AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Richard Yates (200)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées


Onze Histoires de Solitude

"Ceux qui réussissent ne m'intéressent pas"

dixit Richard Yates.

Je confirme

son recueil de nouvelles

n'a d' yeux que pour les laissés-pour-compte

des institutions de la sainte Amérique.

La première histoire "Le docteur Jeux de quille"

dégomme d'un trait implacable

un système scolaire à coté de la plaque,

bien démuni

face à la solitude des élèves les plus fragiles.

Les nouvelles suivantes, dans la même déveine,

montrent  la frustration d'un jeune couple marié,

l'errance d'un malade sur un lit d'hôpital,

l'abandon de vieillards dans les hospices, 

l'angoisse d'un licencié...

Certes, une lecture qui file un coup de blues

mais qui a le mérite de pointer avec style et concision

les défaillances du rêve américain.

Onze histoires de solitude...de bien bonnes mauvaises nouvelles...
Commenter  J’apprécie          700
La fenêtre panoramique

Le moins que l'on puisse dire, c'est que ce roman à l'origine de l'excellent film "Les Noces Rebelles" mérite une nouvelle traduction ! Dommage qu'à l'occasion de sa réédition, Robert Laffont n'ait pas rafraîchi le mot-à-mot maladroit datant de 1962, comme il l'a fait pour l'élégante couverture à l'effigie de Leonardo DiCaprio et de Kate Winslet.



Au-delà de cet inconfort de lecture, le récit s'avère bien construit et extrêmement prenant. Dans l'Amérique des années 50, Richard Yates dissèque les codes de la vie en banlieue et la complexité des relations de couple, surtout quand il s'agit de devenir parents.



A l'aube de la trentaine, Frank et April Wheeler forment un séduisant couple avec deux enfants. Dans leur jolie maison avec fenêtre panoramique sur Revolutionary Road, ils se considèrent différents de leurs voisins tels que les Campbell ou les Givings. Le travail assommant de Frank au siège social des machines Knox à New-York ne sert qu'à subvenir aux besoins des enfants. Leur routine de parents en banlieue n'a pas entamé leurs ambitions de jeunesse. Ils refusent d'avoir des pensées étriquées. Ils sont d'ailleurs prêts à tout plaquer pour aller vivre LA vraie vie en Europe... Mais si tout ceci n'était qu'un mirage ? Si, finalement, leur vraie vie était celle-ci ?



Avec l'histoire de Frank et April Wheeler, Richard Yates offre une vision sans concession de la société américaine. Sous le vernis de la modernité ou de la réussite, les mentalités évoluent peu et, par exemple, rares sont les femmes mariées qui travaillent. Dans cette société typique des années 50, on discute, on s'amuse et on boit beaucoup : bière, whisky, martini et autres cocktails. Pour ces "ménagères désespérées" et ces maris insatisfaits, c'est une manière comme une autre de combler la solitude existentielle, le « vide sans espoir » et de taire l'indicible. Celui ou celle qui ose dire la vérité ou transgresser les codes établis ne rencontrera qu'hostilité et incompréhension. Or certains mots blessent plus sûrement que des armes...



Roman subtil et bouleversant, La fenêtre panoramique est le miroir des illusions perdues.
Commenter  J’apprécie          410
Un été à Cold Spring

Challenge ABC 2016-2017



En 1935, Evan Shepard a 17 ans, il est beau et pas idiot, et se découvre une passion pour les voitures. Il envisage d'étudier à l'université pour devenir ingénieur mécanicien. Mais il tombe dans les bras de Mary, une fille de sa classe, qui tombe enceinte. le voilà obligé de se marier et d'endosser les responsabilités d'un chef de famille. Et de renoncer à l'université.

Inévitablement, quelque temps après, c'est au mariage et à ses chaînes qu'il renonce, et divorce. Mais la vie est une farceuse qui repasse les plats, et Evan un faible qui retombe dans le même panneau en épousant la douce et tendre Rachel. Mais cela ne serait encore qu'un moindre mal si celle-ci n'avait pas à sa remorque sa pénible et envahissante mère, Gloria, et son petit frère, Phil, adolescent solitaire. Et cela ne serait encore qu'un pis-aller si, à l'été 1942, Gloria n'avait pas eu l'idée, pour faire des économies, d'emménager avec ses enfants et son gendre dans une bicoque percluse d'humidité à Cold Spring, à quelques rues de la maison des parents d'Evan.

Dans cette cohabitation grinçante, Evan cherche une échappatoire, mais son rêve d'université a été grignoté par la nécessité de ramener un salaire à la maison, et, l'armée l'ayant réformé, la guerre en Europe s'est elle aussi dérobée à lui.



