Les Chouans, c’est chiant.
C’est vulgaire, je sais, et impardonnable de commencer une critique ainsi.
Bon alors disons que ce n’est pas une critique que je vais faire mais juste donner un avis.
Balzac, c’est quand même de la haute littérature.
Alors c’est moi ou ce genre de passage sonne totalement faux ?
« […] Allons, se dit en lui-même Corentin après une pause […] Mais pour assurer le succès de ma ruse, Hulot m’est nécessaire, et je cours le voir. »
Est-ce que vous vous justifiez dans votre tête d’aller voir quelqu’un en vous disant « je vais le voir ». Non, vous y allez et vous vous dites peut-être « tiens, je vais lui dire ça », mais pas « tiens, je vais le voir » en allant le voir…
C’est un détail. Mettons de côté ces moments où les pensées des gens qui sont retranscrites m’ont rendu les scènes artificielles.
Les dialogues ne m’ont pas beaucoup moins déplu. Mais je n’ai pas d’exemple à donner.
Peut-être les personnages font-ils la beauté, la force de ce livre ? Ah… Mlle de Verneuil.
« Mlle de Verneuil pâlit en voyant la mort du marquis écrite dans les yeux de ce tigre à face humaine, et ressentit pour son amant un amour qui tenait du délire. Chacun de ses cheveux lui versa dans la tête une atroce douleur qu’elle ne put soutenir, et elle tomba sur l’ottomane. »
Et on se fout de la gueule des ado après cela…
Cette grande héroïne balzacienne, elle a mal aux cheveux et s’effondre en pensant à son amant, homme qu’elle ne connaît que depuis dix jours, ne connaît pas charnellement, dont elle ne partageait pas à priori les idées, à posteriori à mon avis non plus, je crois pas qu’ils aient vraiment débattus des sujets de société lors de leurs rares entrevues…
Tout, chez cette femme, m’a paru gnan-gnan, immature, inconsistant… cette façon de s’inquiéter de ses toilettes, de changer d’avis sur la position qu’elle souhaite adopter vis-à-vis du gars – et il ne s’agit là que de vue d’esprit.
Je suis sûrement totalement passée à côté, il est vrai que je n’ai pas réussi à rentrer dedans, à adopter le rythme. Un peu comme ce sketch où Muriel Robin dit les paroles (elle ne les récite pas, elle les dit) de Ne me quitte pas de Jacques Brel, et c’est ridicule. Alors que vous rajoutez l’air, l’intonation et ça devient magnifique.
Sûrement que je n’ai pas trouvé le ton du livre.
Et je me suis ennuyée à peu près du début à la fin.
« […] tout ce manège n’employa pas le temps nécessaire à le décrire. »
Alors pourquoi s’acharner à lire un livre que l’on n’apprécie pas ? Parce que, une fois commencé, je ne peux pas faire autrement que de le terminer. J’aurais l’impression de risquer de rater quelque chose, peut-être.
Et il a fallu que j’arrive à la page 322 de mon édition pour trouver le passage suivant, qui m’oblige à reconnaître la beauté et la précision des descriptions (ce qui n’empêche qu’elles m’ont profondément ennuyées mises bout à bout) :
« En parcourant ces routes elle put mieux apprécier l’état de ces campagnes qui, d’un point de vue élevé, lui avaient paru si ravissantes ; mais dans lesquelles il faut s’enfoncer pour en concevoir et les dangers et les inextricables difficultés. Autour de chaque champ, et depuis un temps immémorial, les paysans ont élevé un mur en terre, haut de six pieds, de forme prismatique, sur le faîte duquel croissent des châtaigniers, des chênes, ou des hêtres. Ce mur, ainsi planté, s’appelle une haie (la haie normande), et les longues branches des arbres qui la couronnent, presque toujours rejetées sur le chemin, décrivent au-dessus un immense berceau. Les chemins, tristement encaissés par ces murs tirés d’un sol argileux, ressemblent aux fossés des places fortes, et lorsque le granit qui, dans ces contrées, arrive presque toujours à fleur de terre, n’y fait pas une espèce de pavé raboteux, ils deviennent alors tellement impraticables que la moindre charrette ne peut y rouler qu’à l’aide de deux paire de bœufs et de deux chevaux petits, mais généralement vigoureux. Ces chemins sont si habituellement marécageux, que l’usage a forcément établi pour les piétons dans le champ et le long de la haie un sentier nommé une rote, qui commence et finit avec chaque pièce de terre. Pour passer d’un champ dans un autre, il faut donc remonter la haie au moyen de plusieurs marches que la pluie rend souvent glissantes. »
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