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Critiques de Jerry Stahl (57)
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A poil en civil

C'est Michel, de L' Emmaüs St Serge à Angers, qui m'a confié À poil en civil...

Il savait que j'apprécierai ce bol fumant de Chili con carné puissamment relevé!

Et donc, j'ai découvert un nouvel auteur américain bien-bien barré: De ceux qui vous racontent la chute de l'empire,ordinaire avec ses monstres de foire et ses sinistres clowns... Comme un cauchemar avec ses ralentis, ses accélérés cocasses et pestilentiels ( l'appartement de Tony Zank est quelque chose de rare...).

Le moteur de tout ce grand et jouissif foutoir? Une jolie photo dérobée sous le matelas d'une vieille dame!.. Photo qui en amènera d'autres toutes aussi compromettantes pour les photographiés.

À poil en civil? De quoi passer de bons et riches moments de lecture...poilante.

Quelque part entre Brautigan, Easton-Ellis, Chase et Goodis, je dirai... À la sauce Stahl (Jerry), bien sur.

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Nein, Nein, Nein !

En 2016, Jerry Stahl, plus dépressif que jamais, le moral, le couple et la carrière dans les chaussettes, décide de se confronter à pire. Il devient passager d'un bus qui le conduit pendant deux semaines dans les camps de concentration polonais et allemands en compagnie d'un groupe hétéroclite de touristes, des homosexuels sexagénaires, un conducteur de bulldozer australien, un couple de Texans dynamiques … aux motivations très variées (dont un fameux « j'ai vu La liste de Schindler »).

Nein Nein Nein! - sous-titre: "La dépression, les tourments de l'âme et la Shoah en autocar" - est donc le récit gonzo de cette expérience de Dark Tourism, par un Stahl bientôt sexagénaire, seul, et désespéré, qui traine non seulement ses casseroles existentielles, mais le passé de sa famille ashkénaze dont une partie n'a pas survécu à la guerre, et dont le propre père a fini par arriver seul à l'âge de neuf ans aux Etats-Unis en évitant miraculeusement pogroms en Lituanie et déportation.



L'échec de la transmission de l'Histoire que le romancier israélien Yishai Sarid avait évoqué dans l'excellent le Monstre de la mémoire, Stahl l'évoque aussi à sa manière, avec beaucoup de recul et d'humour bien noir. Atterré par la « disneylisation » des sites - « De mes précédentes virées, j'ai déjà rapporté un magnet des camps de la mort, ainsi qu'une poignée de cartes postales d'Auschwitz - qui n'a pas envie de voir Arbeit Macht Frei épinglé sur son frigo?- mal à l'aise à l'idée de se rendre dans les sanitaires du camp (« Les toilettes à l'extérieur du musée d'Auschwitz sont payantes (1 zloty); celles dans l'enceinte du musée (Bloc 18 et derrière la chambre à gaz) sont gratuites. » dixit Tripadvisor), Stahl, qui semblait vouloir trouver un lieu au contact duquel sa dépression serait tout à fait appropriée, un peu comme un cancéreux qui entreprendrait un court séjour à Tchernobyl, découvre l'Humanité dans toute sa splendeur. Ancien toxicomane au passé agité, il semblait pourtant avoir tout vécu.



L'image d'une épée de Damoclès suspendue au-dessus de la tête des Juifs et aussi de l'Humanité , ravivée par l'une des obsessions de Stahl, le mandat de Trump et son cortège d'horreur, dont la stérilisation de femmes migrantes, alliée à son sentiment de culpabilité -« mon pauvre père a t-il esquivé des pogroms, transité par Ellis Island, lutté pour gravir les échelons, tout ça pour que son fils, une fois son diplôme en poche, se retrouve à écrire de faux courriers de cul pour le forum Penthouse? » - parcourt le texte, qui n‘est pourtant ni un pamphlet, ni un réquisitoire.



Nullement inapproprié, le récit de ce voyage dans lequel on retrouve l'acidité d'un Marc Behm dans La Reine de la Nuit, est du Stahl pur jus, un Stahl cultivé et caustique dont les blagues et les interventions tombent souvent à plat, un Stahl assez tolérant et stoïque quand on songe à tout ce qu'il voit et qu'il entend, un Stahl fidèle à lui-même, qui consulte alt, le site des fantasmes BDSM pour savoir si les déviances sexuelles de ses membres vivant près des camps sont particulières.



Corrosif et désespéré.

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A poil en civil

Il était une fois un écrivain complètement déjanté qui s"appelait Jerry Stahl .

Il était une fois un roman dont Tarentino jeune), n'aurait fait qu'une bouchée..

Il était une fois un flic nommé Manny, qui carburait à la codéine, et qui habitait une petite ville du Haut Marilyn (je vous laisse imaginer le bas Marilyn...). Un jour sur une intervention il rencontra une infirmière qui venait juste de zigouiller son mari et lui, allez savoir pourquoi, il en tomba amoureux .

La jeune sosie de Faye Dunaway venait également de subtiliser une enveloppe sous le matelas d'une des patientes de sa clinique ... la-dites enveloppe contenait des photos des couilles de Georges W Bush et avait été planquée là, par le fils de la patiente qui comptait bien la récupérer .

Il était une fois" le fils de la patiente" qui suspendit sa mère par les pieds dans le vide pour récupérer les photos qui valait des millions .

