Citations de Richard Powers (1239)
Mon fils adorait la bibliothèque. Il adorait réserver des livres en ligne pour les trouver ensuite qui l’attendaient, attachés par un élastique, avec un papier à son nom. Il adorait la bienveillance des rayonnages, leur cartographie du monde connu. Il adorait le buffet à volonté de l’emprunt. Il adorait la chronique des prêts tamponnée sur la page de garde, ce registre des inconnus qui avaient emprunté le même livre avant lui. La librairie était le plus beau des jeux d’exploration : on avait le plaisir du pillage et la joie de gravir les niveaux.
Qu’est-ce que le chagrin ? C’est le monde dépouillé de l’objet qu’on admire.
Une année de séparation nous avait fait oublier comment on s'y prend pour être frère et sœur.
Si une masse critique de gens, si modeste soit-elle, retrouvait la conscience du lien qui nous unit, l’économie deviendrait écologie. On voudrait d’autres choses. On trouverait un sens à la vie dans le monde.
" Je suis quoi ?
- Tu es ma fille, lui dit-il.
- Non Da. Je suis quoi ?
- Tu es intelligente et bonne dans tout ce que tu fais.
- Non. Je veux dire, si toi tu es blanc et maman est noire…"
La réponse qu'il lui fit alors : erronée également.
" Tu as de la chance. Tu es les deux à la fois."
-
Bizarrement, dans le Manuel "diagnostique et statistique des troubles mentaux", il n’y a pas de nom pour la tendance compulsive à diagnostiquer les gens.
C’était une chouette baraque, un peu mal fichue, un peu vieillotte – la charpente en pin réglementaire du Midwest, maintes fois retapée, avec des infiltrations autour du placage des lucarnes. Elle était parfaite pour deux. Elle devint encore plus douillette à trois. Et plus tard encore, de nouveau à deux, elle se fit caverneuse.
Chanter était ce qu'il faisait de mieux. Chanter, c'était mieux que ce que le monde avait de mieux à offrir, mieux que n'importe quelle drogue, mieux que n'importe quel tranquillisant. Le chant était dans son corps...
Es-tu heureux ? Tu ne pourras rendre personne heureux si tu ne l'es pas toi-même.
" Les vrais Noirs meurent de blessures par balles, pas vrai ? D'overdose. De malnutrition. D'empoisonnement par le plomb. Mais les sang-mêlé, Joey, de quoi meurent-ils ? Personne ne meurt d'engourdissement, si ?
Nous traversons la Voie Lactée tous ensemble ,
arbres et hommes [...]
A chaque promenade avec la nature
on reçoit bien plus que ce qu'on cherche .
L'accès le plus direct à l'univers ,
c'est une forêt sauvage .
John Muir
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TRÈS BONNE ANNÉE 2019 pour tous !
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et que :
" Les mots résistent à toute la brutalité du jour "
( R. Powers )
[...] hêtre noir [...]
Fort et large , mais plein de grâce ,
il s'évase noblement à sa base pour s'offrir son propre socle .
Prodigue de noix qui nourrissent tous les affamés .
Son tronc lisse et banc gris ressemble plus à de la pierre qu'à du bois .
Ses feuilles couleur de parchemin survivent à l'hiver [...]
et se détachent brillantes sur fond de voisins dénudés .
Élégant , avec ses branches solides qui ressemblent tant à des bras ,
et dont les pointes s'élèvent comme des mains en offrande .
Brumeux et pâle au printemps ,
mais à l'automne ses ramilles plates et larges
baignent l'air de dorures .
P.131 -132
Elle raconte comment un orme a contribué à déclencher l’Indépendance américaine. Comment un énorme prosopis vieux de cinq cents ans pousse au milieu d’un des déserts les plus arides de la terre. Comment la vue d’un châtaignier à la fenêtre a redonné l’espoir à Anne Franck, dans le désespoir de sa claustration. Comment des semences sont passées par la lune avant de bourgeonner sur toute la Terre. Comment le monde est peuplé de merveilleuses créatures inconnues de tous. Comment il faudra peut-être des siècles pour réapprendre ce que jadis on savait sur les arbres.
Tel est le piège que l’évolution a façonné pour nous : même si le sort de toute l’espèce était en jeu, je me soucierais d’abord de mon fils.
La vie a un moyen de s'adresser au futur. ça s'appelle la mémoire.
Une contralto interprétant des bribes de Donizetti et de Schubert a changé la vie de mes neveux. Non, ce n'est pas ça. Son concert impromptu ne les a pas changés. Il les a faits.
Tu vois … on est sur un caillou, dans l’espace, d’accord ? Il y a des milliards de planètes qui valent bien la nôtre, remplies de créatures qu’on ne peut même pas imaginer. Et on voudrait que Dieu nous ressemble, à nous ? (p.90)
Personne ne voit les arbres. Nous voyons des fruits, nous voyons des noix, nous voyons du bois, nous voyons de l’ombre. Nous voyons des ornements ou les jolies couleurs de l’automne. Des obstacles qui bloquent les routes ou qui obstruent la piste de ski. Des lieux sombres et menaçants qu’il faut défricher. Nous voyons des branches qui risquent de crever notre toit. Nous voyons une poule aux œufs d’or. Mais les arbres… Les arbres sont invisibles.
Les gens ne peuvent pas supporter trop d'anarchie. Ils ont besoin de motifs. De répétition. D'un dessin qui ait du sens.
Sa vie durant, elle a soupçonné en secret que tout ce que l’on apprend à vouloir, tout ce que l’on fait vraiment sien, nous est retiré un jour. A présent elle sait pourquoi : rien ne nous appartient en propre.