AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Jean-Pierre Guéno (232)


Je rendais mes cartons à la Musique, quand je me suis retourné machinalement sur la ville, la cathédrale vivait, et elle disait : "Je suis belle de tout mon passé. Je suis la Gloire, je suis la Foi, je suis la France. Mes enfants qui m'ont donné la Vie, je les aime et je les garde." Et les tours semblaient s'élever vers le ciel, soutenues seulement par un invisible aimant.
Commenter  J’apprécie          50
5 octobre 1999 : le parlement français adopte une proposition de loi reconnaissant "l'état de guerre en Algérie" dans les années 1950. Il aura fallu près d'un demi-siècle pour requalifier les faits jusque-là définis comme des "événements".
Commenter  J’apprécie          50
A l'heure où les textes semblent domestiqués, mis en boîte, mis en page automatiquement par ordinateurs interposés, les manuscrits vous disent encore le souffle, le signe, la preuve écrite du fait que des hommes et des femmes ont créé, ont aimé, ont souffert et vécu en confiant à la page blanche les hésitations, les repentirs, les élans, les plaisirs et les tristesses, les ratures de la petite musique de l'âme humaine. Ils vous diront que seule l'écriture retrace les étapes successives de la création, la respiration, la pensée de l'auteur, le geste de sa main, les détours de ses repentirs. (...)
Les grands manuscrits de notre littérature vous diront l'incroyable finesse du pinceau des enlumineurs du Moyen Age, capables de peindre des paysages en miniature avec des sujets, de deux centimètres sur trois, si fins qu'ils supportent aujourd'hui l'agrandissement au format des publicités du métro...
Ils vous diront que l'homme vêtu de son pourpoint et de ses poulaines savait combiner, pour créer ses encres et ses teintes, le règne animal, le règne végétal, le règne minéral et le règne humain : il utilisait des couleurs fabriquées avec de la pierre écrasée, des plantes pilées, des cuirs macérés et... du sang de jeunes hommes roux égorgés lors des nuits de pleine lune...
(...) Ils vous diront encore les phrases enflammées de George Sand, les paperoles de Proust, la seine d'Apollinaire, le papier bleu de Colette, les calligrammes de Cocteau... (..)
Vous comprendrez alors qu'un texte prend ses racines dans son manuscrit original; que ce livre n'avait pas pour objet de bâtir un panthéon, un dictionnaire de l'académisme littéraire, mais tout simplement de vous inciter à penser que si l'homme a mis plus de cinq millions d'années pour apprendre à écrire et pour dérouler jusqu'à vous la longue chenille de l'écriture, c'était pour mieux vous apporter à travers ses manuscrits originaux, à travers cette poussière d'étoiles, cette poussière de Graal qui teinte son encre et les mots qu'il enchaîne, la vibration, l'émotion de sa vie, de sa langue, et de sa culture.
Commenter  J’apprécie          50
Extrait d'une lettre de Consuelo à Antoine de St Exupéry datant de 1943 :

