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Critiques de Philippe Jaenada (1169)
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Au printemps des monstres

Comme tout le monde (enfin comme tout le monde de ma génération (j'avais treize ans en 1964, ça avait fait du bruit à l'époque (j'avais même acheté un numéro de détective))) je croyais tout savoir de l'affaire de l'Etrangleur (un certain Lucien léger (qui s'était lui même nommé "l'Etrangleur") avait enlevé un petit garçon de onze ans (pas très éloigné de mon âge à l'époque (je n'y avais pas pensé à l'époque)), avait demandé une rançon (qui n'avait pas été versée) et avait étranglé sa victime; arrêté quelques temps après, il avait avoué et avait été condamné à la prison à perpétuité (tout le monde pensait qu'il avait eu de la chance de sauver sa tête (et que c'était injuste(à l'époque presque tout le monde était pour la peine de mort)).

Ce préambule était un essai d'utilisation des parenthèses à la Jaenada; ce n'est pas très facile, il faut compter les parenthèses pour ne pas en perdre le compte; enfin j'aime bien ça chez Jaenada; moi j'abuse plutôt du point-virgule.

Par la suite, j'avais appris lors de sa libération conditionnelle que Léger détenait le record de la plus longue peine de prison effectuée au vingt-et-unième siècle (quarante et un ans quand même; bien fait!) puis qu'il était mort trois ans après sa libération.

C'est dans cet état d'esprit que j'ai entamé la lecture du livre de Jaenada, dont je suis un fidèle lecteur.

Et au bout de sept cent cinquante pages, où l'intérêt ne s'émousse jamais, je ne sais plus trop quoi penser. Car Jaenada, qui nous a déjà démontré l'innocence d'Henry Girard (alias Georges Arnaud, auteur, entre autres du "Salaire de la Peur" dans "La Serpe", et prendre le parti de Pauline Buisson dans "La petite femelle" (sans oublier "Sulak", mais celui-là je ne l'ai pas lu, au terme d'une enquête monumentale, conclut à l'innocence de Lucien Léger. Enfin, innocence partielle.

Selon Jaenada, Léger serait revenu sur ses aveux dès sa première présentation au juge d'instruction, et raconté une histoire extravagante selon laquelle il aurait endossé le crime pour rendre service aux vrais coupables, ses camarades dans un réseau d'espionnage pro-soviétique, dont Yves Taron, le père de la victime, aurait été également membre. Taron aurait détourné une somme d'argent appartenant au réseau, et les amis de Léger auraient enlevé son fils pour en obtenir restitution; ils n'auraient jamais eu l'intention de tuer Luc, qui serait décédé accidentellement. Dès lors Léger ne serait coupable que d'obstruction à justice et au pire de complicité après le fait.

Jaenada démontre que les aveux de Léger sont un tissu d'invraisemblances et ne peuvent correspondre à la réalité; il n'en reste pas moins, et Jaenada est le premier à le dire, que la version donnée par Léger exposée ci-dessus est elle aussi parfaitement invraisemblable.

Quoiqu'il en soit, la justice en resta aux aveux de Léger; selon Jaenada, ce dernier fut fort mal défendu, d'abord par Me Maurice Garçon, qui abandonna sa défense pour des motifs mal élucidés, puis par Me Albert Naud, qui persista à plaider la folie.

Dans son enquête, que je n'essaierai même pas de résumer, Jaenada met au jour beaucoup de choses troublantes; il apparait à peu près certain que Léger n'était pas "l'Etrangleur" (d'ailleurs l'autopsie prouve que Luc n'a pas été étranglé), mais qu'il fréquentait un milieu interlope d'individus douteux, (parmi lesquels en effet Yves Taron, le propre père de la victime, mais aussi celui de l'écrivain Patrick Modiano) qui, bien loin d'être les espions soviétiques qu'ils avaient prétendu être pour duper Léger, étaient au contraire proches de l'OAS ou anciens collaborateurs, étaient de très authentiques escrocs récidivistes, et que l'histoire de la somme détournée par Taron pourrait être vraie.

Si l'on suit Jaenada, Léger est en réalité la deuxième victime de l'affaire.

Ne m'accusez pas d'avoir spoilé en écrivant tout ceci. D'abord, comme je l'ai dit plus haut, je suis bien loin d'avoir résumé l'affaire et la démonstration de Jaenada. Et même si c'était le cas, le livre mériterait toujours la lecture, à cause de ses bonheurs (oui, même les parenthèses), du récit entrecoupé d'épisodes, souvent savoureux, de la vie de l'auteur (pour les familiers de l'auteur, je précise que son épouse, Anne-Catherine, est beaucoup mieux traitée que d'habitude; on en est heureux pour elle, et elle commençait peut-être à se lasser).

Il y a aussi, et peut-être surtout, l'histoire déchirante de Solange, l'épouse de Lucien Léger, qui est la troisième victime de l'affaire; il est impossible de la lire sans en avoir le coeur serré. Elle m'a fait penser à ces vers d'Eluard que l'on connait (enfin, les gens d'un certain âge) parce que Pompidou les avait cité au sujet de l'affaire Gabrielle Russier (bien qu'Eluard parle en réalité de tout autre chose:

"Comprenne qui voudra,

Moi mon remords ce fut

La malheureuse qui resta

Sur le pavé,

La victime raisonnable,

À la robe déchirée,

Au regard d’enfant perdue

Découronnée défigurée

Celle qui ressemble aux morts

Qui sont morts pour être aimés"



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La Serpe

Jaenada a changé de sujets avec Sulak, la Petite femelle et la Serpe,(il se saisit de grandes affaires jugées mais où plane un doute; mais il n'a pas changé de style, toujours plein d'humour et de digressions

Il s'empare de procès et décortique les affaires en reprenant l'enquête à zéro. Ici, il évoque l'affaire Henri Girard (qui deviendra sous le nom de Georges Arnaud un écrivain célèbre en particulier pour le Salaire de la peur, porté à l'écran)

L'auteur dénonce des oublis, des mensonges lors de l'enquête.

