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Citations de James Hadley Chase (1066)


Oh ! Non, fit-il. Ma propre mort m’importe peu. La date et la façon dont je mourrai, je m’en fiche éperdument. Non, c’est la mort des femmes qui me passionne.
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- Je suis vivement intéressé par la mort, dit Crane en souriant.
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Nous sommes censés avoir un libre arbitre ; eh bien, profitons-en.
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Je n’ai pas l’intention de vous dénoncer. Je ne crois pas à la justice. Ce n’est qu’une forme détournée de la vengeance.
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- Allons, allons, fit Sir Hugh en versant deux énormes mesures de whisky dans les verres qu’il venait de sortir de son tiroir. Vous êtes nerveux comme une jeune mariée. Buvez donc ça et remettez-vous.
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Vous m’intéressez, parce que vous êtes pourri jusqu’à la moelle des os, dit-il. Cette vilénie, c’est votre seconde nature, hein ?
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Petite saleté ! fit-il plein de hargne. Vous vous en fichez pas mal à présent que vous avez trouvé un beau garçon. Vous êtes en train de vendre votre peau, hein ? Je sais. Vous êtes toutes pareilles. Vous vous vendez pour des robes ou de quoi vous remplir la panse. Ce qui arrive vous est bien égal, et à lui aussi… Il me jettera dehors… Me livrera à la police… Qu’importe, si vous lui accordez ce qu’il demande !
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Elle était peut-être moche, mais c’était une femme ; en sachant si prendre, elle lui rendrait service, et le fait qu’elle était sourde arrangeait bien les choses.
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Un homme ne peut pas vivre indéfiniment seul. Une femme rend des services.
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Un vent de mort l’effleura, le plongeant dans les ténèbres.
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À l'heure où les premières bandes rouges annonciatrices de l'aurore commençaient à rayer le ciel nocturne, Harry Mitchell sortit précautionneusement de sa cabine. Il était en slip de bain et portait la valise de Riccard-Boule-de-billard. Les deux seuls objets qu'il en avait gardés étaient le Luger automatique et la boite de cartouches. Il les avait cachés sous une planche disjointe près de son lit.
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J'entrai dans le hall de l'hôtel Calloway quelques minutes après dix heures.
Un vieux monsieur à cheveux blancs était assis au bureau de réception. Près de la porte se trouvait un palmier poussiéreux dans un pot de cuivre. Eparpillés dans la pièce, on voyait cinq fauteuils en rotin dans lesquels personne, semblait-il, ne s'était jamais assis. Une atmosphère sordide se dégageait de ce lugubre tableau. Je m'arrêtai et regardai autour de moi.
Assise dans un coin, dans l'unique fauteuil de cuir, une femme pauvrement vêtue, une cigarette entre ses lèvres outrageusement fardées, tenait les yeux fixés sur moi.
L'espace d'un moment, je ne pus reconnaître Rima. Elle n'avait plus ses cheveux couleur d'argent ; ils étaient teints en rouge brique et coupés court, à la garçonne. Elle portait un tailleur qui n'en avait plus guère pour longtemps. Son chemisier vert crasseux semblait avoir perdu sa couleur à force d'être trop souvent lavé.

Je traversai lentement le hall, sous le regard du vieux réceptionniste, et m'arrêtai devant elle. Nous restâmes à nous dévisager.

Elle s'était drôlement décatie depuis la dernière fois où je l'avais vue. Son visage bouffi était d'une pâleur malsaine. Elle portait beaucoup plus que ses trente ans. le rouge dont elle avait tamponné ses joues ne faisait illusion à personne, sauf, peut-être, à elle-même. Elle avait les yeux durs et indifférents d'une tapineuse professionnelle : on aurait dit des pierres trempées dans de l'encre bleu-noir.
Je fus péniblement affecté de voir combien elle avait changé. le son de sa voix au téléphone avait évoqué dans mon esprit l'image de la fille que j'avais vue onze ans plus tôt, mais cette femme était pour moi une inconnue. Pourtant je savais que c'était Rima : malgré les cheveux rouges et la dureté des traits, on ne pouvait pas s'y tromper.
