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Critiques de Phil Klay (50)
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Les missionnaires

Voilà un roman diablement ambitieux qui entend explorer les répercussions de l'impérialisme américain post 11 septembre en un examen inflexible de la guerre moderne. Phil Klay jette une lumière cinglante sur le système de la guerre antiterroriste que l'armée américaine à développer et exporter dans le monde entier, de l'Irak à l'Afghanistan, de la Colombie au Yémen, dressant ainsi le portrait d'une gigantesque guerre, poreuse, mutable, éternelle.



Clairement, il ne choisit pas la facilité en centrant son récit sur le très complexe conflit colombien débuté dans les années 1960 opposant pêle-mêle armée gouvernementale, groupes paramilitaires ( forces auxiliaires de l'armée ), guérilleros communistes des FARC, les narco-trafiquants ainsi que les civils, cocaleros ou pas, aux obédiences mouvantes. Cela parait presque insensé de construire un récit cohérent à partir d'un matériau aussi chaotique. Cela demande de la discipline dans l'ossature narrative. Phil Klay y parvient et c'est très impressionnant de le voir droit sur sa ligne en refusant à simplifier le propos. Cela demande un effort de concentration et une attention exigeante afin d'absorber une quantité d'informations conséquentes.



Aucune concession non plus à l'impatience du lecteur. L'auteur prend son temps. Toute la première partie ( sur trois ) tend tour à tour le micro à quatre personnages qui racontent leur histoire à la première personne avant de se croiser en enfer, en Colombie, dans une petite ville du Norte Santander. Nous sommes en 2016 en pleine tentative de processus de paix. Un référendum se prépare pour valider un accord entre le gouvernement et les FARC prévoyant un cessez-le-feu, un désarmement des guérilleros et une justice transitionnelle « clémente » pour les repentis.



Dans un quasi flux de conscience proche de la confession, l'auteur révèle leur mécanisme interne et leurs cicatrices psychologiques, se faisant le narrateur convaincant de la vie intérieure de ses quatre personnages, tous abîmés excellemment caractérisés :

- le droit et étroit Mason, vétéran d'Irak, appartenant aux forces spéciales américaines envoyé comme officier de liaison pour aider les autorités locales à mettre fin à la guerre civile tout en neutralisant les gangs de narco-trafiquants qui pullulent en Colombie.

- la journaliste américaine Lisette qui après avoir couvert l'Afghanistan recherche une guerre que les Américains ne perdent pas. Le personnage le plus intéressant car le plus ambigu, à la fois cynique et naïve, idéaliste et blasée.

- Abel, un ex-paramilitaire qui l'était devenu après le massacre de sa famille par les FARC. Le plus touchant, en quête de rédemption mais forcément rattrapé par la dure réalité.

- Juan Pablo, un officier colombien ultra conservateur, inquiet par l'accord de paix en cours, voulant protéger sa fille de l'idéalisme de gauche. Il apporte une véritable réflexion intellectuelle au récit, presque philosophique.



Après une première partie tournée vers l'intériorité, le récit bascule, l'intrigue colombienne démarre dans un rythme et une mécanique proches du thriller jusqu'à un dénouement sanglant. Ce que le roman perd en introspection, il le gagne en vitesse et ampleur, embrassant une vision large et d'une infinie richesse, scrutant la diversité des expériences humaines sous le feu d'une violence extrême. Et c'est extrêmement violent avec des scènes insoutenables mais jamais gratuites parvenant à éviter tout sensationnalisme.



Malgré quelques digressions un poil fastidieuses, Phil Klay maintient la clarté dans des scènes très peuplées insérées dans des événements complexes aux multiples ramifications. Il trie le chaos pour donner du sens entre ironie et empathie profonde pour ses personnages, entre brutalité urgente et réflexions éthico-philosophiques, poussant le lecteur à méditer sur la persistante angoissante de la violence dans le monde contemporain.



Un roman puissant, ambitieux et lucide, captivant.



PS : Phil Klay est un ancien Marine. Les Missionnaires est son premier roman de fiction, après Fin de mission qui revient sur son expérience en Irak, il faut que je le lise ...
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Les missionnaires

Phil Klay est un ancien Marine ayant servi sur le front irakien de janvier 2007 à février 2008. Après « Fin de mission », un recueil de nouvelles aussi poignant que réaliste, il vient de publier son premier roman, « Missionnaires », qui revient comme son ouvrage précédent sur l’engagement des Etats-Unis dans d’interminables campagnes en Irak, en Afghanistan et en Colombie.



« Missionnaires » est un roman très construit, qui, à la manière d’une série, multiplie les angles de vue et les temporalités, en déroulant un récit non linéaire du point de vue de quatre narrateurs distincts. La précision de cette construction quasi-mathématique permet à son auteur d’emmener son lecteur sur les fronts irakiens, afghans et colombiens, et la maestria avec laquelle Phil Klay développe son intrigue est saisissante. Ce procédé est cependant tellement utilisé dans la littérature américaine contemporaine qu’il ne surprend plus. Si le récit gagne en ampleur en multipliant les focales et les époques, il perd sans doute une forme de supplément d’âme qu’une intrigue linéaire sans artifice permet plus aisément de proposer à son lecteur.



« Est-ce qu’il y a la moindre guerre aujourd’hui qu’on ne soit pas en train de perdre?



Et au bout de quinze minutes, il me répond par deux mots :



En Colombie. »



Ce court extrait résume l’idée-force du roman, qui, s’il s’attarde sur les conflits irakiens et afghans dans lesquels sont enlisés les Etats-Unis, a pour ambition de revenir sur les ramifications et les enjeux d’une guerre dont on parle moins, celle qui est menée en Colombie.



