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Critiques de Jérôme Ferrari (751)
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Le sermon sur la chute de Rome

Pas encore présent sur cette photo de famille de 1918, car pas encore né, Marcel sera le dernier à faire exister par « son regard fidèle les siens déjà partis »: La fin d'un monde.

Dans ce roman Jerôme Ferrari fait le parallèle entre l'histoire singulière de ses personnages et l'histoire des mondes: des mondes qui naissent, grandissent, s'entrechoquent et meurent.

Il pose aussi la question de comment passer d'un monde à un autre:

Marcel rêve de quitter ce monde de paysans miséreux et d'accèder par les études à un monde «  palpitant de vie dans lequel les hommes savaient faire autre chose que prolonger leur existence dans la souffrance et le désarroi ».

Mathieu, en revanche, abandonne lui des études de philosophie pour revenir au pays et reprendre le bar du village. Quitter un monde pour un autre semble pour chacun la clé d'une vie meilleure, mais la chute inexorable est là, en gestation, dans l' attente du moment venu.

Si le destin de Marcel, Mathieu ,Libero et les autres se déploie vers ce que l'on pressent comme une issue dramatique, il en va de même, à plus grande échelle pour les mondes: c'est la thèse que défend l'auteur. Il nous reste à espérer que de cette chute, il est encore possible de se relever encore et toujours ... recommencer...

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Le sermon sur la chute de Rome

« Mais nous savons ceci : pour qu’un monde nouveau surgisse, il faut d’abord que meure un monde ancien. Et nous savons l’intervalle qui les sépare peut être infiniment court ou au contraire si long que les hommes doivent apprendre pendant des dizaines d’années à vivre dans la désolation pour découvrir immanquablement qu’ils en sont incapables et qu’au bout du compte, ils n’ont pas vécu. »



Deux amis, Matthieu et Libero, l’un par rêve et l’autre par rancœur, abandonnent leurs études de philosophie à la Sorbonne pour prendre la gérance d’un bar dans un petit village de Corse. A la réussite initiale du bar, qui redonne vie au village, va succéder un échec en forme de pourrissement et d’écroulement interne, dans cette Corse à l’ambiance funèbre et désertée.



A l’inverse de son petit-fils Matthieu qui voulait devenir Corse, son grand-père Marcel a toujours rêvé, lui, de quitter l’île. Il a vécu l’effondrement sans bruit de la colonisation, la désolation de sa propre vie, en même temps qu’une lutte incessante avec les cellules attaquant son corps malade telles des hordes barbares. Il finit maintenant sa vie, dernier de sa fratrie, muet dans sa maison de Corse devant une photo de famille de l’été 1918, la photo d’avant sa naissance, annonce d’un monde à venir et maintenant sur le point de disparaitre pour toujours.



Le roman se boucle avec le personnage d’Aurélie, la sœur de Matthieu, partie elle pour fouiller le site d’Hippone, la sœur lucide qui tente de sortir Matthieu de ses fantasmes, de le ramener à la réalité, mais qui est elle aussi confrontée a la séparation hermétique de deux mondes, le sien et celui d’un archéologue algérien avec qui elle a une aventure.



« Le sermon sur la chute de Rome » est comme une obsidienne, cette pierre noire et brillante ; des phrases rutilantes qui s’écoulent, lentes et sereines, au long des pages, le destin noir des hommes qui assistent impuissants à l’accomplissement de leur propre naufrage, à la naissance et à la disparition de leurs rêves, sous l’égide de Saint Augustin. Superbement écrit, c'est un roman presque trop brillant pour nous toucher au plus profond.



« Son professeur d’éthique était un jeune normalien extraordinairement prolixe et sympathique qui traitait les textes avec une désinvolture brillante jusqu'à la nausée, assenant à ses étudiants des considérations définitives sur le mal absolu que n’aurait pas désavouées un curé de campagne, même s’il les agrémentait d’un nombre considérable de références et citations qui ne parvenaient pas à combler leur vide conceptuel ni à dissimuler leur absolue trivialité. […] Libero ne pouvait plus en douter, et il était comme un homme qui vient juste de faire fortune, après des efforts inouïs, dans une monnaie qui n’a plus cours. »
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Le sermon sur la chute de Rome

" Le sermon sur la chute de Rome " de Jérôme Ferrari.

Prix goncourt 2012 pour cet ouvrage Jérôme Ferrari est né en 1968 ; peut-être en plein "évènements " ?

Mathieu est le descendant d'un combattant de la guerre de 14 fait prisonnier.

C'est pour celà que son grand-père ne figure pas sur la photo de famille de ses ancêtres ; même son père n'y est pas puisqu'il est né après, quand le prisonnier libéré est rentré au village en 1919.

Marcel a ainsi pu voir le jour et malgré sa santé fragile pu assurer sa descendance avec Mathieu, un enfant qu'il n'a pu élever mais qu'il a confié à sa soeur dans leur village d'origine en Corse.

Mathieu a commencé des études à Paris pour bientôt abandonner .

