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Critiques de Jean Starobinski (22)
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La beauté du monde

Pour ceux qui, de près ou de loin, s'intéressent à la littérature, les ouvrages de Jean Starobinski sont des classiques incontournables. La plupart du temps, on ne peut plus lire un auteur après sa critique par Starobinski comme on le lisait avant, même chez les écrivains que nous pensions connaître tels que Rousseau, Montesquieu, Diderot et tant d'autres. Son siècle de prédilection est le XVIIIème avec les Lumières ; il a tenté de les prolonger, c'est-à-dire de renouer l'alliance entre la raison (y compris scientifique) et la littérature, grâce à sa capacité à associer rigueur scientifique et sensibilité littéraire.



Plus connu pour ses travaux sur les lumières et la mélancolie, Jean Starobinski s'est également intéressé à la poésie, aux beaux-arts et à la musique. « La Beauté du monde », un livre de 1320 pages, rassemble de nombreux articles, publiés de 1946 à 2010, qui témoignent de son insatiable curiosité et de son intelligence critique. Les articles portent sur la littérature (Ronsard, Baudelaire, Mallarmé…), la peinture (Goya, Balthus, Michaux…), et sur la musique (Monteverdi, Mozart, Mahler…).



Jean Starobinski est un des seuls a avoir fait de la critique une forme d'art, c'est au partage de son regard qu'invite cet imposant ouvrage dont le titre renvoie à la mission qu'il s'est assignée : lire, regarder, écouter et transmettre « la beauté du monde ».

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L'encre de la mélancolie

Si Jean Starobinski est surtout connue pour être un critique littéraire érudit, la seconde face de ses intérêts intellectuels est moins réputée. Avant de se former à l’étude et au professorat des textes, Starobinski suit des études de médecine et de psychiatrie qui s’achèvent par la publication d’une thèse sur « L’histoire du traitement de la mélancolie ». Le présent ouvrage s’ouvre d’ailleurs sur cette thèse synthétique et richement documentée publiée en 1960. En guise d’introduction, on suivra l’évolution des considérations portées sur la mélancolie en elle-même ainsi que les différents curatifs proposés pour en débarrasser ses victimes. L’exercice paraît trivial –d’ailleurs, on se demande s’il n’a pas déjà été effectué par un étudiant moins connu que Jean Starobinski. Pourtant, il faut se détacher de nos conceptions modernes pour retrouver cet état de virginité psychiatrique qui caractérisa l’histoire avant le 18e siècle et la désignation de la « nostalgie » en tant que terme médical. Dans cette perspective, il s’agit de comprendre les textes anciens au-delà des mots et de retrouver, sous d’autres termes, sous d’autres définitions, derrière des images et des concepts en abondance, ce qu’on finira par regrouper derrière une symptomatologie d’ailleurs très mobile. L’impossibilité de figer un état mental apparaît d’ailleurs très bien dans l’évolution de l’usage des mots et souligne une nouvelle fois la difficulté de l’entreprise de Jean Starobinski.





« Hofer eut la main heureuse : à l’aide de retour (nostos) et de douleur (algos), il créa nostalgia, mot dont la fortune fut telle que nous en avons complètement oublié l’origine. Il nous est si familier que nous l’imaginons mal de formation récente et surtout de formation savante. Ce néologisme pédant a été si bien accepté qu’il a fini par perdre son sens primitivement médical et par se fondre dans la langue commune. Il est entré tard dans le Dictionnaire de l’Académie : 1835. Son succès l’a dépouillé de toute signification technique : il est devenu un terme littéraire (donc vague). C’est là souvent le sort des vocables qui désignent des maladies mentales en vogue : pareille aventure est advenue au mot « mélancolie » (dont les psychiatres du XIXe siècle ne voulaient plus, tant il était galvaudé) et n’est pas loin d’advenir au mot « schizophrénie », autre néologisme formé en Suisse. »





On acceptera donc le panorama littéraire, philosophique et médical de Jean Starobinski comme une vue non exhaustive de la psychologie humaine depuis qu’elle détient l’art de la parole et de l’écriture. D’ailleurs, Starobinski ne s’est pas contenté de cette seule « Histoire du traitement de la mélancolie » -pliant ses recherches sitôt ses études terminées. S’ensuivent une « Anatomie de la mélancolie » et une « Leçon de la nostalgie » qui complètent ces premières observations, les renforcent et les approfondissent sous l’angle d’étude de différents textes et personnages. Les contradictions inhérentes au trouble semblent des constantes qui ne datent pas d’hier. Pourquoi la mélancolie, que certains considèrent comme une débilité d’esprit, fut-elle également galvanisée comme preuve de la supériorité et du génie de l’âme ? Ainsi Esquirol écrivait-il déjà très sérieusement que « plus l’intelligence est développée, plus le cerveau est mis en activité, plus la monomanie est à craindre », ce que d’autres développeront en termes plus littéraires et personnels des siècles plus tard.