Ce "bon fils" était un truand notoire , accompagné d'une autre célébrité qui ressemblait à Dean Martin jeune et Black . Tous les deux tuaient à qui mieux-mieux et carburaient au crack .

On a donc, je résume: deux tueurs frappadingues essayant de récupérer leur bien , volé par une tueuse , elle-même protégée par un flic amoureux (à l'organe viril aussi gros que celui de Félix du" Père Noël est une ordure") . Une photo qui a été volée au domicile de la maire du Haut Marilyn , elle même , ex-femme du flic, et dont le domestique a disparu ....

Bon, je sens que je vous ai perdu !

Sachez juste que ce roman est complètement "dijoncté", très noir et vraiment marrant . Second degré exigé ...les cadavres et les blessures pleuvent sans pitié , mais de mon coté , aucune victime à déplorer, juste trois fous-rires à signaler ...



Il était une fois, Pecosa , une amie babélio qui me l'avait gentiment ajouté à une de mes listes et qui avait très bon goût ! Merci :-D
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Nein, Nein, Nein !

Quand on habite un pays qui a élu Donald Trump président, partir en excursion à Auschwitz s'apparente-t-il à un exercice de relativisme ou à une projection dans la catastrophe à venir? Toujours est-il que Jerry Stahl, juif, américain, triplement divorcé, scénariste déjanté, dépressif chronique et ex-junkie s'inscrit pour un tour-operator au doux pays de la solution finale.

Mais pourquoi s'infliger un truc pareil? Le meilleur de ce livre est sans doute dans la description des pérégrins yankees, concentré d'humanité dérisoire que Stahl chronique sans une once de mépris, et dont les motivations ne seront que suggérées. À l'autre question existentielle: comment se dépatouiller pour supporter ce voyage dans l'horreur? l'écrivain est moins subtil. Il sort la grosse artillerie de l'humour noir, se remémore son opération de l'urètre, partage son chagrin de ne plus voir sa petite fille, parfois même rapporte d'abominables anecdotes à la fiabilité douteuse qui, pour atroces qu'elles soient, transportent l'horreur hors de l'espace où il se situe.

Exemple de sa stratégie d'évitement, le triple "Nein" du titre renvoie à un précédent ouvrage qui relatait comment sa compagne (allemande) de l'époque jouissait en hurlant "Nein! Nein! Nein! Je suis en train de me faire sauter par un Juif!" Et cet entrelacement de la vie de l'auteur, de la manière dont cette vie est la matière même de son oeuvre, et de la visite des camps a fini par me lasser, au point de me donner l'impression que son désespoir était hors-sujet.

Mais parfois, Stahl se la joue moraliste désespéré et fait mouche: "L’entreprise ayant fabriqué les fours, J.A. TOPF & SÖHNE (Fils), a jugé bon d’inscrire fièrement son nom sur l’équipement qu’elle avait conçu, sur une petite plaque. Il se trouve que Topf était le principal fabricant de fours à pain en Allemagne. Et, quand on y pense, pourquoi les pourvoyeurs de machines approvisionnant la patrie en cheesecakes et Streuselkuchen ne voudrait-elle pas que ses prouesses dans le domaine génocidaire s’ébruitent ?

Oui, nous avons conçu les fours, vous informent Topf & Fils, et nous en sommes super fiers. Chaque défunt enfourné dans la grotte de l’enfer devait passer devant cette petite plaque en laiton, un moyen pour le fabricant de rappeler que rien ne lui était trop chaud. Peut-être y a-t-il au contrat une clause stipulant que les plaques doivent rester bien lustrées ?"

Le plus étonnant, conclut Stahl, étant que ce fleuron du professionnalisme allemand n'ait pas survécu à sa collaboration avec le nazisme...
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A poil en civil

Tu ferais quoi, toi, si tu possédais une photo de Georges W. Bush avec ses baloches en gros plan et ornées d’un visage souriant dessiné au marqueur, tandis que la maire de Haut-Marilyn, candidate à la Cour Suprême, est morte de rire à côté ? La planquer sous le matelas de ta mère dans son ehpad ? Mauvaise pioche !



C’est pour remettre la main sur ce qui devait faire sa fortune avant d’être dérobé par une infirmière que Tony Zank, baltringue gonflé au crack, va se lancer dans une quête sanglante et désespérée avec son acolyte McCardle, sosie black de Dean Martin en cavale dont la tête est mise à prix.



« McCardle avait la poisse comme d’autres types ont du psoriasis. »



À leurs trousses, Manny flic à l’ancienne sous codéine permanente va faire usage de ses réseaux et de son art du chantage pour arrêter le flux de cadavres qu’ils laissent à travers les faubourgs de Pittsburgh, dans une interprétation très personnelle de la loi.



Dans la famille des grands auteurs US déjantés, aux côtés des Robinson, Zahler, Easton Ellis et autres Haskell Smith, Jerry Stahl fait figure de premier de la classe et s’en donne à cœur joie dans À poil en civil, traduit par Thierry Marignac.



Plus c’est gros et plus ça passe, alors Stahl se lâche dans le burlesque, le sanglant, le sexe gore et la surenchère. Et effectivement ça passe ; et même plus que crème !



Car Stahl connaît les pièges du genre, alors il soigne son intrigue, peaufine son style et ses dialogues, travaille ses personnages. C’est propre, mais c’est surtout très barré et même drôle. Alors on aurait tort de s’en priver…

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Nein, Nein, Nein !

