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Critiques de Raphaël Meyssan (62)
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Les damnés de la Commune, tome 1 : A la reche..

De temps à autre, des sujets historiques maltraités (ou mal traités) dans les médias dominants refont surface avec une autre vision et par un cadre plus populaire. Ici, Raphaël Meyssan propose un récit sur Les Damnés de la Commune, paru chez les éditions Delcourt.



Une nouvelle histoire de la Commune (1870-1871)

Ces Damnés ne sont pas une histoire nouvelle à proprement parler, mais des éclaircissements, des rappels, des mises au point, au plus près des faits avérés concernant la Commune de Paris de mars à mai 1871. Pour bien comprendre les enjeux posés dès 1870 avec un contexte très particulier (fin du Second Empire, emprisonnement de Napoléon III, guerre contre la Prusse, début de la IIIe République), Raphaël Meyssan nous emmène à la suite de Lavalette, son « voisin communard » comme il l’appelle dès le départ. En effet, au hasard d’une recherche à la Bibliothèque historique de la ville de Paris, il tombe sur un dénommé Lavalette qui habitait dans son immeuble actuel. De fil en aiguille, il remonte le cours de l’Histoire pour comprendre ce qu’un simple gazier (chargé d’entretenir les éclairages publics au gaz) vient jouer comme rôle dans un des plus beaux moments de la démocratie française, mais aussi un des pires. Ce premier tome s’intéresse surtout à la préparation, à la mise en place des enjeux politiques, économiques et sociaux notamment ; deux autres tomes sont prévus, sûrement sur le déroulé des deux mois de la Commune de Paris et son achèvement sanglant.



Une bande dessinée sans dessins

Comme il l’indique à un moment du récit, Raphaël Meyssan a trouvé des gravures dans les journaux et les livres des années 1870, de quoi illustrer son histoire sur tout un livre. Et c’est exactement ce que présente ces Damnés de la Commune : un album de gravures de l’époque retravaillées pour créer une histoire cohérente, d’autant plus que des gravures sur l’événement de la Commune, il est possible d’en retrouver un certain nombre tant il a eu un retentissement mémorable. Pour éviter un récit monolithique, il découpe, strie, réagence, joue en somme avec ces gravures et les fait revivre avec des dialogues soit inspirés de sa propre enquête historique, soit reproduisant directement des écrits de l’époque que des sources attestent encore aujourd’hui. L’effet d’immersion joue donc à plein. On peut bien sûr être peiné de ne pas profiter d’un trait graphique particulier, par contre c’est l’occasion d’analyser et de comprendre toute la complexité du travail de metteur en scène dans le métier de bédéaste. Ainsi, les zooms sont stratégiques, les encarts de certaines lettres d’époque montre à voir bien plus qu’une simple réécriture textuelle et certains jeux graphiques permettent de faire émerger des personnages qui prennent vie, s’extrayant de leur gravure d’origine. L’ensemble aurait pu paraître un brin hétérogène au niveau du style graphique, mais les sources choisies ont dû l’être dans une période de production relativement réduites et le résultat est très convaincant.



Faire de la micro-histoire est passionnant

En nous invitant à suivre la préparation de la Commune de 1871 par les récits de gens simples, souvent éloignés du pouvoir, Raphaël Meyssan fait œuvre de micro-histoire (« microstoria » selon les historiens italiens qui ont débuté ce mouvement dans les années 1970). L’auteur fonctionne selon les découvertes de sources historiques qu’il peut trouver, mais aussi par récits interposés. Ainsi, « à la recherche de Lavalette », nous croisons Victorine, humble parisienne dont les malheurs familiaux croisent les déboires de la France de l’hiver 1870-1871, on passe par le récit de Henri Rochefort, puis les télégrammes de Jules Ferry en panique, et bien d’autres au passage. Ici, ce sont clairement les destins particuliers de quelques personnages qui tiennent le récit ; ils peuvent être vus comme d’importance mineure mais, indice après indice, ils incarnent parfaitement l’idéal d’une insurrection populaire qui devrait encore donner des idées aux générations actuelles. À force de les croiser dans des rues parisiennes qui peuvent vous sembler déjà familières, le lecteur ne peut que saisir la domination exercée sur eux par les institutions politiques, économiques et sociales et constater l’incroyable force d’agir qu’ils invoquent en retour. Gérard Noiriel, auteur d’Une Histoire populaire de la France, validerait sûrement ce type de bande dessinée. Et quand on voit ce qu’on conserve de cette Commune, on se dit qu’il serait bien dommage de ne retenir que les récits des vainqueurs qui ont conservé le pouvoir depuis.



Ce premier tome des Damnés de la Commune est une bande dessinée un peu particulière par le format qu’elle propose, toutefois son propos et son récit en font une lecture passionnante au plus haut point !



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Les damnés de la Commune, tome 2 : Ceux qui n..

Le deuxième tome d’une trilogie est souvent le plus complet, le plus dense, car il n’a pas forcément à s’embarrasser d’introduire ou de conclure une histoire. Avec cette suite des Damnés de la Commune, par Raphaël Meyssan chez les éditions Delcourt, il y avait de quoi faire pour nous rappeler les événements inhérents au lancement de la Commune, notamment de Paris, en 1871.



Retour au cœur de la Commune

De début mars à début mai, ce deuxième tome nous décrit au plus près les événements de la Commune de Paris. Dès son lancement, contre l’attente de la bourgeoisie parisienne et des dirigeants monarchistes, elle organise des élections. Alors qu’elle est assiégée par l’armée prussienne au nord et à l’est et par l’armée versaillaise au sud et à l’ouest, la Commune de Paris se lance dans une campagne électorale afin de rendre le pouvoir au peuple de citoyens ! Ces « sans-dents », ces « fainéants », ces « illettrés », ces « gens qui ne sont rien » en veulent à l’oligarchie et désirent remettre au pouvoir les simples citoyens. Le problème, c’est que le temps ne joue pas pour eux : même s’ils s’organisent très vite, la démocratie (la vraie, la directe) est gênée par ceux qui veulent ralentir la prise de pouvoir des classes populaires, des prolétaires. Ce deuxième tome narre les événements qui déclenche la mise en place de la Commune et les raisons (toutes simples au fond) qui la bloquent dès le départ et cherchent à l’anéantir alors qu’elle est toute neuve.