Sur les quatre narrateurs que l’on suit sur une longue période allant de 1986 à nos jours, deux sont colombiens : Abel, un jeune paysan dont la famille est massacrée par la guérilla, qui rejoint malgré lui Jefferson, un chef paramilitaire aussi influent que malfaisant et Juan Pablo, un haut gradé de l’armée colombienne qui travaille en étroite coopération avec les services américains. Les deux autres narrateurs sont américains : Mason, infirmier engagé sur le front irakien et Lisette, journaliste baroudeuse basée à Kaboul pour couvrir le conflit afghan.



Si le début de l’intrigue nous donne l’occasion d’appréhender toute l’horreur et toute l’absurdité des enlisements irakiens et afghans, on comprend que le coeur du roman bat en Colombie, au creux d’un conflit inextricable, qui évoque une équation insoluble, mêlant paramilitaires, narcos et guérilla, entités se décomposant en factions avides d’argent et de pouvoir, aux alliances fluctuantes, capables d’une cruauté qui dépasse l’entendement.



Lisette et Mason vont en effet reprendre du service en Colombie où leurs destins vont s’entremêler avec ceux d’Abel et de Juan Pablo. L’intrigue qui se noue au présent et met en scène un paysan enrôlé par les paramilitaires, un haut gradé de l’armée colombienne, un ex-infirmier devenu agent de liaison et une reporter au sang chaud, donne l’occasion à Phil Klay de proposer une analyse très fine du conflit colombien.



« Les missionnaires » est ainsi un ouvrage protéiforme et brillant qui permet tout à la fois de revenir sur l’impasse désenchantée des fronts afghans ou irakiens et sur la complexité infinie du conflit colombien.



Exceptée l’attachante Lisette, le roman souffre cependant d’un défaut d’incarnation, et n’est traversé ni par le supplément d’âme, ni par l’improbable poésie qui caractérisent les chefs d’oeuvre du genre. Si le nouvel opus de Phil Klay reste un exercice de style virtuose, il n’atteint pas les sommets des superbes « Yellow Birds » de Kevin Powers ou « Fin de mi-temps pour le soldat Billy Lynn » de Ben Fountain.

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Fin de mission

Qu’ils soient soldat, aumônier ou artilleur, homme de terrain ou employé administratif, chacun des douze narrateurs de « Fin de mission » a vécu la guerre en Irak à sa façon et n’est pas ressorti indemne de son expérience...





A travers leurs regards, Phil Klay nous dépeint avec talent la réalité d’un monde en guerre, dans lequel la violence côtoie la peur, l’absurde se heurte à la raison et où le dégoût se mêle bien souvent à l’incompréhension. Douze histoires impressionnantes de réalisme, qui ne cherchent pas à cacher la misère d’un pays en souffrance, ni l’horreur d’un quotidien où meurent des innocents, où il faut tuer pour ne pas crever, où l’on devient un héros au prix de sa vie…





Dénonçant aussi bien la bêtise de certains dirigeants américains, qui mettent en danger la vie de soldats par leur simple incompétence, que la barbarie des insurgés qui torturent et abandonnent des innocents à la mort, l’auteur nous offre une vision très nuancée de la guerre, sans manichéisme. Il nous parle de toutes ces vies détruites et bouleversées, de l’incapacité à se reconstruire quand on a connu l’horreur des combats et côtoyé la mort d’aussi près.





Loin d’offrir une vision esthétisée de la guerre, comme on en trouve souvent dans les films et les romans, l’auteur opte pour un réalisme glaçant. Ici, les cadavres pourrissent dans les rues, dévorés par les chiens errants, les mines n’attendent que votre passage pour exploser, la peur vous prend et ne vous lâche plus, agissant directement sur vos sphincters... Alors, pour calmer les tensions, il y a les nuits blanches à jouer sur la Nintendo, les bordels et leurs maladies vénériennes et les histoires qu’on se raconte pour se donner du courage…





En tant qu’ancien Marine ayant servi en Irak, Phil Klay nous parle d’un univers qu’il connait bien, nous offrant, à travers ce recueil sublime et intense de douze nouvelles, un regard à la fois lucide et averti sur la guerre. La narration à la première personne nous plonge directement dans la tête de ces soldats engagés au nom de l’honneur et de la gloire. Une narration d’autant plus vivante et effrayante qu’elle est réaliste et sans pathos. Une écriture brute, franche et sans langue de bois, mais qui n’est pas dépourvue de beauté et d’humour. Phil Klay parvient à éviter tout jugement de valeur et ne tombe pas dans un discours pro-américain de l’engagement, préférant évoquer la description du quotidien de l’armée vu de l’intérieur. Un recueil passionnant et saisissant, qui a valu à son auteur de recevoir un National Book Award amplement mérité ! A lire absolument !





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Fin de mission

Quel choc ! Cela va être difficile de transcrire tout ce que ce livre a suscité . Il s'agît d'une dizaine de nouvelles centrées sur la guerre en Irak et plus particulièrement , le retour d'expérience de marines. Ils ont été affectés à la logistique, à la propagande, au service mortuaire, à l'artillerie, à l'infanterie. Ils sont prêtres, seconde classe, commandant. Ils sont blancs, noirs, arabes. Ils sont mutilés, dévastés psychologiquement . Ils attendent la mort, poursuivent leurs études , ne comprennent plus leur femme, boivent. Mais tous ont été changés.