Quoi de mieux pour se changer les idées qu'un voyage organisé en Allemagne et en Pologne sur les traces de la Shoah ? Soigner le mal par le Mal, tel est en quelque sorte le projet de Jerry Stahl alors en pleine crise existentielle — ou dépression.



La Shoah est au fond le dernier sacré d'un Occident qui n'en a plus. On peut tout tourner en dérision, tout remettre en question, se moquer de tout, pas de la Shoah. C'est d'ailleurs interdit par la loi, comme le blasphème l'a longtemps été. Devant ce massacre industriel, froid et rationnel, au service d'une passion délirante, on devrait savoir rester décent, se tenir. (Ce qui n'empêche pas, à mon sens, de pouvoir en rire.) Nous savons que nous ne pourront jamais vraiment comprendre ou plutôt sentir ce que fut l'Holocauste. C'est une sorte d'absolu négatif. Mais tourisme et absolu, tourisme et décence, ça se marie plutôt mal.



À mon sens, le fond de ce livre est là : ce tourisme mémorielle — avec tout ce que le mot tourisme peut charrier de négatif — est plus qu'une indécence, c'est une profanation. C'est cette expérience que vit Jerry Stahl, racontée avec humour — noir évidemment (il en faut! ) — et entremêlée de réflexions désabusés et ironiques sur sa propre vie.



Un bon livre même si je n'accroche pas trop à son style gonzo, que je trouve un peu facile, faussement provocateur et subversif, au fond très conformiste.
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Nein, Nein, Nein !

Première découverte de Jerry Stahl, avec ce récit au titre et au sujet provocateur. L'histoire vraie d'une visite guidée en bus des camps de concentration nazis, racontée avec une lucidité cynique, un humour sans filtres et un goût prononcé pour l'auto-derision.



Le sujet est intéressant et se pose à chacun d'entre nous, puisqu'il est admis que ces lieux se visitent au nom du devoir de mémoire.

La démarche de l'auteur est particulière. Il entreprend ce voyage parce qu'il est déprimé et qu'il veut confronter son mal-être à une douleur de plus grande échelle.

Mais en même temps, il s'interroge : "Quel genre de personne voit le théâtre d'un génocide à travers le prisme de ses propres petits soucis personnels ? Le narcissisme dans toute sa splendeur "



Il explore la façon dont nous nous souvenons de la Shoah et se pose la question de savoir comment on peut honorer la mémoire des victimes de ce génocide. Car, en dépit des digressions et des farces grotesques, c'est bien là la ligne directrice du récit. Et on ne peut ignorer la pertinence de cette ligne directrice puisque l'auteur est lui-même juif.



Le voyage en bus pendant 2 semaines donne déjà lieu à des scènes d'anthologie, tant il est habile à cerner et à appuyer sur les défauts de ses compagnons de voyage et à restituer les échanges les plus saugrenus ( on lui pardonnera les caricatures nécessaires pour valider son expérience).

Ainsi donc il se joint aux foules qui se tiennent devant les chambres à gaz et ne peut manquer de s'offusquer de les voir faire la queue pour manger une pizza dans le snack-bar d'Auschwitz . Car cet homme qui a connu des expériences extrêmes, notamment avec la drogue et qui ne se présente pas comme un parangon de vertu, cet homme capable du cynisme le plus froid, conserve des valeurs suffisantes pour être choqué par cette marchandisation.

Tout comme il est choqué, et les parallèles entre Hitler et Trump abondent, par l'élection de Trump et par la banalisation de son électorat.

Car, inutile de le cacher, ce livre est aussi une tribune contre Trump et ce qu'il représente.



Le résultat est une sorte de livre de voyage disjoncté sur la façon dont la Shoah est commémorée et commercialisée sur les sites en Pologne et en Allemagne. C'est aussi un condensé d'anecdotes peu connues sur les dignitaires nazis car Jerry Stahl n'a pas seulement abordé le voyage en tant que clown dépressif, mais il s'est également sérieusement documenté.

Il le confirme au Times of Israel : " Si je m’évanouissais aujourd’hui, les ambulanciers qui viendraient chez moi trouveraient des étagères et des étagères de livres sur le nazisme, et ils pourraient penser que je suis un nazi ou un spécialiste du nazisme. Mais il ne fait aucun doute que j’ai été obsessionnel. Je devais m’immerger. "



Au delà des digressions et des scènes cocasses, Jerry Stahl pose une question saisissante :" Suis-je le seul être humain qui, en présence de l’indicible, décèle en lui-même un puits d’indicible encore plus abyssal, et amorce une descente aux enfers de petit joueur, sporadique et sans classe aucune, vers ce qu’il ne parvient à saisir que vaguement : l’horreur d’être complètement indigne de l’horreur elle-même ? ".



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Anesthésie générale

Oh. My. Goooood !!!!



Quel bouquin.



Retour de Manny Rupert, l'ex-flic sous codéïne d' A poil en civil, séparé de la tendre Tina (rencontrée alors qu'elle venait d'assassiner son mari à grand renfort d'ampoule pilée et de Destop mélangés à ses Lucky Charms).