Un style accrocheur

Dans la lignée du premier tome, Raphaël Meyssan a poursuivi son travail de recherche et de collecte de documents d’époque pour illustrer son récit. Il utilise donc toujours le même processus graphique de découpage et de montage de très nombreuses gravures de la fin du XIXe siècle ; cela donne une certaine dynamique à des images figées par le temps. De plus, malgré les événéments horribles et particulièrement tristes qui surviennent dans cette année 1871, l’auteur réussit à glisser un peu d’humour dans les répliques des personnages ou dans les références utilisées, soit désuètes soit au contraire contemporaines et donc un peu anachroniques afin de nous montrer les pensées finalement très actuelles qui traversent ces événements de la Commune.



Une portée politique si actuelle

Clairement, là où l’auteur avait construit le premier tome à partir d’une anecdote personnelle et de la traque des archives afin de montrer l’enchaînement des événements, il fonde ce deuxième tome sur la réhabilitation des classes populaires qui ont mené ce mouvement et dont on oublie le rôle. Vous pensiez que la Commune n’était aucunement féministe et au contraire aussi machiste que son époque ? l’auteur replace les femmes dans l’action, en première ligne, et il n’y a pas que Louise Michel qui compte. Vous pensiez que la Commune était uniquement celle de Paris de 1871 ? l’auteur fait un tour de France des initiatives populaires et autogestionnaires pour montrer que le mouvement fut national, et réprimé toujours de la même manière, dans le sang. Comme Gérard Noiriel le montre dans son Histoire populaire de la France, la Commune de 1871 est un des cinq moments de réelles avancées politiques pour les droits des citoyens, sociétales pour le droit des minorités, sociales pour des vies plus décentes du plus grand nombre, et économiques pour un changement dans la répartition des décisions et des richesses (quelques mois en 1793-1794, quelques semaines en 1848, deux mois donc en 1871, quelques mois en 1936-1937 et quelques mois en 1944-1946). Alors même que les conditions de vie, de travail et de paix sont largement compromises, des avancées très importantes sont faites grâce à un rapport de force imposé par le bas.



Dans la forme comme dans le fond, ces Damnés de la Commune montrent des éléments non neufs, au sens où ils seraient juste découverts, mais dépoussiérés car on les oublie trop souvent ou on les passe sous silence. Il faut se battre pour se souvenir des batailles passées.



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Les damnés de la Commune, tome 1 : A la reche..

Cela fait un petit moment que je m'intéresse à la Commune de Paris : par conséquent, j'avais bien envie de lire ce livre.



Ce roman graphique raconte l'histoire de Lavalette et de Victorine, à la recherche de son voisin communard. Si je n'ai pas été passionnée par l'intrigue, l'originalité dont Raphaël Meyssan a fait preuve pour cet ouvrage m'a beaucoup plu.



En effet, le livre est composé de gravures de l'époque et ce sont elles qui, en grande partie, permettent d'illustrer ce récit.



C'était une bonne lecture et je suis curieuse de lire la suite !
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Les damnés de la Commune, tome 2 : Ceux qui n..

Dans l’ombre des grandes figures historiques, nous vivons les premières semaines de la Commune au plus près de ses plus humbles acteurs. Raphaël Meyssan nous narre les rudes batailles du début du siège en suivant les traces de son « voisin » qui semble être partout à la fois.

(...)

Cette démarche originale permet une appréhension de la grande Histoire par les destins individuels. Une histoire populaire en somme. Époustouflant !



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Les damnés de la Commune, tome 3 : Les orphel..

J'ai déjà eu l'occasion de donner mon avis - excellent - sur les deux premiers tomes des Damnés de la Commune, extraordinaire travail de mémoire de Raphaël Meyssan.

Le troisième et dernier tome ne fait pas exception. La qualité de la narration est toujours là, le sens du découpage, le choix des gravures. On aurait pu craindre une certaine lassitude, à voir les mêmes procédés. Tel n'est pas le cas.

Il faut dire que le matériau historique est en lui-même extraordinaire. Ce rêve d'une démocratie directe, sociale, soucieuse des plus faibles. Tout en n'étant pas exempte d'excès.

Je ne suis pas assez spécialiste de la période, que je n'ai jamais abordé dans le détail en fac d'histoire, pour me prononcer sur le contenu purement scientifique. Mais j'ai le sentiment que Meyssan évite tout manichéisme dans son travail. Et que son parti pris d'aborder cette histoire par ses acteurs anonymes n'empêche en rien d'en saisir toute la subtilité, la portée, les contradictions internes.

C'est pour ces raisons que je vais visionner le documentaire que Meyssan a tiré de son travail, visible sur Arte jusqu'en mai prochain. Et ce à l'heure où de grands historiens, comme Pierre Nora, ne comprennent pas l'intérêt d'une commémoration des 150 ans de la Commune.
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Les damnés de la Commune, tome 3 : Les orphel..

Fin 2019, Raphaël Meyssan clôt sa trilogie des Damnés de la Commune chez les éditions Delcourt avec ce tome intitulé Les orphelins de l’histoire.



La fin d’une belle aventure

En 1870 et 1871, s’élèvent des mouvements populaires, notamment ouvriers, dans certaines grandes villes françaises. Raphaël Meyssan a construit cette évocation historique en trois actes (causes et origines dans le premier, lancement véritable dans le deuxième et dénouement dans le troisième) ; il est donc temps d’aborder dans ce troisième tome la conclusion de l’épisode des Communes (de Paris ou d’ailleurs) et de parler de la « Semaine sanglante ». Maintenant que la Commune de Paris est officiellement lancée (mars et avril 1871) avec son lot d’avancées sociales, l’armée versaillaise passe à l’action du dimanche 21 au dimanche 28 mai 1871 ; ce sont donc deux conceptions de la République française qui s’affrontent : la Commune la veut libertaire, égalitaire et fraternelle, les Versaillais sont davantage dominés par les monarchistes et quelques républicains modérés. C’est donc l’heure de suivre pas à pas l’avancée militaire de ces derniers dans les rues parisiennes faisant des milliers de morts et organisant des procès expéditifs.