« Un été à Cold Spring » aurait pu être sous-titré « le livre des désillusions » ou « le roman de l'échec ». Dans ces 250 pages de voies sans issue, il n'y a pas seulement les déceptions d'Evan, il y a aussi celles des parents : son père, militaire qui n'a jamais su faire carrière, sa mère, qui n'a jamais supporté la vie de caserne et qui se replie sur elle-même et dans l'alcool, et Gloria, qui crève de mal d'amour et de médiocrité.

Avec sobriété et détachement, Richard Yates tire le portrait d'un milieu petit-bourgeois coincé dans ses codes : le mari qui travaille pour subvenir aux besoins financiers de sa famille et la femme qui reste au foyer pour ... subvenir aux besoins ménagers de sa famille. D'épanouissement personnel, il ne saurait être question dans ces vies étriquées.

Tout cela n'est guère réjouissant et on ne parvient pas tout à fait à se rassurer en se disant que cela se passait à Cold Spring, USA, en 1942...
Lien : https://voyagesaufildespages..
Commenter  J’apprécie          370
Easter parade

Easter Parade Richard Yates 1976.

« Aucune des deux soeurs Grimes ne serait heureuse dans la vie, et à regarder en arrière, il apparaît que les ennuis commencèrent avec le divorce de leurs parents. »



Un incipit coup de poing, un roman poignant.



Deux soeurs, Sarah et Emmy. Elles ont respectivement 9 et 5 ans au moment du divorce de leurs parents, nous sommes en 1930 à New-York. C’est le début de leurs ennuis dit Yates et ma foi leurs vies vont en être truffés… Sarah la lumineuse, l’extravertie va vivre comme la femme américaine est sensée le faire: mariage, enfants, couple stable, Emmy, elle, va s’affranchir des normes et, après un mariage éphémère, mener une vie de femme indépendante et libre.

Deux soeurs, deux destins et l’immense talent de Richard Yates donnent à ce roman une tonalité, une saveur exceptionnelle. Richard Yates ’analyse en profondeur ses deux héroïnes, il décrypte leurs mal-êtres, leurs qualités et leurs défauts, il perce la carapace qu’elles se sont forgées pour mieux se dissimuler au regard des autres. Quant aux autres Yates ne les oublie surtout pas. Des phrases courtes, une écriture sobre et efficace, du grand art et une très belle traduction en prime..

Richard Yates est sans aucun doute l’un des grands chroniqueurs américains des années d’après guerre. Ses personnages ont un rêve ancré en eux et se sont jurés de le concrétiser coûte que coûte, quel que soit le prix à payer .. Plus dure sera la chute ….

Un univers doux-amer à découvrir .
Commenter  J’apprécie          340
La fenêtre panoramique

Ce roman de Richard Yates retrace l'histoire d'un couple, les Wheeler.

Nous suivons Frank et April, tous les deux élégants, ayant réussi, et habitant depuis peu la banlieue new-yorkaise. Ils se retrouvent dans une jolie maison blanche, d'où ils observent leur environnement depuis la fenêtre panoramique de leur salon. Ils ont renoncé à la grande ville pour une vie plus pépère et familiale, mais ils sont persuadés de valoir mieux que leurs voisins qu'ils côtoient avec courtoisie, voire hypocrisie, sans réels liens d'amitié.

Frank s'ennuie au travail mais il a une bonne situation et s'est résigné depuis longtemps. April, comédienne du dimanche, passe ses journées à la maison et s'occupe des enfants.

Le contexte est très intéressant. J'ai aimé lire la description de leur petite vie de banlieusards des années 60 et le quotidien des employés de bureau de cette grande entreprise new-yorkaise. le tout est plutôt étriqué, malgré leurs rêves de grandeurs.

Ils sont amoureux et sont enviés des voisins. Mais de violentes disputes éclatent entre eux, mettant en péril leur lien et leur union. Ils sont dans l'incapacité de communiquer, pris en étau entre leurs envies profondes d'un côté et le confort matériel et ce que l'on attend d'eux de l'autre.

Pour moi, un superbe roman ! C'est la vie d'un couple, de la rencontre magique à l'effritement du mariage, tout simplement. C'est somme toute banal, mais l'auteur m'a tenue en haleine. le roman est long, certes, mais je l'ai lu comme un thriller. La tension est palpable, les psychologies très fines. L'auteur nous emmène au cœur de ce couple avec brio. C'est un roman universel et intemporel, qui touche à une certaine vérité.

Ne vous attendez ni à une histoire d'amour, ni à de beaux sentiments, ni à un roman feel-good ! Ici, l'âme humaine est sondée, et quand l'on creuse un peu, la médiocrité n'est pas loin.

