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Citations de Roger Vercel (117)


Le ciel, entre les troncs noirs, est si sale, si jaune, que le sol blanc ne parvient plus à éclairer. A droite, le fleuve débordé, entre d'autres arbres de goudron, paraît s'être dressé, tendu comme une haute bande verticale, une longue toile brune qui monte jusqu'au lourd plafond des nuées, et nous cerne. Tout est à ce point obscur, froid et décoloré, qu'il semble que toujours il en sera de même, que nous sommes tombés au-dessous du monde, dans une région de limbes où rien n'a jamais vu le soleil !...
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Mais en moins de trois jours, la vie devint impossible. Le commandant rajeunissait. Tous les matins, il dictait une décision de deux pages : états à fournir, piquet d'incendie, théories, revues d'armes, exercices, paquetages, carrés, répurgation, alertes de nuit, cours de perfectionnement, bal des punis dans la grande cour, tout ce service dont il avait été privé pendant quatre ans, il s'en gorgeait ! La guerre, il ne nous le cacha pas, nous avait tous gâtés ; elle avait trop longtemps servi d'excuse à un laisser-aller de mauvais aloi. Il était temps de revenir aux saines traditions !
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Conan m'exposait un plan de défense général et hautain. Il fallait, selon lui, assurer aux juges que les préventionnaires étaient des soldats d'élite, des audacieux, entraînés, pendant des années, aux exploits violents et que l'armistice avait déconcertés. Ils avaient pris l'habitude de se battre, ça leur manquait ; c'était des héros sans emploi, les plus tristes et les plus à plaindre des chômeurs, et ils auraient besoin de paliers, de longues transitions, avant que s'éteignent les appétits de combat qu'on avait surexcités en eux.
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Elle se rappelait son arrivée au collège de Vannes, à quatorze ans... La première récréation, cette fille brune, ses tresses nouées sous le nez en moustaches, et qui l'entourait de sauts. Elle traînait à sa suite tout un essaim de gamines friandes de persécutions. Elle avait demandé à Claude, de cette voix un peu rauque qu'elle venait de retrouver dans le téléphone :

- Comment t'appelles-tu ?

- Claude La Noue.

- La Noue ? Tu es bien sûre ?

Elle avait eu, elle, la candeur de répondre en souriant :

- Mais oui !

- Tu es bien sûre ? Ce n'est pas La Nouille ?

L'éclat de rire de toutes, à ce trait d'esprit, coupé net par la grande gifle abattue sur la joue de l'insolente, qui, après un moment de stupeur, avait chargé, mais en garçon, à coups de poing. Claude avait encaissé, dents serrées, en rompant à peine, mais quand l'autre avait demandé :

- Tu as compris ? Ce serait plus cher une autre fois, tu sais !

Une seconde gifle, plus décidée que la première, lui avait répondu. Immobile, toute blême, la fille avait longuement regardé Claude, puis elle avait menacé, à mi-voix, lentement :

- Toi, alors !...

Mais une surveillante arrivait à pas rapides. Elle n'avait vu que la gifle ; pourtant, elle ne prenait pas le change.

-Eveline Flossac, vous étiez encore en train de tourmenter la nouvelle, n'est-ce pas ?

La fille, dédaigneuse, attendait les pleurnicheries de l'autre, son mouchardage, l'annonce d'un rapport à la directrice. Mais "la nouvelle" avait déclaré d'une voix tranquille, avec un naturel parfait :

- Non, Mademoiselle, on jouait...

La surveillante, un instant déconcertée, s'était reprise et avait décoché à Claude un regard noir.

- Il faudra renoncer à ce genre de jeux ici, n'est-ce pas ? Et à ce genre de réponse...