Mon Tonnio,
Je suis dans ton petit salon de Bevin House. Le "Petit prince" est là sur la table où il est né. Mon aimé. Quand reviens-tu ? Je sais mal t'écrire, j'enlève mes lunettes à chaque phrase, à cause des larmes, mais ici, dans ton bureau, je te tiens plus près de moi. Toi chéri, demande à tes étoiles amies de nous protéger, de nous réunir. J'écris beaucoup mais une fois les lettres dans l'enveloppe je les déchire elles ne peuvent pas dire tout ce que je veux te donner. Mon Tonnio je ne veux pas que vous soyez triste, je ne veux pas que vous soyez seul comme un papillon qui n'a pas de fleurs. Mon bien aimé puisque vous me donnez le pouvoir de régner dans ton cœur, dans ton corps, prends tout mon parfum toute mon âme. Fait avec une brise qui rafraîchisse ton visage qui caresse tes mains que j'aime tant ! Chéri, moi aussi dans l'éternité je t'attendrai sagement si je pars la première. Mais Dieu est bon et il veut nous voir ensemble parce que je lui ai tant demandé : la paix et l'amour pour ma maison. Notre maison. Aussi humble qu'elle puisse être dessous un arbre, avec mon mari et mon chien, je chanterai son nom les soirs et les jours et je serai bonne pour les passants. Et tu arracheras aux étoiles des poèmes de justice et de lumière pour les peuples anxieux ou inquiets. J'aime tes lettres. Je rentre dans le plus beau de moi même, dans les plus divines que le ciel m'a permis de goûter. Tu reviendras mon époux guerrier. Tu reviendras à moi, tu reviendras à la vie, aux amis, à faire un beau livre que tu m'offriras pour tes anniversaires sans fin que nous aurons encore sur cette planète. J'ai trouvé dans ta lettre le ton, la note l'odeur de nos premières joies, de nos premières rencontres de nos premières afflictions et surtout l'amour complet que tu voulais bien me donner dans nos premières années de mariage, merci mon mari. Reviens me le donner. Et si le ciel m'aide je saurai le garder. Et je n'aime pas t'envoyer des vieilles lettres écrites dans les nuits veuves. Je te chante ma seule chanson mon seul chant d'amour. Pour toi. Je t'embrasse d'un si long baiser jusqu'à ton retour. Ta femme.
Commenter  J’apprécie          50
Je crois que collectivement en France, à la Libération, il y a eu la volonté de jeter un voile, d'oublier beaucoup de choses qui s'étaient passées et nous n'avions pas à parler parce qu'il n'y avait personne pour nous entendre.
Commenter  J’apprécie          50
Nous n'avions pas la prétention de faire œuvre d'historiens en assimilant autant de documents d'une telle force et d'une telle intensité en quelques semaines : notre démarche est avant tout humaniste et littéraire. Il s'agissait simplement de faire entendre ces cris de l'âme confiés à la plume et au crayon, qui sont autant de bouteilles à la mer qui devraient inciter les générations futures au devoir de mémoire, au devoir de vigilance comme au devoir d'humanité.
Commenter  J’apprécie          50
L'enfance est un secret, un coffre aux trésors dont nous gardons pour toujours la clé, un rêve à rêver pour toujours, une histoire qui recommence à chaque instant, l'enfance est tous ces enfants à venir, des millions d'enfants et autant de souvenirs. L'enfance est ce tout petit supplément d'âme, cette petite flamme que l'on garde en soi pour réchauffer son âme.
Commenter  J’apprécie          50
Ils en ont vu ces murs divisant la prison
Ces murs où sont gravés d'étranges souvenirs
Quand vient la nuit ils parlent, ils gémissent et ils souffrent
Ils transpirent de haines et de lointains soupirs
Ils transpirent un parfum plus âcre que le soufre
Commenter  J’apprécie          40
La France a installé les droits de l'homme en Algérie. Simplement, elle a oublié de les lire.
Commenter  J’apprécie          40
J'ai peine à comprendre qu'un jour de bataille soit en même temps un beau jour paisible d'octobre et que tout y soit pareil aux après-midi ordinaires d'automne, sauf que des petites choses dangereuses voltigent dans l'air.
Commenter  J’apprécie          40
Pitié pour nos soldats qui sont morts !
Pitié pour nous vivants qui étions auprès d'eux, pour nous qui nous battrons demain, nous qui mourrons, nous qui souffrirons dans nos chairs mutilées !
Pitié pour nous, forçats de guerre qui n'avions pas voulu cela, pour nous tous qui étions des hommes, et qui désespérons de jamais le redevenir.
Maurice Genevoix, La boue
Commenter  J’apprécie          40
À la place du casque de Prussien, je vais t'envoyer à toi, à Raymond, Maman peut les recevoir aussi, des petites fleurs de primevères que les petits enfants (garçons et filles) du pays où je suis cueillaient autrefois et qui faisaient leur joie, et que moi, le grand enfant, j'ai cueillies cette année dans le jardin pour te les envoyer.
Commenter  J’apprécie          40
Maintenant que je vous ai retrouvée, je viens vers vous avec le même grand respect, la même pureté que jadis. Ne me repoussez pas durement, comme autrefois au premier abord devant l'église St-Germain-des-Prés. Rappelez-vous qu'ensuite vous aviez reconnu qui j'étais. Vous m'aviez laissé vous parler. Car il s'agit de bien autre chose que d'amour. Autre chose de plus pur et de plus mystérieux encore que l'amour. Et en effet, je vous le dis avec déchirement : peu m'importe, à présent, que vous soyez mariée. Cette douleur-là est enterrée aujourd'hui. Mais ce à quoi je ne me résignerai pas, c'est à ne pas vous retrouver, c'est à ne jamais plus vous voir, à passer ma vie sans savoir où vous êtes. Compter sur la mort seulement pour de nouveau, je ne sais où, vous rencontrer ! je vous supplie de me délivrer de cet enfer : "Ne me damnez pas par la privation de votre visage." Je vous supplie de faire attention à cette chose affreuse que je vous dis de tout mon coeur : c'est que je n'ai pas envie de vivre loin de vous.