Le regard des yeux de pierre parcourut rapidement mon complet, l'imperméable que je portais sur le bras, et mes souliers ; puis, il se posa sur mon visage.
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Je lui jetai un regard sans tendresse.
Elle portait un vieux sweater et un pantalon bleu tellement rétréci par les lavages qu’il ne lui arrivait même plus aux chevilles et lui bridait les fesses. Une mèche de ses cheveux bruns lui tombait sur un œil et elle avait une tache de poussière sur le menton. Une demi-heure plus tôt, je me serais dit qu’elle était plutôt bien roulée, mais maintenant j’étais encore ébloui par la robe de toile bleue et les formes agressives qu’elle contenait.
— Pour l’amour de Dieu, Ann, tu ne pourrais pas t’attifer autrement ? Ce pantalon te fait un derrière deux fois plus gros que nature, et ce sweater est tout juste bon à mettre aux vieux chiffons.
Je vis l’air stupéfait qui envahit brusquement son visage, puis elle se mit à rire.
— Je suis désolée, chéri. Je sais que je suis horriblement fagotée, mais je viens de faire un tas de choses. Je vais me changer. (Elle me mit les bras autour du cou.) Je suis désolée d’avoir l’air d’une souillon, mais j’ai été tellement occupée !
J’eus tout à coup honte de lui avoir parlé sur ce ton et le sang me monta au visage.
Je restai quelques minutes assis à mon bureau, irrité, excité et un peu mal à l’aise. Je ne m’étais jamais disputé avec Ann. Je ne l’avais jamais critiquée. Je voyais encore le regard stupéfait, blessé qu’elle m’avait lancé quand je l’avais quittée. Je pensais à Gloria et à moi, à nos airs de conspirateurs en entendant la voix d’Ann. Il n’y avait pas de doute, il fallait que tout ça cesse. Quand Gloria viendrait pour amener sa voiture, je lui dirais que j’avais changé d’avis. Si elle garait chez moi, je la verrais souvent. Je me rappelais ce regard quand elle avait fait semblant de m’enlever un brin de duvet. Les femmes n’ont cet air-là que quand elles cherchent des histoires. Je sentis quelque chose de froid et d’humide qui me coulait sur le visage. Rien qu’à penser à elle comme ça, je transpirais.
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Une fille se promenait autour des établis : vêtue d’une robe de toile bleu marine, sans chapeau, elle portait un sac à main en lézard accroché à l’épaule.
— Bonjour, fis-je en me demandant ce qu’elle voulait. Qu’est-ce qu’il y a pour votre service ?
Elle se retourna.
Vous est-il arrivé de bricoler dans un commutateur électrique défectueux et de recevoir une bonne secousse dans le bras ? C’est à peu près ce que je ressentis quand elle se retourna : une secousse qui me traversa tout le corps ; j’avais la bouche sèche et mon cœur battait à se rompre.
Il ne faut pas en déduire que c’était une beauté. Non ; son visage et sa silhouette attiraient l’attention, évidemment, et les hommes devaient la regarder à deux fois, même à trois, mais c’était encore autre chose. Elle avait ce que les hommes recherchent : appelez ça du sex-appeal, si vous voulez, mais c’était plus que du sex-appeal. Une sensualité animale, quelque chose qui avait l’air de sortir en ligne droite de la jungle…
Son visage était un peu trop long et étroit pour prétendre à la beauté, mais elle avait des pommettes hautes qui lui donnaient un peu l’air d’une Chinoise et, dans ses yeux sombres au regard brûlant, on pouvait lire la promesse à demi voilée de délices indicibles.
Et puis elle avait des formes aussi provocantes qu’ostensibles. La robe qu’elle portait n’était pas conçue pour masquer les lignes de sa silhouette, mais au contraire pour les accuser. Ses petits seins tendaient la toile sombre comme pour la percer. La taille fine s’élargissait vers des hanches pleines qui, à leur tour, descendaient en s’affinant vers de longues jambes fines gainées de nylon.
— Hello ! Harry, fit-elle en souriant et en montrant ses dents blanches.
Et quand elle souriait, il y avait dans ses yeux un éclat qui valait la peine d’être vu.