J'aime beaucoup l'humour de l'auteur et ses célèbres digressions mais c'est un peu long, très ou trop détaillé, très documenté mais cela alourdit , à mon avis, le récit.
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La Serpe

C'est lui qui a écrit le salaire de la peur, le roman dont a été tiré le célèbre film réalisé par Henri-Georges Clouzot. Il s'appelait Georges Arnaud. Mais ça c'était un pseudonyme. de son vrai nom Henri Girard, il avait été compromis dans la sordide affaire d'un crime particulièrement sauvage. Son propre père, sa tante et leur servante avaient été massacrés avec l'outil qui a donné son nom à l'ouvrage de Philippe Jaenada : La serpe.



Quand au tiers de l'ouvrage on connaît l'issue du procès qui, contre toute attente, innocente Henri Girard alors que tout l'accablait, on se demande où Philippe Jaenada va nous emmener. Son intention, il nous la révèle quelques pages plus loin : "mon but, mon idée de départ, c'est d'écrire un roman policier, un truc sanglant, de résoudre une énigme." Mais au fil de l'ouvrage on comprend assez vite que l'intention de départ évolue, au fur et à mesure qu'il s'immerge dans les archives et en se rendant sur les lieux de ce fait divers hors du commun.



Henri Girard a été défendu par le ténor du barreau Maurice Garçon, le Dupont-Moretti de l'époque, "the must". Alors l'accusé, acquitté, est-il un coupable qui ne doit d'avoir sauvé sa tête qu'au talent de son défenseur ? Philippe Jaenada se convainc du contraire au fur et à mesure qu'il rentre dans le dossier. Convaincra-t-il son lecteur ?



Mais plus encore. Un est innocenté, un autre serait donc coupable et non démasqué à ce jour. Les faits se sont déroulés en 1941. Le château d'Escoire, théâtre du drame, était en zone libre. Lorsqu'il publie son ouvrage qui sera couronné par le prix Femina 2017, Philippe Jaenada imagine que la logique a été sacrifiée à la fébrilité du contexte. L'enquête a été contrainte, la vérité étouffée par la passion. C'est donc, rancoeurs et sympathies désormais éteintes, avec le recul on ne peut plus suffisant qu'il se livre à une relecture du dossier et une remise en question de tout. Il mène son enquête et nous la livre avec un luxe de détails qui peut paraître parfois étouffant. Mais dans une enquête, la vérité ne surgit-elle pas le plus souvent d'un détail.



On peut innocenter quelqu'un de deux façons : en prouvant qu'il ne pouvait avoir commis les faits, ou bien en démasquant l'autre, celui qui les avait commis. Et Philippe Jaenada, regrettant au passage les approximations de l'enquête, les partis pris, de forger son intime conviction et nous livrer du bout des lèvres celui qui aura échappé à la justice, bénéficiant sans doute des préoccupations d'un pays secoué par les soubresauts de l'histoire, peut-être plus enclin à poursuivre d'autres innocents désignés, sans procès ceux-là, comme boucs émissaires de la faillite du pays face à l'invasion allemande.



N'en reste pas moins que l'accusé innocenté aura été un curieux personnage n'attirant pas vraiment la sympathie, sans doute limite bi polaire comme on serait tenté de le qualifier aujourd'hui. Mais a bien y réfléchir, avait-il beaucoup de raisons d'en vouloir aux assermentés, accrédités, experts et institutionnels de tous bords pour lui avoir offert deux ans de prison aux seuls faits d'avoir été dans la proximité d'un horrible crime et plus sûrement de n'avoir su plaire à tout le monde.



Le style agrémenté d'un humour froid mais toujours pertinent relève la relation des investigations qui peut parfois s'avérer un peu lourde. On aime aussi l'implication de la vie intime de l'auteur lui-même avec ce qu'il révèle de la relation père-fils, en particulier dans ce qu'on lui connaît de pudeurs inhibitrices. L'artifice de la révélation d'un amour filial par roman interposé est habile. Gageons qu'il aura porté ses fruits dans ce domaine, au-delà du succès littéraire mérité.



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Plage de Manaccora, 16h30

Un incendie ravage une région paradisiaque d'Italie. De nombreux touristes se retrouvent pris au piège sur une plage. Un écrivain français, accompagné de sa femme et de son jeune fils, raconte cette tragique odyssée.

Ce récit nous montre la fragilité de la vie, la dérision de l'humanité souffrante et les promesses vite oubliées.

Un bémol sur le style, cependant.

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13 à table ! 2024

A l’instar de plusieurs babelionautes, j’ai trouvé bon le recueil de cette année. Dix ans d’une initiative fêtés en beauté malgré un contexte d’inflation et a fortiori de pauvreté toujours présent. Les sujets de l’enfance et de la famille sont bien sûr récurrents. Pas beaucoup d’humour cette année mais des nouvelles qui m’ont permis de passer un bon moment. Mes préférées sont :



1) Maxime Chattam et la fusillade du centre commercial

2) Raphaëlle Giordano qui fait parler une machine à laver (si si vous avez bien lu !) ; il paraît qu’on appelle cela « prosopopée »

3) Karine Giebel sur fond d’harcèlement scolaire, d’enlèvement et d’Alzheimer

4) Michel Bussi et l’immigration clandestine d’une famille qui veut passer en Angleterre



Mais j’ai bien aimé aussi Lorraine Fouchet, Romain Puértolas, Philippe Besson & Alexandra Lapierre.

J’ai pas accroché avec Slimani & Tatiana de Rosnay (c’est rare).

Je profite de ce dernier jour de l’année pour souhaiter à tous un bon réveillon et à l’année prochaine pour de nouvelles aventures littéraires !

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Au printemps des monstres

Fait divers.



Luc Taron, jeune garçon de onze ans, a été enlevé un soir du printemps 1964.