Fauché et déprimé, il accepte (un peu obligé), de s'infiltrer à la prison d'Etat de San Quentin (Californie), pour enquêter sur l'identité d'un détenu de 97 ans qui prétend être Joseph Mengele (l'Ange de la Mort d'Auschwitz, officiellement décédé en 1979, réputé pour sa gentillesse avec les petits enfants, à qui il donnait des sucettes avant de leur enlever le foie sans anesthésie). Manny a une couverture en bois : animer un atelier de parole sur la dépendance aux stupéfiants... Et c'est parti pour 450 pages de situations impossibles et délirantes, de personnages complètement dingues (du maton en pleine transformation sexuelle à la confrérie des putes vierges chrétiennes), de dialogues surréalistes, d'humour encore plus trash et déjanté que dans le précédent opus de Stahl, menées à un rythme frénétique et d'une écriture survoltée. Roman décapant et culoté, Anesthésie générale est aussi solidement documenté, rappelant les liens idéologiques et économiques qui unirent le Troisième Reich et l'Amérique (qu'Hitler admirait : la stérilisation des Noirs, les expériences sur les prisonniers, aaaaach !), la complaisance des dirigeants américains envers les scientifiques nazis lors de l'opération paperclip entre autres, et dénonçant rageusement la couleur largement raciste et antisémite ainsi que l'obsession de pureté de l'Amérique bien pensante actuelle. S’il avait vécu, je suis persuadé que le Führer aurait aimé prendre sa retraite en Amérique. Vous comprenez ? L’objectif de la science nazie était d’empêcher les inutiles de polluer notre pur sang nordique. Et voilà que, pas plus tard qu’il y a une semaine, je vais au supermarché bio, et qu’est-ce que je vois ? Une rangée entière pleine à craquer de "purificateurs de sang". Si seulement le Führer avait pu voir à quel point son travail a porté ses fruits. Je n’ai aucun doute qu’il aurait choisi de prendre sa retraite à Los Angeles et qu’il se serait mis au yoga. Il ne jurait que par l’homéopathie !



L'anesthésie générale, plus que celle d'un Manny sous opiacés, c'est celle d'une Amérique en mal de mémoire : "La seule raison pour laquelle les Américains sont tellement satisfaits d’eux-mêmes, c’est qu’ils ne connaissent rien à leur propre histoire" (mais qui se souvient, en achetant son pantalon, qu' Hugo Boss a créé les uniformes de la SS et des SA, qui seront fabriqués dans les camps ?)



Excessif, provocateur, d'un mauvais goût total, davantage sex & drug que rock'nroll, Anesthésie générale constitue à la fois un moment de lecture jubilatoire et de colère réjouissante, une formidable farce, où l'on rigole autant que l'on grince des dents.
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Moi, Fatty

Roscoe Arbuckle n’est pas encore Fatty quand il se retrouve sur les routes des États-Unis , jeté hors du domicile familial par son père alcoolique et violent alors qu'il n’a qu’une dizaine d'années .

De petits boulots en représentations théâtrales, il va commencer à se faire une réputation .

Le succès balbutiant, il se rend à Hollywood où il débute devant et derrière la caméra.

Son succès fera des envieux et le conduira face à la justice , soupçonné de viol et meurtre; le tout n’étant qu’une machination contre Hollywood devenu le centre des débordements en tout genre, drogue, procès , manipulations, dessous de table et pratiques répréhensibles même à l’époque et dans ce milieu.

Fatty vivra une vie pleine de violence, d’argent, de célébrité, d’abus d’alcool et de drogue( la morphine étant " distribuée " aussi facilement qu’un doliprane), et de souffrances tant physiques que psychologique .

il mourra à 46 ans après avoir retrouvé un semblant de popularité mais en étant resté celui qu’il fut toute sa vie, un homme fragile , qui se disait naïf et même un peu simplet.

L’auteur a écrit à la première personne du Singulier, prenant le temps du récit la place de Fatty et comparant sa situation juridique à celle d’O.J Simpson.







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Nein, Nein, Nein !

Depuis que je traîne mes guêtres sur la toile et critique des bouquins, je fais l’effort de classer mes lectures dans des grandes cases, littérature blanche et littérature de genre. Puis dans des cases de taille moyenne : science-fiction, fantasy, policier, romance. Parfois je pousse même le vice à les coller dans des cases plus minuscules que la place qui reste dans mes bibliothèques : cosy mystery, urban fantasy, new romance,… Sincèrement je m’en sors pas trop mal pour savoir ranger mes lectures. À peu près... Du moins pour la littérature dite de genre. Et puis parfois, au détour d’un Masse critique ou de l’étagère d’une librairie, je tombe sur un bouquin et je sais tout de suite que j’aurai du mal à le classer quelque part…



Il y a longtemps que je n’avais pas plongé aussi loin de ma zone de confort. Il faut dire que Jerry Stahl est un « personnage » : écrivain, journaliste, scénariste, il a notamment écrit sur son addiction à la drogue. Sincèrement, je ne le connaissais pas. Du tout. Et j’ai tendance à me méfier des ouvrages estampillés drôles et/ou caustiques. Mais alors pourquoi avoir choisi Nein, Nein, Nein !… à cause du sous-titre qui figure sur la couverture : La dépression, les tourments de l’âme et la Shoah en autocar. Si avec tout ça, ce n’était pas décalé…



Et décalé, le bouquin de Stahl l’est. Sans doute presque autant que son auteur. C’est brut, cynique, vulgaire et foutrement honnête. Je crois que c’est surtout cette honnêteté qui a permis au récit d’aller au-delà du témoignage narcissique, égocentré et caustique. Car ouais Jerry tourne autour de lui autant qu’il semble se haïr. Sa dépression, son énième divorce, sa santé abîmée par son passé de toxico, Jerry ne cache rien, ne dissimule rien et surtout ses propres lâchetés, ses propres médiocrités. Alors que je pensais surtout rigoler – et j’ai ri, vraiment – j’ai aussi été face à autre chose, à une humanité sans fard devant la barbarie et le devoir de mémoire. Parce qu’en fouillant son ressenti face aux visites de Dachau ou d’Auschwitz, monsieur Stahl nous interroge aussi sur notre propre rapport aux souffrances du monde, sur notre penchant, ô combien humain, à revenir à notre propre petite personne, même confronté au pire de l’Histoire..



