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Citations de Raymond Boudon (59)


Comprendre un comportement individuel, c'est construire une théorie des raisons responsables de ce comportement qui soit compatible avec l'ensemble des faits connus.
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Il est crucial que le citoyen de demain soit capable de déceler les conséquences plausibles d'une décision économique ou politique.
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La philosophie la plus ancienne s'attarde sur le conflit entre la raison et les passions. Les stoïciens opposent le sage, qui obéit surtout à sa raison, au non-sage qui résiste mal à ses passions.
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Une fois celle-ci établie [sa réputation, voire sa gloire], l’intellectuel peut s’autoriser sans grand risque à dire à peu près n’importe quoi. Il se trouvera toujours des médiateurs pour assurer la claque.
Lorsque Sartre déclara voir dans la révolution cubaine ou Foucault dans la révolution iranienne une promesse pour l’humanité, certains médiateurs s’empressèrent de diffuser leur message.
Plus lucide, Umberto Eco déclara un jour que, s’il publiait l’annuaire du téléphone sous son nom, celui-ci deviendrait immédiatement un « best-seller ».

(Ch. I, D’où viennent les idées illibérales, p. 81)
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La théorie de la rationalité non seulement prolonge, mais enrichit la théorie philosophique de la raison.
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La philosophie classique voit dans la raison l'instrument qui permet de se représenter le réel tel qu'il est et s'interroge tout au long de son histoire sur son efficacité.
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Comme il est des circonstances où il est bon de mentir, la condamnation du principe du mensonge, ne peut avoir force de loi.
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On ne peut attendre en effet d’un personnel politique en grande partie issu de l’administration et dont les interlocuteurs principaux sont des syndicats de défense des fonctionnaires qu’il marque beaucoup d’enthousiasme à la perspective d’amoindrir les pouvoirs et de diminuer les dépenses de l’Etat.
C’est pourquoi les déficits de bien des services publics français sont chroniques : la solution consistant à les faire financer par l’impôt ne rencontre une résistance sérieuse à aucune étape du processus de décision politique.

(Ch. VII, LES CRITERES D’UNE BONNE THEORIE, p. 248-249)
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[…] la sociologie spontanée a tendance à forger des causes occultes rappelant les « principes » ou le « génie » des peuples évoqués par Guizot et à considérer que ces phénomènes différentiels s’expliquent par le fait que les Français, les Anglais et les Américains sont « culturellement » différents les uns des autres.

Car le culturalisme est bel et bien la théorie favorite de la sociologie spontanée. Aujourd’hui encore, on nous rebat les oreilles par exemple avec l’idée que le libéralisme est propre à la « culture anglo-saxonne », et qu’il est incompatible avec la « culture française ».

On notera au passage que ces affirmations ont l’avantage de suggérer que les questions de méthode, qui passent facilement pour abstraites et spéculatives, ont dans certains cas des conséquences politiques très réelles. C’est bien, pour reprendre le vocabulaire de Tocqueville, sur de « gros lieux communs » du genre de celui qui affirme l’existence d’une sorte d’incompatibilité inexpugnable entre la « culture » française et le libéralisme que sont fondées certaines décisions politiques des gouvernements français.

(Ch. VII, LES CRITERES D’UNE BONNE THEORIE, p. 226-227)
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Tocqueville a clairement anticipé ces effets de tyrannie douce, de censure hypocrite et d’intolérance déguisée en bienveillance qui caractérisent les sociétés modernes.
Par avance, il a bien vu que le règne de la doctrine dite aujourd’hui, selon une expression de Feyerabend (1975) qui a fait mouche, du « tout se vaut », du « anything goes », impliquait le rejet de la « critique » au sens de Kant.

Ici aussi, la vie des mots est un symptôme important pour le sociologue.
Chez Kant lui-même, le mot « critique » désignait l’effort pour distinguer méthodiquement entre le vrai et le faux, le juste et l’injuste, le légitime et l’illégitime, le bon et le mauvais, ce qui a ou n’a pas de valeur artistique, ce qui est utile et ce qui ne l’est pas, etc.
Or le mot « critique » au sens kantien a disparu de l’usage et n’est même plus guère compris.
Car, comme « tout est bon » et que « tout se vaut », ces questions n’ont plus de sens.
Le mot « critique » est devenu aujourd’hui synonyme de dénigrement.