Henri-Alban Fournier à Yvonne de Quiévrecourt, mai 1913
Commenter  J’apprécie          40
« Poème de Gisèle Guillemot - Fresnes, Juillet 1943 »
Écoute Maman, je vais te raconter
Écoute, il faut que tu comprennes
Lui et moi on n’a pas supporté
Les livres qu’on brûlait
Les gens qu’on humiliait
Et les bombes lancées
Sur les enfants d’Espagne
Alors on a rêvé….
De Fraternité.

Écoute Maman, je vais te raconter
Écoute, il faut que tu comprennes
Lui et moi on n’a pas supporté
Les prisons et les camps
Ces gens qu’on torturait
Et ceux qu’on fusillait
Et les petits-enfants
Entassés dans les trains
Alors on a rêvé…
De Liberté.

Écoute Maman, je vais te raconter
Écoute, il faut que tu comprennes
Lui et moi on n’a pas supporté
Alors on s’est battus
Alors on a perdu.

Écoute Maman, il faut que tu comprennes
Écoute ne pleure pas…
Demain sans doute ils vont nous tuer
C’est dur de mourir à vingt ans
Mais sous la neige germe le blé
Et les pommiers déjà bourgeonnent
Ne pleure pas,
Demain, il fera beau.
Commenter  J’apprécie          44
"Tu t'y feras, ça passera." Cette phrase m'obsède. Elle accueille tous les "bleus" débarquant en Algérie. Je me demande souvent " si je m'y suis fait " ; il me semble que oui. Mon indifférence a vaincu mes larmes et ma révolte.
( p 198)
Commenter  J’apprécie          40
Facteur d'harmonie

Ce n'est pas le fruit du hasard si Gaston Bachelard a été facteur avant de devenir le philosophe du savoir et l'inventeur de la psychanalyse de la connaissance objective. Les facteurs sont les observateurs, les vigies des temps modernes, les lanceurs d'alerte de la vie quotidienne. Le plus beau message qu'ils transportent, c'est le regard qu'ils portent sur
nous. (...)
C'est parce que les hommes doivent entretenir des liens de réciprocité avec tout le "réseau" humain qui les entoure que le facteur est incontournable. Il est simultanément un point de repère et un point d'ancrage; il incarne une force de médiation et d'harmonie à la fois sociale et intergénérationnelle . (p. 259)
Commenter  J’apprécie          40
Jacques Ambrosini était originaire de Speloncato en Haute-Corse. Fils d'agriculteur, engagé dans les Dardanelles contre les Turcs, à l'âge de dix-neuf ans, il finira la guerre comme lieutenant, et ses lettres écrites à son frère François décrivent l'horreur quotidienne du front.