Sans doute ne conseillerais-je pas ce bouquin au premier venu… Non, il n’est pas à mettre entre toutes les mains, surtout celles qui se choquent facilement ou qui ont du mal avec l’humour du désespoir ou la banalité de l’égoïsme. Pour les autres, ceux qui comme moi rient plus souvent pour ne pas pleurer que par légèreté, c’est une chouette découverte.
Lien : http://altervorace.canalblog..
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Thérapie de choc pour bébé mutant

Un nouveau roman de Jerry Stahl, c’est toujours une drôle d’expérience. Et celle-ci peut-être encore plus que les précédentes, d’ailleurs. Car si en fin de compte on retrouve dans Thérapie de choc pour bébé mutant les mêmes motifs et personnages que dans ses autres livres (junkies, faux candides, vrais menteurs, manipulatrices, théories du complot et intrigues tarabiscotées), Stahl semble vouloir ici repousser encore un peu les limites.



Voici donc Lloyd, junkie qui aurait voulu devenir écrivain mais n’a jamais percé que dans l’écriture de listes d’effets secondaires de médicaments pour des spots publicitaires (« C’est loin d’être aussi facile que vous le croyez. Il faut décider si "fuite anale" va avant ou après "pensées suicidaires et bouche sèche"») avant de travailler pour un site de rencontres spécialisés dans les célibataires chrétiens (jesusmhabite.com) basé à Tulsa, Arizona. Obligé de quitter la ville après un braquage foireux et donc foiré, Lloyd rencontre dans le bus la jeune Nora. Enceinte, persuadé qu’on veut l’assassiner et que les lobbies de la chimie et de l’agroalimentaire veulent détruire les Américains, elle convainc Lloyd de la seconder dans un plan destiné à révéler cette conspiration à l’Amérique.



Après un début rocambolesque rythmé par les réflexions de Lloyd sur son addiction et ses divers boulots et thérapies (« La raison pour laquelle le café détruit votre foie lorsque vous l'ingérez par la bouche et le sauve si vous le prenez par le fion demeure un des plus grands mystères de la médecine New Age. »), Thérapie de choc… change de braquet, passant très vite de la chronique déjantée du quotidien du junkie assumé à quelque chose d’autre. Une histoire d’amour complètement folle et destructrice dans laquelle Lloyd apparaît comme une sorte d’avatar de Bobby Stark, héros de Perv, une histoire d’amour. Tout aussi coupablement naïf que cet adolescent, tout aussi dépendant d’une fille rencontrée sur la route, Lloyd va toutefois aller encore plus loin – peut-être est-ce aussi un signe des temps puisque Perv prenait place dans les années 70 tandis que Thérapie de choc… se déroule de nos jours – dans la déchéance et une certaine forme d’abomination.



Car si le ton demeure toujours relativement léger et si les passages se succèdent toujours aussi hilarants, il n’en demeure pas moins qu’ils décrivent une réalité tragique. À commencer par cette effarante scène de meurtre au trombone (de bureau, pas à coulisse) dans les toilettes d’un relai routier qui réussit à être à la fois drôle du fait du ridicule achevé de la situation et sordide. Et c’est avec horreur et stupéfaction, mais aussi en rigolant, que l’on découvre les plans totalement fous de Nora et qu’on la voit se vaporiser du Round Up dans le vagin.

C’est dire si l’on réservera cette lecture à un public averti. Pour autant, il serait dommage pour ceux qui n’en ont pas encore eu l’occasion, de passer à côté de cet auteur dont les récits, certes parfois un peu alambiqués de prime abord, relèvent avec crudité et humour les contradictions et les dérives d’une société basée sur l’entertainment créatrice de pantins déshumanisés et dans laquelle les derniers véritables humains sont aussi les personnages les plus fous et faillibles.


Lien : http://www.encoredunoir.com/..
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Perv, une histoire d'amour

Bobby Srark n’est pas un adolescent verni, c’est le moins que l’on puisse dire. Son père s’est jeté sous un tramway, sa mère fait régulièrement des stages à l’hôpital psychiatrique pour y subir des électrochocs et sa sœur s’est fait la malle au Canada avec un déserteur. Cerise sur le gâteau, il vient de se faire virer de sa prépa et doit retourner à Pittsburgh dans l’appartement familial. Un retour aux sources douloureux et un avenir des plus sombres qui s’annonce pour celui qui se qualifie de « garçon de seize ans acnéique et sexuellement détraqué ».