Les bienfaits de la micro-histoire

À nouveau, Raphaël Meyssan mise avec brio sur la micro-histoire pour nous faire saisir la grande, c’est-à-dire se focaliser sur l’histoire de quelques individus en reconstruisant leur vie au jour le jour, ou en tout cas au plus près en fonction des sources disponibles. Ici, l’auteur traque les derniers moments communards de son voisin Lavalette, dont le nom est parfois malmené par les sources et la réputation salie par bien des retournements de situation. Il poursuit également l’épopée de Victorine dont la famille est marquée par les combats dans la capitale. Cartes postales de l’époque, gravure, estampes, extraits de notes privées, parfois des comptes-rendus publics ou des services secrets de la République… les sources sont nombreuses pour appréhender ce moment fatidique de l’Histoire. L’auteur les met en scène en multipliant les montages de ces sources entre elles ; c’est bien là le cœur de sa production : accorder le fond et la forme grâce uniquement aux sources historiques que nous en avons gardé (productions plastiques pour la forme et extraits de journaux personnels et de dépêches officielles pour le fond).



Les enseignements d’un événement politique

En cette période où la politique se tend franchement, entre crise sanitaire, inégalités économiques et bouleversement climatique, il est toujours intéressant de se pencher sur d’autres périodes qui peuvent paraître troublées, de loin, mais enseignent tant une fois qu’on les cerne mieux. Les épisodes des Communes de 1870-1871 (car il n’y a pas que celle de Paris, Raphaël Meyssan le rappelle bien, notamment dans le deuxième tome) sont un de ces rares moments d’égalité revendiquée et mise directement en pratique par les citoyens français. Or, face à eux, s’érige un pouvoir mixte, mélange de monarchistes et de républicains très embourgeoisés ; et quand cette République est en marche, elle tue la démocratie, celle des simples citoyens qui s’organisent en autogestion. Comme l’écrit l’auteur, « le seul moment où le gouvernement s’est retranché à Versailles, c’est lors de la Commune de Paris, pour y rejoindre une Assemblée nationale dominée par les monarchistes. À Paris, on rêve de république démocratique et sociale. À Versailles, on veut remettre le roi sur le trône » ; ainsi, la République est encore aujourd’hui versaillaise, avec un monarque à sa tête qui se veut surpuissant, jupitérien en somme. Mais n’est pas Zeus qui veut, et peut-être faudra-t-il de nouvelles Communes pour le lui rappeler.



En 2020-2021, sont commémorés les 150 ans des Communes (de Paris ou d’ailleurs). Les bouleversements politiques de 1870-1871 sont très peu connus par le grand public et cet album, conclusion d’une magnifique trilogie, permet de leur rendre une partie de la place qui leur revient de droit dans l’Histoire.



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Les damnés de la Commune, tome 3 : Les orphel..

Raphaël Meyssan, totalement happé par son sujet, s’immerge maintenant à l’intérieur de ses images, pour suivre ses personnages au plus près. Il n’a plus aucune distance ni retenue et s’exalte à tout bout de champ. Assistant à une séance de démocratie directe au cours de laquelle les élus se voient imposé par leurs électeurs un mandat impératif, il juge l’événement inconcevable aujourd’hui.

(...)

Cette trilogie figurera désormais en bonne place dans toutes les bonnes bibliographie sur la Commune de Paris.



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Les damnés de la Commune, tome 2 : Ceux qui n..

Paris, 1871. La Commune est proclamée, les élections organisées.

Mais à Versailles, Thiers prépare la reconquête.

Second tome des Damnés de la Commune, qui se concentre sur ces quelques mois où les Parisiens ont semblé pouvoir prendre leur destin en mains, imposer une utopie libertaire, égalitaire.

A Paris, mais aussi Marseille et d'autres villes, le même espoir. Mais à Marseille et bientôt à Paris, la réaction. Bientôt le bain de sang, bientôt les armes qui parlent, les canons qui tonnent ...

Dans "Ceux qui n'étaient rien", Raphaël Meyssan garde la même exigence et la même qualité de narration que dans "A la recherche de Lavalette", p faite.

Un travail toujours aussi remarquable, au plan historique comme d'un point de vue graphique.

Indispensable.
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Les damnés de la Commune, tome 1 : A la reche..

L'originalité de ce roman graphique en trois tomes réside dans le fait que l'auteur l'ait entièrement réalisé avec des gravures issues de journaux et de livres du XIXe siècle, donc en noir et blanc, certaines d'entre elles étant particulièrement saisissantes, comme la Cosette au balai.



Pour l'histoire, c'est encore celle d'un nouveau drame français avec ce défi inutile aux prussiens qui verra la France amputée de l'Alsace et d'une partie de la Lorraine, sa population affamée durant le siège de Paris, mais les français toujours et malgré tout prêts à se déchirer pour des idées improbables.



L'auteur suit deux personnages, Lavalette, son "voisin communard" et Victorine, femme du peuple accablée de malheurs. Par moments, le passage d'une scène à l'autre peut prêter à confusion. J'aurais préféré, pour ma part, l'unique réalité historique.



L'ensemble met bien en perspective toutes les illusions perdues dans cette guère inutile, l'incurie des politiques et les souffrances du peuple.
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Les damnés de la Commune, tome 2 : Ceux qui n..

Je m'intéresse à la Commune de Paris depuis quelques temps déjà, et j'ai même lu le livre que Louise Michel, Communarde, a écrit sur le sujet. Avec des ouvrages comme Les damnés de la Commune, Raphaël Meyssan nous offre une vision contemporaine des évènements.



Dans ce second tome, l'auteur nous présente la période - malheureusement courte - durant laquelle les Communard•es ont cru l'emporter, avant la terrible répression. Nous vivons la Commune auprès des personnes qui y ont participé, mais avec le regard contemporain qu'apporte Raphaël Meyssan.