Un homme s'accuse du meurtre en se surnommant "l'étrangleur". Il s'agit de Lucien Léger, jeune homme sans histoire. Il passera quarante et un an en prison. Mais est-il vraiment coupable ? Philippe Jaenada mène l'enquête.



J'avais beaucoup entendu parler de ce livre et il m'intriguait. Je l'ai enfin lu et je l'ai bien aimé. Jaenada mène son enquête en trois parties: le déroulé des faits, des recherches sur les autres acteurs de l'affaire, et enfin, se concentre sur Solange l'épouse de Lucien. L'auteur a fait un travail de fourmi. Il a recherché jusqu'au plus petit point de détail pour étayer ses hypothèses. L'enquête est ainsi intéressante à suivre.



Nous partons de Julien Léger qui semble être le coupable idéal, mais peu à peu le doute s'installe. En effet, l'entourage de Luc Taron semble cacher de nombreux secrets. En premier lieu son père qui est très loin d'être un honnête citoyen. Les recherches de Jaenada sont impressionnantes et détaillées. On découvre des facettes insoupçonnées des protagonistes de l'affaire. Par exemple, de veuve éplorée Suzanne Brulé devient séductrice. La dernière partie se concentre sur Solange, femme de Lucien, et sa descente aux enfers. Abandonnée par tous, elle meurt dans la misère et l'indifférence.



Toutefois, j'ai trouvé que cette enquête avait des défauts. En effet, je trouve que l'auteur est allé beaucoup trop loin dans ses recherches et parfois se concentre sur des points qui n'apportent rien à son enquête. de plus, il abuse parfois des citations qui peuvent faire des pages entières. Certains passages étaient ainsi ennuyeux à lire. le livre aurait gagné a avoir trois-cents pages de moins.



Au final, une belle découverte même si ce livre était parfois trop long et accordait trop d'importance à des détails peu utiles.
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La Petite Femelle

Alors, tout d'abord, sans les challenges, jamais je n'aurais découvert la plume de Philippe Jaenada...Et franchement j'aurai loupé quelque chose !

Jamais je n'aurai pensé que quelqu'un puisse écrire comme ça !

Il nous raconte, mais avec des histoires dans l'histoire, ce qui renforce son propos.

Et en fermant ce livre, je me suis dit que j'étais vachement chanceuse d'être née à mon époque et pas avant...Le combat des femmes n'est pas encore gagné, mais quel chemin parcouru ! Et pourtant c'était il y a moins de cent ans, et notre société n'est toujours pas débarrassée des réflexes patriarcaux.

J'ai souffert avec cette femme tout au long de son histoire, parce que quand même, un destin comme ça...Et j'ai honnis toute cette meute, qui finalement est toujours la même, mais prend d'autres supports de nos jours.

Alors, oui, elle a tué son amant, mais la société s'est déchaînée contre elle, plus que de coutume, et ce livre explique tellement bien pourquoi.

Triste histoire, mais quel romancier !

Je lirais très certainement d'autres bouquins de lui...
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Au printemps des monstres

Pour la rentrée littéraire 2021 un énorme pavé fait sensation : le dernier-né de la plume de Philippe Jaenada. Sur presque 750 pages il revient sur un fait divers de 1964, l'enlèvement à Paris un soir de printemps du petit Luc Taron, 11 ans. L'enfant est retrouvé mort le lendemain dans un bois en banlieue sud. Rapidement un homme se manifeste dans les médias pour revendiquer le crime. Arrêté au bout de quelques jours il va avouer puis nier être le coupable. Pourtant il passera 44 ans en prison. Un record.



Philippe Jaenada découpe son récit en trois parties. Ce n'est pas un roman mais une véritable enquête journalistique et policière. La première partie est centrée sur le meurtre lui-même : le déroulé tel que les français l'ont vécu en 1964, l'histoire des parents de Luc, l'enquête menée à l'époque, la vie du présumé coupable Lucien Léger jusqu'à sa mort en 2008. Alors que l'on pourrait presque croire que l'histoire est jouée, l'auteur renverse les certitudes avec la deuxième partie. 50 ans après les faits il reprend les éléments de l'enquête, les centaines de pages de documents, les photos, va sur les lieux qui ont parsemé la vie des différents protagonistes, pose des questions, interpelle, confronte les faits, les écrits, les récits, sème le doute dans l'esprit du lecteur. Enfin la troisième partie fait place à Solange, l'épouse de Lucien Léger, une personnalité complexe qui a longtemps mené une vie de misère affective et financière. A la fin des 749 pages il n'y a pas une vérité mais une somme de mensonges en tous genres, de tous bords, et un fiasco judiciaire.



Pourquoi choisir ce fait ? Parce qu'il est survenu la veille de la naissance de l'auteur, parce qu'il vient d'apprendre qu'il a une tumeur au cerveau. Parce qu'il a croisé un avocat un jour. Parce que Philippe Jaenada ne se satisfait pas de ce qui paraît trop clair comme de l'eau de roche.



Cette enquête qui fait revivre un fait divers que pratiquement toute la France à oublier depuis très longtemps, c'est aussi une étude sociologique. Avec force détails l'auteur resitue les événements dans leur époque par mille petites touches (ce dont parlaient les radios, les journaux, les infos, faits divers, météo, musique, sorties cinéma ou littéraire, des détails du quotidien des français, des faits de société, de l'actualité nationale et internationale.). Une époque sans internet, sans téléphones portables, sans police scientifique. Philippe Jaenada y mêle ses propres réflexions au fil de l'écriture, réflexion sur l'enquête, sur sa vie. le sérieux sur sujet est allégé par un humour parfois très noir qui est aussi un peu d'oxygène. le texte est dense, l'impression très resserrée.