Si Jean Starobinski semble parfois dépassé par l’ampleur du sujet qui l’intéresse, il finit par se concentrer essentiellement sur ce dernier aspect paradoxal pour dresser des analyses orientées des œuvres de quelques auteurs ciblés. La question qu’il se pose est d’une évidence telle qu’on se la sera déjà posée plusieurs fois, sans jamais avoir essayé de répondre : si la mélancolie est l’état d’âme caractérisé par l’impuissance d’agir et la disparition de toute volonté, comment se fait-il qu’elle ait toutefois réussi à se sublimer en œuvres chez certaines de ses victimes ? A travers l’étude des contes folkloriques, d’E. T. A. Hoffmann et de Kierkegaard, Starobinski émet l’hypothèse d’un « Salut par l’ironie ». Position paradoxale par excellence, « l’ironie connaît la puissance du non-savoir, qui éclaire de façon égale le savoir et le non-connaissable » (Wilhelm Szilasi). En autres recours, et en se référant aux œuvres de Baudelaire, de Gérard de Nerval et de Bandello, Jean Starobinski décline ensuite la mélancolie comme « Rêve et immortalité mélancolique », dans un balancement incessant entre répulsion et attrait pour la vie –ou pour la mort.





Au bout des 600 pages qui constituent ce regroupement de réflexions sur le thème de la mélancolie, il semble que Jean Starobinski n’a toujours pas fini ses recherches et que nous, lecteurs, n’avons toujours pas apaisé notre soif de questionnements. L’encre de la mélancolie se présente peut-être comme l’achèvement d’une réflexion personnelle car, à l’âge de 93 ans, il serait étonnant que son auteur la poursuive encore de manière décisive. Pourtant, la lecture de cet ouvrage très dense nécessite du temps, une méticulosité d’étude et des références culturelles déjà bien installées. Jean Starobinski semble avoir tranché : entre la médecine et la littérature, ce sont les aspects essentiellement littéraires qui retiennent ici notre attention et qui constitueront les difficultés de lecture les plus dangereuses. En effet, comme pour toute analyse littéraire, celle-ci ne devient intéressante qu’à partir du moment où le lecteur en connaît ne serait-ce que les grandes lignes –ce qui n’est pas toujours le cas dans cette étude fouillée qui nous perdra à maintes reprises. La difficulté de rentrer immédiatement dans l’analyse de Starobinski tient aussi, peut-être, à l’écriture sèche et rigoureuse qui le caractérise. D’un premier abord très scolaire, effectuant parfois la paraphrase plus qu’il n’est nécessaire, elle se révèle toutefois plus illuminante qu’il n’y paraît. On découvrira ainsi que les traitements médicaux chers à notre 20e siècle existaient déjà en germe depuis des siècles, et que ses premières critiques n’avaient pas attendu l’arrivée de l’antipsychiatrie pour se manifester (« […] Que devenir, si celui dont on attend le secours a lui-même besoin de secours ? »).





En citant Nietzsche, Kierkegaard ou Baudelaire, en se concentrant sur leur peine à être sincère, sur leur déception de n’avoir pas mené une vie à leur convenance , le premier écrivant que « notre sincérité habituelle est un masque qui n’a pas conscience d’être masque » et le second poursuivant en disant que sa « vie présente est comme une contrefaçon rabougrie d’une édition originale de mon moi », Jean Starobinski mérite lui-même de devenir un objet d’étude mélancolique à part entière.
Lien : http://colimasson.over-blog...
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Jean-Jacques Rousseau : la transparence et ..

C'est l'essai le plus abouti sur Jean-Jacques Rousseau, sur les Confessions surtout.