C'est un livre absolument remarquable car le point de vue l'auteur est neutre quand à l'utilité de la guerre, de cette guerre en Irak. Il n'est pas là pour nous dire "c'est bien " ou "c'est mal". Il est là pour rétablir des vérités .Même si elles sont dures à entendre.

Philip Klay est un vétéran d'Irak et cela se ressent.Rien n'est fortuit. La réaction d'un marine à son premier mort, l'attente de la confirmation de la mort à travers une lunette thermique, cela ne s'invente pas.

Que dire de l'étude de la guerre sans arme ? La distribution de tenue de base ball aux petits Irakiens, ou la propagande diffusée dans les villes assiégées.

On rencontre des marines d'une humanité absolue, venus chasser les insurgés mais protéger la population civile. On trouve aussi des commandants venus pour tuer, entrainant tout le régiment derrière eux avec toutes les conséquences physiques et mentales imaginables.

On croise des soldats qui s'évertuent à apprendre l'apiculture aux veuves irakiennes et d'autres qui provoquent pour mieux attaquer.

Lorsque les marines sont de retour aux USA, on est dans du plus classique . L'incompréhension du monde , l'alcool , la dépression , l'isolement.Mais également ceux qui s'appuient sur leur statut de vétéran pour s'élever socialement.

L'armée US n'en sort pas grandie, ni salie d'ailleurs. Je l'ai trouvée plus humaine que ce que je pensais.

Comme d'habitude, la religion fout le bordel . Là, c'est entre chiites et sunnites. Si l'on comptait sur une année les morts liés à la religion, la Covid ne serait en effet qu'une gripette insignifiante. Ce problème local est , comme le reste, montré avec beaucoup de recul, sans position péremptoire.

C'est le livre le plus fort que j'ai pu lire sur la guerre "moderne", mais je ne suis pas un expert. Ce livre a reçu le prix du meilleur livre américain 2014, ça ne veut rien dire mais quand même ...

je vous le conseille bien évidemment.

J'en profite pour présenter mes vœux à ceux qui lirait ces quatre lignes insignifiantes. Je vous souhaite, comme je le fais à mes élèves , d'être heureux. Démerdez vous comme vous voulez mais soyez heureux.
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Fin de mission

Ce recueil de nouvelles signé Phil Klay nous emmène sur les champs de guerre d'Irak et d'Afghanistan. Lui même ancien du corps de marine, Klay raconte le quotidien de ces soldats engagés dans des conflits qui font la fierté de l'Amérique mais qui porte un regard lucide, glaçant sur les blessures psychologiques à la fin de ces missions. La peur, la bravoure, l'absurdité des combats, la difficulté de retrouver les siens après le chaos du terrain, Phil Klay dans un style très réalisme qui fait froid dans le dos, décrit aussi l'impossibilité de compréhension des proches, les horreurs vécues et la difficulté de la réinsertion quand autant d'images terrifiantes hantent la mémoire des soldats.

Klay n'évite rien, ces portraits sont aussi touchants que terrifiants. Fin de Mission mais surtout début d'auteur remarquable.
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Les missionnaires

Brillant, complexe dans ses ramifications, ce premier roman sidère par sa puissance de frappe, par la force de son cri multiple et foisonnant de plusieurs voix, toutes dénonçant la Guerre avec un G majuscule – ces conflits qui n'en sont qu'un, fusionnant en une seule lutte menée par ces missionnaires du bien porteurs du mal et de la violence. Violent, brutal, ce roman force à ouvrir des yeux que certains préféreront garder clos (plus de détails : https://pamolico.wordpress.com/2022/01/26/les-missionnaires-phil-klay/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
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Les missionnaires

Raconter la guerre ; raconter les guerres.



Parmi les théâtres d’opérations extérieures dans lesquels les USA se sont engagés ces dernières années, il y a les plus connus : Afghanistan, Irak, Libye. Et puis il y a les autres, ceux où la guerre est différente, moins visible, officieuse, larvée. Mais c’est la guerre quand même.



Dans Les Missionnaires, Phil Klay – traduit par Laura Derajinski – nous plonge au cœur de la guerre civile colombienne, dans cette période d’avant 2016 où après 220 000 morts, 40 000 disparus et 6 millions de déplacés, un accord de paix entre les FARC et le gouvernement se dessine. Dans la douleur, et toujours dans le sang.



C’est là que se retrouvent Lisette, grand reporter en manque de terrain depuis l’Afghanistan, venue y recueillir la parole des populations civiles, et Mason, agent des forces spéciales US rangé du terrain mais toujours actif depuis son bureau, ses téléphones et ses rendez-vous secrets.



Officiellement, voilà un conflit où les États-Unis ne sont pas engagés mais où tous leurs services rivalisent d’interventionnisme occulte : des intrigues de la CIA aux actions commandos des SEAL, ils y mènent une guerre qui ne dit pas son nom.



Mais qui dit guerre dit ennemi, et une faction guérilléros en chassant souvent une autre, les alliances se faisant et se défaisant au gré du pragmatisme politique, il apparaît bien difficile à définir pour les Américains, posant constamment la question de la légitimité changeante de leur intervention.



Et du côté de la population, le dilemme est souvent le même, à l’image d’Abel dont la famille a été assassinée par les Mil Jesùses, mais qui finira par travailler pour leur chef Jefferson, avant de se ranger puis de lui revenir à nouveau, témoignant malgré lui de la difficulté à choisir un camp, à garder ses convictions et à rester en vie simultanément.