Il revient dans le village de son enfance reprendre la gérence du café avec son ami Libero. S'en suit une période de vie plus ou moins dissolue jusqu'à la chute dramatique, et... " le silence fût bientôt suffisant pour qu'on pût entendre le hululement mélancolique de la chouette dans la nuit d'été "

U n monde s'écroule ...un autre continu.

J'ai aimé ce livre.
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Le sermon sur la chute de Rome

Mathieu et Libero, deux amis corses exilés à Paris pour suivre des études de philosophie à l’université, décident de tout plaquer et rentrent sur l’île de beauté pour reprendre le bar du village de leur enfance. L’endroit ne désemplit pas et devient un lieu festif où l’insouciance et la joie de vivre semblent régner en maître. Malheureusement, même dans ce « meilleur des mondes possibles », la bassesse de l’âme humaine va reprendre ses droits et tout engloutir…



Au-delà des mésaventures de jeunes écervelés emportés par leur triomphe commercial, Jérôme Ferrari relate la saga en accéléré d’une famille corse sur trois générations. De Marcel le grand-père à Mathieu son petit-fils, c’est une histoire placée sous le signe de la destruction qui est offerte au lecteur.



Sans forfanterie, l’auteur du sublime Où j’ai laissé mon âme entend élever la littérature face à la bêtise. Cette dernière est ici représentée par le troquet des deux amis. Pour eux, il importe de protéger leur paradis de tout contact avec l’esprit, d’ériger un monde dans lequel la pensée n’a plus sa place : « Mathieu et Libero étaient les seuls démiurges de ce petit monde. Le démiurge n’est pas le Dieu créateur. Il ne sait même pas qu’il construit un monde, il fait une œuvre d’homme, pierre après pierre, et bientôt, sa création lui échappe et le dépasse et s’il ne la détruit pas, c’est elle qui le détruit. »



Le sermon sur la chute de Rome montre l’effondrement des rêves les plus fous et des faux espoirs, cet effondrement qui sonne le glas des désirs insatisfaits, des croyances creuses et décevantes. En filigrane, le message est clair : point de salut dans le cynisme commercial qui ne pourra, à terme, qu’entraîner ceux qui le glorifient vers le pourrissement.



Comme toujours chez Ferrari, la langue est superbe, à la fois poétique et abrupte, et l’écriture, oscillant sans cesse entre un lyrisme maîtrisé et un vocabulaire des plus crus, reste d’une incroyable fluidité.



Cette réflexion sur la disparition d’un monde n’a rien d’une lamentation et encore moins d’une quelconque leçon de morale. Ce texte magnifique est surtout empreint de pessimisme et d’une bonne dose d’humour noir. Assurément pour moi le roman français de l’année.




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À son image

Petit roman au grand contenu, A son image rentre dans la catégorie des œuvres exigeantes dont on se plait à retarder la progression, non pas en raison d'une lecture difficile mais au contraire pour mieux en savourer l'écriture délicate et profonde.



L'histoire est en apparence banale et triste: celle d'une vie prématurément fauchée par un stupide accident, de ceux qui jalonnent quotidiennement la rubrique des faits divers, et dont le bilan se voit étalé à coups de souvenirs à l'occasion des funérailles. Sauf que le tragique destin d'Antonia n'est pas le véritable sujet du roman...la demoiselle, photographe de mariages désabusée, n'étant effectivement qu'un catalyseur au service d'une réflexion bouleversante sur la place de l'image dans notre monde.



Du simple hobby personnel promettant un accomplissement artistique à l'immortalisation du caractère vain de notre existence (la déshumanisation des individus face à des causes troubles en temps de conflits, la dégradation et la mise à mort des corps...), Jérôme Ferrari nous entraîne loin, très loin, dans une sorte d'anthologie de cas de figure traversant les époques et les frontières sans pour autant imposer une conclusion tranchée à ses lecteurs. A ces derniers de méditer sur la profondeur des enjeux dévoilés au fil d'une construction ne laissant rien au hasard, de son style aérien mais empreint d'une oppression latente à ses tranches de vie mêlant chronique naturaliste et méditation philosophique (voire un brin mystique).
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À son image

Ce livre incarne de manière exemplaire le mystère d’une non-rencontre d’un ouvrage avec son lecteur.

Sur le papier, il avait tout pour me plaire : l’intérêt du sujet, les personnages, la construction littéraire et la réputation de l’auteur. Rien à redire. C’est d’ailleurs avec une grande gourmandise que je me suis lancée dans sa lecture. Et là, boum, il ne se passe rien ou pas grand-chose. Oui, j’admire la composition sophistiquée du récit. Bien sûr, les questions du réel et de la représentation qui y sont explorées sont en tout point passionnantes. Quant aux personnages, rien à redire, ils sont subtilement élaborés. Alors, comment se fait-il que l’alchimie ne prenne pas ? Est-ce la mécanique parfaite, un peu trop bien huilée, qui malgré ses qualités intrinsèques manqueraient un peu de chair et d’humanité ? Le syndrome de la copie du bon élève, en quelque sorte, brillante mais sans émotions ? Mon abandon de lecture au 2/3 du roman n’est-il juste le résultat d’un mauvais timing ? Cette lecture n’est peut-elle pas venue tout simplement au bon moment ?