Phrase-clé : "Rousseau désire la communication et la transparence des cœurs ; mais il est frustré dans son attente, et, choisissant la voie contraire, il accepte — et suscite — l’obstacle, qui lui permet de se replier dans la résignation passive et dans la certitude de son innocence."

L'autobiographie vise la transparence, si on en juge par la première phrase de ce qui est considéré comme la première autobiographie de l'histoire de la littérature : "Je forme une entreprise qui n'eut jamais d'exemple et qui n'aura point d'imitateur". Mais cette transparence est-elle possible ? Jean-Jacques peut-il être le juge de Rousseau et inversement ?

Essai qui foisonne d'informations, de réflexions. Passionnant.
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Montesquieu par lui-même

Ce qui me fit acheter cet ouvrage c’est son auteur plus que son sujet :j’ai la plus profonde admiration pour Jean Starobinski. De Montesquieu je ne connais que « Les lettres Persanes » (étudiées et enseignées ) et « « L’esprit des lois » (plus par devoir car c’est une lecture certes passionnante mais peu récréative) . Le reste de son œuvre multiforme (les esprit curieux de tout des Lumières ne cessent de m’impressionner) m’est inconnue. Starobinski trace les contours de la vie et de l’œuvre en une centaine de pages puis présente un choix de textes.
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L'Oeil vivant

Quel rôle joue le regard dans les oeuvres littéraires? Ce livre traque, dans quelques oeuvres majeures, les jeux de dévoilement de cache-cache, les masques et les miroirs, les éblouissements et les aveuglements. Corneille ébloui montre ses héros au monde dans leur noble vérité, dans leur éclat, alors que chez Racine les regards entrecroisés se troublent, se cherchent mais ne se trouvent pas. Rousseau n'ose s'exposer aux yeux de l'autre, du troisième homme, de celui qui juge, et qui condamne, forcément. Pour lui, le regard est toujours faute. Stendhal se cache derrière ses pseudonymes pour tenter d'être autre que l'homme laid qu'il refuse d'être. Tous jouent un jeu mystérieux, se dévoilent en se voilant, et à travers ces miroitements incertains s'esquisse une histoire du regard, qui incite à se plonger, les yeux dans les yeux, dans leurs oeuvres, traces d'hommes et d'époques devenus invisibles.

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L'Oeil vivant

Quand la critique littéraire est à la hauteur de son objet, on touche à l'art. Starobinski fait partie de ces critiques qui illuminent les textes de leur intelligence et les servent magnifiquement..
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Portrait de l'artiste en saltimbanque

Starobinski (décédé en 2019) faisait partie de ces auteurs qui rendent leurs lecteurs intelligents . Dans cet essai que j’ai lu dans la superbe collection « les sentiers de la création » de Skira , il parcourt dans l’histoire de la littérature et des arts visuels le thème du saltimbanque et du clown et en propose une interprétation. Ces deux personnages si présents en peinture (Rouault, Picasso…) , en littérature (Baudelaire,Apollinaire..) et au cinéma (Fellini,Chaplin..) seraient une métaphore de l’artiste lui-même pris entre aspiration à l’idéal et inadaptation au réel . Il peut être aussi carrément maléfique tel le Hellequin devenu Arlequin et que l’on voit revenir dans des films récents (« ça « , le Joker) . Superbement illustré ;
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La beauté du monde

Jean Starobinski est le plus grand critique de littérature de la seconde moitié du XXe siècle - sans doute avec Benichou. De lui, il faut tout lire. Ce livre reprend des textes devenus rares. Un régal.
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Les Enchanteresses

De livre en livre, Jean Starobinski, peut-être le plus grand penseur du phénomène esthétique de la deuxième moitié du XXe siècle, accomplit le tour de force de nous surprendre. Qu''une telle intelligence, une telle sympathie pour les artistes, de Stendhal à Nietzsche, de Mozart à Bonnefoy, trouve à s''exprimer dans un style aussi limpide que lumineux, c''est un privilège dont nous lui sommes redevables et qui fait de notre temps un moment de création plus riche qu''on le prétend à l''ordinaire. Dans la tradition de ses écrits désormais classiques sur Rousseau, Montesquieu et ceux qu''il a dédiés à l''imaginaire de la Révolution française, le Maître de Genève nous découvre une clef cachée et inédite qui ouvre à la compréhension de notre civilisation : la présence envoûtante des ensorceleuses, mi-saintes mi-fées, de toutes ces femmes si musicales par elles-mêmes, Juliette, Elektra, Manon ou Lulu, à qui l''opéra a offert mieux qu''un miroir : une troisième vie, après les temps de la magie et ceux de la religion. Ou comment comprendre Poppée et l''assassinat, Alcina et les sortilèges, Juliette et sa déchéance...' Livre d''heures qui déborde le territoire de la stricte musicologie, "Les enchanteresses" donne aussi, grâce à la perspective de l'art lyrique, une vue magistrale sur l''évolution métaphysique de l''Europe, depuis la naissance des nations jusqu''au triomphe de l''individu, et le nihilisme qui le guette.
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Portrait de l'artiste en saltimbanque