Le mercredi 19 mai 1915
Cher Frangin
Je prends la plume à la main pour continuer mon petit récit. Ce ne sera guère long. Je m'étais arrêté si je ne me trompe au moment où l'on partait pour l'assaut. La baïonnette au canon, on s'élance hors des tranchées. Le capitaine en tête, nous faisons un bond de trente à cinquante mètres, et nous voilà couchés dans la tranchée qu'occupaient nos camarades de 1re ligne.
Les balles avaient bien sifflé, mais personne n'avait été touché. La rage de tuer et poussés par l'odeur de la poudre aussi bien que par les cris des bêtes féroces, car à ce moment-là ont devient des bêtes féroces, pensant qu'à tuer et massacrer, nous nous élançons tout comme un seul homme. Victor est à mes côtés, mais bientôt, dans cette course folle, je ne le vois plus. Les camarades tombent. Presque tous blessés. Ce sont alors des cris de douleur. D'un côté, on entend "ma femme", "mes enfants", de l'autre, "ma mère", "achevez-moi", "ne me faites plus souffrir". Tout ceci te déchire le coeur, le sang coule à flots, mais nous avançons quand même, marchant sur les morts. (...)
Commenter  J’apprécie          40
Premier été; la fleur au fusil... La guerre de mouvement serait courte; l'empereur Guillaume II y laisserait forcément ses moustaches... La propagande battait son plein, mais beaucoup d'hommes ordinaires ne s'y laissaient pas prendre et ne comprirent pas très bien ce qui leur arrivait lorsqu'ils quittèrent soudainement et dans l'angoisse leur famille et leur emploi. Ils n'avaient pas abandonné les bancs de l'école depuis si longtemps, ces quatre millions de Français mobilisés de la première heure : conscrits de fraîche date, réservistes et rappelés plus âgés qui s'en allaient vêtus de leur pantalon rouge et de leur manteau bleu, la tête rasée, sans casque, à travers les champs remplis de coquelicots et de bleuets, comme pour des grandes manoeuvres estivales, que seules les longues marches forcées et la lourdeur du barda pourraient différencier des exercices du temps de paix. Les paysans étaient soucieux : qui moissonnerait? Qui finirait de rentrer la paille? Qui labourerait? Qui vendangerait?
La moisson serait meurtrière et la vendange sanglante; beaucoup ne survivraient pas à ce premier été: ils tomberaient sous les balles des mitrailleuses ennemies; ils finiraient crucifiés dans le piège carnivore des fils de fer barbelés; ils seraient pulvérisés par des tapis d'obus. Ils seraient les premières victimes de la guerre, mais aussi celles des erreurs d'une hiérarchie militaire incompétente qui brillait encore par le culte du sabre et de la baïonnette, et par le mépris de l'artillerie lourde. Et ils tomberaient à l'époque de la rentrée des classes, comme Charles Péguy, comme Alain-Fournier et comme tant d'autres.
Commenter  J’apprécie          40
Riches de la diversité du monde
Nous qui sommes riches de la diversité du monde et des bonheurs particuliers, nous qui défendons avant tout, quand nous défendons notre bonheur, le bonheur des autres, parce que le bonheur des autres est le notre...
Lettre aux Américains
Page 159
Commenter  J’apprécie          40
un soldat écrit à son fils qui lui demande de lui rapporter des balles allemandes et un casque de prussien...

Pour les balles allemandes, je pourrai le faire. J'en rapporterai quand je reviendrai. Pour le casque de prussien, ce n'est pas sûr. Ce n'est pas maintenant le moment d'aller les décoiffer. Il fait trop froid, ils pourraient attraper la grippe. Et puis mon pauvre Maurice, il faut réfléchir que les prussiens sont comme nous. Vois-tu qu'un garçon prussien écrive à son père la même chose que toi et qu'il lui demande un képi de français, et si ce papa prussien rapportait un képi de français à son petit garçon et que ce képi fut celui de ton papa ? Qu'est-ce que tu en penses ? Tu conservera ma lettre et tu la lira plus tard, quand tu sera grand. Tu comprendra mieux.
Commenter  J’apprécie          40



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Jean-Pierre Guéno (2280)Voir plus

Quiz Voir plus

La Grande Guerre

Combien de soldats français se sont engagés

6 millions
2 millions
9 millions
8 millions

3 questions
5 lecteurs ont répondu
Thème : Paroles de poilus : Lettres de la Grande Guerre de Jean-Pierre GuénoCréer un quiz sur cet auteur

{* *}