« Si vous voulez que les gens rejettent la paix, présentez-leur des victimes des FARC. Si vous voulez que les gens l’acceptent, reparlez-leur que l’État a du sang sur les mains, lui aussi. » (…) « Il y a vingt ans, je payais le vaccin aux FARC. Il y a quinze ans, je le payais aux paras. Il y a cinq ans, je le payais aux Peludos, et puis aux Urabeños. (Il secoua la tête.) Cet endroit est comme un ballon de foot, et ils se font juste des passes. »



Et puis à La Vigia, dans le Norte de Santander, tout ce petit monde va se retrouver, mettant chacun face à ses responsabilités face à un final sanglant devenu inéluctable.



Les Missionnaires est une grande et ambitieuse fresque romanesque, doublée d’une réflexion politique poussée sur l’évolution de l’intervention des USA dans ces conflits : de l’Afghanistan - guerre ingagnable - à l’Irak – et ses armes de destructions massives qu’on ne trouva jamais –, on est passé à la Colombie (et au Yémen, en Syrie, aux Philippines…).



Klay raconte qu’on ne fait plus la guerre, mais qu’on déploie désormais des successions de missions, pour la plupart occultes. Des missions qui n’ont plus besoin d’objectifs ni de justifications réelles, mais qui ont juste lieu « parce qu’on ne peut pas rester sans rien faire » et que l’équilibre politique de la paix est de plus en plus complexe à trouver.



Si Fin de mission, recueil de nouvelles où Klay racontait les séquelles de la guerre, m’avait emballé, j’ai eu beaucoup plus de mal avec Les Missionnaires, reconnaissant la qualité et la profondeur du travail de l’auteur, mais souvent perdu dans la myriade de factions rivales, les nombreux rappels historiques, et une forme d’hésitation perpétuelle entre le roman et l’essai historico-politique.



Mais pour qui est, comme moi, amateur de livres de guerre, de politique et d’histoire contemporaine, alors Les Missionnaires se doit d’être lu.
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Fin de mission

Ce livre m'a été envoyé par masse critique et je me réjouis d'en partager la découverte.Il s'agit d'un recueil de nouvelles écrit par un trentenaire vétéran du Corps des Marines.

Dans chacune de ces histoires,je suis immédiatement entrée dans le corps,dans la tête du personnage,héros de celle ci.J'ai ressenti,suivant les situations racontées avec le réalisme du vécu,de la colère,de la haine,un immense chagrin,du dégoût,de la peur,une réelle admiration pour ces héros qui le sont devenus parfois malgré eux,dont les actes du quotidien de la guerre seront souvent ignorés,parfois mal compris s'ils réussissent à rentrer chez eux.

Quelle souffrance aussi ,pour eux,de ne pas pouvoir tout simplement oublier ce qu'ils ont fait,vécu,et de comprendre qu'on ne va les "considérer" que s'ils rapportent des faits bien sanglants grâce auxquels on pourra s'apitoyer sur leur souffrance,surtout si les séquelles en sont bien visibles!

L'auteur n'est pas tendre avec ceux des officiers dont le manque d'intelligence ou l'ambition ont entraîné la mort d'hommes qui n'avaient comme tort que de participer à une guerre dont ils n'étaient que des pions.

Je ne vois pas l'intérêt de rapporter une à une,dans chacune de ces nouvelles,tout ce qui m'a touchée,convaincue.Si on ne lit pas cet ouvrage,on ne peux pas s'en faire vraiment une idée.

Je suis éblouie par le talent de cet auteur qui a su transformer son expérience de la guerre en acte positif d'écriture et peut-être amener les civils à comprendre pourquoi le combattants ont tant de mal à reprendre une vie "normale" après.

Qu'on soit pour ou contre la nécessité de telles guerres,on comprend en lisant ces nouvelles que tous ces hommes ont exploré le pire et le meilleur d'eux-mêmes et qu'ils n'en sortent jamais innocents

ENORME BRAVO à Phil Klay.
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Fin de mission

Fin de mission... Vraiment ?



Dans cette douzaine de nouvelles de Phil Klay (traduites par François Happe), les névroses et autres syndromes de stress post-traumatiques (PTSD) explosent à la face du lecteur, comme autant d'EEI (Engins Explosifs Improvisés) cachés en Irak ou en Afghanistan.



Elles sont atrocement anecdotiques comme celui des tueurs de chiens, mystiques comme celui de l'aumônier de guerre ou de ce dialogue catholico-islamique de campus, drôles autant que misérables lorsqu'il s'agit d'imposer le base-ball aux petits irakiens pour faire plaisir à un sponsor planqué au pas... Elles font toutes réfléchir.



À travers ces récits, Klay nous rappelle que revenir de mission d'Irak ou d'Afghanistan était déjà un succès. Mais cela ne signifiait pas que la mission était finie pour autant. Une autre démarrait alors : celle de la vie d'après qu'il faut essayer de reconstruire.



Alors que je n'aime habituellement pas les nouvelles, j'ai pris plaisir à lire celles-ci, tant le style de Klay est rythmé et habile à alterner l'anecdote et la réflexion, le grave et le drôle, les dialogues et les digressions.