Trouvé par hasard chez un bouquiniste. L'auteur m'est familier, le sujet beaucoup moins. Peut-être le cirque a-t-il même pour moi ce quelque chose de répulsif, évoquant un univers grossier, populeux, prondément triste.

Et puis ce livre! Quelle merveille!

La beauté de l'écriture et l'intelligence de l'analyse. Le tout mêle peinture et littérature. Cette dernière serait même celle qui ouvre les yeux aux as du pinceau.

C'est l'un des textes les plus réjouissants qu'il m'a été donné de lire cette année.
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La Mélancolie au miroir

La mélancolie au miroir, trois lectures de Baudelaire, de Jean Starobinski : une suite d'essais où l'auteur confronte les textes de poètes aux représentations picturales de la mélancolie (George de la Tour, C. D. Friedrich, Léon Davent, Goya, etc.) pour le plus grand plaisir du lecteur averti qui ne pourra, comme l'écrivait Baudelaire dans un poème dédié à Sainte Beuve, que boire "L'Écho lointain d'un livre" - en l'occurrence celui-ci - et ressentir "Le Cri d'une émeute". Immense.
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Montaigne en mouvement

Jean Starobinski explore différents thèmes des "Essais" à travers lesquels Montaigne s'efforce de saisir, par l'intermédiaire de l'écriture, les permanences et les variations du moi.
Lien : http://www.nonfiction.fr/art..
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Le corps et ses raisons

Un ouvrage posthume rassemble les écrits sur la médecine du grand historien des idées Jean Starobinski.
Lien : https://www.la-croix.com/Cul..
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La beauté du monde

Un recueil documenté rassemble désormais une centaine d’articles de Jean Starobinski sur la littérature et les arts. Il rappelle la place majeure qu’occupe dans le paysage critique des 70 dernières années une œuvre qui ne cesse d’entrevoir et de susciter des correspondances.
Lien : http://www.laviedesidees.fr/..
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L'encre de la mélancolie

Jean Starobinski rassemble en un volume ses travaux sur l’histoire de la « bile noire », et son rôle dans une certaine idée de la psyché humaine.
Lien : http://www.humanite.fr/cultu..
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La beauté du monde

L'oeuvre moins connue de Jean Starobinski, critique d'art, de musique et de littérature.
Lien : http://www.nonfiction.fr/art..
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Interrogatoire du masque

Suite et dénouement des méditations sur le masque, de l'angoisse de l'enfant qui en pressent les mystères à l'acuité de l'adulte qui les décrypte.
Lien : http://www.telerama.fr/criti..
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Les approches du sens : Essais sur la criti..

En consacrant à la pratique critique de Jean Starobinski un recueil d’articles assorti d’un colloque, les éditions de La Dogana donnent à voir un intellectuel combatif et engagé dans une défense des sciences humaines on ne peut plus actuelle.
Lien : http://www.laviedesidees.fr/..
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L'encre de la mélancolie

L’Encre de la mélancolie retrace le parcours intellectuel de J. Starobinski et propose un voyage dans son œuvre critique. Dans le volume de plus de six cents pages s’ajoute à sa thèse et la bonne vingtaine d’articles publiés en revues de 1962 à 2008 et distribués en cinq sections.
Lien : http://www.nonfiction.fr/art..
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L'encre de la mélancolie

L’Occident révèle sa puissance de mélancolie dans cette histoire sémantique et imaginaire où Jean Starobinski décrit les mythologies scientifiques que suscita l’affection entre le Ve siècle avant J.-C. et l’orée de la psychanalyse.
Lien : http://www.laviedesidees.fr/..
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