Plusieurs fois pendant ces deux derniers jours, son souvenir m’était revenu insidieusement à l’esprit et je m’étais demandé si je la reverrais jamais. J’étais parvenu à me convaincre à moitié qu’elle ne viendrait pas et voilà… elle était là, sortie de l’ombre maintenant, plus excitante encore et beaucoup plus dangereuse que mon imagination ne l’avait faite lorsque je m’étais laissé aller à penser à elle.
— Eh bien ! pour une surprise… Je ne m’attendais pas du tout à vous revoir.
J’avais du mal à reconnaître ma voix qui avait tout d’un croassement rauque. Elle m’examinait des pieds à la tête du même air absorbé que je devais avoir, moi, pour la dévisager.
— J’avais dit que je viendrais.
Tout à coup, je me rendis compte que Tim nous regardait et je fis effort pour me reprendre.
Son regard glissa de moi à Tim, puis s’arrêta assez longtemps sur lui pour que le garçon se mette à rougir et s’en aille à l’autre bout du hangar.
— Il a l’air amusant, ce garçon. Il travaille avec vous ?
— Il est plus malin qu’il n’en a l’air.
— Je préfère ça, fit-elle en riant ; je voudrais garer ma voiture ici.
Je me rendis compte alors, comme par une réaction instinctive que je devais lui dire que j’avais changé d’avis. Ce que je ressentais, maintenant que j’étais devant elle, était trop inquiétant. Il ne fallait plus la revoir. Il fallait arrêter ça avant que ça n’aille trop loin. Je le savais. Je savais que si je la revoyais, ça ferait du dégât.
Ma raison me disait que ça ne marchait pas, mais ma voix dit autre chose :
— D’accord. Si vous garez là-bas contre le mur, vous ne serez pas sur mon passage et ça vous sera plus facile pour entrer et sortir.
Le froncement de sourcils disparut et ses yeux se remirent à briller.
— Parfait, fit-elle en ouvrant son sac. Je vais vous payer un mois d’avance. Donnez-moi un reçu.
— Venez dans mon bureau.
Elle s’assit sur la chaise boiteuse à dossier droit et croisa les jambes sans beaucoup se gêner. D’où j’étais, je voyais un genou et un petit triangle de cuisse blanche à l’endroit où la jupe s’était relevée. J’avais la bouche aussi sèche que si elle avait été pleine de poussière.
Je sortis mon carnet de reçus et en remplis un. J’avais du mal à écrire lisiblement : on aurait dit l’écriture d’un vieillard de quatre-vingt-dix ans.
Lorsque je relevai les yeux pour lui tendre son reçu, je vis qu’elle m’observait. J’avais comme une idée qu’elle se rendait bien compte de l’état dans lequel elle me mettait, mais lorsqu’elle sourit, ses yeux ne trahissaient rien de ses pensées. Elle me lança un long regard de ses yeux en amande, ferma son sac et se leva.
Elle vint vers moi. Je m’étais levé et j’avais quitté le bureau. Son parfum était aussi capiteux que sa silhouette.
— Vous voulez des idées ?
— J’y réfléchirais volontiers. Je ne suis pas fier.
Elle leva la main et chassa un imaginaire brin de duvet sur mon revers. Il y avait dans le regard étincelant de ses yeux noirs une invitation qui ne laissait place à aucun doute. Je me rendis compte que je serrais les poings derrière mon dos pour éviter de la prendre dans mes bras.
— Alors, j’y penserai. Il se pourrait que j’aie une idée pour vous.
— Harry !
La voix d’Ann mon épouse emplissait l’escalier.
Nous reculâmes chacun d’un pas comme si quelque force invisible se fût glissée entre nous pour nous séparer brutalement.
— Tu es là, Harry ?
D’un pas un peu hésitant, j’allai ouvrir la porte.
— Oui, qu’est-ce qu’il y a ?
— Pourrais-tu monter un moment ?
— J’arrive.
— C’est votre femme ? fit-elle tout bas.
Et elle se rapprocha de moi de nouveau.
— Oui. Il faut que j’y aille.
Nous parlions comme des conspirateurs.
— J’amènerai la voiture demain. Au revoir, Harry.
— Au revoir.
Elle glissa devant moi et traversa le garage d’un pas rapide. Je remarquai qu’elle roulait légèrement les hanches en marchant. Si j’avais été un peu moins troublé je me serais rendu compte qu’elle le faisait exprès.