Je ne me souvenais pas que l'auteur donnait son avis et s'intégrait de cette manière dans le récit dans le premier volume, mais peut-être est-ce un oubli de ma part. Dans tous les cas, cet aspect est assez présent dans ce second tome, ce qui est assez intéressant parce que cela permet aux lecteur•rices de s'immerger dans l'histoire sans toutefois oublier ce qui s'est passé ensuite. Il y a beaucoup de protagonistes, si bien qu'on s'y perd un peu si on ne connait pas trop le sujet. Je commence toutefois à mieux situer les différent•es acteur•rices de la Commune mais aussi d'autres personnes comme Thiers.



J'ai préféré ce second tome au premier, notamment parce que j'ai apprécié le regard contemporain et la comparaison avec notre époque qui était faite, le titre étant même un clin d'œil à la phrase "ceux qui ne sont rien" prononcée par Macron. Encore une fois, les gravures sont très belles et cela donne un aspect original au livre !
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Les damnés de la Commune, tome 1 : A la reche..

Superbe découverte que ce premier tome des Damnés de la Commune.

Il y a d'abord le thème, qui m'a attiré. En apprendre davantage sur cette période si particulière où, l'espace de quelques jours, quelques semaines, un nouveau monde a semblé possible ... A l'heure où le monde d'après se fait un peu attendre, un peu d'utopie révolutionnaire réchauffe les cœurs ... quand bien même les Communards ne sont pas exempts de tout excès.

Et la forme utilisée pour narrer cette histoire. Car une fois passé la couverture, on découvre l'extraordinaire travail réalisé par Raphaël Meyssan. Ce graphiste fait le choix audacieux - et exigeant en terme de travail - de n'utiliser que des gravures d'époque. Mais des gravures dont il est aussi capable de s'affranchir, dans son découpage, parfois novateur voir iconoclaste, dans la mise en page et dans la façon dont il commente les images utilisées : soit en immersion, comme si nous étions au coeur de l'action, soit en prenant du recul, interprétant les événements avec un regard du XXIème siècle.

Car il y a enfin le fond. Meyssan fait le choix de nous raconter la Commune en se mettant en quête des traces laissées dans les archives - qu'il utilise et cite abondamment - de Lavalette, un Communard qui a vécu dans son immeuble. Des histoires singulières au cœur de la grande histoire. Et un premier tome qui nous raconte comment, dans l'Empire finissant et agonisant, dans la IIIème République naissante, le petit peuple veut croire en un avenir radieux, en une société de liberté et d'égalité.
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Les damnés de la Commune, tome 3 : Les orphel..

Troisième et dernier volet de cette fresque sur la Commune, relatant cette fois essentiellement la semaine sanglante durant laquelle les versaillais massacrèrent les communards, hommes, femmes, enfants sans la moindre pitié. Cette boucherie qui détruisit plus de vingt mille vies se déroula dans un paris dévasté, bombardé, incendié, comme les français savent si bien le faire au nom d'idées qu'ils ne maîtrisent même pas.



Le récit de Raphaël Meyssan est lourd, toujours décousu, cependant au troisième tome le lecteur s'habitue. Pour ma part, je n'ai guère adhéré à ce récit, très peu structuré, dans lequel on peut facilement mélanger les rôles des personnes les plus célèbres. D'où une lecture que j'ai trouvé assez ennuyeuse.



Seul Victor Hugo, l'immense, émerge de toute cette boue, mais il est en Belgique et ne peut guère intervenir. Néanmoins, il existe.



Restent les planches de l'époque qui ont conservé toute leur dimension, cette fois beaucoup plus encombrées de texte que dans les albums précédents.





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Les damnés de la Commune, tome 2 : Ceux qui n..

Les affres et misères de la Commune de Paris dépeints de manière dramatique et tellement réelle dans ce deuxième tome deviennent peu à peu lassants tellement les mêmes situations de guerre, de mort et de désespérance se succèdent aux portes de Paris.



L'ouvrage met clairement en évidence les contradictions de la Commune qui, voulant supprimer les formes excessives du pouvoir en crée de nouvelles, puis les abolit, les réinstaure et finalement se perd de décisions chaotiques en sursauts désespérés, préparant elle-même son inexorable fin.



Le pouvoir n'est décidément pas fait pour le peuple, inapte à l'exercer que ce soit à travers une assemblée fédérée incompétente ou des comités de salut public qui décident de tout et de rien, sauf du salut.



Toujours la belle figure de Victorine qui s'efforce de réduire les souffrances des malheureux combattants partis vers la mort sans même de fortes convictions mais seulement des mots qui n'entraîneront que d'autres maux.



Triste époque que cette guerre civile, mais les suites de l'histoire de France et du monde ont hélas prouvé qu'il y aurait encore pire plus tard.
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Les damnés de la Commune, tome 3 : Les orphel..

J'avais lu les deux premiers tomes avec enthousiasme, séduite par les gravures faisant office d'illustrations. Ce troisième tome relate la Semaine sanglante, événement tragique et notable de la Commune de Paris.



Dans ce dernier volume, Raphaël Meyssan nous présente la Semaine sanglante vécue par les personnages que nous suivons depuis le début, notamment Lavalette, Communard recherché par l'auteur depuis le début.



Encore une fois, les alternances entre le présent et le passé rythment le récit. L'auteur utilise des évènements historiques (la Commune réprimée par les Versaillais, les massacres et les horreurs commises pendant la Semaine sanglante...) pour les mêler à la fiction, comme on le comprend lorsqu'on voit un auteur contemporain à Paris en 1871. J'ai été particulièrement amusée par la rencontre entre Raphaël Meyssan et Tardi (qui a réalisé la bande dessinée Le cri du peuple) et le dialogue qui s'en est suivi.



C'est le tome le plus sombre de la trilogie, comme on pouvait s'en douter. L'auteur relate les crimes commis pendant la Semaine sanglante, personne n'étant épargné... D'archives en archives, il remonte la trace de son voisin Communard. C'était vraiment une chouette histoire et l'utilisation des gravures de l'époque rend l'ensemble très réussi et original !
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Les damnés de la Commune, tome 2 : Ceux qui n..