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À son image

Une chronique argumentée n'apporterait rien de plus à tout ce que je viens de lire ici et ailleurs à propos de ce roman : d'autres ont dit bien mieux que moi comment Jérôme Ferrari raconte les liens entre la photographie, la mort, le réel et l'image. Mais j'ai trop apprécié le livre pour ne pas écrire juste ça : j'aime les belles phrases longues et enveloppantes de l'auteur qui nous promènent dans son récit sans nous lâcher, j'aime avoir l'impression de reconnaitre des lieux et des comportements familiers dans cette Corse où je vis, j'aime ces digressions qui n'en sont pas et qui nous emportent dans des réflexions toujours renouvelées. J'ai donc adoré ce roman et j'attends déjà le prochain avec impatience !

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À son image

« Sur les photographies, les vivants mêmes sont transformés en cadavres parce qu'à chaque fois que se déclenche l'obturateur, la mort est déjà passée ».



« A son image », de Jérôme FERRARI est un roman qui, tout en racontant l'histoire d'Antonia, photographe de métier, s'interroge sur ce rôle de la photographie, qui prend une place de plus en plus importante dans nos vies. Depuis toute petite, et sans qu'elle parvienne à analyser pourquoi, Antonia est fascinée par les photographies de famille. Très jeune, son parrain prêtre lui offre son premier appareil argentique grâce auquel elle va s'entraîner à cet art auprès de ses proches. A chaque réunion de famille, elle fait des portraits des gens seuls ou en réunion. Hormis la technique du cadrage, de l'exposition, de la composition, Antonia s'interroge face au résultat de son travail. Elle n'est jamais totalement satisfaite sans vraiment comprendre pourquoi.



« Il fallait reconnaître que la plupart des instants ne méritaient guerre d'être arraché à leur caducité ».



Je ne peux qu'approuver cette réflexion avec l'avènement du numérique, lorsque je regarde l'inflation de photos stockées sur mon téléphone. Sont-elles toutes sinon indispensables du moins utiles ? Je suis sûre que non… Par ailleurs, Antonia se rend compte que les portraits qu'elle réalise ou les instants qu'elle fixe ne reflètent pourtant pas toujours les personnes qu'ils représentent. Parce qu'en choisissant de les photographier à certains moment, Antonia donne au portrait un sens qui n'existait pas forcément.



« Ses photos souffraient toujours d'un excès ou d'un déficit de signification ».



Peut-être aussi parce le réel, la vérité, n'existe pas vraiment : Regarder quelque chose, c'est déjà l'interpréter avec notre sensibilité, notre vécu, notre façon de penser, de percevoir qui nous est propre. A cela s'ajoute le choix de ce qu'on montre ou pas sur la photo : cadrage, composition, lumière, etc… Tout cela fait qu'une photo n'est pas une vérité absolue mais la façon dont le photographe voit les choses. Et si j'aime cet aspect de la photographie, Antonia en demeurait insatisfaite.



« Ses images manquaient d'innocence. Elles ne se contentaient pas d'accueillir la trace candide de l'instant mais s'inscrivaient, sans qu'Antonia comprît pourquoi, dans tout un réseau, bavard et solennel, d'interprétations superflues, peut-être mensongères. »





Son parrain étant prêtre, nous profitons également d'un rapprochement d'idées entre la représentation des icônes religieuses, qui sont des images, et l'art de la photographie.



« le Christ lui-même est contrefait. C'est sans importance. le regard ne s'appuie sur les images que pour les traverser et saisir, au-delà d'elles, le mystère éternel et sans cesse renouvelé de la passion. Mais la photographie ne dit rien de l'éternité, elle se complaît dans l'éphémère, atteste de l'irréversible et renvoie tout au néant.



Par un beau matin ensoleillé, Antonia se laisse éblouir par le soleil et meurt dans un accident de voiture.



« Tu ne feras pas d'idole, ni aucune image de ce qui est dans les cieux en haut, ou sur la terre en bas, ou de ces qui est dans les eaux sous la terre. Tu ne te prosterneras pas devant eux, et ne les serviras pas. - Il n'avait pas écouté la parole, et voici qu'à cause de lui sa filleule avait servi des idoles qui l'avaient terrassée. »



A son enterrement, chacun se remémore les bribes de moments clés passés avec Antonia qui donnent au lecteur une mosaïque « à son image ». Comme les photographies qu'elle prenait, il est probable qu'aucun portrait fait par les autres ne la reflète totalement ; mais chacun à sa manière la reflète en partie, chacun nous offre un panel de pixels qui contribue à reconstituer un portrait à son image, à nous rapprocher de l'essence de son être, sa vérité. En découvrant l'image que chacun a gardé d'elle, on reconstitue son portrait tout en s'interrogeant avec elle sur le sens de la photographie, au fur et à mesure qu'elle progresse elle-même dans sa pratique et dans son métier.





