Citations de Marcela Iacub (107)
Dans mes intervalles de lucidité, je ne comprenais pas comment j'avais pu croire - au point d'en mourir - en une institution comme le couple alors que j'avais des idées si extravagantes sur presque tout.
Il n'est pas impossible que j'aie attendu à mon insu qu'un prince charmant vienne me convaincre que j'avais tort. Je n'avais pas réussi à éteindre dans mon coeur l'opium de l'espérance.
Je n'avais jamais conçu la vie dans la solitude sentimentale. En dépit de l'immense déception que j'avais vécue, j'y croyais comme une jeune fille. J'étais vieille, et innocente.
Le médecin vous fait comprendre avec un sourire plein de compassion que vos organes affectés jadis au miracle de créer la vie se mettront, petit à petit, à dévorer la vôtre. Soudain, une panoplie de maladies affreuses dont vous ignoriez jusqu'alors l'existence vous guette.
Vous devrez traquer, fliquer, surveiller vos organes inutiles qui se révoltent contre votre corps pour vous signifier que lorsque vous perdrez le pouvoir de procréer, vous serez finie.
En bref, le sexe dans le couple ne sert qu'à unir ceux qu'il va finir par séparer quelques années plus tard (...)
Quand le sexe les unit, il le fait en excluant tout le reste du monde. Quand il inclut un tiers il le fait généralement sous la forme du sexe sans sentiments, tel un acte de consommation. Et si jamais il inclut ce tiers dans un lien avec attaches ou avec des sentiments, c'est la fin du couple conjugal.
En bref, la passion amoureuse qui semble si puissante et absolue -- et comme séparée de toutes les circonstances extérieures -- n'est qu'illusoire quand elle ne peut s'appuyer que sur elle-même. Au lieu du bonheur il y a la satiété, l'ennui, la routine, la solitude. Et cette désillusion provoque la méfiance, la haine, les reproches et les remords.
Dans les couches aisées de la population, les femmes étaient soutenues par leurs maris comme si le rôle d'épouse était une profession. C'est pourquoi on avait pu affirmer que "si la femme se distingue de la courtisane ordinaire c'est seulement parce qu'elle ne loue pas son corps à la pièce, comme une salariée, mais le vend une fois pour toutes, comme une esclave".
Le sentiment de solitude est à l'origine de cette manière d'être mort alors que l'on respire qu'est la dépression.
On prétend que seuls les enfants auraient besoin d'avoir des rapports fors -- notamment avec leur mère -- pour survivre et se développer. Alors que les adultes, eux, pourraient le faire grâce au souvenir de leurs attachements passées. La personne dite immature est celle qui n'y réussit pas.
Les femmes sont parfois comme ça ; il suffit qu'elles trouvent l'homme dont elles tombent amoureuses, et puis toutes leurs fantaisies homosexuelles disparaissent.
Le cinéma et surtout la télévision, à une plus grande échelle, sont les outils de propagande les plus efficaces pour nous convaincre et nous faire croire. On pourrait même penser que c'est dans le langage cinématographique que l'on apprend aux gens à vivre leurs expériences amoureuses. Et tout cela pour mieux vendre leurs produits mais surtout pour créer l'obéissance et la foi avec lesquelles on achètera tous les autres. Car la publicité est elle-même un énorme champ qui exploite aussi bien l'amour que la préparation à l'amour. On nous vend des voitures en nous faisant croire que nous pourrons par ce biais séduire une femme unique, qu'en achetant tel mascara nous serons en mesure de capturer comme dans une toile d'araignée l'homme auquel on rêve.
Chaque amour échoué devait apparaître comme une erreur. L'autre moitié de nous-mêmes était censée respirer, son cœur battre quelque part dans ce bas monde en nous attendant ; ce serait l'être qui nous produirait jusqu'à la mort les mêmes frémissements des premiers jours.
Le pervers est velléitaire et arrogant. Il est capable d'allumer des cigarettes avec des billets de cinq cents euros, de jeter des diamants à la poubelle si ça lui sert à mener son horrible entreprise de destruction. Les pervers amoureux sont absolument intraitables car la destruction est leur passion et ils la communiquent à autrui, sous la forme d'une passion d'autodestruction.
La passion amoureuse nous fait penser que nous naissons au monde de l'Autre, que la réalité comme telle se réduit à son être à lui, que, hormis cette terre promise qu'est son corps, sa voix, son parfum, nous sommes bannis de la vie elle-même.
Eros était, selon les Grecs, un amour qui ne peut se passer de la présence de l'autre, un amour cannibale, un amour fou, absolu, celui qui fait que les gens se retrouvent dans des situations proches du délire, pour tout oublier, pour s'arracher au monde frustrant et sauvage qui est le nôtre, le substituer aux autres liens absents, compenser leurs échecs, prendre la place de toute spiritualité. Cet amour-là s'est développé comme la foudre et chacun est prêt à tout pour le vivre. Tandis que les autres voies de l'oubli sont interdites ou déconsidérées, l'amour est, au contraire, quelque chose que l'on a voulu tout à la fois banaliser et ennoblir.
L'amour passion est une véritable emprise sectaire dans la société actuelle que l'on ne perçoit pas comme telle, car il semblerait que ce soit une secte autorisée même si elle peut s'avérer encore plus dangereuse que celles contre lesquelles nos gouvernants ne cessent de nous mettre en garde.
C'est dans la souffrance de chacun d'entre eux que les lois sociales et psychiques deviennent compréhensibles. C'est pour cette raison que j'ai décidé non pas de rédiger un traité avec des idées générales et abstraites, mais de vous montrer la vérité de l'enfer amoureux à travers le vécu d'individus aussi réels que vous et moi.
On est censé s'y occuper de toutes sauf de celles de l'amour, les plus nombreuses, et les plus « victimes », si j'ose dire, parmi toutes. Car on censure tout discours qui porte sur les ravages de l'amour. Il est presque un signe de mauvais goût, une ringardise dans un monde toujours prêt à accepter plus de sacrifices pour glorifier cette nouvelle idole.
Souvenez-vous comme Isabelle Adjani s'est couverte de ridicule lorsqu'elle a osé rompre la loi du silence pour dénoncer les cruautés psychologiques de son partenaire. Lorsqu'elle a élevé la voix pour dénoncer l'absence de législation contre les abus dont elle avait été l'objet, tous les magazines s'en sont servis pour se moquer de cette femme courageuse.
Parfois l'on devient pervers, l'on prend goût à la destruction d'autrui d'une manière occasionnelle, car la situation se présente. Convenons d'appeler ce groupe de pervers récidivistes ou occasionnels les « maltraitants » et leurs victimes, les « proies ».
Nos sociétés de jadis avaient de solides garde-fous pour contenir, voire empêcher ce type de comportement. À une époque que certains verront comme arriérée, le divorce était rare, les couples s'unissaient pour la vie et les pervers devaient se contenter d'aventures marginales. Leur capacité de nuire était ainsi sévèrement cantonnée. Qui plus est, les tribunaux étaient très indulgents à l'égard du crime passionnel, ce qui pouvait leur faire craindre le feu d'une vengeance irrémédiable. Une maille bien plus forte encore, celle de la morale, faisait que ce type de personne ne trouvait pas l'approbation, voire l'indifférence souveraine qu'elle suscite aujourd'hui.
« Tu as transformé Voltaire en une secrétaire. Tu as fait de moi une secrétaire toxicomane, psychotique et mégalomane
qui se prend pour Voltaire. »