La France a perdu face à la Prusse mais Paris fait de la résistance. La ville déclare la commune et programme des élections. Mais ils sont encerclés de toute part et les combats vont bientôt faire rage.



L'auteur continue de nous faire partager ses connaissances accumulées sur La Commune de Paris à travers les gravures d'époque. Il s'attache principalement à deux personnages : Lavalette et Victorine.

Malgré cette masse d'informations, malgré ses combats, nous ressentons les émotions principalement à travers les mémoires de Victorine. On sent les rêves et les espoirs, et l'ont sent le découragement et l'horreur des combats. La commune avec ses rêves de justice, d'égalité et de fraternité est trop isolée. Que pouvait-elle faire face à l'armée, au force du gouvernement versaillais.
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Les damnés de la Commune, tome 1 : A la reche..

C’est une bande dessinée d’un genre assez particulier. Non seulement, elle relate des faits historiques mais les images sont entièrement d’époque… J’ai aimé être dépaysée par ces illustrations qui sont de véritables œuvres d’art. La technique artisanale de la gravure nous plonge directement dans l’époque des faits, soit la fin du XIXè siècle. Je connaissais les événements qui ont stimulé l’organisation de la Commune de Paris et la répression sanglante qui y a mis fin, ce qui a sans doute facilité la lecture de cette BD aux allures de chronique, de journal de bord. Ça m’a paru un peu décousu par endroits mais ça nous fait vivre ce qu’a été cette insurrection et tout l’espoir qu’elle a pu susciter chez les Parisiens opprimés par la classe dirigeante et le vainqueur allemand. J’ai, d’une certaine façon, pu vivre les émotions des insurgés et presque me sentir participer à leur mouvement de résistance.

En outre j’ai été frappée par la similitude entre la situation de fin de règne de Napoléon III, le déclenchement d’une guerre pour détourner l’attention des problèmes intérieurs et la situation que l’on vit aujourd’hui en France… L’histoire serait-elle en train de se répéter ? N’a-t-on pas appris qu’une guerre entraîne une autre et risque de dégénérer en un conflit mondial qui ne servent jamais que quelques intérêts privés…. À lire et à relire, ne serait-ce que pour la leçon d’histoire.
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Les damnés de la Commune, tome 1 : A la reche..

Au fil de ses pérégrinations dans Paris, l'auteur tombe par hasard sur un nom : Lavalette, communard, et une adresse : 6 rue Lesage, Belleville. Mais ? C'est sa rue! Son immeuble! Intrigué le narrateur va faire des recherches. De bibliothèques en librairies et de librairies en archives nationales, le voilà qui part sur les traces de cet homme dont le nom n'est pas passé à la postérité dans cette époque sombre qu'est la commune de Paris.

C'est principalement à travers deux personnages : Lavalette donc mais aussi Victorine qui a vécu dans le même temps et qui a laissé ses mémoires, que l'auteur va nous raconter la Commune. Et tout d'abord les temps de révoltes qui l'ont précédé, puis la guerre avec la Prusse et la reddition de la France contre l'avis des Parisiens. C'est très intéressant même si par moment je n'ai pas trouvé les éléments très clairs. Je me suis parfois sentie perdue.

Ce qui est vraiment original, c'est le traitement graphique. L'auteur a du faire un incroyable travail de recherche. Il a épluché des centaines de gravures, de pages d'enquêtes, de journaux d'époque, de témoignages et j'en passe pour réunir informations mais aussi images. A coup de ciseaux, ce sont elles qui servent à illustrer le propos.
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Les damnés de la Commune, tome 2 : Ceux qui n..

Avec le second tome de cette trilogie, je m’habitue peu à peu à la forme bien que je trouve que le parti pris d’utiliser des gravures d’époque ait ses limites. Le rythme n’est pas aussi soutenu que ces insurrections et leur répression nécessiteraient… mais je me sens toujours proche des protagonistes que l’auteur a choisi de mettre en scène et je prends connaissance des évènements comme ceux et celles (elles ont eu un rôle important) qui y ont participé l’ont vécu, ce qui donne une autre dimension à la connaissance que j’en avais, la précisant parfois. Ainsi, par exemple, j’ignorais que de semblables mouvements avaient eu lieu dans d’autres villes de France. Les cartes de la fin de ce volume aident a comprendre la géographie des opérations aux alentours de Paris et en province.

Je vais donc poursuivre avec le troisième tome que j’anticipe plutôt déprimant car je n’ignore pas ce que fut la semaine sanglante….
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Les damnés de la Commune, tome 3 : Les orphel..

A l’occasion de l’anniversaire des 150 ans de la Commune de Paris, on a beaucoup parlé ces dernières semaines de la diffusion sur Arte d’un documentaire retraçant l’avènement et la sanglante répression de l’événement. Mais avant le film, « Les damnés de la Commune » est avant tout une série de bandes dessinées réalisées par Raphaël Meyssan (également à l’origine de l’adaptation) et dont les tomes ont été publiés entre 2017 et 2019 : « A la recherche de Lavalette » ; « Ceux qui n’étaient rien » et « Les orphelins de l’histoire ». Outre le fait qu’elle se focalise sur une période généralement occultée et mal connue de l’histoire de France, la spécificité de l’œuvre réside dans le choix de l’auteur de faire une bande dessinée… sans dessin. Ou du moins sans dessin de sa main. Chaque tome est en effet illustré uniquement grâce à des reproductions de gravures datant de l’époque, la plupart publiées à l’origine dans des journaux. Le pari était osé : d’abord parce qu’il a fallu trouver une unité de ton entre des dessins réalisés par des dizaines d’artistes différents, ensuite parce que les goûts esthétiques d’hier ne sont pas les mêmes qu’aujourd’hui, si bien que l’auteur courrait le risque de voir sa bande dessinée rebuter par son aspect. Il n’en est heureusement rien, et le résultat est absolument bluffant, tant visuellement qu’en terme de narration. Car pour le scénario non plus, Raphaël Meyssan ne fait pas dans le conventionnel : plutôt que de relater simplement la succession d’événements qui ont abouti à la proclamation de la Commune, l’auteur préfère relater son enquête pour retrouver la trace d’un Communard en particulier, un dénommé Lavalette, qui a habité dans son immeuble en 1871. D’archives en archives, en passant par les articles de presse, les témoignages de contemporains, les rapports de police, les lettres ou encore les comptes rendus de débat à l’assemblée, l’auteur remonte la piste de son voisin communard, et nous plonge avec lui dans le bouillonnement du Paris de 1870-1871. L’immersion est totale, non seulement grâce aux illustrations mais aussi aux textes qui alternent entre « voix-off » de l’artiste qui contextualise, enquête, questionne (le fond des bulles de texte est alors de couleur marron orangé), et retranscriptions de sources contemporaines (sur fond blanc). Le procédé est astucieux et permet de mêler l’émotion suscitée par les témoignages d’époque et l’analyse proposée par l’auteur. Difficile compte tenu de la masse d’informations collectée de ne pas être admiratif de l’érudition dont fait preuve ici Raphaël Meyssan, pourtant parfait néophyte en histoire communarde lorsqu’il se lance à la poursuite de son voisin d’un demi-siècle.



