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Citations de Jacques Perret (121)


Jacques Perret
quel chapeau n'est pas curieux quand la tête n'est plus dedans ?
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Jacques Perret
Si les hommes ne dansaient pas sur les volcans, je me demande où et quand ils danseraient ; l'important est de bien savoir qu'on a le volcan sous les pieds afin de goûter son vrai plaisir d'homme libre.

Bâtons dans les roues.
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Or, j'ai précisément un vieux saule devant ma fenêtre.
Il est feuillu, nourri d'excellent limon crétacé, sans parler des sédiments historiques.
En vérité ses expériences personnelles ne remontent guère au delà de Fallières, mais il est d'une vieille souche qui a vu passer les drakkars et fourni leurs bâtons aux pélerins de Saint-Wandrille.
Par le radotage des pies et des geais colporteurs de tradition orale, il sait que les fils de Clovis II ont dérivé sous mes fenêtres dans le brouillard du matin, vautrés sur leur radeau d'infortune et cachant leur tête rasée sous des lambeaux frangés d'or.
Bien sûr, je ne vous dirai pas tout, ni Philippe Auguste en amont, ni Saint-Louis en aval, ni Charles le Chauve en face.
Et pourtant si : de Charles le Chauve, j'ai quand même deux mots à dire, en passant, parce qu'on lui a joué un drôle de tour à propos de cette Europe dont il est tant parlé ....
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Nous savions déjà que le rayonnement de la France est assuré jusqu'aux Fidjis par ses parfums, ses robes, ses colifichets et ses débats parlementaires.
Ce n'est pas rien, certes, et avec un peu de littérature comme nous savons la faire, il est permis d'affirmer que notre civilisation est tout entière dans l'allure d'un mannequin, que nos premières mains tissaient déjà pour la rançon des chevaliers, que le trémolo radical nous vient de la Gaule romaine, que la guirlande de Julie est tout entière effeuillée dans un parfum de Rochas, que le secret d'un beau tailleur est dans Descartes et l'âme d'un flou dans la chanson de Roland ...
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Nous tirons également beaucoup de satisfaction de la formule : yaka. Certes, l'invention n'est pas de nous. Il s'agirait d'une contraction magique de la tournure grammaticale : il n'y a qu'à. D'où qu'il vienne, je connais peu de gens assez forts pour mépriser les avantages du yaka. Poli et mis au point au cours des âges, ce yaka est sans doute un des maîtres-mots du génie français ; il a tempéré nos mœurs et guidé notre histoire, résolu maints problèmes domestiques et présidé aux conseils de l'État. Personne, à ma connaissance, n'en fait usage avec autant de maîtrise que le matelot. Il ne craint pas, en effet, d'attaquer les plus gros problèmes au yaka. Si j'expose la nécessité d'un travail important, la coque à gratter, ou si j'évoque un cas dramatique, la rupture du grand mât, Collot réplique d'un yaka et tout le labeur se ratatine au niveau d'un bricolage enfantin. C'est à la fois rassurant et déprimant. / Certains auteurs font remonter le yaka aux origines de la philosophie hindoue ; ce serait la dernière étape du sage avant le nirvana, et c'est un fait que, même sous nos cieux peu favorables aux avachissements sacrés, de yaka en yaka nous pourrions atteindre aux apathies suprêmes. D'autres soutiennent l'hypothèse d'un yaka hellénique. Selon eux, Hercule aurait appris de sa mère Alcmène le fabuleux pouvoir du yaka et chacun de ses douze travaux aurait été accompli à la faveur d'un traitement préalable au yaka. De toute manière, l'efficacité du yaka a été considérablement amoindrie par l'usage vulgaire et, dans certains cas, avili. À nous-mêmes, Collot et moi, il arrive de couper court à tel dialogue animé ou laborieux par cette grossière échappatoire : ‘’Yaka se l'attacher à la portugaise, etc.’’, vous voyez le genre. Et voulez-vous me dire quel maître-mot, quel verbe souverain, nom d'or ou cabballigramme résisterait à de si basses pratiques? D'ailleurs, avec l'expérience, je me fie un peu moins aux yakas du matelot. Arrivés à échéance, la plupart des problèmes résolus à coup de yaka dans l'euphorie du pousse-café prennent leur revanche. Revanche aussitôt contrée, il est vrai, par l'intervention immédiate et spontanée du yavaika, produit naturel du yaka, de telle sorte que ledit problème, coincé entre yaka et yavaika, s'évanouit dans le dérisoire ou se désagrège dans le fictif.