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Au bout de quelques pas, il perçut une forte odeur d’hydrocarbures. Il poursuivit son chemin, puis s’arrêta en distinguant, le long du mur de la galerie, cinq ou six barils à pétrole. Il en fit basculer un. Le baril fut très facile à déplacer. Il était vide. Girland réfléchit un instant. Un baril à pétrole devait flotter, songea-t-il. Ce serait peut-être une solution pour franchir la nappe d’eau qui obstruait la galerie devant eux.
Sur ces entrefaites, il entendit arriver Mala et l’attendit. Elle traînait péniblement le sac de montagne et le fusil.
— Je ne pouvais pas supporter de rester seule, dit-elle. Je suis désolée.
— Regarde ces machins-là ! Nous pourrions fabriquer un radeau. On en attacherait trois ensemble. Allons voir où commence l’eau.
Il l’enlaça et tenant de l’autre main la bougie, il se remit à avancer. Ils n’eurent pas loin à aller et durent bientôt s’arrêter brusquement. Le sol de la galerie descendait en pente raide sur environ trois mètres et disparaissait alors sous une eau noire et visqueuse, qui dégageait une odeur nauséabonde.
— Nous ne pouvons pas passer par là ! s’exclama Mala, avec un mouvement de recul. C’est impossible !
— C’est pourtant le chemin, mon chou, et c’est par là que nous allons passer.
Il posa le sac et le fusil, fouilla dans le sac et y prit une autre bougie qu’il alluma aussi. Il remit les bougies à Mala, et retourna près des barils de pétrole. Il en renversa un sur le côté et le fit rouler jusqu’au bord de l’eau. Mala le suivit. Ils retournèrent ensuite chercher un second baril. Au moment où il le faisait basculer, quelque chose s’agita soudain à proximité ; une ombre noirâtre lui passa sur le pied et disparut dans l’obscurité. Mala poussa un cri et recula, en lâchant une des bougies.
— C’était un rat ! s’exclama-t-elle en frissonnant.
— Eh bien, il est parti maintenant, dit Girland en ramassant la bougie. (Il la ralluma à celle qu’elle tenait dans sa main tremblante.) Allons, mon chou, ne pique pas ta crise de nerfs ! J’ai besoin de toi. (Il se tourna vers le deuxième baril.) Attends-moi ici. Je vais revenir chercher le troisième.
— Je vais avec toi ! s’écria Mala. Tu crois qu’il y a d’autres rats ? ajouta-t-elle en jetant des coups d’œil angoissés autour d’elle.
— Je ne pense pas, prétendit Girland en se rappelant ce que lui avait expliqué Jan. (Il ne voyait pas l’utilité de lui dire la vérité. Elle était déjà suffisamment terrorisée comme ça.)
Il fit rouler le fût de métal au bord de l’eau et le dressa à côté du premier. Mala était toujours sur ses talons. Ils retournèrent chercher le troisième baril. En le déplaçant, il aperçut ce qu’il prit d’abord pour un serpent. Son premier réflexe fut de sauter en arrière, mais il se domina et, immobile, dit à mi-voix :
— Donne-moi une bougie.
A l’angoisse qui perçait dans la voix de son compagnon, Mala se pétrifia de terreur. Elle lui remit la bougie. Élevant à bout de bras la flamme vacillante, il examina ce qu’il avait pris pour un serpent. C’était un rouleau de corde.
— Cette fois, la chance est avec nous, dit-il ; il se baissa pour prendre le rouleau. Une énorme araignée était tapie dessous. Elle détala et disparut dans le noir non sans avoir frôlé Mala qui, à sa vue, fit un bond en arrière en étouffant une exclamation.
— Ce n’est qu’une araignée, dit Girland. Voyons, tu es une grande fille maintenant. Tiens… prends la corde. Je vais m’occuper du baril. (Il lui tendit le rouleau et lui sourit.) N’oublie pas que nous avons un rendez-vous : le souper le plus fastueux de Paris !
— Je n’oublie pas, dit-elle et prenant le rouleau de corde, elle se le passa à l’épaule.