L’enquête est incroyable et pleine de rebondissements tant la figure de ce Lavalette s’avère difficile à saisir, et paradoxalement présent à chaque moment clé. Avec Raphaël Meyssan, on découvre donc le parcours atypique de ce presque anonyme qui aura suivi de près toutes les grandes figures révolutionnaires de cette fin de XIXe : « Si j’avais inventé un personnage de fiction, un héros de roman, présent à chaque moment de l’histoire, ayant connu tous ces grands personnages, aurais-je été crédible ? Lavalette est partout. » Et force est de constater que c’est vrai. En 1870, il gravite autour d’une des figures les plus emblématiques de l’opposition au Second Empire, le journaliste Henri Rochefort ; il participe ensuite de près à l’insurrection du 31 octobre 1871 (au cours de laquelle la Commune sera une première fois proclamée) ; il fait aussi évader de prison Gustave Flourens, chef des francs-tireurs de Belleville et figure phare de la Commune ; il prend la tête du 159e bataillon de la garde nationale, succédant ainsi au bras-droit d’Auguste Blanqui, l’Enfermé, le révolutionnaire le plus célèbre du XIXe (arrêté la veille de la proclamation de la Commune de Paris). Oui, Lavalette est partout. Et pour les milieux qu’il ne fréquente pas, les grands événements dont il est absent, il y a le témoignage de Victorine. Victorine, c’est la seconde grande figure de ce triptyque : une femme du peuple, qui a servi comme ambulancière dans un bataillon de la garde civile (comme beaucoup de femmes, à l’image d’Alix Payen dont je vous parlais récemment et dont le témoignage est ici aussi retranscrit en partie), et qui a, elle aussi, assistée à tout : le siège des Prussiens, la reddition par l’assemblée bordelaise, la nuit du 18 mars, les combats contre les Versaillais, et enfin la Semaine sanglante et ses suites. Son témoignage est bouleversant, et témoigne à la fois de la misère dans laquelle vivaient les classes populaires de l’époque, mais aussi l’enthousiasme incroyable qu’aura suscité l’avènement de cette Commune de Paris. Tour à tour galvanisantes ou tragiques, les retranscriptions de sources contemporaines permettent au lecteur de s’immerger pleinement dans l’ambiance et donc de vivre une expérience de lecture d’une intensité difficile à égaler. On s’émeut des deuils successifs qui frappe la pauvre Victorine, on se prend à rêver à cette république sociale qui anime les plus radicaux des insurgés, on verse d’amères larmes de rage de voir cet idéal si violemment réprimé, et on rit, parfois, notamment lorsque l’auteur se met lui-même en scène dans les gravures de l’époque, cherchant dans la foule Lavalette ou Victorine (et tombant même sur un autre dessinateur bien connu du grand public lors d’une scène d’anthologie).





A travers les trois tomes, le lecteur se voit expliquer par les contemporains de l’époque aussi bien que par l’auteur tous les tenants et aboutissants de la guerre franco-prussienne et de ses suites. On voit défiler toutes les grandes figures qui ont marqué la période, certains connus (Léon Gambetta, Adolphe Thiers, Victor Hugo, Auguste Blanqui, Louise Michel…), d’autres moins (le général Trochu, Jules Favre, Felix Pyat, Henri Rochefort, Gustave Flourens...) et d’autres encore qu’on ne s’attendait pas forcément à trouver là parce que leur heure de gloire viendra plus tard et qu’on oubliera qu’ils étaient aussi contemporains de ces événements (Clemenceau, Jules Ferry, Émile Zola….). Grâce à la diversité des témoignages, l’ouvrage se focalise aussi bien sur les grands événements et personnages que sur la réalité de la vie quotidienne de l’époque pour la population parisienne. Les informations fournies sont colossales, et pourtant à aucun moment le lecteur n’éprouve de lassitude ou n’a l’impression de se perdre dans cette masse de noms, de lieux ou de dates. Le tout est présenté de manière extrêmement ludique par l’auteur qui, en plus de multiplier les sources, change régulièrement d’angle d’approche (procédant à des focus ou au contraire des élargissements pour mieux cerner les enjeux, ou s’attardant sur le portrait d’un personnage en particulier) et fournit au lecteur quantité d’annexes (intégrées à la narration ou présentes en fin de volume, c’est selon) qui permettent de se repérer visuellement dans le Paris de 1871 ou d’identifier telle ou telle figure (chaque tome comporte ainsi une magnifique carte de la capitale de l’époque, avec des encarts synthétisant les grandes dates, lieux et événements décrits, ainsi qu’une impressionnante liste de références bibliographiques). Raphaël Meyssan revient aussi régulièrement sur les idées reçues qui polluent l’imaginaire populaire concernant l’histoire de la Commune. Loin des clichés d’une révolution sanglante et égoïste menée par des Parisiens déconnectés du reste du pays, la Commune telle que dépeinte ici par l’auteur constitue une formidable expérience démocratique au cours de laquelle quantité de réformes de justice sociale furent prises en compagnie d’autres mesures qu’on ne retrouvera que bien plus tard ou qui paraissent aujourd’hui encore plutôt radicales : possibilité pour les électeurs d’imposer un mandat impératif aux élus, abolition de l’armée permanente et affirmation de l’importance de la garde nationale dont les officiers sont désormais élus et révocables, séparation des églises et de l’état (les églises servent à la messe la journée, aux clubs la nuit), reconnaissance de l’union libre, pension alimentaire pour femmes séparées et reconnaissance de droits aux enfants non légitimes… Difficile de ne pas être contaminé par l’enthousiasme qui transpire du témoignage de Victorine et des autres, même s’il serait erroné de croire que l’auteur se livrerait ici à une opération réhabilitation sans nuance. Raphaël Meyssan aborde aussi les aspects les moins reluisants de la Commune (comme les persécutions anticléricales ou l’exécution d’otages après l’entrée des Versaillais dans la ville) et interroge aussi bien les sources pro-Commune que celles laissées par les conservateurs, les modérés, les observateurs étrangers ou encore les journalistes.