Commenter  J’apprécie          314
Un été à Cold Spring

L'auteur dépeint une galerie de personnages émouvants et pathétiques qui semblent condamnés par leurs faiblesses. Le texte est très bien écrit et on retrouve l'ambiance du film Noces rebelles, même si le contexte est très différent.

J'ai passé un très bon moment avec ce roman bien qu'il soit un peu trop fataliste (réaliste ?) à mon goût.
Commenter  J’apprécie          300
Jeunes coeurs éprouvés

Richard Yates, dans ce roman paru aux États Unis en 1984 dépeint sur plusieurs décennies la vie d'une femme, Lucie et d'un homme, Michael Davenport à partir des années 1950 entre New-York et sa banlieue .



Dans la première partie, nous assistons à leur rencontre alors qu'ils sont étudiants .

Michael , ancien vétéran de la seconde guerre mondiale est poète et dramaturge , il vient de publier son premier recueil "Tout est dit " .

Lucy, elle, est une jeune femme riche , une définition simpliste et réductrice .

Ils se marient rapidement et ont une petite fille Laura .

Michael est ambitieux et veut pouvoir vivre de son talent d'écrivain même si il doit travailler par ailleurs pour gagner sa vie , il met un point d'honneur à ne pas profiter de la fortune de Lucy. Ils fréquentent un milieu d'artistes jeunes dont des peintres , les soirées sont arrosées et finissent souvent mal , Michael jouant des poings lorsqu'il est ivre.



On sent rapidement le malaise dans le couple, Michael est subjuguée par Diana, la sœur d'un des peintres , Lucy est malheureuse mais assume son statut d'épouse .



Délitement du couple, délitement de ce milieu qui se cherche, s'observe, se jalouse ...



Après le divorce qui intervient lorsque Laura a 9 ans, Richard Yates consacre la seconde partie, la plus captivante à Lucy.



Cette jeune femme sent bien la transformation de la situation des femmes dans la société mais elle est tiraillée par son envie de vivre sa vie et son éducation.

Elle aimerait tant qu'on l'apprécie elle aussi pour elle-même et s'essaie au théâtre, à l'écriture et la peinture dans un milieu rempli d'hommes réticents à la présence d'une femme et éminemment condescendants .

Lucy espère aussi en fréquentant ces milieux intellectuels trouver une âme sœur plutôt qu'un amant éphémère.



Bien sûr, après Lucy, vient le récit sur Michael.

Difficile pour le lecteur de trouver ce personnage sympathique .

Il est toujours décalé, parlant trop avec la mauvaise phrase qui fout tout en l'air, jalousant le succès de ses amis , bloqué dans ses inspirations poétiques . Fallait-il d'ailleurs appeler l'un de ses premiers poèmes "Tout est dit ": C'est un peu le reflet de sa vie.



De ces années des trente glorieuses , on ne saura pas grand chose en dehors de l'opposition à la guerre du Vietnam .

Les gens croisés dans ce récit semblent vivre dans un vase clos sans confrontation avec le reste du monde.



Une chronique à la fois nostalgique et amère sur ces années là .



J'ai bien aimé la façon dont Richard Yates présente Lucy .

Au début du récit, le seul élément qui la caractérise est sa fortune, un boulet dont finalement elle va s'extraire , ses expériences malheureuses font plutôt sourire, mais sa lutte pour réussir sa vie dans ce monde qui la dépasse et la pirouette finale que l'auteur offre à son héroïne la rend plus attachante.



lu en Décembre 2023

Commenter  J’apprécie          294
Un été à Cold Spring

Je ressors de ce livre un peu rincée de morosité!



Quelques heures de lecture en ambiance mélancolique sur les traces de Ewan Shepard, jeune américain au physique avantageux, mais sans grande ambition. Un jeune homme qui va accumuler les échecs et les désillusions: un premier mariage imposé pour cause de maternité et finalement raté, un second guère plus heureux, des portes fermées pour les études et l'incorporation dans ces temps de conflit mondial.



Le temps de l'été 1942, les deux familles du jeune ménage cohabitent à Cold Spring, faisant face à la neurasthénie d'une mère, à la démence affective d'une autre, aux émois d'adolescent d'un jeune frère mal dans sa peau. La faillite du couple, plombé par les compromis, devient palpable, exacerbée par l'ambiance insupportable de la promiscuité, dans une maison humide et inconfortable.



Richard Yates fait parfaitement son job d'écrivain de société, décrivant le quotidien et les difficultés des gens ordinaires dans un roman brut et sans concessions. Il peint une classe moyenne américaine désenchantée, stigmatisant son désir de briller et de réussir, de se distinguer et d'élever son rang social. Et, au résultat, pour ne gagner que rêves avortés, regrets et rancoeurs.

J'ai souvent pensé au film Noces rebelles, tiré d'un roman de Richard Yates, durant cette lecture. Même ambiance, même terrible constat, même impression d'étouffement.

