J’ai laborieusement échelonné la lecture des Illusions perdues d’Honoré de Balzac sur presque quatre mois… À la fin, c’était devenu mon rituel du matin, quelques pages après mon petit déjeuner pour enfin en finir !
Le roman est divisé en trois longues parties : « Les deux poètes », « Un grand homme de province à Paris », « Eve et David ». Il faut noter que les contemporains de Balzac ont lu les trois livres de manière morcelée, sous forme de feuilletons et que c’est la partie parisienne qui a eu le plus de succès, qui a fait le plus polémique.
Lucien Chardon et David Séchard, deux amis sans fortune, rêvent de gloire : Lucien, fils d’apothicaire, veut devenir un grand poète et porter le nom de sa mère, de Rubempré, tandis que David, fils d'imprimeur, veut inventer un nouveau mode de fabrication du papier et épouse Eve, la sœur de Lucien.
Protégé par Mme de Bargeton, sensible à sa beauté et à son charme, Lucien fréquente le milieu aristocratique d’Angoulême. Il finit par suivre sa muse à Paris pour fuir les rumeurs provinciales et satisfaire ses ambitions littéraires.
Dès la première partie, nous mesurons combien les deux personnages principaux sont différents, physiquement et moralement. Cependant, je ne suis parvenue à m’attacher à aucun des deux. Lucien m’insupporte déjà car je le trouve superficiel et naïf, ambitieux sans véritable envergure. Le dévouement inconditionnel de David envers son ami me désolera tout au long de ma lecture car il se sent inférieur à son ami.
Paris va symboliser la perte des illusions pour Lucien. S’il avait un avenir prometteur à Angoulême, il fait un peu tâche dans la capitale, ne maîtrisant pas les codes mondains. Vite délaissé par sa protectrice, il survit d’abord pauvrement, en écrivant, sans parvenir à se faire éditer, puis devient journaliste tout en vivant au crochet d’une jolie actrice devenue sa maitresse.
Malgré les longueurs balzaciennes, j’ai adoré la mise en abyme du fonctionnement des milieux littéraires et journalistiques, de la recherche du succès et de la renommée par des moyens peu reluisants. Balzac nous donne à voir les mœurs d’une véritable faune où évoluent toutes sortes de gens de lettres : libraires, éditeurs, auteurs, dramaturges, journalistes, etc. Balzac règle sans doute ici quelques comptes personnels avec certains libraires-éditeurs et critiques… La tonalité se fait satirique, polémique.
Lucien devient un dandy en vue, menant une existence brillante avant de s’attirer des ennuis et des inimitiés. Balzac illustre à travers lui le pouvoir corrupteur de l’argent et une certaine dégradation morale. La littérature devient une marchandise, un commerce.
Dans cette partie parisienne, j’ai apprécié de retrouver de nombreux protagonistes de La Comédie Humaine, déjà croisés depuis que j’en ai entrepris la lecture et relecture in extenso.
Rapidement criblé de dettes, Lucien rentre à Angoulème où, David et Eve, qui l’ont beaucoup aidé financièrement, sont au bord de la faillite. Tandis que David poursuit ses recherches, ils sont aux prises avec les manœuvres déloyales d’une imprimerie concurrente. Le contraste s’accentue entre leur posture digne, travailleuse et profondément honnête et l’attitude égocentré et geignarde de Lucien, auteur de fausses écritures qui font peser sur David la menace d'une arrestation, toujours en train de se plaindre et de se repentir.
J’avoue que Balzac m’a perdue dans les passages techniques sur la fabrication du papier et ceux, procéduriers, entre David et ses concurrents ou son père.
J’ai trouvé le dénouement un peu facile avec l’arrivée providentielle d’un drôle d’ecclésiastique espagnol qui engage Lucien comme secrétaire et lui donne les moyens financiers de réparer ses fautes envers David et Eve. Si vous connaissez bien l’échafaudage de La Comédie humaine, vous savez que d’est Vautrin, encore une fois évadé du bagne, qui se cache sous cette identité (la suite dans Splendeurs et misères des courtisanes).
Un roman fondamental chez Balzac, mais vraiment indigeste !
Pourquoi les romans les plus connus de La Comédie humaine sont-ils aussi les plus difficiles à lire, les plus ennuyeux… ?
Lien :
https://www.facebook.com/pir..