Citations de Patti Smith (496)
Ma connaissance du LSD se résumait a des passages de Collages, un petit livre d'Anaïs Nin. Je ne savais rien de la culture psychédélique qui florissait à l'été 67. J'avais une vision romantique des drogues et les considérais comme sacrées, réservées aux poètes, aux musiciens de jazz et aux rituels indiens.
Nos différences sociales, si exaspérantes fussent-elles, se teintaient d'amour et d'humour. Au final, nous avions plus de points communs que de différences et nous nous attirions comme des aimants, si large fût la faille. Nous essuyions toutes les tempêtes, grandes ou anecdotiques, avec la même vigueur. A mes yeux, nos destins étaient irrévocablement liés, comme ceux de Paul et Elisabeth, le frère et la soeur des Enfants terribles de Cocteau. Nous jouions à des jeux identiques, décrétions l'objet le plus obscur un trésor, et déconcertions souvent nos amis et nos relations par notre dévotion indéfinissable l'un envers l'autre.
(p. 278, Patti Smith parle ainsi de son ami, Robert Mapplethorpe)
J'écris pour avoir quelqu'un.
Nous désirons des choses que nous ne pouvons pas avoir. Nous cherchons à retrouver tel moment, tel son, telle sensation. Je veux entendre la voix de ma mère. Je veux revoir mes enfants quand ils étaient enfants. Petites mains, petits pas rapides. Tout change.
Après un dernier café au Collage, je me suis rendue à l'aéroport où j'ai appris que mes bagages avaient été oubliés à l'hôtel. Je suis montée dans l'avion [...] Je n'avais pas de livre à lire et il n'y avait pas de film durant les cinq heures de vol. Je me suis sentie immédiatement prise au piège [...] J'ai décidé d'écrire. J'ai écrit afin d'avoir quelque chose à lire...
Il existe deux sortes de chefs-d'oeuvre. Il y a les oeuvres classiques, monstrueuses et divines telles que Moby Dick, Les Hauts de Hurlevent ou Frankenstein ou le Prométhée moderne. Puis il y a ces textes où l'auteur semble infuser une énergie vitale dans les mots tandis que le lecteur est secoué comme dans une machine à laver, essoré et suspendu pour le séchage. Des livres dévastateurs.
Une zombie optimiste, calée sur ses oreillers, noircissant des pages somnambuliques - fruits encore un peu verts ou déjà trop mûrs.
Je rêvais d'être peintre, mais j'ai laissé l'image glisser dans une cuve de pigments et de crème pâtissière pendant que je sautais de temple en décharge en quête du mot.
"J'étais complètement éprise des livres. Je voulais les lire tous, et ceux que je lisais généraient de nouveaux désirs." (p. 16)
Le travail de Wahrol reflétait une culture que je voulais éviter. Je détestais la soupe,et la boîte ne m'emballait guère. Ma préférence allait à l'artiste qui transforme son temps plutôt qu'à celui qui se contente de le refléter.
J'étais attirée par le Moyen-Orient, les mosquées, les tapis de prière et le Coran de Mahomet. J'ai lu Les femmes du Caire de Nerval et les nouvelles de Bowles, Mrabet, Albert Cossery et Isabelle Eberhardt. Comme le haschich imprégnait l'atmosphère de ces histoires, j'avais l'intention de m'y adonner également. Sous l'influence de la fumée, j'écoutais The Pipes of Pan at Joujouka, l'album produit par Brian Jones en 1968. J'étais heureuse d'écrire au son de la musique qu'il aimait. Des hurlements des chiens aux cuivres extatiques, ce disque fut un temps la bande-son de mes nuits.
J'ai lu et relu le livre interdit, je l'ai suivi sur des sentiers qui ont orienté mon esprit vers des horizons inattendus. Si je me perdais en route, j'avais désormais une boussole trouvée dans un tas de feuilles mouillées dans lequel, chemin faisant, j'avais donné un coup de pied. La boussole était vieille est rouillée, mais elle fonctionnait encore, reliant la terre aux étoiles. Elle m'indiquait où je me trouvais et où était l'ouest, mais pas où j'allais ni ce que je valais.
L'inspiration est la quantité imprévue, la muse qui vous assaille au cœur de la nuit. La flèche vole et on n'est pas conscient d'avoir été touché, on ignore qu'une multitude de catalyseurs, étrangers les uns aux autres, nous ont clandestinement rejoint pour former un système à part, inonculant les vibrations d'un mal incurable _ une imagination brûlante _ à la fois impie et divin.
Silence. Passage des voitures. Le grondement du métro. Des oiseaux appelant l'aube. Je veux rentrer à la maison, geignais-je. Mais j'étais déjà à la maison.
Ensemble, nous riions des enfants que nous avions été ; nous jugions que j'avais été une méchante fille qui s'efforçait d'être gentille, et lui un gentil garçon qui s'efforçait d'être méchant. Au fil des années, ces rôles allaient s'inverser, puis s'inverser de nouveau, jusqu'à ce que nous arrivions à accepter notre nature double et à nous mettre en paix avec l'idée que nous renfermions des principes opposés , la lumière et l'obscurité.
La seule chose sur laquelle on peut compter, c’est le changement.
Par certaines nuits spécialement claires, il m’arrivait de voir du mouvement dans les herbes. Au début, je pensais que c’était l’envol de la chouette effraie ou les grandes ailes pâles d’un papillon lune qui se déployaient et se repliaient tel un habit médiéval. Mais j’ai compris une nuit que c’étaient des êtres comme je n’en avais jamais vu, vêtus d’étranges costumes et de coiffes archaïques. Je pensais alors que je pouvais voir le blanc de leurs bonnets et, par instants, une main, en train d’attraper quelque chose, illuminée par la lune et les étoiles ou les phares d’une voiture.
Cependant, une vibration se faisait sentir, une impression d'accélération. Ça avait commencé avec la lune, ce poème inaccessible. Maintenant, des hommes avaient marché dessus, il y avait des traces de caoutchouc sur la perle des dieux. Peut-être était-ce la conscience soudaine du temps qui passe, le dernier été de la décennie. Parfois j'avais envie de dire pouce et d'arrêter tout ça. Mais arrêter quoi ? Arrêter de grandir, tout simplement, peut-être.
C'est de retour à la maison en sécurité avec mes livres.
Je suis toujours reconnaissante envers ma mère de m'avoir appris à lire.
Je suis prise d'un désir nostalgique de redevenir celle que je n'ai pas été.