Si la première et la troisième partie sont plus centrées sur les acteurs directs et sur la description d'une époque, entre sortie de la guerre et avènement des Trente Glorieuses, la partie centrale interpelle sur le système judiciaire et sa fiabilité, sur les médias, sur le jugement des êtres humains. Dans cette deuxième partie intitulée « les monstres », Jaenada démontre méticuleusement les multiples erreurs et absurdités de cette histoire. Refaisant le chemin du tueur ou plutôt de celui qui s'était auto-accusé du meurtre, épluchant tous les documents sous tous les formats (papier, audio, vidéo, témoignages d'époque et à posteriori) il met en évidence ceux qui pour l'auteur sont les vrais monstres, ceux à qui le crime profite tout comme ceux qui abandonnent le présumé coupable dès lors que ce qu'il dit ou bien la tournure de l'affaire ne vont plus dans leur sens (l'avocat ténor du barreau, le juge, la presse papier, télé et radio).



Si l'histoire et surtout l'approche sont intéressantes, la lecture est difficile. Il y a beaucoup de disgressions, de détails pas forcément utiles sur les protagonistes directs et encore plus sur les indirects. Quant aux passages sur la vie de l'auteur, ses réflexions livrées comme si elles étaient brutes, nature, sans filtre, ne se justifient pas toujours et lassent par moments.



Reste un miroir sociologique d'une époque, et la démonstration des méandres de l'âme humaine. Pas toujours beau à voir. Mais l'être humain cessera-t-il un jour de hurler avec les loups ?

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La Serpe

Je n'ai lu que la moitié de ce long livre qui nous fait partager la biographie d'Henri Girard, un homme fantasque et à la vie ô combien mouvementée. Je n'ai pas aimé que l'auteur se mette en scène par des digressions qui, à mon sens, ne servent pas le livre. L'aspect biographie est plutôt intéressant mais là aussi, il y a beaucoup de longueurs et l'on sait que l'auteur a imaginé certains pans de l'histoire. Et pourtant, je dois reconnaître que ce livre est le fruit d'un long travail de lectures et de recherches.
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La Serpe

On se croirait dans un roman d'Agatha Christie, sauf qu'ici tout est vrai. Nous sommes en octobre 1941, quatre personnes, Georges le père, Henri le fils, Amélie la tante et Louise la bonne sont cloîtrés dans un château. le matin Henri trouve le cadavre des trois autres tués à coups de serpe. Il n'y a aucune trace d'effraction, rien n'a été volé et le fils a emprunté récemment la serpe à une voisine. Accusé Henri crie son innocence mais s'inquiète de savoir s'il sera guillotiné si par hasard il est coupable. Henri, à la loterie de la vie, on peut dire que côté physique, il n'a fait pas partie des gagnants, c'est un sale individu, capricieux, violent, cynique, fils unique d'une bonne famille Pour ce qui est de dépenser, les billets de 1000 francs fondent dans sa main. Il pompe tout l'argent de son père et de sa tante. Il aime les femmes, l'alcool et les belles voitures.



L'auteur nous fait revivre l'ambiance nauséabonde de l'occupation, la méfiance des juifs, les restrictions, les attentats contre l'occupant, les exécutions en représailles. Il part enquêter dans le Périgord sur les lieux mêmes de l'affaire. Avec sa petite pelle il tente de déterrer certains détails négligés par les enquêteurs. Tout y passe, nous voici la veille du drame, puis sur la scène du crime, une description minutieuse des cadavres et de leurs multiples blessures. On se replonge dans le dossier d'instruction, le procès avec un président du tribunal complaisant, les plaidoiries des avocats, le talent de l'avocat de la défense qui petit à petit va semer le doute parmi les jurés, comme un illusionniste en deux mouvements il transforme un foulard rouge en un vert et un accusé en innocent. Tout l'accuse et personne ne comprend ce qui a pu se passer lors du procès. Mais surtout Philippe Jaenada démontre qu'il s'agit d'une des enquêtes les plus désastreusement menées de l'histoire de la police et de la justice.



Une bonne dose d'humour ,rend cette sordide histoire plus légère. L'intérêt principal de ce récit est de nous faire découvrir cet homme atypique que fut Henri Girard, sale gosse, fils indigne, aventurier en Amérique du Sud, qui deviendra un écrivain célèbre sous le pseudonyme de Georges Arnaud et finira sa vie comme pourfendeur des injustices. Pour les reste si Philippe Jaenada même une enquête minutieuse, démontrant les erreurs commises par les enquêteurs,les mensonges et les contradictions des uns et des autres, tout ce qu'il avance n'est que des suppositions et ne présente que peu d'intérêt 75 ans après les faits d'autant plus que tous les protagonistes ont disparus.
Lien : http://notreavis.canalblog.c..
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La Serpe

Pour ce qui est du sujet de la Serpe, la première partie de la quatrième de couverture est parfaite dans le genre informatif : dates, lieu, personnages, faits. Je vous y renvoie. J'ai appris récemment qu'une bonne chronique littéraire devait parler du livre, pas de son sujet. L'excuse est bonne pour ne pas tenter un (énième) résumé de l'histoire (merci, Philippe Annocque).



Malgré ses nombreuses références clin d'oeil aux méthodes de détectives littéraires populaires (Poirot, Columbo, la petite bande du Club des cinq,...) Philippe Jaenada ne fait pas que de la littérature dans La Serpe.

On comprend et on croit très vite à la force de son engagement, à sa volonté de ne rien rater de ce que les autres ont vu, dit et écrit sur l'affaire, mais surtout d'aller encore plus loin en quête de ce qui leur aurait échappé, ou qu'ils auraient volontairement déformé.

Il ne s'en vante pas, c'est pas son genre, mais il suffit de lire La Serpe pour comprendre combien il a payé de sa personne pour mener son "enquête" : avant d'écrire, il a sans doute passé des jours et des nuits à consulter des montagnes de comptes rendus judiciaires, de correspondances, de témoignages, à lire la presse de l'époque, à prendre des notes, à compiler, à comparer.

Ensuite, se rendre sur le lieu du drame, s'isoler, s'imprégner, au risque ou à la chance de perdre ses propres repères.