« Peut-être a-t-il fini par se dégoûter de ces images qui n'égaleront jamais la peinture parce que, finalement, ce n'est pas en tant qu'art que la photographie donne la mesure de sa puissance ».



Poursuivant sa passion pour la photo, et sa quête de la photo parfaite, celle qui se rapprocherait au plus près de la vérité de l'instant qu'elle souhaite si ardemment capter, Antonia était devenue journaliste. Elle débute dans un journal local où elle a l'impression que ce qu'elle montre est inutile (tournoi de pétanque, réunion des nationalistes corses qu'elle perçoit comme de la mise en scène qu'elle ne ferait que répercuter, etc…). Puis, cherchant à donner du sens à ses photographie, elle part dans les pays en guerre.



« Elle lui parle des photos qu'elle a prises. du choc qu'elles vont certainement provoquer si elles sont publiées. Il essaye de la détromper gentiment. Aucune photo, aucun article n'a jusqu'ici provoqué aucun choc, si ce n'est peut-être le choc inutile et éphémère de l'horreur ou de la compassion. Les gens ne veulent pas voir ça et s'ils le voient, ils préfèrent l'oublier. Ce n'est pas qu'ils soient méchants, égoïstes ou indifférents. Pas seulement, du moins. Mais c'est impossible de regarder ces choses en sachant qu'on ne peut strictement rien y changer. On n'a pas le droit d'attendre ça d'eux. La seule chose qui est en leur pouvoir, c'est détourner le regard. Ils s'indignent. Et puis ils détournent le regard. »



Si elle pensait au départ pouvoir saisir la vérité de l'être dans une photo, toute vérité est-elle pour autant bonne à dire ? A montrer ? A dénoncer ? Est-ce un devoir de montrer ce qui existe, même quand il s'agit de ce que l'homme fait de pire, afin que personne ne puisse ignorer et rester passif ? Ou est-ce obscène de montrer des situations à des gens qui n'ont pas le pouvoir de les changer ? L'obscène est-il dans la photographie ou dans le fait que ce que montre la photo existe ?



« Que cette photo soit obscène, c'était indiscutable pour Antonia, comme ce devait être également indiscutable pour Kevin C lui-même et c'était sans doute la raison pour laquelle il l'avait prise, afin que nul ne puisse prétendre ignorer l'obscénité du monde dans lequel il consentait à vivre. »



L'auteur, sans jamais imposer son point de vue ni celui des personnages, nous encourage au moins à y réfléchir à l'aide de situations concrètes, d'arguments contraires, d'influences diverses (religions, vécus, etc…).



« Elle se sent de plus en plus mal à l'aise avec l'idée que les photos qu'elle a prises aujourd'hui pourraient être publiées. Même si un magazine les acceptait, elle ne voudrait pas que des yeux étrangers puissent se poser avec curiosité ou indifférence sur le désastre complet dont elle a aujourd'hui été témoin. Ce désastre, elle ne veut pas le dupliquer. »



Au total, j'ai trouvé dans ce livre une plume riche, sensible et généreuse comme je les aime, un auteur philosophe qui a guidé ma réflexion sur un thème toujours d'actualité, et beaucoup d'émotions venant du récit et des personnages.



Que ce soit pour le roman en lui-même, la plume, ou les réflexions qu'il a le mérite d'initier sur un thème qui nous concerne tous plus ou moins, je suis contente d'avoir découvert Jérôme FERRARI à l'occasion de cette rentrée littéraire.
Lien : http://onee-chan-a-lu.public..
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À son image

C’est l’histoire d’Antonia, une photographe corse, mais c’est aussi sa messe d’enterrement (après un accident de voiture, je ne révèle rien, c’est tout au début), ainsi que l’histoire du photojournalisme de guerre, en particulier dans les Balkans, et une partie de l’histoire du FNLC (les séparatistes corses). Ca a l’air compliqué dit comme ça, mais c’est d’une fluidité incroyable.

Le plan suit celui de la liturgie de la messe d’enterrement, d’ailleurs le prêtre qui célèbre l’eucharistie, qui est également l’oncle et le parrain d’Antonia, est un personnage central de l’histoire. Chaque chapitre fait également référence à une photo, imaginaire (celles d’Antonia) ou réelle, et raconte un épisode de la vie de l’héroïne ou du photographe historique. Il est beaucoup question de mort, de guerre, de la photographie qui fige, de la foi, de la Corse aussi. Attention, ce n’est pas celle de nos vacances, ou pas seulement, outre sa beauté et sa chaleur, c’est celle du déterminisme et de la violence terroriste. Antonia a tenté de sortir de ça, avec plus ou moins de bonheur.

La langue de Jérôme Ferrari est belle et limpide, moi qui ai toujours peur de ne pas comprendre ses accès de philosophie, je n’ai eu aucun mal à suivre. La forme est extrêmement moderne, tout est réfléchi, à sa place, un vrai bonheur de lecture. Je pense qu’il est préférable de disposer d’une certaine culture catholique pour apprécier toute la profondeur de l’ouvrage, en tout cas de pas y être totalement hermétique. Une belle réussite !