Avec les trois volumes des « Damnés de la Commune » Raphaël Meyssan réussit plusieurs tours de force. D’abord, celui d’avoir réalisé une bande dessinée uniquement illustrée par des gravures d’époque, ce qui ne rend l’immersion du lecteur que plus intense. Ensuite, celui de réunir une masse d’informations et de sources impressionnantes sur le sujet, ce qui lui permet régulièrement de s’effacer au profit d’un ou d’une autre narrateur/narratrice qui ont directement vécu les événements. Enfin, celui de faire comprendre toute la complexité d’une époque et d’analyser les événements avec recul tout en laissant régulièrement la place aux émotions du lecteur qui ressortira bouleversé, presque hébété par ce douloureux mais magnifique voyage dans le passé. Une expérience de lecture qui ne se refuse pas, que vous soyez connaisseur de l’époque ou non, amateur de BD ou non, héritiers des Communards et Communardes ou non.
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Les damnés de la Commune, tome 1 : A la reche..

Ce tome est le premier d'une histoire complète en 3 tomes. La première édition date de 2017. Il a été réalisé par Raphaël Meyssan. C'est une bande dessinée en noir & blanc, qui compte 136 planches, construites en 11 chapitres. En introduction, l'auteur remercie Christine Martinez, archiviste passionnée et passionnante, ainsi que la Bibliothèque historique de la Ville de Paris, le musée d'Art et d'Histoire de Saint Denis, le Musée Carnavalet, les archives de la Préfecture de Police de Paris, le Service Historique de la Défense, les Archives Nationales, les archives départementales des Yvelines, les archives départementales de l'Allier et les archives de l'Assistance Publique des hôpitaux de Paris.



Le narrateur indique qu'il vit à Paris, la ville lumière, celle de la tour Eiffel et des Champs Élysées, dans le quartier de Belleville. Un jour qu'il se promène à pied, il éprouve la sensation de percevoir un Paris plus ancien derrière les façades plus récentes et les vitrines rutilantes. La pluie commençant à tomber, il se réfugie dans la Bibliothèque historique de la ville de Paris, rue Pavée. Il y a pris un livre sur une étagère, l'a ouvert et est tombé sur une adresse politique, celle d'un certain Lavalette habitant rue Lesage, la même rue que lui. Sur les conseils du bibliothécaire, il consulte alors le Maitron (Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, 1964-1997). Dans le tome 13, il y est fait mention de Lavalette, Charles, Hippolyte (prénommé ailleurs Gilbert et surnommé Bonnet). Il faisait partie du comité central de la garde nationale pendant la Commune de Paris de 1871. Le narrateur essaye de s'imaginer Paris en 1871, sans tour Eiffel, sans basilique du Sacré Cœur, mais déjà avec les 12 communes avoisinantes annexées en 1860, et les travaux du Baron Haussmann qui relèguent les pauvres vers les faubourgs. Il se rend aux archives de la préfecture de police, où la préposée lui indique que toutes les archives de la police ont brûlé en 1871. Le narrateur est déçu car il aurait préféré trouver des traces de Lavalette avant 1871. Il y a quand même une note qui parle de lui comme un agitateur surveillé dans les réunions publiques en 1868.



L'auteur décide de partir à la recherche de Lavalette, son voisin communard, cherchant son histoire au milieu des archives, comme un bout d'Histoire laissé de côté. Il retourne à la Bibliothèque historique de la ville de Paris, aux archives de la Préfecture de Police. Mais les rapports de police ne lui apprennent que ce que peut me dire un policier. Il lit les rapports des indicateurs, les déclarations des concierges, les condamnations judiciaires. Le soir, il rentre dépité chez lui et choisit d'aller boire un verre dans un bar du onzième arrondissement. Il évoque ses recherches infructueuses et récupère un bouquin oublié par un autre client. Le livre est un recueil de témoignages. L'un d'eux est signé seulement d'un prénom : Victorine B. Elle s'est mariée à Orléans le 13 mai 1861. Elle est montée à Paris avec son époux, et son premier enfant est né le 14 janvier 1864. Elle évoque la pauvreté, l'alcoolisme de son mari, son plaisir de lire Les Misérables de Victor Hugo (1802-1885), en l'empruntant à un cabinet de lecture. Cela rappelle son propre exemplaire du livre à l'auteur qui redécouvre les gravures qui l'illustrent. Cela le fait penser à toutes les gravures qu'il trouve dans les archives et lui donne l'idée d'un ouvrage.