Un livre qui instruit, qui fait réfléchir et qui ne laisse pas indifférent.
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Fin de mission

Des soldats. Américains. En Irak. Celui-là rentre chez lui après avoir passé son temps, là-bas, à abattre des chiens qui se nourrissaient de cadavres. A la maison il retrouve sa femme et son labrador, couché au pied du canapé. Celui-là vient de délivrer des policiers irakiens torturés dans la cave d’une maison tenue par des insurgés. Celui-là a du mal à se remettre de la mort d’un gamin de 14 ans, tué sous ses yeux par son collègue. Lui, il était affecté aux « affaires mortuaires », chargé de récupérer et transporter les corps de combattants, qu’ils soient américains ou irakiens. Cet autre, civil, rêvait de remettre en service une station de traitement de l’eau pour venir en aide à la population. Eux, ils débriefent à la cantine après avoir envoyé leur premier obus sur des cibles humaines. Combien en ont-ils eu en tout ? Combien ça fait de morts par membre de la section ? Et puis il y a cet aumônier recueillant des confessions difficiles à entendre, cet étudiant revenu du front, pointé du doigt par une camarade musulmane sur les bancs de la fac ou encore ce pauvre gars, défiguré par une mine, qui raconte son histoire dans un bistrot de New-York...



Phil Klay, vétéran du corps des marines ayant servi en Irak entre 2007 et 2008, a l’intelligence de ne pas sombrer dans les clichés, de ne pas jouer au « pro » ou au « anti » guerre. Son angle d’attaque est beaucoup plus fin : de l’artilleur à l’aumônier, du civil engagé par l’armée à l’administratif n’ayant jamais vu une zone de combat, il multiplie les points de vue et alimente la réflexion. Avec un réalisme sidérant, il décrit la vie d’une compagnie au jour le jour, il dit la peur du soldat sur le terrain, la haine absolue et aveugle de l’ennemi, les traumatismes physiques et psychologiques, l’impossible retour à une vie normale à la fin d’une mission, mais aussi l’incompréhension des proches, la quête de sens face à l’absurdité de certaines situations, les nombreux suicides, le regard, parfois difficile à supporte,r de ceux qui vous jugent sans avoir la moindre idée de ce que vous avez vécu.





Aucun pathos, aucun jugement, pas d’envolée lyrique, le ton est sec comme un coup de trique, empreint d’une lucidité qui fait froid dans le dos. Plus proche, dans l’esprit, de « Yellow Birds » que de « Fin de mi-temps pour le soldat Billy Lynn », deux autres textes abordant le conflit irakien, ce recueil marque la fracassante entrée en littérature d’un jeune trentenaire incroyablement talentueux.






Lien : http://litterature-a-blog.bl..
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Fin de mission

Vétérans

C'est la lecture de Billy Summers qui m'a donné envie de sortir ce livre de ma PAL pléthorique (j'achète des bouquins, je les range dans ma bibliothèque, je les contemple, je les oublie… je crois que ça porte un nom en japonais -tsundoku- heureusement, il y a les challenges Babelio !!) justement récompensé par un prix prestigieux (le National Book Award en 2014) et encore une fois, parfaitement illustré par la couverture de la collection Totem.

Phil Klay s'est engagé dans le corps des Marines et a servi pendant la guerre d'Irak en 2007 et 2008. Il a transcendé cette expérience particulièrement traumatisante en écrivant ce recueil de douze nouvelles relatant le chaos, personnel ou collectif, pendant ou après la guerre. Rédigées à la première personne, elles nous font entrer (violemment) dans l'esprit de douze personnages très différents, du simple caporal au lieutenant chargé d'un boulot administratif (absurde soit dit en passant), ou encore un prêtre, sur le terrain des opérations ou aux Etats-Unis, à leur retour de service.

Je trouve souvent que dans un recueil de nouvelles certaines sont meilleures que d'autres. C'est aussi vrai pour celui-ci (j'ai été particulièrement touchée par la première qui donne son titre au livre « Fin de mission » mais encore plus par Corps… et par Prière dans la fournaise et Histoires de guerre), mais globalement c'est une vraie réussite, un livre qui fait réfléchir, sans être dans l'apitoiement ou le manichéisme.

Eprouvant mais nécessaire.

A lire l'entretien avec l'auteur paru dans le Temps en 2015 : https://www.letemps.ch/culture/livres/fin-mission-phil-klay-raconte-sale-guerre-dirak

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Fin de mission

Ce premier livre de Phil Klay a été couronné par l’un des prix littéraires les plus prestigieux des Etats-Unis : le National Book Award. Autre reconnaissance, lors de sa parution en France, aux éditions Gallmeister, le recueil a reçu les louanges d’un certain Columm Mc Cann en une du « Monde des Livres ». Je viens modestement prolonger cette série de consécrations en lui décernant 5 étoiles rutilantes sur Babelio.



Phil Klay est un ancien soldat du Corps des Marines qui a effectué une mission de treize mois en Irak entre 2007 et 2008. Une fois démobilisé, il a intégré l’université de New York, dans le cadre d'un programme d’aide aux vétérans, où il a suivi des ateliers d’écriture. J’ouvre une parenthèse : de nombreux écrivains américains de qualité sont issus de ou enseignent dans ces ateliers de « creative writing », ce qui est une preuve de l’importance et de la qualité de ces filières, fin de la parenthèse ! Offrir cet apprentissage à un vétéran a une double utilité. D’une part, écrire a une fonction cathartique – au sens psychanalytique – pour son auteur qui peut ainsi extérioriser et purger ces treize mois lourds d’expériences traumatisantes. D’autre part, ce témoignage sur un conflit récent a une valeur historique et représente un éclairage sur l’état d’esprit des belligérants.