Néanmoins remarquable!

Commenter  J’apprécie          270
La fenêtre panoramique

Amateurs d’Happy Endings et de tendres histoires d’amour s’abstenir : le très grinçant roman « La fenêtre panoramique » de Richard Yates (adapté très brillamment au cinéma, il y a quelques années, sous le titre « Les noces rebelles ») n’est pas pour vous. Tout commence pourtant de la façon le plus classique du monde par un coup de foudre entre Franck Wheeler, jeune homme plein d’entrain au brillant avenir professionnel, et April, belle jeune femme cultivée. Ils s’aiment, ils s’admirent, ils sont chacun « l’être le plus intéressant » que l’autre ait jamais rencontré. Touchante illusion mais que quelques années de mariage et deux enfants plus ou moins accidentels ne tardent pas à ternir...



Huit ans plus tard, les Wheeler sont toujours un couple charmant, installé en banlieue new-yorkaise dans une coquette petite maison et grandement apprécié de leurs voisins, mais le ver s’est insinué dans la pomme. Dissimulés derrière les murs de leur joli foyer et leurs murailles de faux-semblants, les Wheeler se déchirent, ponctuant leur vie conjugale de disputes de plus en plus violentes : April méprise Franck et Franck craint April. Dans un ultime effort pour sauver leur mariage et se prouver l’un à l’autre qu’ils sont toujours les êtres exceptionnels qu’ils pensaient être huit ans plus tôt, ils prennent une décision aventureuse : quitter l’Amérique et partir en France, terre de culture et de civilisation (oulah !) où leurs potentialités pourront enfin s’épanouir. Mais, comme disait l’autre, il y a loin de la coupe aux lèvres et, loin de stabiliser les choses, ce projet hasardeux va jouer le rôle d’événement déclencheur, précipitant la crise.



Avec « la fenêtre panoramique », Richard Yates réussit l’exploit de livrer un roman à la fois profondément dérangeant et curieusement touchant. Dérangeant car il offre une image du couple bien éloignée de celle des romances habituelles : une relation fondée sur le mépris mutuelle, la passion des apparences et du conformisme (si notre vie n’est pas un conte de fée, elle ne vaut pas la peine d’être vécue…) et la peur névrotique de la solitude. Mais touchant également, car si Franck et April rivalisent souvent de puérilité et d’aveuglement – même si Franck remporte à plusieurs reprises la palme de la médiocrité, à mon avis – ils n’ont restent pas moins très humains : ils nous répugnent un peu, nous dérangent, mais nous les comprenons tout de même. Dans leurs faiblesses, leurs petites veuleries, leurs craintes infantiles, il y a un peu de nous. Un roman fort, triste et vrai que l’on referme avec au cœur une pointe de pitié glacée et de crainte : prions le ciel de ne jamais être comme eux…

Commenter  J’apprécie          252
Jeunes coeurs éprouvés

Étude des artistes en peine, des mariages qui battent de l'aile et de la masculinité étouffante pour le deuxième sexe, mères et épouses avant d'être femmes, ce dernier roman inédit de Richard Yates immerge le lecteur dans l'Amérique des Trente Glorieuses, celle de Mad Men. Son héroïne est sensible et forte-tête malgré l'époque, et la partie qui lui est dédiée est indéniablement la plus sensible du livre (plus de détails : https://pamolico.wordpress.com/2023/11/08/jeunes-coeurs-eprouves-richard-yates/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
Commenter  J’apprécie          240
Un destin d'exception

Robert Prentice a tout juste dix-huit ans en 1944 lorsqu'il part en France sous le drapeau américain. La guerre y fait rage encore. Le jeune homme veut servir son pays, lui être utile, donner de sa personne. Devenir, pourquoi pas un héros de guerre, être reconnu... se sentir vivant.

Car jusqu'ici Bobby a toujours vécu dans l'ombre de sa mère, Alice, une femme originale et exubérante. Aimante à en être étouffante, elle élève son fils seule. Ce gamin, qu'elle trimbale partout n'est-il pas finalement l'homme de sa vie ? Ayant en elle une confiance absolue, elle est persuadée qu'elle deviendra une grande sculptrice. Robert est d'ailleurs son modèle attitré. Il prend la pose des heures durant, patiemment, devant le regard moqueur des autres enfants. Le petit garçon puis l'adolescent vit avec et pour la passion de sa mère sans ne jamais broncher supportant les déménagements, les amants, les amis, les dettes, les rêves d'Alice. Il s'efface devant elle. Connaissant à peine son père, que sa mère a quitté parce qu'il était trop gentil, trop sérieux, trop calme et si peu aventureux, Robert est complètement dépendant de cette femme, son unique référence.