(Ch. VI, PROCESSUS SOCIAUX, p. 184-185)
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[...] il [Tocqueville] met en place, dans la première « Démocratie en Amérique » et plus nettement encore dans la seconde « Démocratie » et dans « L’Ancien Régime et la Révolution », une méthode d’analyse des faits sociaux qui forme un contraste saisissant avec celle des auteurs qu’il déteste – les physiocrates, les théoriciens du socialisme, les philosophes de l’histoire et sans doute aussi les pionniers de la sociologie – parce qu’ils « suppriment, pour ainsi dire, les hommes de l’histoire du genre humain ».

(Ch. I, L’ETERNELLE JEUNESSE DE TOCQUEVILLE, p. 13-14)
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La globalisation a un effet majeur : affaiblir le modèle du despotisme immense et tutélaire de l’Etat. Les nécessités de la coopération en matière de politique de l’énergie ou de gestion des ressources rares et les avancées des techniques d’information et de communication sont peut-être appelées à jouer un rôle de facilitation des processus de rationalisation analogue au rôle que Durkheim a imputé aux progrès de la division du travail. Car ces facteurs ont pour effet d’affaiblir les Etats-nations et de favoriser le pouvoir des institutions et des organisations transnationales de caractère humanitaire, économique, judiciaire ou communicationnel. Ces institutions et organisations transnationales sont porteuses d’une forme de contrôle social dans une large mesure inédite, esquissant le développement d’un Recht ohne Stat : d’un « droit sans Etat ».
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[…] la critique d’une idée n’a guère d’efficacité en elle-même, dès lors qu’elle se heurte à l’« opinion » et au « pouvoir social ».
On peut une fois de plus illustrer l’analyse de Tocqueville par un exemple qui lui est postérieur de façon à souligner l’importance de sa pensée pour l’intelligence de nos sociétés : celui des innombrables essais critiques qui, de Viktor Kravtchenko à Alexandre Soljenitsine, ont dénoncé le système soviétique, son inefficacité et sa cruauté. Ils n’ont ébranlé que les non-croyants […]

La critique d’une idée tend en effet à ne devenir efficace que lorsque la réalité en démontre les faiblesses de façon si évidente que les croyants se retrouvent isolés et sont alors abandonnés par le « pouvoir social ».
C’est seulement en 1956, avec la répression par l’armée soviétique de la révolte de Budapest, que la foi dans le système communiste se trouva sérieusement ébranlée auprès des nombreux Occidentaux qui avaient crus à ses vertus.
Mais il fallut attendre 1989 et la chute du mur de Berlin pour que le « juge éclairé et intègre » dont parle Tocqueville rende enfin un verdict définitif sur les idées qui avaient été mises en application par la révolution soviétique de 1917.

(Ch. VI, PROCESSUS SOCIAUX, p. 189-190)
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Tocqueville repousse énergiquement, quant à lui, le dilemme selon lequel l’histoire devrait être considérée comme produite soit par des individus, soit par des mouvements de masse, car l’histoire est l’effet selon lui de l’action de tous les hommes et non des seuls grands hommes.
Elle n’est pas non plus le produit des seuls « mouvements sociaux », comme on dit aujourd’hui, et encore moins de forces occultes.
[…]
[…] la prudence […] avec laquelle Tocqueville traite le thème de la lutte des classes contraste avec le simplisme avec lequel il est souvent traité aujourd’hui. Le schéma explicatif de la « lutte des classes » reste en effet très vivace dans les sociétés contemporaines, sans doute parce que l’« homo democraticus » est, comme le veut Tocqueville, EN QUETE DE REPERES FACILEMENT LISIBLES lui permettant d’avoir L’ILLUSION DE MAITRISER LA COMPLEXITE DU REEL.
Le thème de la lutte des classes est par exemple présent, de façon subliminale, dans les déclarations, devenues des lieux communs pour certains responsables politiques ou certains journalistes français contemporains, selon lesquelles toute mesure prise par les pouvoirs publics pour abaisser le coût du travail est un « cadeau aux entreprises ».
Il est présent encore dans cet autre lieu commun selon lequel le progrès des pays du Nord ne saurait se faire qu’aux dépens des pays du Sud.

