Robert Darnton

Les Lumières sont nées d'une grande crise survenue dans les dernières années du règne de Louis XIV. Pendant un siècle, le pouvoir de la monarchie et le prestige de la littérature avaient marché la main dans la main; après 1685, ils suivent des chemins séparés. La révocation de l'édit de Nantes, la querelle des Anciens et des Modernes, la persécution des jansénistes et des quiétistes provoquent une situation critique à un moment où la France subit une série de désastres démographiques, économiques et militaires. Alors que" l'état est au bord de l'effondrement, des hommes de lettres rattachés à la cour ( Fénelon, La Bruyère, Boulainvilliers, Vauban, Saint-Simon) mettent en cause les fondements de l'absolutisme des Bourbons et l'othodoxie religieuse qu'ils imposent. La ville* suit son propre chemin tandis que la cour* succombe à la paralysie, dans l'attente de la mort d'un roi âgé. Une nouvelle génération d'esprits forts et de beaux esprits s'empare des salons et insuffle une nouvelle vie au libertinage qyui s'est développé tout au long du XVIIe siècle.

Un « livre électronique », contrairement au codex imprimé, peut contenir de nombreuses strates organisées en forme de pyramide. Les lecteurs pourront télécharger le texte et parcourir la strate supérieure qui sera rédigée comme une monographie classique. Si cela leur suffit, ils imprimeront le texte, le relieront (il est possible aujourd'hui de brancher des relieuses aux ordinateurs et aux imprimantes) et l'étudieront à leur guise sous la forme d'un livre fabriqué sur commande. S'ils tombent sur quelque chose qui les intéresse plus particulièrement, ils cliqueront sur une autre strate et accéderont à un essai ou à un appendice supplémentaire. Ils pourront aussi continuer à s'enfoncer plus profondément dans le livre à travers un corpus de documents – bibliographie, historiographie, iconographie, musique de fond -, tout ce que j'aurai mis à leur disposition pour conduire à la compréhension la plus complète possible de mon sujet. Finalement, ils s'approprieront le sujet parce qu'ils y traceront leurs propres cheminements en le lisant de façon horizontale, verticale ou diagonale, selon les directions ouvertes par les liens électroniques.

L'opinion publique se forme toujours de manière obscure.

malgré leur diversité, ces livres transmettaient une vue du monde empreinte d’un message implicite : le monde tel qu’il est n’est pas celui qui doit être. […] En 1789, dans le sillage des livres qui avaient circulé par les canaux du commerce, la pensée se ferait action 

Le succès en tant qu’éditeur dépendait de sa compétence comme expéditeur ; et pour réussir dans les livraisons, que ce fût par des canaux légaux ou par la contrebande, elle devait créer et maintenir un réseau de gens, ainsi qu’un système d’itinéraires ».

Favarger était confronté à la tâche de collecter cette dette et de défendre les intérêts de la STN en trouvant n'importe quel accommodement que Robert et Gauthier seraient susceptibles de faire avec leurs créanciers. Et comment vendrait-il à Bourg en Bresse le moindre livre de la société si son client le plus important cessait ses activités ?

Malgré son caractère picaresque, le récit de Favarger appartient tout autant à l'économie et à la sociologie qu'à l'histoire littéraire.

C'est l'élite qui lisait les livres qui a commencé la Révolution.

moyennant un moteur de recherche suffisamment puissant, nous imaginons pouvoir accéder au savoir sur toute chose dans le monde et même dans le passé. Tout est là sur Internet attendant d'être chargé et imprimé.
Une telle conception du cyber espace entretient une étrange ressemblance avec la conception que se faisait Saint-Augustin de l'esprit de Dieu - omniscient et infini parce que son savoir s'étendait partout, au-delà même du temps et de l'espace.

Panckouke représente la transition entre ces deux mondes et comment la transition de l'un à l'autre peut-être difficile.

... Les bibliothèques ne furent jamais des entrepôts de livres, mais elles ont été et seront toujours des centres du savoir. Leur position au cœur du monde du savoir en fait des lieux idéalement adaptés pour servir d'intermédiaires entre les modes de communication imprimés et numériques.

Consolidez les bibliothèques, approvisionnez-les en imprimés, renforcez leurs salles de lecture, mais ne les considérez pas comme de simples entrepôts ou des musées

[...] L'Avenir des bibliothèques. Où l'on se demandera ce que pourrait être une République numérique des Lettres. Google et l'avenir du Livre. De la différence entre les bibliothèques et Google [...]