— C’est bien, ça ! Allez, viens !
Et Girland se mit à faire rouler le troisième baril.
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Un homme n’aime pas qu’on défende sa femme quand il est là pour le faire.
.../...
Il avait cet air à la fois indulgent et exaspéré qu’ont les gens qui parlent à un fou.
.../...
Le 38 était sur la banquette, à côté de moi, le 22 dans ma poche-revolver. J’étais prêt à tout. Si on me tirait dessus, j’étais décidé à répondre dans la même langue : c’était comme ça.
.../...
C’est là que j’aurais dû dire non et m’en aller, quitte à risquer une balle dans le dos. C’est là que j’aurais dû me rappeler les propos de Tom Roche sur les grosses fortunes trop vite faites et les ennuis qui vont avec. Mais je n’ai pas dit non.
.../...
Elle était toujours accroupie près du cadavre. Avec ses yeux noirs étincelants levés vers moi et ses doigts rougis de sang, elle était d’une effrayante beauté : une goule.
.../...
il y avait aussi peu de monde qu’à l’enterrement d’un pauvre.
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Vous voulez que je vous raconte ? »
Je lui répondis que les timbres ne m'intéressaient pas.
« je vous propose un marché. Qu'est-ce que vous en dites ? »
Je répondis qu'étant en vacances et sans rien d'autre à faire, j'étais prêt à écouter.
« Vous serez pas déçu, mon vieux. Vous avez faim ? »
Je répondis que non.
Il secoua la tête, l'air désapprobateur.
« Quand on a l'occasion de manger, mon vieux il faut manger. On sait jamais quand on aura la possibilité de remettre les pieds sous la table. »
Je répondis qu'il y avait là, en effet, matière à réflexion.
« Chaque chose en son temps, mon vieux, je reviendrai à lui plus tard. Je veux que cette histoire vous apparaisse dans son déroulement exact. (Barney jeta un regard anxieux à Sam qui était en train de servir une autre bière.) Pas à pas… une chose à la fois. Pour que vous compreniez le topo, il faut que je vous raconte tout ça à ma manière. »
Je lui déclarai que je n'y voyais aucun inconvénient et lui demandai s'il voulait bien commencer son récit.
« Je débuterai donc par Joey Luck et sa fille, Cindy, diminutif de Lucinda, parce qu'ils jouent un rôle important dans le vol des timbres Larrimore. (Il me gratifia d'un regard rusé.) Vous ne saviez même pas que ces timbres, qui valent un million, avaient été volés, je parie ? »
Je lui répondis que si je l'avais su, ça m'aurait laissé de glace
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Au retour de Cindy, Joey comprit rapidement qu'il s'était passé quelque chose. Elle avait ce regard lointain qu'ont les filles quand elles en pincent pour un gars. (Barney se tut un instant et poussa un profond soupir.) Si je vous disais le nombre de fois, quand j'étais jeune, où j'ai vu cette expression dans les yeux d'une fille, vous en seriez épaté. Tout comme moi, Joey reconnaissait les symptômes, et il s'est brusquement senti glacé, mais il a été assez malin pour ne pas poser de questions.
A la nervosité que manifestait Cindy en rentrant, Joey comprit qu'elle allait enfin parler. le père avait eu six jours pour s'habituer à l'idée que, finalement, Cindy était tombée amoureuse. Il n'avait cessé de se répéter que c'était inévitable et il savait à présent que s'il ne voulait pas perdre Cindy il lui faudrait jouer serré. Il pouvait s'agir d'une simple amourette, une passade, mais en fait, il en doutait. Il décida qu'il n'y avait qu'une chose à faire : se montrer compréhensif, feindre d'être très heureux à l'annonce de cette nouvelle et espérer que le gars serait à la hauteur et ne laisserait pas tomber Cindy. L'idée de passer le reste de ses jours seul le déprimait, mais il savait qu'il devait accepter cette perspective. Il essaierait de persuader Cindy de ne pas faire un mariage précipité, mais en usant de douceur.
