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Citations de Pierre Jourde (329)


C'est ainsi que, dans un esprit toujours résolument moderne, Christine Angot fait un usage très personnel de la répétition :

"Il met des clémentines sur son sexe pour que je les mange. C'est dégoûtant, dégoûtant, dégoûtant, dégoûtant."

Déplorons ici un peu de timidité dans la redite. Une page, une page et demie de "dégoûtant" auraient donné à la phrase sa pleine puissance. Autres exemples (les cas sont innombrables) :

"Tous ces gens-là, c'est impossible, impossible, impossible, impossible de les appeler".

"J'accouchais Léonore Marie-Christine Marie-Christine Léonore Léonore Marie-Christine Léonore Léonore Léonore Léonore Marie-Christine Léonore Léonore Léonore. Léonore Marie-Christine Marie-Christine Léonore. Léonore Marie-Christine. Marie-Christine Léonore".

On regrette d'interrompre un tel régal. Car cela continue. La prose ici se fait musique, on songe à "La fille de Minos et de Pasiphaë", du regretté Jean Racine, ou à l'alexandrin d'Alphonse Allais : "Jean-Louis François Mahaut de la Quérantonnais". Et puis, c'est toujours une demi-page de remplie. Au prix où se négocie la demi-page de Christine Angot, elle aurait tort de se priver.
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En France et dans les pays occidentaux, la demande de consommation culturelle se généralise. On se bouscule aux expositions et aux musées. On s’arrache le Goncourt, qu’on ne lit pas ou qu’on offre. Il s’agit donc de fournir à un public élargi, qui désire pénétrer dans le cercle des amateurs cultivés, quelque chose qui puisse passer pour de la vraie littérature (en fournir vraiment serait plus compliqué. Un auteur au plein sens du terme met du temps à se faire admettre, il ne rapporte pas vite). Il n’est pas nécessaire que de tels textes soient lisibles, il faut simplement que les livres soient achetés. Le public n’a pas réellement besoin de lire le livre qu’il a acquis : il suffit, par une promotion adroite, de parvenir à le convaincre qu’il est devenu détenteur d’une valeur symbolique, qui se nomme littérature. On s’emploie donc à lui fournir, non pas de la littérature, mais une image de la littérature. Il y a des écrivains pour fabriquer ces textes médiocres qu’éditeurs et journalistes ont habitué le public à considérer comme de la création.

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Pourtant, lorsque j'y pense à présent, tout en me reprochant de tenir à un lieu, je finis par comprendre que se recueille encore là, peut-être, cette bizarre qualité: le sentiment même de la perte, dans toute sa douloureuse intensité. (p.18)
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Que les qualités de ce qu'on aime nourrissent en secret des chagrins, on l'ignore presque toujours. On ne veut pas le voir. On le pressent cependant, dans la crainte qui s'attache aux choses belles, on tourne autour, on se garde d'ouvrir la porte, sachant ce qui se tient derrière, avec sa force atroce. Vivre n'est possible que si la porte est fermée.
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S'il existait un groupe folk du néant, Olivier Rolin serait joueur de biniou.
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Si tu as écrit ce livre, c’est par amour du pays, tu y viens deux à trois fois par an depuis ta naissance.
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On ne peut cependant pas se défendre d'un malaise à propos de Houellebecq, du sentiment qu'il y a là quelque chose de louche. On est en droit de refuser ce nihilisme et cette manière d'universaliser la bassesse. Faut-il penser que cette oeuvre, par sa sincérité, son humour, transcende sa médiocrité, ses pulsions répugnantes ? Doit-on au contraire considérer qu'elle tend au lecteur un piège gluant, qu'elle sert à justifier son auteur à ses propres yeux et aux nôtres, à nous faire partager médiocrité et frustrations, à nous y attirer ? Dépassement ou simple entreprise de blanchiment ? Je n'ai pas la réponse.
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La boursouflure est une maladie qui atteint les gens situés dans la position qu'occupe Sollers : assez intelligents pour avoir un peu conscience de leur manque d'épaisseur littéraire réelle, mais intellectuellement déformés par l'importance artificielle qui leur est donné.
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Il est laid comme un pou, ce brave Henri Cusset,
En plus c’est un jobard, dupé, berné, benêt.
Mais bête comme une oie, couvert de pellicules,
Il a le droit à l’amour, ce navrant homoncule.

Aimons Cusset, dupe ou laid.
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C’était un petit chat tout à fait maladroit.
Fallait pour le dresser s’y reprendre à deux fois,
Mais avec des efforts enfin la brave bête
Apprit à faire le beau, des sauts, des galipettes.

Enfin d’heureux tours par Minou.