Alors que la guerre du Vietnam bat son plein, Bobby rêve de partir pour San Francisco, lieu de débauche et de perdition où toutes les utopies semblent pouvoir se réaliser. Grâce à Michelle, son amour d’enfance devenue Hare Krishna (avec sari, crâne rasé et catogan), Bobby fait le grand saut. La fuite vers Frisco de ce duo improbable va malheureusement virer au cauchemar…



Jerry Stahl frappe fort avec Perv, un roman picaresque et décapant. Son héros est un poissard complet qui accumule les échecs et les rencontres hautes en couleur. Tout le charme (si l’on peut dire !) du texte repose sur cette galerie de personnages hors normes croisant la route de Bobby. De Sharon la nymphomane à Mr Schmidlap le tatoueur manchot, de Howard et Henrietta, les retraités séniles à Varnish et Meat les hippies psychopathes, Bobby attire comme un aimant les freaks les plus barrés que l’on puisse imaginer.



La narration à la première personne renforce la sensation de désarroi du jeune homme. Totalement perdu, revenant sans cesse avec nombre de flashbacks sur les épisodes les plus affligeants de son enfance, Bobby tente de comprendre comment il en est arrivé là. Lucide, drôle malgré lui, c’est un héros assez typique de la littérature américaine contemporaine. Et si l’on sourit franchement au début de l’aventure, le tragique de la situation ne fait par la suite qu’empirer jusqu’au chapitre final où l’apparente légèreté laisse place à une véritable angoisse et à un sentiment de malaise pour le lecteur.



Avec Perv, Jerry Stahl révèle un sens aigu de la cruauté doublé d’une ironie mordante. Une plongée truculente et déjantée dans l’Amérique sous acide des années 70. Âme sensible s’abstenir.




Lien : http://litterature-a-blog.bl..
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Nein, Nein, Nein !

Quel est le point commun entre Alf (mais si, l'extra-terrestre baffreur de chats!), Trump et les camps de la mort ? C’est Jerry Stahl bien sûr ! Ecrivain et scénariste pour la télé, dépressif, ex-héroïnomane et juif, il manie l'humour noir- pétrole dans un des récits les plus décapants et forts qu’il m’ait été donné de lire.

Son aventure commence par un message d’alerte au mot-clé « Holocauste » sur Google, qui entraîne Jerry Stahl à contacter un tour operator spécialisé dans les circuits de la 2de Guerre Mondiale. La brochure annonce : « vous visiterez certains des camps de concentration […] vous découvrirez les plus infâmes : Auschwitz et Birkenau où vous verrez des souvenirs glaçants de l'Holocauste. » Ni une ni deux, Stahl s'embarque dans ce périple de 2 semaines, « pour voir de l'intérieur le fief des authentiques nazis du cru. » et traverse l'Allemagne et la Pologne dans un car de tourisme.

Ce qui commence par une blague de mauvais goût se poursuit pourtant comme une réflexion essentielle et profonde sur les lieux de mémoire, et « l’humanité sous son pire jour ». Stahl raconte son périple, les habitants qu’il rencontre, ses compagnons de voyage et les autres touristes avec un humour à vous faire grincer des dents mais ses réflexions s’appuient également sur une documentation conséquente pour aboutir à un constat d’indignité : « Avant mon séjour, j’avais passé des mois à éplucher des ouvrages et des témoignages, à m’immerger dans la Shoah […] Tout ça pour attester, dès mon arrivée, non pas la mascarade que constituent ces camps, mais ma propre et déconcertante incapacité à le comprendre en profondeur. Pour quelles raisons nos pensées ne peuvent être aussi nobles que nos intentions ? »

Stahl nous abreuve ainsi d’anecdotes historiques passionnantes et dit son malaise aussi. Par exemple, il est interpellé par le snack-bar à la sortie du camp d’Auschwitz : « La déconnexion totale entre dureté du passé et décontraction du présent truffé de sacs banane, malbouffe et cartes postales achetées au magasin de souvenirs est si flagrante qu’elle se passe de commentaires. » et par l’incongruité de certaines remarques qu’il entend. Mais sa conclusion est sans appel : « Rien, en définitive, ne saurait diminuer la cuisante gravité émanant des lieux arpentés par les martyrs, nos ancêtres. » et de nous mettre en garde « la Shoah n’était guère une exception. L’exception, ce sont les laps de temps entre chaque holocauste. Alors un conseil : savourez-les, ces moments. »



Un texte décapant et intelligent, à découvrir absolument !
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Perv, une histoire d'amour

Jerry Stahl maîtrise l’art de la digression narrative et arrive ainsi à exprimer avec brio ses états d’âme. Ce procédé rappelle à la fois Philip Roth, Woody Allen et J.D. Salinger —tous Juifs. J’ignore pourquoi les Juifs ont tant de facilité à exprimer leurs déboires avec humour et sans jamais se prendre au sérieux mais être capable de rire de soi est à mon avis une incontestable preuve d’intelligence.



Bobby a 16 ans. À la suite d’une fornication collective qui tourne mal, il se fait virer de l’école et retourne à Pittsburg où il tente de cohabiter avec sa mère, une veuve névrosée qui fait grande consommation de barbituriques. Il rencontre éventuellement Michelle, une hippie dont il tombe amoureux et dès lors, on nage en plein chaos psychédélique.



Les 200 premières pages rappellent L’Attrape-cœur mais là où Salinger évoquait avec génie la naïveté d’un ado, Stahl plonge dans les méandres de la psyché tordue d’un gamin issu d’une famille juive dysfonctionnelle. Le contraste entre la mère qui fait passer ses comprimés avec du cognac et Bobby qui file à la chambre de lavage pour fumer son joint est savoureux et on sent bien que Stahl, toxico notoire, s’est posé de sérieuses questions existentielles avant d’écrire.