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À son image

Le déroulemet d’une messe de Requiem comme ossature d’un roman, fallait y penser , J, Ferrari l’a fait et avec quelle réussite.

Cette messe pour laquelle le célèbrant est le parrain de la défunte est prétexte à retracer la vie d’Antonia et ce pendant les douze étapes la composant.

Antonia est corse, a observé depuis son adolescence les soubresauts politiques de l’île, a vu ses camarades entrer dans le nationalisme.

Mais ce qui la passionne c’est la photographie, des fulgurances, sa cruauté parfois, la vérité toujours. Le clic à peine terminé, le sujet de la photo n’est déjà plusqu’un souvenir , ne fait plus partie du présent ; c’est un des thèmes les plus présents du livre.

Pour s’extraire d’une vie plan-plan faite de photos de mariage, Antonia part au Kosovo, la mort est présente à chaque instant, la photographie concentre les instants de vie et de mort.

Antonia aime l’amour , mais les démons qui retiennent les hommes lassent aussi, et c’est en Corse dans un virage que prend fin la vie d’Antonia.

L’écriture est superbe comme toujours chez cet auteur, corse de naissance, mais je me suis sentie un peu au bord de la route. Bien que les thèmes traités soient universels, il me semble que mieux vaut être « natif » pour s’emparer totalement de cette écriture.

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Un dieu un animal

La distance entre le résumé des faits, en quatrième de couverture de ce mince roman, et l'impression que donne sa lecture, ne cessera de m'étonner. Le résumé aplatit l'histoire comme une crêpe, mais il a au moins l'avantage de réserver au lecteur une bonne surprise, celle de ne pas rencontrer les banalités qu'il annonce.



Ferrari traite l'histoire, la succession plus ou moins logique des événements fictifs, avec une certaine distance, pour ne pas dire avec une apparente négligence. Sa narration fait glisser le lecteur d'un segment à un autre, d'une époque à une autre, et lui fait croire que vraiment, là n'est pas l'essentiel. Bien sûr, on suit le parcours d'un jeune mercenaire traumatisé, mais les considérations pieuses sur la violence, le Moyen-Orient etc, se débitent ridiculement à une table de restaurant : c'est le Dictionnaire des Idées Reçues, auquel le personnage ne peut plus adhérer. Il ne s'agit pas du tout ici de l'histoire d'un pauvre soldat traumatisé par "la violence", ou pas nécessairement. Il s'agit d'un triangle de personnages, le soldat que le narrateur tutoie, Magali, son amie d'enfance, dont il parle à la troisième personne, et enfin de Hallâj, le mystique soufi du Moyen-Age, mort en martyr pour avoir dit : "Je suis la Vérité". Toujours, semble-t-il, les romans de Ferrari s'élaborent à l'ombre d'un grand homme et d'une idée qui ont révolutionné la pensée : Heisenberg, Nietzsche, Hallâj, ou l'Alef zéro.



Comment tous ces éléments s'emboîtent-ils ? La guerre dépouille le héros de son humanité et le place donc entre le dieu et l'animal : hors de l'humanité et de ses illusions consolantes, et surtout, bien sûr, loin des femmes, loin de Magali, qui est sa dernière tentative pour vivre une vie à hauteur d'homme. Mais il ne le peut plus. La guerre lui a fait voir l'absolu, ce Dieu qui, dans le roman, se manifeste en musulmans féroces, ce Dieu qui agrée tous les sacrifices humains qu'ils lui offrent, hommes, femmes, enfants, génies, innocents, mystiques. Le héros rencontre Dieu et il sort de cette rencontre tellement abîmé qu'il ne peut plus rejoindre les hommes : "Car dans la nuit de ta fièvre tu as été ramené tout au bout des déserts, là où tes yeux s'ouvrent sur les moissons de chairs sanglantes que le souffle énorme de Dieu a dispersées. Sa main s'est abattue près de toi et t'a à peine effleuré, mais tu es rompu pour toujours et, autour de toi, gisent ceux qu'il a choisi d'étreindre." (p. 109)



Deux remarques pour finir : la vision que ce roman donne de Dieu est proprement effrayante, augustinienne, ou islamique. Il est la vérité insupportable qui dévore tout. Ce court roman est consacré à cette vision, et rappelle celui d'Ali Erfan sur les enfants "martyrs de l'islam" lors de la guerre entre l'Iran et l'Irak. Pour être convaincant, Ferrari se maintient toujours à une intensité de style, à une puissance, qui épuisent le lecteur à qui presque rien n'est épargné. Mais c'est un livre fort et beau.
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Le Principe

Le principe est un court roman qui m'a interpelé par son thème scientifique très intéressant à mes yeux: le principe d'incertitude d'Heisenberg. Le narrateur nous raconte ses recherches à propos de la vie de ce physicien allemand qui a connu la seconde guerre mondiale et ses corollaires.