Depuis les origines de la littérature, la guerre a été l’un des thèmes les plus souvent traités. Seule la puissance de l’écrit permet de retranscrire la complexité d’une guerre. Pour établir une compraison, nous pouvons prendre un exemple cinématographique récent sur le thème de l’Irak :« American Sniper ». Dans une scène, le tireur d’élite incarné Bradley Cooper connaît un moment d’hésitation avant d’abattre un enfant qui se lance vers un convoi américain armé d'une charge explosive. L’instant de doute est rendu de manière simpliste quand le texte permet de rendre la longue digestion morale, toute en remords et en culpabilité, de ce type d’acte. Le choix d’un recueil de douze nouvelles participe à la volonté de peindre la guerre dans toute sa complexité en permettant la multiplication des points de vue. Parmi la foule de personnages, nous trouvons bien évidemment le combattant, mais aussi l’officier qui traite les questions administratives, l’artilleur éloigné de plusieurs kilomètres de ses cibles, l’aumônier, les soldats du génie chargés de l’entretien des routes, ceux chargé de la propagande ou de ramasser les corps, les agents qui participent à la reconstruction et à la réanimation de l’économie locale, les gueules cassées…



Les thèmes traités sont nombreux. Phil Klay évoque la difficulté du retour à la vie civile dans un monde normal où le soldat se sent étranger, au milieu d’individus avides de témoignages sordides ou qui opposent au vétéran leur condamnation politique du conflit. L’auteur aborde également le questionnement moral du prêtre qui reçoit les confessions de soldats lui indiquant que les « règles d’engagement » ne sont pas toujours respectées et que certains officiers appellent à une violence démesurée sur le terrain. Derrière les fanfaronnades et l’esprit bourrin des marines, Klay fait remonter les atermoiements des soldats face à leur premier tué : il y a ceux qui refusent d’en assumer la responsabilité, ceux qui veulent voir le résultat de leurs tirs, ceux qui compatissent avec leur victime et ressentent des remords. L’auteur montre aussi le quotidien des soldats : la misère sexuelle au cours de la mission mais aussi à leur retour, le stress des déplacements avec l’omniprésence des engins explosifs EEI sur les routes. Dans une courte nouvelle, la guerre est transcrite en termes bruts, ceux utilisés au quotidien, du jargon administratif et opérationnel riche en acronymes (un glossaire aurait d'ailleurs été bien utile au lecteur!). La mascarade de la reconstruction est aussi dénoncée, entre corruption de barons locaux et mise en place de directives inadaptées à la réalité, dans une société écrasée par la violence et les conflits communautaires.



Ces nouvelles présentent de multiples points de vue d’un seul camp : celui de l’armée américaine. Une œuvre du même acabit avec le regard irakien serait appréciable. Ces textes d’une grande qualité permettent une prise de conscience de la complexité d'un conflit. Phil Klay maîtrise parfaitement l'art de la nouvelle. Un recueil remarquable qui permet d'approndir sa connaissance d'une guerre surmédiatisée dont nous n'avons retenu que les images des journalistes "embedded" et que nous avons déjà commencé à oublier.
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Fin de mission

Reçu dans le cadre de masse critique, hasard, coïncidence la dernière fois j'avais reçu Compagnie K de William March de la même maison d'édition Gallmeister et traitant du même sujet, la guerre. D'ailleurs l'excellent livre de March est mentionné dans l'excellent livre de Klay (page 255).



Mon dieu, ce livre est bon !



Constitué de 12 nouvelles, écrites à la première personne, Phil Klay met la focale sur les hommes, les détails dont ne parlent jamais les médias, ici la guerre n'est pas aseptisée, quand on tue un homme son cadavre pourri, on a des remords, on veut voir sa dépouille, les chiens errants lapent du sang, quand on bombarde une maison, il y a des cadavres dedans, ici c'est l'anti guerre du Golfe, première du nom, avec ses frappes chirurgicales



L'aumônier en vient à perdre la foi, les anciens combattants font se pâmer les filles, ils tuent des gens et le soir ils jouent aux Pokémon.



Il y a une brigade qui est chargée de ramasser la viande froide et qui conseille à un jeune soldat de 19 ans, tout juste marié,(pour que sa femme touche sa pension. s'il meurt) ; de mettre son alliance autour de son cou, car enlever une bague sur le doigt d'un mort, n'est pas une tâche facile.



Il y a une brigade dont le job est de réparer les nids de poule sur la route, une autre qui balance des obus de 65 kilos à 10 km de distance et qui se demande si le mec qui a porté l'obus est responsable de la mort des tués.



Un milliardaire veut venir en aide aux irakiens en leur apprenant à jouer au Baseball.



Et ça continue, et à la fin on est déçu que ça se termine parce que le rythme est tellement soutenu qu'on ne voit pas la lecture passer.



Il y a une nouvelle hallucinante dans laquelle on découvre que des marines se baladent dans les rues en hurlant des insanités à la population pour qu'elle sorte révoltée et qu'ils puissent engager le combat, certains gradés sont réellement tarés, des engagés fuient la misère en s'engageant dans les Marines, c'est tout un pays, une société, un système qui se prend une grosse claque dans la gueule.



C'est réellement très complet, très sombre, très réaliste, très cru et ce jeune auteur est lettré.



Ce n'est pas manichéen, pas d'anti et de pro guerre, chaque homme engagé à des niveaux différents doit vivre avec les horreurs vues et ou ressenties. Du combat sur le terrain, au retour au pays, les hommes tués, les remords, la culpabilité.



Là, il faut foncer, parce que cet auteur livre un premier roman assez exceptionnel et encore une fois Gallmesiter frappe fort, dans la découverte de nouveaux talents.



Pour vous en convaincre, une petite citation, on pourrait citer tout le livre :



"La vraie vie et les autocollants de pare-chocs, ça fait deux, alors, n'oubliez pas : si vous dites trop la vérité, personne ne vous croira."



Allez encore trois :



- Ce ne sera pas un problème, dit-il. L'Irak manque de beaucoup de choses, mais pas de veuves.