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Il est temps de penser aux choses sérieuses et de savoir en somme comment m'évader, car, tout bien considéré, je ne suis guère plus tiré d'affaire que la girafe qui, sortant de sa cage, cherche à s'orienter sur le quai d'Austerlitz; un certain nombre d'épreuves lui restent à courir avant de paître aux clairières natales.
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Ma première raquette était une Williams, modèle 1912. La forme spatulée se faisait beaucoup cette année-là, ce qui favorisait le style dit "à la cuiller" où Marcel Proust ne craignait pas de s'essayer avec mille grâces, en veston d'alpaga, sans mouiller son faux col.
Il n'y a pas de quoi sourire. Le spectacle avait de la tenue. C'est également l'époque où furent inventées les chaussures de toile, dites tennis, à semelles de caoutchouc.
J'ignore où sont allés les faux cols, mais je crois savoir que les surplus de tennis ont été dirigés sur nos possessions de l'Afrique noire à l'intention des notables qui les apprécient beaucoup, sans pratiquer pour autant le tennis.
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Jacques Perret
Chaque fois que j'ai offert mes services au règne végétal, j'ai compris qu'un malentendu nous séparait.
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On pense quelquefois que je suis hostile au progrès, mais pas du tout, ce serait idiot. J'aime le progrès. Je n'y crois pas beaucoup mais je l'aime, non tel que les hurluberlus ou les coquins nous le serinent mais tel qu'il pourrait satisfaire aux vœux innocents du brave homme lequel n'a certainement pas pour idéal d'habiter les grands clapiers rationnels de la cité radieusement concentrationnaire, ou, comme le dit joliment Le Corbusier : rétrécie. Qu'on le veuille ou non, l'homme du XXe siècle, avant ou après J.-C., reste fidèle à son rêve d'habiter une petite maison à lui, d'y loger sa petite famille, d'y faire un feu qui se voit et d'ouvrir la porte à ses amis qui arrivent par la route et non par l'ascenseur. Il a le goût du plain-pied, il aime la terre, il veut que sa maison soit posée dessus et non suspendue au grand perchoir collectif. Il veut son toit à lui pour y inviter qui bon lui semble. La cité radieuse et monobloc il s'en moque, il veut que la population soit comptée par feux et que toutes les fumées ne sortent pas par la même cheminée. C'est alors qu'il pourra nouer avec son prochain un commerce vraiment fraternel.
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A propos de silhouette noire et correcte, il convient de dire un mot du stand Rolls Royce. J'ai découvert que cette voiture royale et puritaine, que ce véhicule de conformisme invétéré commençait à présenter quelques signes d'émancipations, et si je n'étais tenu au respect, j'insinuerais qu'elle donne des gages de progressisme. Dans le mouvement de ses ailes par exemple, j'ai cru découvrir une velléité d'aérodynamisme qui m'a profondément attristé.
Je ne veux pas dire que la Rolls du salon 1953 s'oriente ouvertement vers la voiture de gigolo, mais elle m'inspire de l'inquiétude.
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Aucune importance : je suis en règle avec ma mémoire, elle a ses dadas, je les enfourche et hue cocotte ! ...
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Raymond est un bel athlète du genre coquet, pourvu d'une indiscutable tête de boxeur, cheveu plat et raide, nez effacé, pommette profilée, œil enfoui, front en glacis.