Je ne connaissais pas Jérome Ferrari et il faut dire que sa plume est riche, son style très touffu. Pour ma part j ai beaucoup aimé cette écriture dense.



A lire donc pour les férus de sciences et d'histoire des sciences.
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Le Principe

Le vertige somptueux de Jérôme Ferrari, autour de la figure énigmatique de Werner Heisenberg.



Le narrateur du roman «Le Principe», étudiant désenchanté sous le coup d’une humiliation cuisante lors d’un oral de philosophie, s’est retiré dans la maison paternelle en Corse où il rêve d’écrire un grand roman.

Là, il médite sur la figure fascinante de Werner Heisenberg et lance une adresse à ce physicien de génie, qui jetât les bases de la physique quantique dès les années 1920, inventeur à vingt-cinq ans du principe d’incertitude, principe qui établit qu’on ne peut déterminer avec une précision infinie la vitesse et la position d’une particule élémentaire.



«Vous aviez vingt-trois ans et c’est là, sur cet îlot désolé où ne pousse aucune fleur, qu’il vous fut donné pour la première fois de regarder par-dessus l’épaule de Dieu. Il n’y eut pas de miracle, bien sûr, ni même, en vérité, rien qui ressemblât de près ou de loin à l’épaule de Dieu, mais pour rendre compte de ce qui s’est passé cette nuit-là, nous n’avons le choix, nul ne le sait mieux que vous, qu’entre une métaphore et le silence. Pour vous, ce fut d’abord le silence, et l’éblouissement d’un vertige plus précieux que le bonheur.»



Werner Heisenberg, resté en Allemagne pendant la Seconde Guerre Mondiale, contribuât plus tard au programme nucléaire allemand et fut ainsi compromis avec les Nazis, qu’il ait essayé de ralentir ce programme ou pas. De cette valse-hésitation vertigineuse d’Heisenberg, au cœur de la terreur et de l’Allemagne en sang puis en ruines, le narrateur se fait l’écho en cette année 1989, tandis que le mur de Berlin s’effondre.



«Vous êtes debout au coin d’une rue de Leipzig, vous ne bougez pas, et pourtant vous êtes entraîné, à une vitesse indéterminée, presque nulle et presque infinie, dans un mouvement dont vous craignez qu’il vous emporte à jamais et qui commence maintenant, au moment où le monde entier s’efface sous vos yeux. Vous voyez à travers les pierres glacées des immeubles, vous voyez à travers les corps des passants, non ce qu’ils cachent, mais ce qu’ils sont, des ruines chancelantes comme un décor de théâtre, que baigne la lueur du phosphore, un amoncellement de gravats poussiéreux, gisant à l’abri de hauts murs inutiles, dans un épouvantable désordre de pierres incandescentes, de planchers effondrés, d’argenterie en fusion et de poutres métalliques, tordues comme des os brisés et, entre ces ruines, se pressent des cadavres qui n’avancent dans le matin d’hiver que parce qu’ils se croient vivants, nul ne les ayant encore avisés qu’ils sont morts depuis longtemps, et voués comme le monde tout entier au châtiment incurable de l’irréalité, si bien qu’ils ne sont même plus des cadavres mais des simulacres, des âmes perdues auxquelles est refusée jusqu’à l’aumône de la damnation.»



Au vertige du narrateur penché sur cette figure lumineuse et sombre enveloppée de doutes, confronté au chaos du monde saccageur d’innocence, répond le vertige du lecteur découvrant ce roman somptueux, une littérature, comme la science, dédiée au plus haut. Avec des rapprochements historiques brillants et une poésie qui rappellent Éric Vuillard («La bataille d’Occident» en particulier), Jérôme Ferrari lance un pont entre la science, le principe d’incertitude et la littérature, c’est-à-dire cette ambition de l’écrivain de renommer le monde, sans jamais pouvoir atteindre un fond des choses qui toujours se dérobe.



«En 1922, à Göttingen, quand Niels Bohr vous a révélé, avec une infinie compassion, que votre vocation de physicien était aussi une vocation de poète, il ne vous a rien appris que vous ne sachiez déjà.»



Après le magnifique «Le sermon sur la chute de Rome», ce roman paru en mars 2015 chez Actes Sud se lit comme une plongée dans l’abîme des tourments d’une humanité confrontée au choc de son ambition et à l'incertitude du monde, un livre comme une bataille dont la force et la beauté stupéfiante vous laissent pantelant.



«Car le regard des physiciens n’est plus qu’un regard d’hommes, instillant à tout ce qu’il effleure le venin de la subjectivité. Il ne sera jamais celui de Dieu. On ne dévoilera pas les plans du vieux, à peine peut-on espérer jeter furtivement un œil par-dessus son épaule, et c’est ce qu’Einstein ne peut supporter. Ni lui, ni Schrödinger, ni de Broglie n’acceptent de renoncer à l’espoir, déraisonnable et magnifique, qui fut la raison d’être d’une quête menée depuis si longtemps, de parvenir un jour à la description du fond secret des choses et ils n’acceptent pas qu’à cause de vous, cet espoir soit aboli, et ne puisse même pas subsister à titre d’idéal, parce que les choses n’ont pas de fond, et que le principe instaure entre elles et nous une limite infranchissable, un isthme au-delà duquel s’étend le néant ineffable.»