Lorsqu'il a l'opportunité de s'éloigner d'elle, il n'hésite pas. C'est l'échappatoire qu'il attendait depuis longtemps. La guerre dans laquelle il s'enrôle est sa guerre à lui, celle qu'il va mener contre lui-même. Couper le cordon maternel, vivre pour lui, sans elle.

Mais, il sera un piètre soldat, constamment à côté, enchaînant les échecs, les brimades. On est loin du héros de guerre qu'il aurait aimé être. Lui qui espérait que les combats feraient de lui un homme, le délivreraient de l'emprise de sa mère, lui feraient une place, rien d'exceptionnel ne lui arrivera. Il sera un soldat parmi d'autres, et la seule chose qu'il « attrapera » sera une sévère pneumonie.

Deux destins voilés, qui ne trouveront pas la lumière tant espérée. Deux personnages voués à la défaite. Même s'ils se débattent pour s'en sortir, leurs acharnements semblent inutiles comme si tout était joué d'avance. Leurs rêves sont inatteignables pour des gens comme eux, aux petites existences médiocres.

Richard Yates a mis beaucoup de lui dans ce roman, en partie autobiographique. Et cela se sent à la lecture. Il est assurément un des plus grands écrivains américains. Ce roman sur la désillusion est un chef d'oeuvre.
Lien : http://lesmotsdelafin.wordpr..
Commenter  J’apprécie          236
Un été à Cold Spring

Je vous épargnerai le résumé de ce roman , celui qui vous est proposé sur la fiche du livre vous dit tout ou presque...

C'est dans le presque qu'il vous faut aller dénicher le talent de Richard Yates. Vénéré par ses pairs, il est sans aucun doute le romancier qui a su décrire le mieux ,et dans ses moindres recoins, l'état d'esprit de la classe moyenne américaine sur la période courant des années 30 aux années 80.

S'attachant à ses personnages, à ces couples mal assortis, à ces hommes en quête d'ascension sociale, de patriotisme viril ,et de la place qui leur revient face à un monde féminin qui sort de l'ombre, Richard Yates fort habilement donne la parole à ces hommes englués dans leurs contradictions, impuissants face à leurs épouses. A chacun d'eux il donne la parole, les seniors, le trentenaire ou l'adolescent semblent sortis du même moule.

Sans fioritures, la franchise est de mise, le discours est sobre. Tout est dit, rien ne nous est caché, faut ll en rire ou se jeter sous un train?

Après La Fenêtre panoramique et Easter parade que j'ai particulièrement aimés , je referme ce roman dubitative. Est-ce l'impression de lire pour la 3è fois la même histoire? Certes les évènements diffèrent un peu mais si peu. Fidèle à ses sujets de prédilection, Richard Yates semble ne pouvoir entrainer son lecteur qu' à la poursuite de personnages , hommes ou femmes, englués dans des histoires similaires.. Dommage

Commenter  J’apprécie          220
La fenêtre panoramique

Dans les romans de Richard Yates, et celui-ci ne fait pas exception, il ne faut pas s’attendre à une fin heureuse, à des personnages joyeux et heureux de vivre mais au contraire à des personnages perdant pied dans leur vie, malheureux en amour et parfois aussi dans le travail, le tout sous couvert d’une belle petite vie bien rangée avec la maison en banlieue, le mariage heureux, le travail épanouissant et permettant de gagner confortablement sa vie ; en somme la vie de bourgeois bien conformistes.

Malvina Reynolds en son temps avait très bien illustré cette situation avec sa chanson "Little Boxes", et dans Le Domaine du Mont de la Révolution il en va de même, seul le bonheur a droit de résidence : "Le Domaine du Mont de la Révolution n'avait pas été conçu pour abriter une tragédie.".



Ici nous avons donc April et Frank Wheeler, un couple bien comme il faut, habitant une grande maison dans la banlieue de New-York, parents de deux enfants, Frank travaillant à New-York dans une grande entreprise fabriquant des machines électroniques tandis qu’April est femme au foyer.

Mais passé la fenêtre panoramique de leur maison, ce conte de fées n’est plus qu’apparence : ils sont malheureux tous les deux, se disputent assez souvent et de façon violente, Frank méprise son travail tout comme il méprise par moment sa femme : "Troisièmement, il se trouve que le rôle d'un mari de banlieue muet et insensible ne me convient pas; tu as tenté de me le faire jouer depuis que nous sommes arrivés ici; mais je préférerais crever plutôt que l'assumer." et noie ses désillusions dans l’alcool ; quant à April, n’ayant jamais eu de modèle familial elle ne sait pas toujours comment se comporter avec ses enfants et fait montre d’une psychologie fragile tout en s’ennuyant ferme toute la journée dans sa belle maison de banlieue.