Elle avait à peine tourné le dos que Claude s'était senti saisir la main. C'était le début d'une amitié exclusive, tyrannique, souvent orageuse, souvent efficace, mais toujours compromettante. Eveline Flossac était une récidiviste du Conseil de Discipline.
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Pour la plupart, ce ne sont même pas des professionnelles. Des employées, des vendeuses qui viennent pêcher ici quelques dollars d'appoint. Un camarade a gratté l'i de toilet, sur la porte du lavabo : ladies to let, dames à louer. Exactement. (chap. 2)
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Il rappela que le remorqueur de haute mer "Centaure" les reprendrait le lendemain matin à sept heures. Chaque fois que c'était possible, il mouillait ainsi en rade. Il fallait une bonne nuit pour rincer à fond toute la viande saoule du bord. (chap. 2)
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Les hommes se classent par l'idée qu'ils se font des femmes.[...] J'ai été tenté, plus d'une fois, de me livrer à la première venue, afin d'en finir, de me guérir comme d'une maladie de ce respect de la femme que je n'arrivais pas à tuer.
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C'était pas méchant !...Je ne faisais de mal à personne !... Eh bien ! ça a déchaîné toutes les femmes de l'établissement : elles avaient compris avant moi tout ce que je contenais pour leur plaisir, toutes les possibilités de volupté que ça offrait, mon truc, comme elle disaient ! (chap. 7)
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-Mesdames, messieurs, le professeur Fabiano, que vous rappelez avec tant d'enthousiasme, reviendra sur cette scène demain, à la même heure. Mais, après la révélation qu'il vient de nous donner, c'est avec une profonde émotion que je salue en lui le maître du rêve !...
C'est ainsi que je fus baptisé, mon vieux. (chap. 7)
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Vous savez bien que quand des hommes ont fait une saloperie, ce sont toujours des femmes qui en profitent ! (chap. 6)
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Roger Vercel
Il n'était point, comme ceux des canots de sauvetage, un sauveteur désintéressé. Ce qu'il voulait avant tout, c'était ramener à quai le bateau malade afin de pouvoir lui présenter la note. (chap.3)
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"Cinq doigts pour sa vie, cinq doigts pour l'armateur" : l'ancienne loi des voiliers où les hommes, à trente mètres de haut, avec 90° de ballant, s'accrochaient d'une main à l'étrier, pendant que l'autre étouffait la toile, l'ancienne loi de sauvegarde redevenait en vigueur. [...] plus de la moitié d'entre eux avaient le mal de mer, de pauvres gueules creuses, jaunes sous la crasse. Mais, sans s'arrêter de tordre ou de scier, ils vomissaient sur leurs mains. (chap.3)
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Il se souvenait de ce [bateau] Danois qui dérivait sur Molène, après avoir cassé ses deux ancres, et qui, au bout de deux heures de silence, cinq minutes avant d'aller s'ouvrir sur Pen-Ven-Guen, avait télégraphié : "Vous ne pouvez plus rien pour nous. Inutile de continuer votre route. Merci beaucoup. Adieu !" (chap.2)
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C'était un brise-glace russe, une épave plus rouillée qu'un vieux fourneau et qui avait pourri tranquillement, pendant des années, dans l'eau tiède des bassins. Des échelles rongées pendaient des passerelles, en pointes de herse. Des pustules d'acier s'écaillaient sous le doigt tout le long de la coque et le pied enfonçait dans le bois spongieux du pont. [...] "Avec deux millions, vous en ferez le plus beau remorqueur d'Europe !" (chap.2)
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Nous nous taisions. La guerre était encore si proche que nous retrouvions brusquement, comme si elle fût restée attachée au terrain, notre âme des soirs de relève, cette angoisse active qui tenait tous les sens à l’affût, cette impression d’une présence hostile et cachée qui guettait notre montée. Le silence, même, inquiétait sourdement, comme jadis, la quiétude trompeuse des secteurs. Ont eût entendu sans grande surprise, l’espace brusquement gronder.
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- Alors, c'est vrai, ce qu'on dit ?
- Si c'est vrai ! On la trouve partout, avec n'importe qui ! Pas plus tard que tout à l'heure, Calvez se vantait de lui avoir fait plus d'une fois voir les feuilles à l'envers dans les bois de Sainte-Anne.

(chapitre 2)
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