Enfin de retour parmi nous ! Expression du père noble ouvrant les bras au fils prodigue retournant au foyer après avoir dilapidé son pécule avec des créatures.
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Ce sourire radieux qu'il avait, à quatre ans, lorsque j'entrais dans sa classe de maternelle pour le ramener à la maison, ne cesse de me poursuivre. Qu'en ai-je fait, de ce sourire ? Comment ai-je répondu à ce don absolu, confiant, de l'enfant qui se précipite dans les bras de son père, après une longue journée passée parmi des étrangers ? Qu'est-ce j'ai fait, et dit, qui méritait ce sourire, qui ne le décevait pas ?
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Devoir à présent vieillir avec cette absence, avec cette éternelle jeunesse éternellement arrachée. C'est le travail qui reste à accomplir.
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Pierre Jourde
L'histoire de l'art grouille de salopards qui sont aussi de grands artistes, et la morale n'a pas à s'immiscer dans la création.
(en réaction à l'affaire Polanski)

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La littérature ne vit que lorsqu'elle se nie, lorsqu'elle sort d'elle-même. Tous les grands écrivains ont écrit non pas pour, ou en vue de, mais contre la littérature. Contre l'idée même de littérature. Alors ils commencent à en faire.
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À la nuit close, les belles bergères crasseuses, aux longues nattes et aux yeux bridés, se mettent torse nu et se glissent sans plus de façons sous une épaisse couche de couvertures multicolores. Les femmes voilées de l'islam sont à un jour de marche. Je pense à ces jeunes filles, à leur grâce et à leur liberté, leur souhaitant qu'aucun prosélyte du Coran ne monte jamais de la vallée, pour chercher à leur faire regarder leur candeur comme de l'impureté.
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Pourquoi donc le fait de signaler les oeuvres de qualité empêcherait-il de désigner clairement les mauvaises? Jamais les librairies n'ont été si encombrées d'une masse toujours mouvante de fiction. Il faut donner des raisons de choisir. Ce devoir est devenu d'autant plus impératif que les produits sont frelatés. Des lecteurs de bonne foi lisent ces textes et se convainquent que la "vraie littérature" est celle-là. Or une chose écrite n'est pas bonne à lire par le seul fait qu'elle est écrite, comme tendaient à le faire croire les actuels réflexes protecteurs du livre.
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Pierre Jourde