Ce roman n’est pas un pamphlet contre la vie en banlieue, c’est plus un pamphlet contre la volonté de conformisme des individus, de ne surtout pas sortir des sentiers battus et de chercher la sécurité à tout prix : tout le monde se marie, tout le monde a des enfants, tout le monde a sa maison en banlieue et va travailler quotidiennement en ville.

A ce sujet, le titre original "Revolutionary Road" est plus évocateur que la traduction en français puisqu’il fait référence à la révolution de 1776, année de la déclaration d’indépendance aux Etats-Unis.

Ce qui est remarquable dans ce propos, c’est que ce qui était vrai dans les années 50 l’est toujours autant aujourd’hui : gare à celui qui dévie de la norme dans sa vie, une âme bien pensante viendra vite lui signifier qu’il est anormal et qu’il devrait vite retourner sur le droit chemin sous peine de brûler dans les flammes de l’enfer.

Là où il devient amusant, c’est qu’il ne faut surtout pas pour les Wheeler et leur couple d’amis et voisins les Campbell être comme tous ces petits bourgeois qu’ils passent leur temps à critiquer lorsqu’ils se voient.

Ils se croient et se revendiquent différents, ils sont juste exactement comme eux.

La vie est un perpétuel spectacle dans lequel il faut faire bonne figure et choisir le bon costume et le bon masque, ce n’est d’ailleurs pas un hasard que ce livre s’ouvre sur une représentation théâtrale.



Je n’irai pas jusqu’à dire que je me suis attachée aux personnages, Frank est trop orgueilleux pour s’attirer ma sympathie et April trop soupe au lait pour que je puisse envisager un instant de m’identifier à elle.

Néanmoins, le propos sous-jacent à ce roman m’a vivement intéressée et j’ai été interpellée par cette dissection au scalpel de la vie d’un couple.

S’aiment-ils ou jouent-ils à s’aimer : "Prouver, prouver ... Et pour prouver encore, il avait épousé une femme qui s'était plus ou moins arrangée pour le maintenir constamment sur la défensive, qui l'aimait quand il était gentil, qui vivait selon ce qu'elle avait envie de faire, et qui pouvait à n'importe quel moment (c'était bien le comble !) à n'importe quel moment du jour ou de la nuit avoir envie de partir et de le quitter." ? Se détestent-ils et se sont-ils uniquement mis ensemble pour ne pas finir seul ? Frank est-il le plus manipulateur dans le couple : "Il avait triomphé, mais il ne se sentait pas l'âme d'un vainqueur. Il avait dirigé avec succès le cours de sa vie, mais plus que jamais il se sentait victime de l'indifférence du monde. Cela ne lui semblait pas juste." ou bien est-ce l'inverse ?

Autant de questions qui restent sans réponse, les Wheeler me font penser à des enfants qui auraient voulu grandir trop vite ou qui auraient mal grandi.

Ils ont encore des rêves plein la tête et un petit côté égoïste, leur décision de partir en Europe en est un bel exemple, à aucun moment ils ne se sont posés la question de savoir ce qu’il adviendrait de leurs enfants ni comment ils vivraient ce départ.

Néanmoins, il y a aussi quelques vérités dans ce récit : la vie de couple est difficile, il y a des hauts et des bas, mais c’est quelque chose qui se construit à deux, par le dialogue et sur la confiance.

Je n’envie pas ce couple, c’est une certitude, mais je n’ai pas non plus ressenti de dégoût pour eux à la lecture du roman.

Je les voyais se débattre dans une toile d’araignée sans réussir à s’en sortir, plutôt un modèle à ne pas retenir mais pas non plus un modèle que je condamne.

La construction du roman est également intéressante : une pièce de théâtre en ouverture avec une April comédienne ratée, un découpage de l’histoire en parties avec une alternance dans les points de vue : majoritairement celui des Wheeler mais aussi celui des Campbell et des Givings.

Ils ont un petit côté pathétique mais amusant tous ces couples à s’observer derrière la fenêtre, à épier le moindre faux pas du voisin pour se rassurer et se dire que soi-même on est différent et que cela ne pourrait jamais nous arriver.



"La fenêtre panoramique" est un roman mordant comme Richard Yates sait si bien en écrire, découpant et mettant à nu la vie d’un couple pour dénoncer le conformisme des années 50 aux Etats-Unis.