On a pris ma prime de combat et on a acheté des tas de choses. C'est comme ça que l'Amérique riposte aux terroristes.



- Vingt siècles de christianisme. On pourrait penser qu'on a retenu quelque chose. (Je tripotais la petite croix). Dans ce monde, Il ne nous promet qu'une seule chose ; que nous ne souffrions pas seuls.



Peut-être manque-t'il des notes en bas de page pour expliquer le jargon militaire utilisé.

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Fin de mission

«  La guerre comme si vous y étiez , ou que vous en reveniez » (Liberation)

Engagé dans le corps des Marines et ayant servi pendant la guerre d'Irak en 2007 et 2008, Phil Klay a tiré de son expérience douze nouvelles, douze histoires écrites à la première personne et mettant en scène des personnages appartenant à des services différents de l’armée .



Ils sont dans l’infanterie, l’artillerie, la logistique, la propagande ou les affaires mortuaires; ils sont commandant, capitaine, employé administratif ou prêtre. Des rôles, des situations et donc des points de vue multiples sur le conflit irakien mais aussi sur la guerre en général , ceux qui la font et ceux qui la subissent, ceux qui en reviennent et ceux qui n’en reviendront pas, ceux qui tentent d’oublier et ceux qui ne s’en remettront jamais.

Il y a ceux qui tuent pour la première fois, ceux qui préfèrent ne pas savoir s’ils ont atteint leur cible, ceux qui veulent faire le meilleur « score » quitte à prendre des risques insensés, ceux qui s’interrogent sur la légitimité des ordres reçus…



Dans ces douze récits, on côtoie la peur, la violence, les interrogations. L’auteur ne juge pas, il dresse plutôt un tableau lucide et réaliste, c’est cru, sans langue de bois, poignant bien sûr , et d’une écriture directe et efficace.

Un peu d’humour aussi paradoxalement, avec le petit chapitre presqu’exclusivement à base d’acronymes militaires ( et sans lexique, s’il vous plait !) et surtout avec la nouvelle « Le dollar , une autre arme» abordant l’absurdité de la soit disant aide américaine à la reconstruction …



Un témoignage fort sur un conflit du XXI e siècle , qui a reçu le National Book Award. Encore un Gallmeister de qualité !

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Fin de mission

Des marines engagés sur le front, en Irak ou en Afghanistan, décrivent leur mission, mais surtout, la fin de celle-ci et leur difficile retour à la vie civile. Ils ont vu, entendu, touché, le fracas des armes, la violence de la guerre, la mort au quotidien, la peur chevillée au corps. Mais de retour au pays, c’est bien souvent leur esprit qui est fracturé, tant le chaos a été sans nom. Comment reprendre goût à la vie civile, dans un monde soudain lisse, aseptisé et à distance du combat ?



En douze nouvelles, Phil Klay esquisse quelques réponses à ce sujet. La quatrième de couverture le présente comme « âgé d’à peine trente ans, […] vétéran du corps des marines, pour lequel il a servi dans la province irakienne d’Anbar de janvier 2007 à février 2008. Son premier livre, Fin de mission, best-seller aux Etats-Unis, a été couronné par le prestigieux National Book Award en 2014 ».

Les intrigues et l’écriture de Phil Klay ne peuvent laisser indifférent : le ton est volontiers mordant, cynique, drôle, mais aussi poignant et laisse en tête le sentiment d’une profonde tristesse et d’une solitude sans fin. Car ces marines revenus du front sont seuls face à leurs souvenirs et même s’ils tentent de revoir leurs camarades de combat, c’est pour noyer ensemble leur chagrin dans l’alcool, comme pour oublier ce qui pourtant les unit. L’auteur décrit sans détour les traumatismes invisibles, le Post Traumatic Stress Disorder – ou PTSD - au premier plan.

Chacune des douze nouvelles constitue autant de variations sur le même thème : celui de la guerre et des dommages qu’elle procure à l’âme humaine, la séparant irrémédiablement du commun des civils. Chacune est percutante à sa manière, mais au fur et à mesure, le sillon d’ombre qu’elles creusent dans l’esprit du lecteur commence à peser, d’autant que le ton est souvent cru et réaliste.



Alors, au terme du chemin, que retenir ? L’auteur ne semble pas donner un tour politique à ses intrigues, préférant la perspective descriptive, à hauteur d’hommes et de souffrance. Et quand passe le cercueil de cet homme tombé au combat, c’est une spirale de silence qui s’ouvre parmi les vivants, à mesure qu’il progresse, happant les mots, toute possibilité de rendre compte de ce terme. La fin de mission ouvre l’espace des possibles, de ces ailleurs qu’il va falloir imaginer et incarner.
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Fin de mission

C'est un livre dur. Un coup de poing dans la figure que l'on reçoit au cas ou on aurait oublié que la guerre, c'est "moche". Les hommes n'en sortent pas plus glorieux, ce sont des victimes. Ils se sont engagés, ont choisi l'armée parce que c'est un boulot, comme un autre ou presque, qui permet de draguer les filles, d'exister, d'être quelqu'un aux yeux des autres, des civils, ceux de l'arrière. Mais à quel prix ? Chaque nouvelle donne une facette différente, sans jugement moral ou politique, juste le combat, la survie ou la mort, la souffrance et les tourments. Quand ils s'en sortent, ils sont cassés, à vie, incapable de reprendre une existence normale, incapable d'expliquer ce que l'on ressent quand un copain se fait descendre ou saute sur une mine. Ils n'ont pas les mots, il n'y en a pas d'assez fort, d'assez expressif pour exprimer l'inexprimable. La guerre est une chose anormale, une monstruosité exécutée par des gens normaux, décidée par ceux qui ne la font pas et faite par ceux qui ne décident de rien.