On sent qu'il a même parfois pensé à l'échec de son entreprise (bizarrement un seul des 21 chapitres, le douzième porte un titre, "Tunnel", tiens pourquoi ?).



C'est cette démarche d'immersion en décor naturel - un repérage à posteriori - qui sert de structure au roman.

Parti de Paris au mois d'octobre 2016, le romancier-narrateur va passer une dizaine de jours tout seul à Périgueux, tourner autour du château d'Escoire où a eu lieu le massacre à la serpe soixante quinze ans plus tôt, et du tribunal où le procès s'est déroulé en mai 1943.

Il raconte le voyage, sa voiture de location mal réglée, l'hôtel Mercure de Périgueux où il n'y a pas de mini bar ; les (nombreuses) sculptures rouillées de Jean-Pierre Rives l'ancien rugbyman qui décorent la ville ; les œufs frais que des enfants lancent sur lui depuis un balcon (sorte de lynchage rural qui postfigure en moins tragique les relations difficiles de la famille Girard, propriétaires parisiens fortunés, avec leurs métayers durant l'Occupation).

Et à chaque chapitre, il interrompt son journal de bord périgourdin et remonte le temps pour nous plonger dans une bonne tranche de l'affaire Girard : comment tout a commencé, l'entre deux guerres, la personnalité étrange du jeune Henri, son mariage précoce en 38, sa captivité, son évasion, son kidnapping contre rançon dans Paris occupé.

Puis on abandonne la chronologie, avec la transformation d'Henri après son emprisonnement : acquittement, nouvelle femme, enfants, dilapidation de son héritage, vie aventureuse en Amérique du Sud, retour et écriture sous le pseudo de Georges Arnaud, le Salaire de la Peur, succès, remariage, engagement contre la torture en Algérie avec Vergès, et pour finir, installation en Espagne.

Puis retour arrière avec le procès à Périgueux en mai 43 (mais toujours rien sur les meurtres sanglants de 41... patience) : la formidable figure de Maître Maurice Garçon, ses méthodes, les trois jours d'audiences, la délibération express du jury, le verdict.



Je conseille de ne pas lire certaines pages de La Serpe avant d'aller dormir, surtout ni c'est, comme moi, dans les étages d'un vieux château (cette nuit-là j'ai entendu les boiseries grincer, et j'ai dû me retenir de me lever pour aller vérifier la fermeture des portes). Une scène de crime effroyable, pas d'empreintes malgré le sang répandu, des accès apparemment inviolés, des toiles d'araignée qui font office de scellés, une panne d'électricité opportune, des indices trop bien placés : tous les éléments d'un mystère criminel qu'on croirait tirés grand classique de la littérature policière...

Là, je commence à dériver sur le sujet, revenons au livre...



Jaenada est réputé pour ses digressions familières (et/ou familiales) souvent cocasses, on les attend, on les savoure, on n'est pas déçu.

Il y a celle sur Houellebecq s'enfuyant à la cloche de bois de l'abbaye périgourdine où il était venu travailler sur Huysmans et Soumission ; infiniment touchante, une postface à La Petite Femelle avec des nouvelles d'Essaouira où a été inhumée Pauline Dubuisson, pour des compléments d'information ; des voix du passé : la triste destinée d'adulte de Bébé Cadum, celle beaucoup moins triste et plus longue de la fameuse Pompe funèbre responsable du décès scabreux de Félix Faure, etc.



Je n'ai pas sous la main ses précédents romans (que j'ai lus et beaucoup aimés) sur Bruno Sulak et Pauline Dubuisson, mais j'ai l'impression qu'avec Henri Girard, Jaenada est allé encore plus loin dans l'implication personnelle. Et au départ ce n'était pas gagné car contrairement à Sulak et Pauline, Henri Girard (alias Georges Arnaud) n'est pas beau du tout et pas très attachant. C'est plus facile quand les personnages malmenés par la vie ont des physiques angéliques et qu'ils irradient une lumière séductrice qui fait contraste avec leur part d'ombre. Si Jaenada s'est vraiment forcé pour Henri (mais c'est peut-être juste une habile manipulation d'écrivain pour emballer le lecteur, auquel cas je me suis fait avoir avec plaisir !), l'effort valait la peine, et le résultat est d'autant plus réussi.



Georges Arnaud a dit un jour qu'il voulait faire un livre sur la rencontre d'un père et de son fils. Il ne l'a jamais écrit (on comprend pourquoi en lisant La Serpe). Avec La Serpe, Jaenada le fait à sa place, in memoriam. L'amour de Georges Girard pour son fils Henri est au cœur du drame, et celui de Philippe pour son fils Ernest, quotidien et vrai, offre un contrepoint consolateur, léger et souriant, à une apocalypse familiale qui fend le cœur.
Lien : http://tillybayardrichard.ty..
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13 à table ! 2024

13 à table souffle ses 10 bougies !!!

Ce recueil de nouvelles permet de passer un agréable moment en découvrant la patte des écrivains emblématiques français à travers ces textes courts et, surtout, de faire une bonne action, un livre acheté correspondant à 5 repas pour Les Restos Du Cœur !!!

La thématique de cette année est toute simple : J'ai dix ans !!!

J'ai tout particulièrement adoré celles de Raphaëlle Giordano "On est pas des machines" , François D'Epenoux "69, année fatidique ", et, en apothéose du cru 2024, "Le miroir " de Franck Thilliez !!!
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Sans preuve et sans aveu



Pour rester dans le registre de la justice, j'ai terminé l'année avec ce drôle de livre de Philippe Jaenada dont j'avais beaucoup aimé La petite femelle et La serpe et qui a pour spécialité de reprendre d'anciennes affaires judiciaires.