Une œuvre intéressante sur bien des aspects dont je ne m’explique pas pourquoi il aura fallu tant d’années pour qu’elle traverse l’Atlantique.
Lien : http://lemondedemissg.blogsp..
Commenter  J’apprécie          211
La fenêtre panoramique

Descente aux enfers d’un couple aux USA dans les années 50 : jeunesse à NY ou tout est possible, tous les espoirs permis, avec la certitude d’être supérieurement différent ; ensuite la réalité de la vie les rattrape : enfants, banlieues, femmes au foyer, les hommes faisant la navette, l’ennui, la perte de sens, les rêves que l’on sait impossibles à réaliser, l’indifférence, la violence, …
Commenter  J’apprécie          200
Un été à Cold Spring

Je n'ai pas vraiment compris la finalité de ce roman si ce n'est de nous offrir un bref portrait de deux familles américaines modestes, au cours des années 30 et 40.

Evan Shepard a une passion pour l'automobile mais ses ambitions de devenir ingénieur vont être réduites à néant par son désir pour l'impétueuse Mary. A 19 ans, l'ayant mise enceinte, il se voit contraint de l'épouser et divorce peu après. Bien décidé à reprendre son destin en main ainsi que ses études, voilà qu'il tombe sous le charme de la fragile Rachel. Obligé de travailler pour subvenir à leurs besoins et de vivre en compagnie de sa belle-famille, il fait à nouveau le deuil de ses ambitions. Comme son père par le passé, il ne pourra même pas faire carrière dans l'armée, réformé pour raison de santé.



En toile de fond, il y a la seconde guerre mondiale qui se profile et l'engagement patriotique des jeunes américains, mais cela reste une simple évocation. L'auteur se cantonne à nous décrire l'existence même de quelques personnages peu attachants. Les femmes jeunes y prennent le pouvoir jusqu'à ce qu'elles soient enceintes. Plus âgées, délaissées, elles se réfugient dans l'alcool, pour noyer leur mélancolie. Evan n'a pas vraiment de caractère pour se donner les moyens de réaliser ses rêves. Trop sensible aux attraits féminins, il manque de volonté et le moindre jupon lui fait oublier le fait qu'il va de désillusion en désillusion.



Ce roman reste malgré tout, grâce au style de l'auteur, agréable à lire. Il a l'avantage d'être court (vaut mieux quand on n'a pas grand chose à dire) mais, pour moi, il ne mène strictement nulle part. Plutôt frisquet, cet été à Cold Spring ! 9/20



Commenter  J’apprécie          184
Menteurs amoureux

Je suis tombée dans les nouvelles américaines il y a de nombreuses années et ne me suis jamais relevée. Merci à ce libraire qui me mit dans les mains Trois Roses Jaunes. Depuis, je me sens une âme de fleuriste. Alors, lorsque a paru un recueil de nouvelles de Richard Yates, mon porte-monnaie n'a rien eu à dire… Même si j'avais dépassé le quota qu'exige ma bonne conscience. Même si ma Pile A Lire se lamente de ne pas dégraisser (je mettrai dedans un livre de régime).

Yates n'étant pas un petit nouveau, il était temps qu'un éditeur français outrepasse l'indéracinable constat: "en France, les nouvelles ne marchent pas" (ben non, elles ne marchent pas plus que les livres ne volent. Gros soupir. Il y a suffisamment de succès éditoriaux pour financer sans état d'âme des auteurs dont le talent n'est plus à démontrer, non? ) Mais foin de mon mauvais esprit. Les nouvelles parues en 1978 aux Etats-Unis ont enfin traversé l'Atlantique. Que ce soit à dos de tortue importe peu.



Hosannah! Yates est aussi grand nouvelliste que romancier. Sé-dui-te, je suis.

Prenez l'Amérique des années 30. On y divorçait déjà beaucoup. Les parents de Richard Yates avaient suivi le mouvement. Aussi, l'écrivain devenu adulte trempe-t-il sa plume dans son enfance instable. Le Billy de la première nouvelle et la Nancy de la troisième assistent aux courageuses et pitoyables tentatives de leur mère d'acquérir leur indépendance. Les vies continuent cahin-caha. L'alcool coule à flots.

Dans toutes les histoires, on boit trop chez Yates. Beaucoup trop. L'alcool-béquille.

On s'y sépare aussi. Chaque fois. Le sentiment d'abandon y est récurrent. Les rêves d'un lendemain plus prometteur permettent de supporter l'existence.

Les hommes, pathétiques, cherchent une gloire toujours illusoire. Ils peuvent rêver de conquête au point de s'empêtrer dans des relations improbables ou de reculer.

Toujours les fêlures nourrissent les doutes. Il y a la quête de l'amour. La recherche de la reconnaissance. Les rêves qui succèdent aux rêves et qui s'écrasent



Parent de Cheever dans les cinq premières nouvelles, Yates se tourne résolument vers Francis Scott Fitzgerald dans les deux dernières. Avec un immense talent.



