dit l’abbé Charousse. « Le plus souvent, on ne veut savoir que pour en parler. »
Il se venge du monde, parce qu’il n’est pas de ce monde ; il se venge des hommes, parce qu’il n’est pas tout à fait un homme… Les bêtes distinguent l’odeur humaine. Ainsi, les hommes sentaient en Lermontov une odeur qui le dénonçait comme étant d’une autre race. (V. Méréjkovsky)
Moscou ! ... Soudain, toute la cité parut éclater, comme une fourmilière ouverte par un coup de talon. La rivière surgit, avec des quais chargés d'équipages rapides, aux roues miroitantes. Les mâts des bateaux, ornés de pavillons, se balaçaient à contre-jour sur le ciel bleu de feu. La musique des cloches tombait du haut des coupoles dorées. Et, sur l'autre rive, dominant le bric-à-brac des toits et des fenêtres, le Kremlin, massif et rose, dentelé, fermé, hérissé de tours et de clochetons, vibrait dans la brume, telle une image prête à s'évanouir.
A boldino il (Pouchkine) vibrait à l'unisson du monde. Et les vers que formait sa plume avaient une perfection qui le charmait lui-même. Il écrivait, dans "l'Automne" :
Dans ma tête bourdonne un essaim de pensées,
Et la rime légère accourt à leur appel,
Les doigts vont à la plume et la plume au papier,
Un éclair, et les vers couleront librement.
Ainsi, lorsqu'un navire immobile sommeille,
Les matelots, soudain, s'élancent aux agrès.
En bas, en haut, tendent les toiles à la brise.
Le mastondonte vibre et fend les océans.
Le vent qui s'était tu pour reprendre haleine, se jeta de nouveau sur la maison. Au delà du cercle lumineux de la lampe, les fauteuils conspiraient accroupis, les poings sur les genoux, dans l'ombre.
A demi asphyxiée, elle balbutia: " Maman! Maman! " non dans l'espoir de rappeler celle qui avait déjà disparu, mais pour se défendre par ce mot, si intime et si chaud, contre le vide effrayant qui se creusait autour d'elle.
Il était sept heures du soir. Les phares de l’auto refoulaient la nuit sur les bas-côtés haillonneux et humides.
Qu'il haïssait cette liberté soudain retrouvée !
Personne ne parlait, car le vent de la course séchait les lèvres au point de les rendre douloureuses. Les oreilles devenaient des glaçons sonores où tintait le métal guilleret des grelots. Les narines, brûlées et dures, accueillaient le parfum vide, vaste et propre de l’hiver. Sûrement, le cocher était mort de froid, et les chevaux galopaient, livrés à leur seule fantaisie. Depuis combien de temps le traîneau avait-il pris la route ? Dix minutes, vingt minutes ? Une lumière. Deux lumières. Michel tourna vers Tania sa figure aux sourcils et aux moustaches poudrés de neige
Il y a tant de vraisemblance dans ce mensonge, que Vissarion en l'énonçant acquiert une conviction nouvelle. Il croyait se jeter dans le vide, et voici que des ailes lui poussent dans le dos ; au lieu de tomber, il est porté, il plane !
le but de la poésie,"c'est le beau,le beau seul,le beau pur,sans alliage d'Utile,de Vrai et de Juste".p351
L'homme se débat au centre d'un chaos.Il sent qu'il lui sera impossible,quelle que soit son intelligence,de découvrir la justification exacte de sa présence sur la terre.Cette ignorance étant acceptée,il éprouve de l'angoisse devant l'absurdité de sa condition,que nul ne saurait lui expliquer en termes humains.
« Toute singularité mérite d'être cultivée à la façon d'une plante rare », comme disait ce vieux renard de Voltaire.
Ecoeuré de bonheur, la chair affaiblie et le cerveau lucide, il se dit, pour se justifier, que l'oubli est la condition indispensable de toute vie. Nous n'avons qu'une seule toile à notre disposition pour peindre les différentes étapes de notre destin. il est nécessaire, il est sain de recouvrir une couleur par l'autre. Toujours cette notion de santé qui excluait la tentation de la nostalgie.