Ici, l'affaire n'est pas ancienne et elle est venue à lui, en la personne d'Alain Laprie, purgeant actuellement une peine de prison de 15 ans pour le meurtre en 2004 de sa tante, meurtre qu'il nie avoir commis. Ce dernier, désespéré à quelques jours de sa détention, prend contact avec l'auteur pour lui demander son aide. Il est passé trois fois devant les tribunaux, acquitté en 2018, le deuxième procès est reporté, puis il est condamné en 2021 sans possibilité de faire appel.

Philippe Jaenada, comme il l'avait fait dans ses précédents livres, et avec le talent de limier qu'on lui connaît, s'empare du dossier et traque ses incohérences, et Dieu sait s'il y en a des incohérences, des erreurs, des lacunes dans l'enquête des gendarmes et dans la procédure des magistrats, lesquelles manquent toutes deux d'impartialité et chargent Alain Laprie, au mépris de tout bon sens et sans aucune preuve.

Il s'agit d'une vilaine histoire de jalousie, de paranoïa et d'héritage, comme il en existe dans certaines familles. Une vieille femme qui a un peu d'argent, des testaments successifs, de nombreux frères et soeurs qui lorgnent sur le magot, des clans rivaux, un neveu préféré qui s'occupe de sa tante... Tout cela débouche sur un assassinat sordide dans une maison à moitié brulée.

Malgré le travail minutieux et impressionnant de reconstitution de l'enquête où l'ensemble des pièces du volumineux dossier est passé au peigne fin, la démarche louable de l'auteur est un peu vaine, voire pathétique, car il ne peut parvenir à infléchir le cours de la justice. Il est convaincu de l'innocence de l'accusé, semble avoir quelques idées sur les présumés meurtriers, mais ne peut aller plus loin.

Un livre agréable à lire comme un thriller, avec le style inimitable mais allégé de Jaenada, qui met le doigt sur les failles du système judiciaire français.

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Sulak

Braquages non-violents.



Philippe Jaenada s'attache à retracer la vie de Bruno Sulak, qui se fît remarquer dans les années 80 avec ses braquages sans effusions de sang.



Lecture agréable. Après le sympathique "Au printemps des monstres" j'ai voulu lire un second Jaenada. Bien m'en a pris. Ici l'auteur nous raconte la vie de Bruno Sulak, de sa naissance à sa mort avec de sympathiques digressions.



Je n'avais jamais entendu parler de Bruno Sulak. Toutefois l'auteur m'a appris qu'il avait parfois été considéré comme l'ennemi public n°1 dans les années 1980. Issu d'une famille pauvre d'immigrés, Sulak deviendra légionnaire, puis après une désertion involontaire se lancera dans des braquages de supermarchés.



L'auteur ressent une immense sympathie pour Sulak et nous la transmet. Bruno Sulak n'était-il pas, avant d'être un criminel, tout simplement amoureux de la liberté ? A-t-il tout simplement voulu se libérer des chaînes de la société ? Son grand-père ayant été condamné à une vie misérable par ses seules origines. Son père réussira à conjurer le sort en s'engageant dans la Légion Étrangère.



J'ai apprécié suivre cette vie atypique, où seule la liberté compte. Bruno Sulak s'avère être à la fois attachant et fascinant. J'ai ressenti de la tristesse en même temps que l'auteur lorsqu'il écrivait ses derniers instants.



En bref, un agréable moment de lecture en compagnie de Jaenada.
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Au printemps des monstres

En fin de livre, une citation d'Oscar Wilde : "La vérité est rarement pure et jamais simple". Une longue enquête de 750 pages autour d'un fait divers de 1964. Au début, tout est clair et on se demande comment l'auteur peut consacrer autant de pages à ce fait divers, mais peu à peu, le coupable idéal perd son statut et les proches du garçon retrouvé mort dans le bois apparaissent sous un jour différent : un marécage de sombres personnages : escrocs, profiteurs de guerre, faux résistant, femme entretenue...Une galerie digne d'un roman de Simenon..."ceux qui agissent et ceux qui observent, les cachotteries partout, les bassesses et infamies occultées, maquillées qui cernent l'infamie claire et bien visible du meurtre". Trois ans d'enquête et de quête de la vérité, une plongée dans les dossiers, des découvertes, un livre sombre mais réussi !
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Au printemps des monstres



Philippe Jaenada reprend l’enquête à propos de l’enlèvement et le meurtre de Luc Taron, jeune garçon de 11 ans qui a disparu un soir du mois de mai 1964.

Le condamné, Lucien Léger, a atteint un triste record : s’il a échappé à la peine de mort, il a passé 41 ans de sa vie en prison, épuisant en vain tous les recours possibles.

Mais est-il l’assassin ? Un an après son arrestation et de multiples aveux circonstanciés, il clame son innocence et incrimine une autre personne qu’il ne veut pas nommer. Il invoque la loyauté. Ses circonvolutions autour de SA vérité ne feront que convaincre les magistrats, la presse et l’opinion publique de sa culpabilité.

Philippe Jaenada présente son enquête en trois parties.

Dans la première, il reprend les éléments publics et factuels de l’affaire, déroulant le chemin qui a conduit à l’incarcération à perpétuité de Lucien Léger et celui de ses nombreuses demandes de révision, jusqu’à son décès, 4 ans après sa sortie de prison.

Dans la deuxième partie, il développe des arguments qui remettent en cause la thèse officielle et ouvre de nombreuses perspectives en rapport avec les parties prenantes à cette affaire : le supposé coupable, donc, les parents de la victime, les proches des uns et des autres, les magistrats et autres avocats, etc.

Dans la troisième, il dresse un portrait tendre et ému de la seule personne qui suscite sa compassion dans cette affaire, trouvant ici encore des arguments favorables à sa thèse de l’innocence de Lucien Léger.

Ce qui fait le sel de cette enquête est la méthode de Philippe Jaenada et son style narratif.

Il fait des recherches très poussées, passe des heures aux archives judiciaires, épluche la presse de l’époque et s’entoure de partenaires telle Wats.