Vous l'ai-je dit? J'ai beaucoup beaucoup aimé.
Commenter  J’apprécie          180
La fenêtre panoramique

AUTOPSIE D'UN MARIAGE AMERICAIN.Nous sommes en 1955, dans le Connecticut Ouest "banlieue de New York".Einsenhower est Président des USA, la guerre est finie depuis 10 ans,les jeunes soldats ont repris le chemin de la vie civile avec plus ou moins de succès.Frank Wheeler et sa femme April , parents de 2 jeunes enfants ont acheté une maison dans un village en pleine expansion."vraiment une gentille petite maison, dans un gentil petit cadre." "pas grande et tout en bois , chevauchant hardiment sa fondation .en béton , avec une fenêtre centrale immense qui ressemblait à un grand miroir noir: ""une fenêtre panaromique".

Richard Yates va nous faire partager la vie de ce couple associé par erreur , rêvant d'espace , de départ ,pour échapper à la médiocrité ambiante .Frank Weeler se vante d'avoir un travail alimentaire et d'y dépenser le mons d'énergie possible ,quant à April elle fourgonne dans sa maison , en pensant à autre chose , à se réaliser autrement que dans les biberons et les couches !

En l'espace de quelques mois nous voyons se couple se désagréger , se prendre en grippe , ;Le texte de Yates est d'une pertinence surréaliste ,il fait mouche à tous les coups et nous regardons impuissants le drame se nouer.

Beau texte à replacer impérativement dans son contexte historique , à noter l'adaptation cinématographique Les Noces Rebelles réalisée par Sam Mendes avec Leonardo Di Caprio et Kate Winslet particulièrement bien réussie .
Commenter  J’apprécie          180
Un été à Cold Spring



J’ai choisi ce livre pour le challenge ABC. Malgré la quatrième de couverture élogieuse, je n’ai pas été éblouie. C’est un bon roman sans plus pour moi.



Il présente un certain nombre de personnages qui essaient de se faire une vie dans l’Amérique des années 30 et 40. Tout d’abord la famille Shepard, dont le père a dû quitter l’armée pour cause de mauvaise vue, la mère neurasthénique et leur fils Evan, assez médiocre, mais qui se découvre une passion pour l’automobile. Contraint au mariage par la grossesse de sa petite amie, il travaille dans une usine puis divorce assez vite. Il en épouse une autre, trop contente de quitter sa mère qui ne sait contrôler ni sa parole ni sa consommation de cigarettes et d’alcool. Ce couple devra pour raisons financières partager une maison avec cette femme et le frère, revenu pour l’été de son école privée où il a beaucoup de mal à s’intégrer. Le quotidien mesquin de tous ces gens nous est raconté sobrement.



Pas vraiment un livre feel good. Mais il peut être intéressant à lire.

Commenter  J’apprécie          170
La fenêtre panoramique

Le romancier Richard Yates analyse un couple à la dérive. Franck et April Wheeler mènent une vie paisible dans un quartier pavillonnaire de la banlieue new-yorkaise dans une Amérique prospère des années cinquante. Après une modeste représentation théâtrale où April est l'actrice principale, elle se rend compte que leur couple est passé à côté de leurs ambitions de jeunesse. Elle décide qu'ils doivent prendre un nouveau départ, et projettent de partir s'installer à Paris.

Après la lecture et le visionnage du film (magnifiquement interprété par Kate Winslet et Leonardo di Caprio), on se rend bien compte que seul leur rencontre aura été pour eux l'unique instant de bonheur. On sent une atmosphère pesante tout le reste du temps.

Ce qui m'a intéressé dans ce roman, c'est le regard porté sur la société américaine, mais aussi sur un thème récurrent, le rôle de la femme, ici en simple ménagère élevant ses enfants mais aspirant à davantage de reconnaissance sur ses compétences.

Cette fine observation psychologique de ce couple ne laisse pas indifférent.

Un roman (et un film) à découvrir.
Commenter  J’apprécie          170
La fenêtre panoramique

On ne peut pas nier que ce roman soit bon. Il dépeint la vie d'un couple (April et Frank Wheeler) dans une banlieue américaine des années 50. Le début du roman est fascinant mais la suite est vite devenu pour moi, très lourde, pesante et longue. Des descriptions à n'en plus finir, des personnages qui représentent tous les pires aspects et défauts ce qui fait qu'on n'arrive pas a les aimer et puis au fur et a mesure que le roman avance, l'histoire est de plus en plus noire et tragique.
Commenter  J’apprécie          170




Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Richard Yates (821)Voir plus

Quiz Voir plus

Le quiz des prénoms (niveau facile)

Le titre du recueil de poèmes d'Aragon s'intitule ...

Le Fou d'Anna
Le Fou du Roi
Le Fou d'Elsa
Le Fou d'Estelle

10 questions
5128 lecteurs ont répondu
Thèmes : prénomsCréer un quiz sur cet auteur

{* *}