Voilà un ouvrage singulier qui se distingue immédiatement des autres bandes dessinées sur la Commune comme Les Voleurs d'empires, tome 1 de Jean Dufaux & Martin Jamal, ou Le Cri du peuple de Jean Vautrin & Jacques Tardi. Comme il l'indique, et comme le stipule la quatrième de couverture, cette bande dessinée a été entièrement réalisée à partir de gravures issues de journaux et de livres du dix-neuvième siècle. Le premier effet est que la narration visuelle est construite sur des images réalisées au dix-neuvième siècle, une vision que l'époque avait d'elle-même. La seconde conséquence est que la narration visuelle ne peut pas montrer un même personnage dans différentes postures, différentes scènes. Raphaël Meyssan parvient à surmonter cet obstacle en choisissant quelques images d'individus très similaires pour Gilbert Lavalette et Victorine B., le texte des cases attestant qu'il s'agit bien d'eux. Il personnalise également le récit avec les hommes célèbres (et peut-être les femmes célèbres par la suite) qui eux sont représentés de manière similaire par les différents artistes graveurs de l'époque. Il consacre également de nombreuses cases à des inconnus, leur attribuant un dialogue, ou explicitant leur intention, leur motivation, leur état d'esprit. En termes de découpage des planches, il privilégie les cases rectangulaires disposées en bande. Il recadre les gravures pour obtenir des plans plus rapprochés, pour n'en conserver qu'un détail, ou au contraire conserver une vision d'ensemble. Il compose des planches avec des cases de la largeur de la page, ou de la hauteur de la page, des petites cases, des cases en trapèze, des dessins en pleine page artificiellement découpés en plusieurs cases, régulières ou non. En y prêtant attention, le lecteur constate également que Raphaël Meyssan a intégré quelques photographies, de documents d'archive ou de la tombe de Gilbert Lavalette.



Finalement, l'auteur réalise une bande dessinée avec des contraintes singulières : ne pas savoir dessiner, utiliser des images (gravures) réalisées par d'autres plus d'un siècle auparavant. Il est possible de lire le nom d'un ou deux artistes originaux dans leur gravure, et lorsqu'ils étaient cités, leurs noms sont compilés en fin d'ouvrage. Il utilise les outils narratifs de la bande dessinée de manière organique, et il réalise des pages très variées, ayant numérisé plus de 15.000 documents différents. Le lecteur éprouve bien la sensation de lire une bande dessinée. Les dessins sont en noir & blanc, avec souvent une couleur de fonds un peu jaunâtre, sans donner l'impression d'un papier moisi. L'impression globale est surannée, mais pas vieillotte. L'amateur de bande de dessinée se rend vite compte du degré de détails très impressionnant. Il reste même bouche bée devant la qualité descriptive des façades parisiennes, devant les scènes de foulées habitées par des inconnus tous différenciés, par la description de la vie quotidienne parisienne de l'époque. Il sourit en se rendant compte qu'à quelques reprises, l'auteur s'amuse à utiliser ces gravures du dix-neuvième siècle pour une courte scène contemporaine, du début du vingt-et-unième siècle, créant un décalage déstabilisant, comme si l'individu présent est composé du passé.



Cette bande dessinée raconte avant tout une histoire : celle de l'auteur recherchant qui est le dénommé Gilbert Lavalette, et celle de Victorine B. au travers de son témoignage écrit. Les 2 fils narratifs alternent, au gré de la découverte d'un témoignage sur Lavalette, ou d'une nouvelle entrée de ce qui s'apparente au journal de Victorine. La logique narrative est assurée par les cellules de texte où l'auteur intervient directement, mais aussi par les événements relatés par Victorine B., ou encore par des discours à l'assemblée (repris en l'état), par quelques dialogues inventés. Le lecteur se laisse rapidement happer par l'ensemble de la narration, impressionné par la qualité des gravures, par ce qu'elles montrent de Paris à cette époque, par les questions sur Lavalette, par le témoignage de Victorine sur sa vie. Son regard est souvent attiré par un détail ou un autre : une façade connue, une tenue vestimentaire, un modèle de fiacre, une colonne Morris, la fréquentation dans un bistro, un homme en train de déboucher une bouteille sur les barricades. Il est épaté par la manière dont l'auteur a su s'approprier des dessins déjà existants, les sortir de leur contexte, leur donner un autre sens en les incorporant dans un récit différent, une œuvre totalement postmoderne, un recyclage de formes préexistantes.



Ce réemploi de dessins déjà parus nourrit également une reconstitution historique qui a la particularité d'être réalisée par des individus ayant vécu à l'époque, comme si Raphaël Meyssan avait pu travailler directement avec eux. Bien sûr le lecteur sait que ces images sont des interprétations réalisées par des artistes avec donc une licence artistique plus ou moins appuyée. L'auteur lui-même joue avec ce degré d'interprétation, insérant de ci de là une touche d'humour volontaire, pour rappeler que ce n'est pas un reportage objectif. Il suffit de lire page 46 le dialogue décalé entre Eugénie de Motijo (1826-1920) et son époux Napoléon III (1808-1873) pour en avoir la preuve. Cela ne diminue en rien la qualité de la reconstitution historique. Raphaël Meyssan a effectué des recherches approfondies sur la Commune et met en scène les figures historiques de l'époque, comme Napoléon III et le chancelier Bismarck, mais aussi Léon Gambetta, Jules Favre, Ernest Picard, Adolphe Crémieux, Louis-Jules Trochu, Garnier Pages, Emmanuel Arago, Jules Simon, Camille Pelletan, Henri Rochefort, Jules Ferry, Félix Pyat, Gustave Flourens, Henri Rochefort. Il déroule avec clarté les différents événements historiques depuis l'assassinat de Victor Noir (1848-1870) en janvier 1870 jusqu'au 18 mars 1871, en passant par la Dépêche d'Ems du 13 juillet 1870, Napoléon III fait prisonnier en septembre 1870, l'évasion de Gustave Flourens de la prison de Mazas en janvier 1871, le vote par l'Assemblée Nationale du la cession de l'Alsace et d'une partie de la Lorraine, etc.



Avec une forme postmoderne surprenante, Raphaël Meyssan réalise une véritable bande dessinée, entremêlant la vie d'une femme du peuple (Victorine B.), l'enquête sur l'histoire personnelle d'un membre du Comité central de la Garde Nationale (Gilbert Lavalette), et les événements qui conduisent à la création de la Commune de Paris. Le lecteur a la surprise de rapidement se trouver transporté à l'époque par cette narration visuelle hors du commun qui relève effectivement de la bande dessinée, impressionné par la résistance de Victorine B. à des conditions de vie épouvantables, intrigué par les mystères de la vie personnelle de Gilbert Lavalette et passionné par l'Histoire de la Commune de Paris.
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