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Luceville, qui se trouve à quelque douze cents kilomètres au nord de Paradise City est une ville industrielle d’une grande étendue sur laquelle plane perpétuellement un épais nuage de poussière et de fumée. Sa principale industrie est le traitement de la pierre à chaux. Au cas où vous ne le sauriez pas, on broie la pierre à chaux pour en tirer la chaux, le ciment ainsi que les matériaux nécessaires à la construction et au revêtement des routes. C’est d’ailleurs également la principale industrie de la Floride. Alors que j’approchais des faubourgs de la ville, la poussière de ciment commença à me coller à la peau, et je me sentis sale et poisseux. Cette poussière recouvrit bientôt mon pare-brise et la carrosserie. Pas le moindre rayon de soleil. Si puissant fût-il, il n’avait pu percer la calotte faite de fumée et de poussière de ciment qui pesait sur la ville. Le long de l’autoroute menant au centre s’échelonnaient des usines de pierre à chaux, et le bruit de la roche broyée résonnait comme un lointain tonnerre.
Je découvris l’hôtel Bendix qui, aux dires du docteur Melish, était le meilleur de la ville, dans une petite rue transversale coupant la grand-rue. Un endroit lugubre. Les portes de verre disparaissaient sous la poussière de ciment ; le hall était meublé de sièges de rotin branlants et la réception se réduisait à un simple comptoir surmonté d’une planche où étaient accrochées des rangées de clés. Comme changement de décor, ça se posait un peu là. Je m’approchai de la fenêtre grande ouverte et plongeai mon regard sur la rue. Elle grouillait de passants tous misérablement vêtus, la plupart crasseux. Quant aux femmes, elles faisaient leurs emplettes. Ça fourmillait également de gosses qui auraient eu grandement besoin d’un bain. Les voitures qui encombraient cette rue étaient toutes recouvertes de poussière de ciment. J’appris par la suite que cette poussière constituait l’ennemi numéro un de Luceville, l’ennemi numéro deux étant l’ennui. Puis j’allai faire un tour. Luceville n’avait rien d’autre à offrir que poussière et misère. Je déambulai dans le district qui sur le plan de Jenny portait le numéro 5. Je me trouvais dans un univers dont jusque-là je ne soupçonnais même pas l’existence. Après Paradise City, j’avais l’impression de m’enfoncer dans l’Enfer du Dante. Chaque passant repérait en moi un étranger à la ville. Tous s’écartaient de moi et certains se retournaient et chuchotaient entre eux. Des gosses sifflaient sur mon passage et certains imitaient des bruits ignobles.
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Vêtue d’un bikini bleu ciel, elle posait sur le sable, devant une poignée de photographes en sueur ; les uns debout, les autres agenouillés, ils formaient un demi-cercle autour d’elle, cependant qu’une foule dense, massée sur la Croisette, contemplait ce spectacle avec une curiosité avide. Blonde, très jeune, elle était dotée d’une anatomie répondant aux normes requises par le monde du cinéma. Sa peau avait la couleur du miel liquide. Elle était jolie, avec des traits délicats et une expression vive et enjouée qui devait être extrêmement photogénique.
.../...
Sophia s’appuya contre lui et frotta sa joue contre l’épaule de son mari. — Tu es un amour, dit-elle doucement. J’ai vraiment un mari en or ! Delaney bomba le torse avec satisfaction. — Puisque nous en avons les moyens, autant en profiter, remarqua-t-il. Plus je vais, plus je constate que l’argent arrange tout ! Mais Sophia se disait que toute la fortune de Floyd ne suffirait pas à effacer les conséquences du crime de Jay. Un meurtre ne s’arrange pas !
.../...
Le remords l’étreignit à la pensée de cette minute atroce où il avait serré le cordon autour du cou de la jeune fille. Pourquoi avait-il fait cela ? Ce n’était pas par ennui, par dégoût d’une vie trop monotone, comme il l’avait raconté à Sophia pour tenter de se justifier. Ce n’était pas non plus pour mettre son courage et son intelligence à l’épreuve. C’était là un autre mensonge, forgé pour tenter de se justifier à ses propres yeux. Un frisson le parcourut : il comprenait maintenant qu’il avait tué, mû par une impulsion irrésistible. Une force, qu’il n’avait pas été en son pouvoir de maîtriser, l’avait poussé au crime. Etait-ce donc cela que les gens appelaient la folie ? Etait-il vraiment un malade ?
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