Et il le raconte ! Il prend le métro pour aller à Vincennes, il loue une voiture pour visiter le lieu de vie des différents personnages, il explique le chemin de sa pensée. Ainsi, il bâtit un argumentaire solide et convaincant qui défend en détail sa thèse de l’innocence. En effet, si parfois les infimes descriptions de ses recherches semblent futiles, la digression a toujours un sens et ramène le lecteur de façon inexorable vers la construction du propos : Lucien Léger est très très probablement innocent du crime pour lequel il a été condamné.

C’est l’occasion de revisiter le Paris des années 1960, de prendre le pouls de la vie quotidienne de cette époque, de contextualiser sur le plan politique et culturel les différents temps de l’affaire Lucien Léger.

La vie de chacune des personnes qui apparaissent est passée au crible, le crayon affûté de l’auteur leur donne corps et pensées, leur apportant une humanité sans pareil, pour le meilleur comme pour le pire.

J’ai audio-lu ces plus de 700 pages (912 pour la version poche à paraître en août prochain) et j’ai vécu une expérience incroyable. J’étais au coin du feu, écoutant le déroulé de cette affaire sur le ton de la conversation, comprenant petit à petit que l’auteur posait une brique à la fois des fondations et de la charpente de son propos.

C’était ma première lecture de cet auteur, je me régale d’avance des autres livres qu’il me reste à découvrir.

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13 à table ! 2020

Lecture et bonne action moi je dis oui !



Chaque année je me procure ce livre, depuis 6 ans que cette opération existe.



Aider les Restos du cœur par la lecture c'est tout de même une bonne idée et je remercie les auteurs des différents opus pour leurs dons de mots ♥



Je vous invite à partir en voyage avec eux car c'est le thème de cette année.



Les nouvelles qui se lisent sans peine, qui peuvent pour certaines s'oublier vite...



Des nouvelles qui condensent chaque auteur dans leur substantifique moelle.



Pour ceux que je connaissais j'ai retrouvé leur style.



Et pour ceux que je ne connais toujours pas et bien j'ai pour certains apprécié leur histoire.



Merci sincèrement à Philippe Jaenada de m'avoir fait rire après l'angoisse de la nouvelle de Karine Giebel.



Cet opus est dédié à Véronique Colucci.



Merci à elle et à son homme pour avoir toujours œuvré auprès des personnes démunies.











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13 à table ! 2020

Comme chaque année depuis le début le 13 à table a rejoint ma pile à lire.



J'ai aimé comme d'habitude ces récits et la bonne action qui va avec cet achat, j'ai cependant un petit bémol sur le thème du voyage qui à mon sens n'a pas été respecté par les auteurs ou alors il s'agit vraiment de voyage au sens très large du thème.



De même de nombreux auteurs connus sont dans ce recueil mais je n'avais aucune connaissance pour 2 d'entres eux. Un avis mitigé sur cette année ou certains auteurs sont toujours à la hauteur mais d'autres moins.
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13 à table ! 2020

C’est la sixième édition de cette belle initiative qu’est 13 à table, proposée par les éditions Pocket. 16 nouvelles dans un recueil en faveur des Restos du cœur. Une bonne action de tous qui permet de financer 4 repas pour chaque livre acheté. Cette fois encore, tous ont participé gracieusement à cette belle aventure humaine (les auteurs, l’éditeur, l’imprimeur, les publicitaires, les médias…). 3,4 millions de repas supplémentaires servis grâce aux quatre premières éditions !



5 € pour se faire plaisir et faire une bonne action !

Il y en a pour tous les goûts, cette fois-ci sur le thème du « Voyage ».



Les auteurs (tous des pointures) ont joué le jeu, souvent avec pour trait commun l’amour en plus du voyage. Cette bonne action permet de se faire plaisir et de découvrir certaines plumes qu’on n’aurait peut-être pas lu. Encore un très bon cru !



Philippe Besson et sa virée américaine

Françoise Bourdin et sa croisière

Michel Bussi et son gros cylindre

Adeline Dieudonné en mode selfie

François d’Epenoux et son franglais

Eric Giacometti et Jacques Ravenne et leur virée à Florence 2.0

Karine Giebel et sa migration

Philippe Jaenada et son train de l’enfer

Yasmina Khadra sur ses terres algériennes

Alexandra Lapierre et le voyage d’une vie

Agnès Martin-Lugand et son expédition filiale

Nicolas Mathieu et son voyage d’amour

Véronique Ovaldé et son voyage immobile

Camille Pascal et son voyage avec l’Impératrice

Romain Puértolas et son restaurant austro-japonais

Leila Slimani et son voyage vers la vieillesse.



Mon trio personnel : Giacometti et Ravenne / Giebel / d’Epenoux



Mentions spéciales à Adeline Dieudonné pour avoir remplacé Chattam cette année pour la nouvelle très noire du recueil, à Leila Slimani pour sa sensibilité, à Romain Puértolas et Philippe Jaenada pour leur humour en lien avec de vraies anecdotes
Lien : https://gruznamur.com/2019/1..
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La Serpe

En parcourant les sélections du prix des lectrices de Elle , j'ai relevé que le livre « La Serpe » de Philippe Jaenada sous la plume de A de M, a été dégriffé au motif d'y trouver un assemblage de toutes les anecdotes imaginables autour de Henri Girard.

C'est justement pour ce motif et parce que j'apprécie les fleuves foisonnants, les digressions intempestives, que j'ai lu « la Serpe ». 



Je me suis servi et resservi à ce menu g'astronomique. Nous sommes de déconcertants lecteurs, à travers nos avis clairsemés et contradictoires, on relève de si profanes divergences.



Je soulignerai le plaisir de soupeser 640 pages et d'en souper, ça fait du bien de lire des romans ultra longue distance, des livres pour combler un vide dans l' estomac et assouvir notre faim. Et quel estomac faut-il, pour s'enhardir d'un dossier plié d'avance, et un non-lieu qui avait scandalisé à juste titre la France de Vichy.