Retrouvez cette note de lecture, et toutes celles de Charybde 2 et 7 sur leur blog ici :

https://charybde2.wordpress.com/2015/04/30/note-de-lecture-le-principe-jerome-ferrari/

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Le sermon sur la chute de Rome

J'ai été très déçue par ce prix Goncourt.

Certes, la langue employée par l'auteur est belle, l'érudition dont il fait montre sur saint Augustin m'a intéressée. Cependant l'histoire ne m'a pas du tout plu, la mise en abyme avec l'histoire de Marcel pendant la guerre et le mariage des parents du personnage principal n'apporte rien à l'intrigue, si tant est que l'ouverture d'un bar avec hôtesses en Corse en soit une! De plus, les personnages - à l'exception peut-être de la grande sœur, Aurélie- sont désagréables au possible et suscitent peu d'intérêt.

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Un dieu un animal

Un récit court mais d'une poésie violente et poignante. Tout oppose, ce que ces deux amis d'enfance sont devenus, tout deux aussi inadaptés au monde et tout aussi désespérés, submergés par la violence, les attentats et la guerre pour l'un, par une compétition économique sans sens pour l'autre. L'histoire est sans espoir, elle ne peut pas bien finir, et laisse un goût amer sur notre civilisation.
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Le sermon sur la chute de Rome

Microcosme corse, le bar de Libéro et Matthieu, deux anciens étudiants en philosophie, a des allures utopiques. Petit coin de paradis au sein même de l'île de beauté, le petit établissement regorge de joie de vivre, et s'impose comme une société parfaite assimilable à la grande époque romaine.

Mais tout Empire est voué à la chute, et le bar n'échappe pas à la règle. Au fur et à mesure, d'infimes grains de sable viennent perturber la mécanique si bien huilée de nos deux héros, et s'engage alors la spirale infernale de la décadence. Et c'est là que le roman sonne juste. On assiste à l'avènement d'un "Empire" qui naît de rien, à son apogée, puis à son implosion, pour qu'enfin ce merveilleux univers, isolé au fin fond d'un village corse, ne soit plus qu'un souvenir lointain et redevienne néant, et et le tout avec force et passion. Les références à Saint Augustin prennent alors tout leur sens, et l'analogie avec la chute de Rome également.

Le sermon sur la chute de Rome est une tragédie apocalyptique, réellement plaisante à suivre, bien écrite, et réalisée avec talent.

Un excellent roman, et qui a largement mérité son Goncourt.
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Le sermon sur la chute de Rome

Le Sermon sur la chute de Rome a reçu le prix Goncourt en 2012, soit l’un des prix littéraires français les plus prestigieux. C’est pour cette raison que je l’ai acheté les yeux fermés, sans même m’enquérir du résumé, chose que je regrette maintenant amèrement, car ce livre fût une totale déception. Je suis même surprise qu’il ait pu recevoir un tel prix.



Il n’y a rien de très historique dans ce bouquin, malgré ce que le titre pourrait nous faire penser. L’histoire principale se concentre essentiellement autour d’un bar corse, qu’une femme donne en gérance à plusieurs hommes d’affilé, qui la font ployer sous les dettes additionnelles. Finalement, ce sont Matthieu et Libero, amis d’enfance, qui reprennent le bar et le font vivre, laissant derrière eux leurs études parisiennes prometteuses.



J’ai trouvé ce livre d’un ennui mortel. Je suis passé totalement à côté de l’histoire : je n’ai absolument pas compris où l’auteur voulait en venir. La construction narrative est complexe, tarabiscotée, totalement mélangée, avec une alternance de narration dont on peine à suivre le fil. Des époques qui se mélangent, tout comme les personnages : je n’ai pas réussi à comprendre qui était qui, qui vivait où et à quelle époque, c’est pour dire. Il faut sans doute plus de sensibilité que moi et une dose d’imagination et de créativité artistique pour comprendre et apprécier à sa juste valeur ce texte plein de subtilités.



Je suis passée totalement à côté de ce livre, mais je ne doute pas que d'autres puissent l'apprécier, puisqu'il a quand même remporté le prix Goncourt (rien que ça !).
Lien : https://analire.wordpress.co..
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Le sermon sur la chute de Rome

Matthieu et Libero, deux amis d'enfance, arrêtent leurs études de philosophie à Paris et reprennent un bar dans le village corse qui les a vus naître. Leur fraîcheur et connaissance des environs vont faire du lieu un endroit lucratif, mais petit à petit ce monde va les engloutir...