La tribune signée par des intellectuels et des artistes est un exercice classique dans la vie intellectuelle (et politique). On ne les compte plus.
Moi-même, j’en signe.
Ça me rassure : je vérifie ainsi que je suis bien un intellectuel (et un artiste).
Et que je continue à m’intéresser au monde.
Certaines sont plus pertinentes que d’autres, certes.
Vous vous souvenez certainement de cette tribune qui, à l’initiative d’Annie Ernaux, a permis de débusquer de son trou le nazi Richard Millet (alias M le maudit). Ce fut un lynchage organisé. L’abject individu en a d’ailleurs perdu son emploi.
Bien fait pour lui.
Pour une fois qu’une tribune est efficace, il y a de quoi se réjouir !
Et puis j’aime bien les comités d’épuration, ils aident à rendre la justice.
La même Ernaux a d’ailleurs appelé depuis au boycott d’Israël.
Ce qui me fournit une excellente transition.
Car, avec la même pertinence, un régiment d’intellectuels et d’artistes vient, dans « Libération », de publier une tribune dénonçant l’« apartheid » que fait régner Israël sur le territoire de la « Palestine historique » - c’est-à-dire Israël plus les « territoires palestiniens ». En rappelant que « l’apartheid est un crime ».
Il y a Edgar Morin dedans.
Sa compétence n’est plus à démontrer.
Alors là, je dis bravo.
Je suis d’autant plus heureux que je connais bien Israël, pour y avoir effectué plusieurs missions (conférences et inspection de centre de recherches) au cours desquels j’ai traversé les territoires palestiniens, le Néguev, et tout ça.
Et en effet, ça crève les yeux, le crime se commet tous les jours, au su et au vu de tous.
On en a la gorge serrée, croyez-moi.
L’Afrique du Sud en 1960, le Mississipi en 1930, à côté de ça ? Bluettes, contes pour enfants.
Jugez-en.
Des familles palestiniennes et juives côte à côte sur les plages de Tel Aviv, c’est de l’apartheid.
Juifs, druzes, coptes, maronites, catholiques, chiites, sunnites se croisant dans les rues de Jérusalem, c’est de l’apartheid.
Les Palestiniens, même non israéliens, soignés dans les hôpitaux juifs, c’est de l’apartheid.
Les jeunes filles musulmanes voilées dans les universités israéliennes, c’est de l’apartheid.
Les députés arabes musulmans israéliens, c’est de l’apartheid.
Les deux millions de citoyens arabes israéliens, c’est de l’apartheid.
Les journaux arabes israéliens, c’est de l’apartheid.
Les organisations d’aide aux Palestiniens qui ont leur siège en Israël, c’est de l’apartheid.
Les milliers de Palestiniens qui viennent travailler en Israël, c’est de l’apartheid.
Les Druzes et les Arabes dans l’armée israélienne, c’est de l’apartheid.
La liberté de penser, d’écrire, de critiquer, de voter, c’est de l’apartheid.
La liberté des femmes, c’est de l’apartheid.
Les terroristes palestiniens arrêtés mais jamais exécutés, faute de peine de mort, c’est de l’apartheid.
Cinq millions de juifs tentant de survivre au beau milieu de dizaines de millions d’Arabes qui veulent leur anéantissement, c’est de l’apartheid.
Une partie des territoires de Cisjordanie est occupée par l’armée israélienne.
Les sionistes vous diront que cela fait suite à plusieurs guerres, toutes déclarées, et toutes perdues par les états arabes, dans le but proclamé de détruire Israël.
Ne croyez pas les sionistes.
Ils sont fourbes.
Vous les reconnaîtrez à leur nez crochu.
L’occupation, c’est donc bien de l’apartheid.
Comme je le disais récemment au roi du Maroc, au premier secrétaire du parti communiste chinois, au premier ministre indien, au premier ministre turc, au premier ministre russe, l’occupation du Sahara occidental, du Tibet, du Cachemire, de l’Arménie, du Kurdistan, de la Tchétchénie, les gars, c’est de l’apartheid.
En revanche, autour d’Israël, pas d’apartheid. Pas une ombre, pas ça.
D’accord, ce sont soit des dictatures militaires sanglantes, soit des théocraties cruelles, mais rien à voir avec de l’apartheid.
Ils ont d’ailleurs trouvé une excellente solution pour remédier à l’apartheid. Une solution finale, en quelque sorte. Des Juifs, ils n’en ont plus. Comme ça, pas d’apartheid.
Si jamais, toutefois, un reliquat de juif tente de raser les murs au Caire ou à Bagdad, ses chances de survie sont proches du zéro absolu. Mais ça n’est pas de l’apartheid.
Deux millions de musulmans citoyens en Israël, disions-nous, c’est de l’apartheid. En revanche, attention, soyons précis sur les notions, pas un Juif dans les rues de Ramallah ou de Naplouse, ça n’est pas du tout de l’apartheid. Et si on trouve des groupes de juifs en Cisjordanie, c’est illégal, ça s’appelle des colonies.
D’ailleurs le sort des Coptes et en général des chrétiens dans les pays musulmans ça n’est pas de l’apartheid.
Une chrétienne arrêtée, condamnée à mort au Pakistan pour avoir bu (et donc souillé) de l’eau réservée aux musulmans, ça n’est pas de l’apartheid.
L’interdiction de toute religion autre que l’Islam en Arabie saoudite, ça n’est pas de l’apartheid.
Voilà, je pense que les choses sont claires désormais sur ce qu’est l’apartheid.
J’aime bien quand les intellectuels éclairent le monde.
Je tiens à préciser que cette chronique est libre, non rémunérée, qu’elle reflète mes opinions et non celles du site qui m’héberge. P.J
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Je ferme les yeux afin de me délecter de chaque seconde si intense et profonde. Est-e donc cela le bonheur ? [...] Désormais, plus rien ne peut me séparer de cet état de plénitude. C'est le genre d'instant éphémère, si proche du nirvana, qu'on aimerait pouvoir vivre une éternité.
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Les Ladakhis ne sont plus, dans leur propre pays, que des espèces de Sioux, les vestiges folkloriques d'une culture morte. J'ai pitié de les voir se laisser prendre en photo, tout contents, par des Allemands roses et gras. J'ai pitié de les voir se laisser prendre en photo par moi. Même si je suis famélique. L'Occident aura aussi efficacement anéanti cette culture par la curiosité que, de l'autre côté de la frontière, la Chine par l'oppression. Et notre propre curiosité y aura contribué.
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Tout à coup, les gardes républicains se mettent à rouler le tambour. Entrée en grande pompe, par le haut des gradins, de l'Académie française.
Un frisson me parcourt.
C'est l'entrée des morts-vivants. [...]
Le spectacle est affreux. Georges Romero n'aurait pas fait plus effrayant et plus désolant. Les grands médecins, les avocats célèbres, les écrivains glorieux titubent, se risquent à tout petits pas jusqu'au bord des marches, comme s'ils parcouraient, non pas en habit chamarré mais en haillons déchiquetés, les rues boueuses d'un village désert du Tennesse.
Et commence la descente. Là c'est une autre image qui s'impose. La vingtaine de marches leur prend autant de temps que s'il s'agissait de la face nord des Grandes Jorasses. Il s'agrippent à la rambarde, se tiennent les uns les autres, crochètent désespérément tout ce qui passe à portée de leurs mains tavelées et noyées de rides, tout branlants, tout tremblotants, on se dit que si l'un fait un faux pas, c'est tout la cordée qui va basculer dans le vide.
La salle frémit, retient son souffle. Vont-ils arriver entiers ? Qui va y laisser son col du fémur ? Faudra-t-il récupérer derrière eux un dentier, des ongles un oeil de verre . Prévoit-on d'éponger discrètement les traces d'urine.
[...]
Et les tambours roulent durant tout le temps que dure la représentation comme pour dramatiser le numéro accompli par une bande de vieux clowns arthritiques qu'on aurait invité se produire par compassion, dans un spectacle de charité.
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