Quel mouche a piqué Philippe Jaenada de se lancer dans cette enquête ? Lecteur, je suis impatient de lire et de goûter, et avide de découvrir pourquoi l'auteur s'est mis à table, et pour quelles idées. A ressasser le passé de Pierre Girard, j'avais le sentiment de lire un récit sans queue ni tête, je baissais les bras. Puis multipliant les vat-et-vient mon obstination a payé, car j'ai relevé la tête et entrevu le défi .





L'indice oublié s'il existe, ne peut se cacher que dans les sous bois d'un château hanté, perdu dans le menu détail d'une affaire judiciaire hors norme, où l'on dissèque trois cadavres horriblement décapités à la serpe ( une première sans nul doute) la propre famille de Henri Girard, dans le Château d'Escoire .





Un défi, inutile, mais quel émotion pour l'écrivain, faut-il ne jamais baisser les bras. Défi d'autant plus périlleux que les charges sont trop pesantes, pour fragiliser la culpabilité de Henri Girard. L'enquête est au point mort depuis 42, Philippe Jaenada, et sa Meriva la sort de sa tombe.





Avec l'art de maintenir notre attention, Philippe Jaenada multipliera les fausses pistes se délectant par exemple de ce cabinet de toilettes condamné. Gendarmes et policiers dépités en feront le constat , "page 187 on aurait donc pas pu l'ouvrir de l'extérieur".



Les témoignages, les plaidoiries des avocats, les PV de l'instruction, se sont brisées sur une multitude de faits mal coordonnées, dans les méandres de pièces à charge bien trop volumineuses.. Au final Me Maurice Garçon retourne le tribunal à sa cause, Henri Girard sauve sa tête.



Analyser le fonctionnement de la justice dans ce contexte éveillait chez Philippe Jaenada une gourmandise de choix , qu'il a su exhausser.

Pour gagner un procès il faut connaître le droit ou connaître le Président du tribunal. L'instruction sera dispersée et certains se feront abuser comme le Juge Joseph Marigny par des confidences fantaisistes de Henri Girard à la prison de Beleyme à périgueux.

La partie la plus saillante est la correspondance citée page 275 " Mon chère maître et cher ami" entre l'avocat Maurice Garçon et le président du tribunal Henri Hurlaux, (qui sera révoqué par le garde des sceaux suite à l'affaire Stavisky) . Cette complicité met une touche sulfureuse à ces investigations, et Me Garçon passera en dernier, les délibérations n'ont jamais été aussi courtes pour un triple meurtre.





Le troisième sujet du livre est le parcours désordonné d'un personnage de cinéma, d'un saltimbanque des nuits parisiennes ( avec son ami Calaferte), et le cerner ou le décrire peut rapidement vous griser.

Car dans cette trajectoire, la réalité viendra très vite faire un pied de nez à la fiction, le personnage clé, Henri Girard, ou Georges Arnaud est une énigme à lui tout seul, prêtre ou bandit selon les circonstances, moraliste ou dépravé selon ses fréquentations, courageux ou lâche avec sa propre famille, honnête ou voleur selon son humeur, écrivain ou pamphlétaire selon ses colères.



Parallèlement les relations entre le père et fils sont parfois très émouvantes. On découvre entre le père d'Henri et son fils des liens d'affection sincères. Lui soutirer de l'argent était devenu un jeu de plus en plus subtil, il ne pouvait s'en passer.

Allant jusqu'à imaginer une fausse arrestation, puis une demande de rançon par la police allemande.



L'histoire du film "le Salaire de la Peur", se trouve propulsé sur l'avant scène, c'est peut être le sujet initial du livre tant il suscite l'intérêt de Manu le petit fils de Pierre Girard et l'ami de Phlippe Jaenada. Sa rancœur à l'égard de H G Clouzot, est l'un des passages les plus savoureux de l'évocation du 7ème art. Tout cinéphile ne peut se passer de lire ces récits, ces digressions sur le cinéma d'après guerre. le titre a lui seul est rentré dans le langage courant, la formule inspire avec le sale air du rappeur page 119 .

Le livre et le flm vont modifier sa trajectoire, c'est plus qu'un triomphe,



Avec le salaire de la peur, Georges Arnaud est rentré dans notre paysage culturel et littéraire. Malgré ce succès il gardera à l'égard de Clouzot une féroce iniquité déclarant : " le film est bâtard, truqué, à trop vouloir nuancer, adoucir, il a caricaturé. Il a voulu faire de la philosophie. Il a eu tort. P114."





Le style de Jeanada, est celui de l'urgence, de la turbulence, c'est un pilote de rallye, pas un promeneur solitaire en rase campagne, il mène son écriture à fond la caisse, sur verglas, sur chaussée défoncée comme sur la glace. Ainsi on peut rester embourbé sur un détail, ou filer à vive allure, sans rien voir, c'est là que commencent les digressions. Il refait le parcours, sans lâcher l'accélérateur. 640 pages comme 640 km avant d'atteindre le Château d'Escoire.





Ce château il le découvre dans les dernières pages, ce n'est pas un château très luxueux, plutôt une masure féodale, l'eau courante n'existe pas. Ce sont les gardiens Monsieur et Madame Doulet qui tous les jours transportent l'eau. Des gardiens corvéables à merci, résignés. On fera la connaissance du fils dont on ne sait pas grand-chose.

La famille Gérard et la tante Amélie, veillaient à économiser sur chaque ardoise.



J'avoue, avoir joué au chat et à la souris avec le récit. Abandonnant la meriva, à Périgueux, chapitre cinq, pour filer chapitre 15 voir Monique Lacombe, son père figure parmi ceux qui n'ont jamais douté de son innocence. Puis je suis retourné lire le destin de celui qui a failli mourir sans laisser de traces.

C'est ainsi que je reviens sur certains détails oubliés, certaines phrases insolites. Je ne partage pas tout ce qui se dit , mais lire est un voyage, Philippe Jaenada, sait nous faire voir du pays.





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