Dur de résumer ce roman qui oppose le devenir de deux jeunes hommes corses, les membres de leurs familles et les théories d'un philosophe chrétien du 5ème siècle... Vu les références historiques, religieuses et surtout philosophiques sur lesquelles le récit présent d'une famille est basé, le lecteur lambda qui n'aura pas fait une Licence de philo et/ou y connaîtra "que dalle" en matière d'histoire pré-Charlemagne (quand on fait le calcul, ça fait quand même une bonne partie de la population) aura beaucoup de mal à faire le lien. Tout seul ou tout court.

Ah donc en fait le récit de la famille de Matthieu est surtout là pour démontrer que toute chose naît et meurt ? Ah bon. Ok.

Même.

Bien que ceci soit visiblement le but du texte, si vous êtes un lecteur comme moi qui n'a pas décelé la morale à travers les faits et s'en fiche d'ailleurs pas mal, alors cela apparaît comme un roman inégal. Toutes les parties (y compris les petites phrases en ouverture de chapitres ou jetées pêle-mêle au fil des pages) qui comprennent des références du passé restent obscures ou sensiblement hors sujet, tandis que tout le reste du récit qui s'attarde sur les expériences des protagonistes, dans une écriture superbement travaillée, se révèle captivant et touchant, avec de très nombreux paragraphes bien sentis critiquant l'âme humaine et la société. J'ai personnellement été transportée plusieurs fois par la narration et la stylistique. Les phrases à rallonge gênantes au début révèlent en réalité petit à petit de très nombreuses qualités littéraires, devenant indissociables du contexte et du fond.

Si on reste un peu coi devant les parallèles dressés, alors on ressort de la lecture un peu perdu avec un avis mitigé. le processus de construction et la rhétorique du roman ne sont pas facilement accessibles et ont de grandes chances de laisser le lecteur perplexe à la fin. Comme moi, pour qui le fond philosophique et les références historico-religieuses me sont complètement passés au-dessus.
Lien : http://livriotheque.free.fr/..
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Le sermon sur la chute de Rome

L'écriture de Jérôme Ferrari nous ligote, nous transporte au fil de phrases magnifiques dont le parcours nous ensorcelle. La vigueur, l'émotion, le déclin et l'espoir, la famille, la France et la Corse, l'histoire, même en Afrique, la mythologie nous hypnotisent avec des sensations haletantes dont quasiment tous les chapitres (sauf le dernier) proviennent des sermons d'Augustin. Les règles, les codes, les traditions, les ascendances et leurs descendances heurtent, provoquent ou bouleversent les relations sentimentales, politiques, historiques, familiales de nations et de populations. Jérôme Ferrari possède une écriture habitée, notamment par le sang, la virulence et la réalité, qui lui a valu le prix Goncourt totalement mérité en 2012. Le sermon sur la chute de Rome a même conduit à des effets inattendus, en changeant le regard porté sur la littérature corse jusqu'alors...

A lire, relire et transmettre !

Livrement vôtre
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À son image

Jérôme Ferrari est un auteur qu'il m'est toujours difficile de chroniquer. A chaque nouvel opus, j'ai du mal à poser des mots sur mon ressenti. En effet, à la fermeture de ses romans, je suis toujours emballé mais il m'est toujours compliqué de comprendre pourquoi. « A son image » ne déroge pas à la règle.



A l'instar de ses précédentes oeuvres, il s'empare de thèmes et y apporte son regard personnel. La guerre est une toile de fond de son histoire. Que ce soit en Yougoslavie avec son excès de cadavres ou en Corse avec son nationalisme décadent, les conflits vont traverser la vie d'Antonia, photographe professionnelle.



Mais ce livre est surtout une ode à la photographie. On sent dans ce texte toute l'admiration que porte l'auteur à cet art. Il essaye de l'analyser, de l'expliquer en le transposant dans le milieu guerrier. Il peut ainsi étudier le rapport entre l'image et la mort. Dans ce contexte particulier, il s'interroge sur l'impuissance du métier de reporter sur ces champs de bataille et sur la limite assez ténue qui existe entre information, intimité et obscénité.



Comme les thèmes abordés ne m'attirent pas outre mesure, comme l'histoire racontée est plutôt banale, après réflexion, je crois que c'est l'écriture de Jérôme Ferrari qui fait la différence. Son style d'une remarquable élégance, parsemé de magnifiques longues phrases, imprime un rythme envoûtant à l'histoire. Parfois maniéré, j'imagine qu'il peut rebuter certains/es lecteurs/rices mais sur moi, il produit un effet fascinant presque mystique.



Comme d'habitude, Jérôme Ferrari a écrit un court roman qui dégage une grande densité littéraire. Grâce à sa plume soignée, il arrive à concentrer les idées et les émotions pour entraîner le lecteur dans son univers. En peu de mots, il pose un oeil avisé sur tout ce qui l'entoure : le FLNC et son évolution dans le temps, les guerres et leur utilité mais aussi la religion. En bon professeur de philosophie, il nous amène à nous poser des questions sur des sujets qui ne nous sont pas familiers. Je suis donc une nouvelle fois sous le charme de cet écrivain qui sait transcender la matière de ses histoires pour en faire des créations artistiques.
Lien : http://leslivresdek79.com/20..
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