Page après page, il nous entraîne dans le tourbillon de pensées qui assaille Bobby. Ses doutes, son manque de confiance, ses fantasmes. Le procédé est classique mais appliqué de façon crue et assaisonné de drogue, il donne au livre une dimension étonnante et le rapproche de classiques de la contre-culture tels que Speed de William Burroughs et Drugstore Cowboy de James Fogle.
Lien : https://alaincliche.wordpres..
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Mémoires des Ténèbres

roman autobiographique de Jerry Stahl .

Dernière page, je referme le bouquin et j'ai l'impression d'avoir moi aussi ingurgité toute les substances psychotrope que c'est envoyé Jerry durant une bonne partie de son existence!

pour faire un comparatif j'était à peu près dans le même état qu’après le visionnage de "requiem for a dream".

Ce roman m'a scotché et m'a conforté sur tout le bien que je pensais de Mr Stahl (et sur tout le mal que je pensais de la drogue)

Il est drôle, cynique, critique et d'une efficacité redoutable dans ses propos bref un grand écrivain, même le "chacal "le dit c'est que ça doit surement être vrai!

Je me demande encore comment est il possible qu'il soit encore en vie avec tout ce qu'il s'est mis dans le cornet durant 25 piges! il dit lui même qu'il n'a jamais été sobre en écrivant ce roman et quand on voit la qualité de celui ci on en arriverait presque à regretter que les cures de désintox aient fonctionné .

un film a également été adapté(permanent midnight) avec ben Stiller dans le rôle principal (ma photo de pseudo) moins puissant que le bouquin certes mais plutôt bien joué!

Merci Mr Stahl de m'avoir donner un grand moment de lecture .

et je n'oublierais pas ce que vous m'aviez dit lors d'une dédicace :

"on se reverra en enfer"
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Nein, Nein, Nein !

Récemment, ma fille de 16 ans m’a surpris en m’annonçant qu’elle aimerait visiter des camps de concentration. Voulant en savoir plus sur ce tourisme de l’ombre, je me suis lancé dans la lecture de "Nein, Nein, Nein !", le dernier roman de Jerry Stahl dont j’avais entendu parler dans les médias.

« Quel genre d’homme se dit : "Tiens, et si je me faisais une petite virée dans les camps de la mort" ? Il faut avoir une vie en vrac total pour voir en ce dispositif le remontant idéal, le seul capable de vous remettre d’aplomb, non ? »

Je ne pense pas que ce soit le cas de ma fille, mais c’est celui de Jerry Stahl, dépressif de longue date et bien connu pour ses mémoires imbibées de drogue.

Découvrant qu’il existait des circuits touristiques sur l’Holocauste, Jerry Stahl s’est dit qu’en « [s]'imposant une situation où le malheur était de rigueur, l’expérience […] [lui] apporte[rait] une nouvelle forme de soulagement ». Ou comment soigner son malheur en le nourrissant. Son improbable virée en autocar avec un groupe d’une quinzaine de touristes l’a conduit à Auschwitz, Buchenwald et Dachau, sans oublier le ghetto de Varsovie, le musée Schindler, la fête de la bière de Munich et Nuremberg.

Dans un flot ininterrompu d’humour noir, l’auteur raconte sa propre vie détraquée et la pure cruauté qui a permis à ces lieux d’exister, le tout saupoudré de remarques caustiques pour les touristes. Auschwitz ? Meilleur parking et toilettes gratuites « derrière la chambre à gaz ». Buchenwald ? La cafétéria la plus sympathique où l’on peut « déguster un succulent déjeuner ». Et n’oubliez pas de porter des chaussures confortables si vous ne voulez pas succomber « à un oignon au pied chopé dans un camp de la mort ».

Dans une langue acérée et pleine d’autodérision, il parle ainsi de la banalisation du mal et de sa rage contre l’absurdité humaine, n’hésitant pas à railler ses compatriotes avec qui il voyage : Tad et Madge, par exemple, un couple digne de Disney World, en shorts rouges assortis, Shlomo, un septuagénaire de Chicago qui soutient Trump ou Doug et Tito, deux « véritables professionnels du voyage organisé » qui intercalent l’excursion sur l’Holocauste entre un séjour de 13 jours en Irlande et une croisière de 21 jours en Alaska.

J’ai trouvé que Jerry Stahl jetait un regard inhabituellement mordant sur l’Holocauste en s’interrogeant sur ce tourisme macabre. De temps en temps, au milieu du sarcasme ou de l’ironie, émerge la vraie question qui anime le livre : « la présence, sur le site d’un génocide, de touristes braillards agglutinés en une horde compacte a-t-elle un quelconque impact sur la gravité des événements ? » Stahl trouve logiquement pathétique et tragique le fait de transformer l’inimaginable en une excursion d’une journée. Mais il est surpris d’être à la fois incapable de comprendre l’énormité des crimes génocidaires et respectueux de ce qui a été préservé et commémoré pour que les gens puissent le voir.

L’auteur est une figure intellectuelle décapante et clivante. Ses opinions politiques diviseront les lecteurs et certaines de ses comparaisons entre l’Allemagne nazie et l’Amérique d’aujourd’hui pourront paraitre extrêmes. Il établit par exemple un parallèle entre les nazis et les membres de la foule qui a pris d’assaut le Capitole des États-Unis le 6 janvier 2021, « vu que les tee-shirts et sweats à capuche arborés par les sbires lyncheurs-défécateurs de Trump comportaient des logos rigolos du type Camp Auschwitz ». Mais elles ont le mérite de pointer les poussées nationalistes et populistes actuelles en Europe ou en Amérique et invitent à réfléchir à leurs dérives malsaines ou violentes.