Il ne cache pas son goût pour les petites comédies traditionnelles du métier : arrivée sautillante, flexion des jambes, emphatique abandon du peignoir, sourire à la galerie. Tant d'assurance me fait considérer avec un peu d'inquiétude mon champion à moustache, assis dans son coin, modeste et rêveur. Son visage n'est pas abîmé du tout et cela me tracasse un peu; il pourrait être celui d'un marchand de nouveautés ou d'un garçon d'honneur un peu ébloui par la noce. En outre, il a l'œil trop rond, à mon avis, pour un champion de sa catégorie. Il a l'air d'attendre chez le dentiste en rêvant à des chagrins d'amour. Quelque chose de somnambule.
Je commence à me demander s'il n'est pas prématurément marqué par le signe du Knock-out.
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Il y a longtemps qu'on ne va plus à Roland-Garros pour voir gagner les français, mais cela n'enlève rien au charme de ces réunions; bien au contraire, elles sont d'autant plus charmante que la passion en est exclue.
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Un bistrot de mon quartier vient de moderniser son établissement. A ce préambule, vous dites : « Bon, ça y est ! Le voilà encore qui nous écrit son papier avec une plume d'oie entre une chandelle de suif et la tabatière de ses aïeux ; il va encore nous gémir cent lignes sur quelque vieillerie, pleurnicher sur les moulins à vent et repousser du pied les fallacieux bienfaits de notre siècle. » C'est exact.
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Tour de France 1952 (Les pavetons de l'enfer).

Tout cela, évidemment, m'a donné envie de faire une étape à moto. Et pour que l'expérience soit plus riche, le sort m'a réservé cette étape que les coureurs appellent "l'enfer du Nord". Il ne s'agit pas de ces bonnes intentions qui, après tout, feraient à l'enfer un pavage assez roulant, mais de pavés vrais, exquisément concrets, authentique invention des ingénieurs du XIIIe siècle, et non pas de ces pavés en mosaïque, ajustés à la règle, et qui font sous les sains boyaux des coureurs un crépitement léger, presque agréable, mais de ces gros pavés au sens le plus pavé du mot, pavés de style royal, casseurs de roues de carrosse, chahuteurs d'entrailles et tourmenteurs de cyclistes.
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Cette course contre la montre a encore l'avantage de nous laisser, à nous autres, un peu de temps pour voir le paysage.
J'adore la Lorraine avec ses belles routes d'invasion, ses chers vieux tas de fumier qui forment depuis Charlemagne ces collines inspirées et ces bistrots où nos petits soldats, de père en fils, vont prendre la mirabelle dans l'intervalle des batailles.
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J'adore les querelles de famille quand elles sont vraiment des querelles de famille; c'est un signe de santé, cela prouve que la famille se porte bien. Les querelles d'idées m’écœurent, ces idées qui viennent on ne sait d'où, comme des épidémies exotiques colportées par des mouches à mots. Se battre pour des idées, c'est une idée de fou. C'est même un peu dégradant, à la longue, de s'égorger pour des ombres qui n'ont ni père ni mère.
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"Après des bords et des bords tirés sous la pluie et dans une mer cassante, le bateau se trouva tout d'un coup dans l'azur et le grand calme".
Telles sont les premières lignes d'un récit qui, j'espère, va commencer tout à l'heure.
Elles n'ont rien d'extraordinaire mais les guillemets lui sont dûs car il s'agit d'une citation.
Et non seulement c'en est une, mais elle est de moi.
Ça commence bien ...
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Il est un peu tard pour parler de la grève du métro, surtout que je n'ai rien de très original à en dire, ni pour ni contre. En principe, je ne crois pas plus au caractère sacré de la grève qu'à la prétendue sainteté du travail. En outre, sans informations précises, je ne puis réclamer, comme je l'entends faire parfois, l'extermination pure et simple de la caste des poinçonneurs, sous prétexte qu'ils fournissent un travail indigne de ce nom. S'il fallait s'en prendre à tous ceux qui fournissent un travail indigne de ce nom, il y aurait fort à faire et je me demande bien souvent si écrire des chroniques est un travail digne de ce nom. Le poinçonneur n'est pas un personnage essentiellement dérisoire ; il s'apparente à tous les enfileurs de perles, et rêvasser en enfilant des perles ou caresser des chimères en poinçonnant des billets honore autant la condition humaine que revendre en troisième main un lot de bas de soie au cours d'un apéritif d'affaires. De toute manière, un poinçonneur, même en grève, est plus sympathique qu'un portillon, même détraqué. Donc, ne comptez pas sur moi pour faire le procès du poinçonneur ; au plus avouerai-je ma tentation de renvoyer, pour son bien, tout ce prolétariat cryptique à l'agriculture d'où il vient, laquelle, par exemple, pourrait lui offrir, pour commencer, un sécateur à vendanger dont le maniement lui rappellerait les ivresses du poinçonnage aux heures de pointe. On en profiterait, bien sûr, pour murer une fois pour toutes les bouches du métro et rendre à l'air libre une population qui, de toute évidence, a la nostalgie de la marche à pied.