...nous pourrions accorder davantage d'attention à la lecture comme élément de ce que l'on appelait l'histoire des mentalités - c'est-à-dire des visions du monde et des modes de pensée. Tous ceux qui ont tenu des recueils de citations (...) lurent leur chemin dans la vie en collectant des fragments d'expérience et en les insérant dans des schémas. Les affinités sous-jacentes qui assuraient la cohésion de ces schémas représentaient une tentative pour prendre la vie en main, pour lui donner un sens, non pas en élaborant des théories, mais en imposant une forme à la matière. Rassembler des citations était confectionner un patchwork: cela produisait des images, certaines plus belles que les autres, mais chacune intéressante à sa façon. Elles révèlent des modes de culture: les morceaux qui entrèrent dans la composition, les coutures qui les unirent, les déchirures qui les détachèrent et l'étoffe commune dont ils étaient faits.

Si vous lisez des réclames pour des livres dans les journaux du XVIIIè siècle, vous serez frappé par l'accent mis sur sur le matériau fondamental de la littérature: "Imprimé sur le meilleur papier d'Angoulême." Cette accroche commerciale serait impensable aujourd'hui où les lecteurs prêtent rarement attention à la qualité du papier dans les livres. Au XVIIIè siècle, ils trouvaient souvent des taches formées par les gouttes tombées d'un cadre volant mal tenu ou des fragments de jupon qui n'avaient pas été convenablement broyés. Des remarques portant sur le papier reviennent si souvent dans les lettres des imprimeurs - (...) - que je pense qu'il existait une forme particulière de perception consciente du papier en Europe au début de l'époque moderne. Cette perception a dû disparaître avec l'avènement au XIXè siècle du papier fabriqué mécaniquement à partir de pulpe de bois. Mais, dans les époques antérieures, les gens regardaient le substrat du livre et pas simplement le message verbal. Les lecteurs discutaient des degrés de blancheur, de la texture et de la souplesse du papier. Ils usaient d'un riche vocabulaire esthétique pour en décrire les qualités, un peu comme on le fait aujourd'hui pour le vin.

En 1950 , le gouvernement fixa le prix du pain le plus courant dans les boulangeries de RDA à 5 pfennigs et le maintient à ce prix pendant quarante ans , tandis qu'il faisait passer le prix d'un paquet d'une demi-livre de café à 35 marks , l'équivalent d'une journée de salaire pour la plupart des travailleurs . Un appartement de deux pièces coûtait couramment 100 marks ou moins par mois , et un ordinateur 25000- si tant qu'on pouvait en dénicher un .

Les trains sont généralement à l'heure en RDA , mais si le train traverse un passage à niveaux en pleine campagne et que vous êtes au volant de votre voiture , vous devez souvent attendre quinze minutes ou plus . Un préposé baisse la barrière à la main , avec la lenteur d'un escargot . Vous vous arrêtez , descendez de voiture , entamez la conservation avec les autres automobilistes , car une queue ne tarde pas à se former et on a amplement le temps de bavarder .

Les gens ordinaires n'ont généralement pas le téléphone . Quans ils ont quelque chose à dire , ils vont chez lui ou le retrouvent dans un café pour discuter . Les Allemands de l'Est parlent tout le temps . Ils surveillaient leur langage lorsqu'ils pensaient que les oreilles de la Stasi traînaient , mais ils parlaient surtout à un cercle d'amis limité et n'abordaient qu'un éventail de sujets restreint .C'était du papotage qui prenait une grande partie de la journée

L'événement clé qui déchencha les manifestations à Berlin -Est se produisit pendant un concert de Michael Jackson le 19 juin 1988. Pendant que M. Jackson faisait du bruit près du Reichstag , du côté occidental du mur , un groupe de jeunes se rassembla pour l'écouter du côté oriental , où ce genre de musique était interdit .La police tenta de les disperser , mais la foule résista : elle revendiquait le droit d'écouter le genre de musique qui plaisait à sa génération et qu'elle avait appris à aimer grâce à la radio et à la télévision occidentales ;

Il n'y aura jamais de révolution en allemagne , parce qu'il faudra que quelqu'un marche sur la pelouse ;