De plus, lorsqu’il se calme pour se concentrer sur l’horreur, il place le lecteur simplement face à la vérité de ce qui s’est passé. Et c’est là qu’il brille, car le récit ne glisse jamais vers un manque de respect pour les victimes de l’Holocauste. Le cœur de Stahl est toujours à la bonne place et reste humble face à la réalité qui s’offre à lui. Son habileté à manier l’humour rend encore plus puissants ces apartés d’un sérieux mortel. « J’aimerais que la douleur et la souffrance causées par la Shoah et les sentiments provoqués en nous lorsque nous nous y confrontons puissent servir de passerelle vers le martyre enduré par d’autres », déclare-t-il dans un passage.

Jerry Stahl sort de cette expérience dans un état probablement différent de celui auquel il s’attendait malgré l’« incapacité à ressentir » qu’il s’attribue à lui-même. Aucune lecture ne peut préparer quelqu’un, tout comme aucune prétention ou posture ne peut le protéger de l’impalpable vérité des meurtres nazis ou génocidaires. Et finalement, conclut-il, peu importe si l’Holocauste est devenu une industrie lucrative. « Rien, en définitive, ne saurait diminuer la cuisante gravité émanant des lieux concrets arpentés par les martyrs, nos ancêtres. […] On pourrait parler de rédemption des vivants par les morts. C’est là le cadeau suprême. L’horreur suprême. Et la seule réalité qui compte, après tout. »

Une belle et digne conclusion pour cet ajout vivant, audacieux, parfois perturbant à la littérature sur le génocide. C’est caustique, souvent à mourir de rire et maniaque dans sa mise à mal du tourisme de l’Holocauste. Il nous remet à l’esprit des énigmes qui interrogent l’âme et que les traitements pudiques de la Shoah étouffent parfois. Je n’ai pas ressenti de culpabilité en me surprenant à y rire ou sourire. Le pouvoir de l’humour, la tension et le contraste entre rire et pleurer peuvent vraiment servir de tremplin grâce auquel nous apprenons à mieux nous comporter les uns envers les autres au cours de notre bref séjour sur terre.

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A poil en civil

Ca commence sur les chapeaux de roue : un dénommé Zank et son complice McCradle, défoncés jusqu'à la moëlle, suspendent par les pieds la mère du premier depuis sa chambre de la maison de retraite pour lui faire avouer où se trouve une photo qui vaut son pesant d'or et sur laquelle ils ont misé leur avenir. La suite du roman est à l'avenant : les situations improbables se succèdent, les morts s'accumulent (suivant des modes aussi loufoques que variés, à savoir empoisonnement au débouche-évier, décapitation, accident de voiture), l'hémoglobine coule à flots. Les méchants sont des psychopathes paranoïaques qui carburent au crack, le flic a le coeur tendre et un penchant pour la codéïne, la suspecte est une femme fatale avec sang-froid et cigarette aux lèvres, et tous sont obsédés par le sexe. Jerry Stahl tire à vue sur les policiers, les politiques, le polar, et on se régale avec un roman trash, outrancier et déjanté, et surtout franchement drôle.
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Permanent Midnight

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Magnifique interview sur deux pages par Eric Naulleau dans le Journal du Dimanche N.4004 du 08 octobre 2023.



Les questions sont opportunes. Les réponses sont, pleines de belles citations d'autres écrivains, tout simplement supra-machin chose.



On comprend l'artiste. C'est émouvant.



Le tout est à propos de la sortie de ce livre ""Permanent Midnight"", pour nous expliquer très justement son propos.



Je recommande chaudement.





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A poil en civil

Cette histoire complètement barrée avec des personnages border line est juste jubilatoire.

Du sexe, de la drogue, un flic accro à la codéïne, une tueuse d'époux gourou et une maire prête à tout pour s'élever dans la hiérarchie politique c'est un cocktail explosif qui explose à chaque chapitre.
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Anesthésie générale

Pour éviter l'expulsion, Manny Rubert, ancien policier et drogué, accepte d'infiltrer la prison de San Quentin, en se faisant passer pour l'animateur d'ateliers sur la prévention de la toxicomanie. Harry Zell l'a chargé d'identifier un vieil homme, emprisonné pour un accident de la route, qui affirme être Joseph Mengele, le médecin sadique qui officiait à Auschwitz.

Quatrième roman de Jerry Stahl, romancier et scénariste. Il a notamment écrit des épisodes de "Twin Peaks" et de "CSI", et collaboré au scénario de "Bad Boys 2". L'auteur de l'impressionnant "Mémoires des Ténèbres", véritable descente aux enfers, revient à sa veine plus légère avec Anesthésie générale. Dans cette suite de "A poil en civil", on retrouve Manny Rupert, ex-flic, ex-junky sommé par un type louche d'aller enquêter dans la prison de San Quentin sur un redoutable médecin nazi. L'occasion pour Jerry Stahl de tirer à vue sur le système carcéral et politique américain (entre autres) avec un humour peu subtil, mais assez ravageur.


Lien : https://collectifpolar.com/
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