A propos de cette grève, on s'émerveille une fois de plus de l'angélique patience du public parisien : « La bonne blague, dit-on, que ce peuple prétendu frondeur ! Il encaisse toutes les brimades sans broncher, il a perdu les belles réactions de sa jeunesse, il est mûr pour n'importe quelle tyrannie, et gouverner un tel peuple est un jeu d'enfant. » Jugement hâtif, peut-être. Je penserais plutôt qu'en manifestant, soit contre les poinçonneurs, soit contre un gouvernement fauteur de chienlit, les Parisiens eussent témoigné d'une édifiante passion pour l'ordre, chose qui, assure-t-on, n'est pas dans leur vraie nature. Réjouissons-nous au contraire de voir le public accepter avec allégresse une telle rupture des routines quotidiennes et envisager avec si peu d'impatience le retour dans les tunnels du conformisme ferroviaire. Voilà qui prouve une belle vitalité ; il faut être jeune pour aimer la pagaille ; tout ce qui vient empêcher la machine de tourner rond est accueilli comme une aubaine et ce que les observateurs superficiels prennent pour de l'apathie est en réalité une prise de position en faveur du désordre, l'affirmation d'un goût vivace pour les aléas de l'anarchie, la plus sûre garantie enfin que puisse nous donner la population parisienne de son inaptitude aux futures disciplines de la technographie sociomaniaque, stakanovicieuse et totayloritaire où les poinçonneurs dopés feront des heures supplémentaires pour augmenter la production des petits trous, à la gloire de l'humanité en marche dans les souterrains de l'émancipation matérialiste.

Il y a aussi, dans cette patience des Parisiens, la séduction du pire. Depuis quelque temps en effet, à chaque scandale, à chaque brimade, à chaque démonstration de la capilotade parlementaire, à chaque pitrerie, escroquerie, tartuferie du IVe Gang, à chaque culbute des cabinets cascadeurs, le public, vidé de toute indignation, préfère défier le destin et claquer gaiement du doigt en se disant : « Tant mieux ! Remettez-nous ça ! Vivement que ça pète ! » Comme si chaque tournant de la vrille nous rapprochait de je ne sais quel point de chute sur je ne sais quel fond élastique tapissé d'espoirs. L'histoire nous offre évidemment quelques exemples de redressement à partir de zéro, mais on rebondit toujours un peu moins haut et, à bien réfléchir, aucune loi ne garantit le rebond.
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Tour de France 1952 (les belles filles du talus).

J'ai vu aussi pas mal de bonnes sœurs entourées de leurs petites écolières pour qui le divertissement était de tout repos; Evidemment, si les cent vingt-deux gaillards en caleçon pimpant avaient mis pied à terre, je pense qu'elles eussent ramené en vitesse leurs brebis dans les profondeurs du pensionnat.
Mais si le Tour s'arrêtait à tous les tournants, il y perdrait son génie et sa raison. Sa vertu est justement qu'il passe et c'est même chose déchirante de voir, par exemple, assises tout au long de la route, parmi les fougères du talus, tant de belles filles qui vous adressent des sourires et des signes qui, à soixante à l'heure, n'engagent à rien; et, bien sûr, plus on va vite, plus elles vous témoignent d'enthousiasme et d'ardeur.
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