Ce n'est pas nouveau et le plus cynique dans cette histoire est qu'ils sont censés porter, pour certains, la bonne parole. Ceux-là, qui n'ont pas tué directement en viennent à regretter de ne pas être allés au feu, d'avoir fait tuer leurs camarades. Culpabiliser ou mourir, quel option choisir ? Il n'y en n'a pas d'où ce terrible sentiment d'impuissance à répondre à cette question.

Un rappel bibliographique sur un autre livre de guerre : Les nus et les morts de Norman Mailer, correspondant de guerre en Corée, plongée en apnée dans l'absurdité sanglante de la guerre d'après...

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Fin de mission

National Book Award 2014.

Non, il n'y a pas de sens à trouver à sa vie quand on fait la guerre. Même quand on est un homme, un vrai, qui échange avec son père, un verre de whisky en main, avant de partir en Irak, tandis que lui est un ancien du Vietnam, ce pays où il y avait des putes.

On ressort secoué de cette lecture.

Je la compare à l'oeuvre de Tim O'Brien, éternel traumatisé du Vietnam (mais dont j'avais préféré son livre : "Les choses qu'ils emportaient", encore plus dévastateur).

Je conseille un grand film : "Dans la vallée d'Elah" qui dénonce la folie des hommes en Irak.

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Fin de mission

Phil Klay est un vétéran du corps des marines en Irak. Dans ce recueil de douze nouvelles, il se place à la hauteur de ceux qui font et vivent la guerre. Chaque narrateur, chaque histoire, déplace le point de vue : celui du soldat qui tue pour la première fois à celui qui rentre chez lui défiguré, celui de l'aumônier qui essaie de "consoler" à celui de l'humanitaire qui croit aider les populations civiles. Partis pour des raisons économiques ou idéologiques, tous se retrouvent pris dans l'engrenage de la violence et confrontés à la responsabilité de leurs actes. Phil Klay ne se livre à aucune analyse approfondie du conflit - à part quelques allusions politiques et économiques. Il met la guerre à nu : c'est un face à face entre les soldats américains et la population irakienne. Les hommes et les civils se vident de leur sang, le conflit de son sens. Ni l'héroïsme, ni le patriotisme ne résistent à l'examen moral de ce qu'est une guerre. Rongée jusqu'à l'os, il n'en reste plus qu'une chose : la cruauté humaine. De son expérience, Phil Klay écrit un livre universel, fort, dur et nécessaire.
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Fin de mission

Je n'aurais pas cru qu'un bouquin sur la guerre, écrit par un écrivain américain, catho de surcroit, puisse m'enthousiasmer à ce point. Ce n'est pas tant parce que c'est drôle, on rit, mais on rit jaune, pas tant aussi qu'il démontre de l'absurde inutilité des guerres, la retraite des américains cet été d'Afghanistan au bout de vingt ans en est une preuve plus puissante, mais parce j'ai découvert un écrivain qui ne parle de la guerre que pour dévoiler un peu plus la complexité de la nature humaine, comme Conrad parlant d'aventure marine. Respect. Et j'attends le prochain.
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Fin de mission

Dans ce recueil de nouvelles, Phil Klay décrit les affres de la 2eme guerre d’Irak vécues par le corps des marines US, un corps dans lequel il a servi de 2007 à 2008.

Dés leur Fin de Mission, et à leur retour chez eux, beaucoup de ces marines ont des difficultés à retrouver une vie civile normale, certains divorcent, d’autres ont un coup de blues et l’adrénaline des combats leur manque !!!! Mais tous ne veulent pas parler de cette sale guerre, ils ne ressentent aucune gloire ; la prime de guerre servira pour les plus futés à s’inscrire à l’université.

Phil Klay fait leur mea culpa (et le sien) en présentant les marines comme des Victimes. Des victimes qui ont cependant choisi de s’engager Volontairement dans l’armée et aller faire la guerre comme d’autres auraient choisi de faire un boulot ordinaire.

Aller faire la guerre d’Irak, comme leurs prédécesseurs ont fait la guerre en Irak (la première), en Afghanistan, au Vietnam, ce n’est pas un boulot ordinaire.

Aucun mot sur le pays détruit, aucun mot sur les ‘vraies’ victimes de cette guerre horrible, injuste, injustifiée, comme l’ont été toutes les guerres (souvent programmées) où se sont engagés les USA.





«Ce qui me manque, c’est l’idée que se font de l’Irak tous mes amis civils quand ils prononcent ce mot, un Irak de violence et d’honneur, un Irak – je ne peux pas m’empêcher de le penser – que j’aurais dû connaître, mais à côté duquel je suis passé, ayant commis la stupide erreur d’opter pour une spécialisation militaire qui ne m’exposerait pas au danger. Mon Irak à moi, ça a été un tas de documents. Des feuilles de calcul Excel. Une fenêtre obstruée par des sacs de sable derrière un bureau bon marché ».’



« Voorstadt a pris une grande assiette de raviolis et des Pop-Tarts, et avant de donner un premier coup de fourchette, son regard fait le tour de la table et il dit : — Je n’arrive pas à croire qu’on a enfin eu une vraie mission d’artillerie. Sanchez dit : — Il était temps qu’on tue quelqu’un. »



Écœuré par cette guerre et toutes les guerres. Écœuré par l’impartialité suspecte de l’écrivain. Écœuré par le National Book Award qui a récompensé ce roman.

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