(Ch. IV, LOIS SOCIOLOGIQUES, p. 116-117)
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Dieu sait en effet si les sciences humaines d’aujourd’hui attribuent facilement les phénomènes qu’elles cherchent à expliquer à des forces occultes, sous l’influence persistante notamment de Marx et de Freud, et aussi de mouvements d’idées variés, comme le culturalisme, le structuralisme ou la sociobiologie. Faisant du comportement humain la résultante de causes agissant à l’insu du sujet, tous ces mouvements tournent le dos à l’idée que le comportement humain doit être considéré comme en principe « compréhensible » au sens de Weber. Selon ce principe, ce sont les raisons et les motivations du sujet, telles que le sociologue peut les reconstituer, qui doivent être considérées comme les causes exclusives de son comportement.

Refusant de prêter attention aux intentions, aux raisons et aux motivations de l’être humain, les mouvements d’idées que je viens d’évoquer illustrent les théories que Tocqueville détestait parce qu’elles « suppriment (…) les hommes de l’histoire du genre humain ».

(Ch. IV, LOIS SOCIOLOGIQUES, p. 91)
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La question de la liberté humaine traverse les sciences sociales tout autant que la philosophie.
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Théoriquement, un gouvernement adossé à un Etat surdimensionné devrait être fort.
Dans la pratique, il est faible. Fort, il l’est par l’extension de ses prérogatives. Faible, il l’est parce qu’il est incapable de faire passer une mesure qui heurterait les fonctionnaires.
Ainsi, « deux révolutions semblent s’opérer de nos jours, en sens contraire ; l’une affaiblit continuellement le pouvoir, et l’autre le conforte sans cesse : à aucune autre époque de notre histoire, il n’a paru ni si faible ni si fort » (Démocratie en Amérique II, 645).

Le lecteur contemporain a l’impression que ce qui était vrai de la France de la monarchie de Juillet le reste dans une large mesure de la France actuelle. Les gouvernements de la Ve République ont toujours eu bien du mal à faire prévaloir l’intérêt général contre les intérêts corporatistes de ses agents : éducateurs, électriciens, gaziers ou cheminots.

(Ch. VII, LES CRITERES D’UNE BONNE THEORIE, p. 250-251)
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On peut finalement préciser la notion de « bonne théorie » telle qu’elle émerge des analyses de Tocqueville : une bonne théorie est celle qui fait d’un phénomène social le produit d’attitudes, de croyances, d’actions humaines compréhensibles à la lumière de la psychologie ordinaire et qu’on peut confronter avec succès aux données offertes par l’observation.

(Ch. VII, LES CRITERES D’UNE BONNE THEORIE, p. 225)
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La psychologie ordinaire, celle que nous employons tous les jours, celle qu’Aristote ou les moralistes du XVIIe siècle ont mise en forme, celle qu’utilisent les magistrats et les policiers, tire son identité et sa force de ce qu’elle peut seule engendrer des propositions réfutables.
On peut confronter à la réalité la théorie selon laquelle le coupeur de bois a l’intention de se chauffer et la théorie selon laquelle il veut plutôt confectionner un objet en bois, et déterminer sans ambiguïté laquelle est la bonne ou s’il faut en rechercher une troisième.
[…]
Ainsi, les théories incluant des propositions psychologiques relevant du registre de la psychologie ordinaire mobilisent des mécanismes psychologiques dont l’existence est avérée à partir des observations et des expériences que chacun peut faire. Et, dans le cas où l’observateur hésite à imputer un comportement à tel mécanisme plutôt qu’à tel autre, il peut chercher à trancher à partir des faits et bien souvent y parvient effectivement.
[…]
…La psychologie des profondeurs a en revanche le défaut de rendre irréfutables les théories qu’elle inspire du fait qu’elle se donne le droit d’évoquer des mécanismes psychologiques entièrement conjecturaux. Il s’ensuit que de telles théories peuvent se donner l’ambition de proposer des INTERPRETATIONS plus ou moins intéressantes, non des EXPLICATIONS que l’on puisse facilement soumettre au verdict du réel.

(Ch. VII, LES CRITERES D’UNE BONNE THEORIE, p. 222-223-224)
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Tocqueville, Durkheim et Weber se recommandent finalement du réalisme : on ne peut construire des sciences humaines solides en réduisant l’homme à telle ou telle catégorie de besoins ; on ne peut nier l’intervention du hasard ; on doit considérer que le contexte détermine l’existence d’occasions, mais non le comportement même des individus, lequel est l’effet de motivations et de raisons ;
[…]
Le réalisme exclut une vision déterministe du devenir historique.

(Ch. VI, PROCESSUS SOCIAUX, p. 213)
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