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Critiques de Sabyl Ghoussoub (182)
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Beyrouth-sur-Seine

Ghoussoub , auteur franco-libanais, nous revient dans son dernier livre avec un récit lumineux et drôle, prix Goncourt des Lycéens 2022. C'est l'histoire de ses parents couplée de sa propre quête d'identité. Les parents quittent le Liban pour Paris en septembre 1975 uniquement pour deux ans, le père voulant passer son doctorat de théâtre et de langue arabe à la Sorbonne. Mais c'est la veille de la guerre au Liban, ils n'y retourneront jamais y vivre. Ainsi l'auteur naîtra à Paris , mais ce qu'il en dit est touchant « Je suis né à Beyrouth dans une rue à Paris. »



J'avais déjà bien aimé son livre « Beyrouth entre parenthèses », et je retrouve ici de même un récit fin, brillant, léger, émouvant, pour un sujet complexe qui incorpore l'exil, le déracinement et ce qui en suit, la quête d'identité plurielle.

Le père est un journaliste couplé d'un poète, qui aime les cafés miteux où il aime siroter un café parmi «  les petits gens que nous sommes et que nous resterons en France » . Comme son père c'est dans cet environnement qu'il se sentira lui aussi le plus à l'aise. le tragique de l'exil disparaît souvent sous l'humour qui finalement reste l'élément essentiel pour bien vivre, vu les aléas de la vie. Il n'y lésine même pas quand il dresse aussi les portraits de ses parents, « l'espion et la prostitué » ou sa soeur , miss «  All Eyes on Me » 😊! Je dois avouer c'est spécial, mais vu qu'il y a aucun malice c'est plutôt avec tendresse qu'il assouplie l'honnêteté qui peut s'avérer crue 😊!

Bref une belle histoire personnelle, une histoire libanaise, simplement libanaise, même si une bonne partie s'est déroulée en France ! Je pense personnellement dans ce monde multiculturel où l'immigration si contestée , la plupart du temps forcée, est devenu la bête noire des sociétés occidentales , ce livre nous tend l'envers du miroir de l'exil, l'image d'une personne ou des personnes qui viennent d'ailleurs mais qui conserveront éternellement la nostalgie de leurs origines , « Mes références viennent d'ailleurs et beaucoup du monde arabe, pourtant j'ai grandi en France. J'ai alors l'impression bancale d'avoir grandi ailleurs tout en ayant grandi ici. »

Beaucoup aimé !





« « Until the philosophy / Which hold one race superior and another / Inferior / Is finally / And permanently / Discredited / And abandoned / Everywhere is war / Me say war »

( Bob Marley)
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Beyrouth-sur-Seine

« Mes parents voulaient que je naisse à Beyrouth. (…) Ils pensaient que la guerre se terminerait et qu’ils rentreraient enfin. Ils ne voulaient pas que je naisse à Paris, alors pendant toute leur vie ils ont recréé sans s’en apercevoir Beyrouth à la maison. Je suis né à Beyrouth dans une rue de Paris. »





Lorsqu’ils sont arrivés à Paris en 1975, au moment où la guerre éclatait au Liban, les parents de Sabyl Ghoussoub ne pensaient y rester que deux ans, le temps d’y achever leurs études. Plus d’un demi-siècle plus tard, leur fils, finalement né en France et désormais trentenaire, entreprend de les interroger sur leur histoire, manière pour lui, incidemment, de réfléchir à son propre rapport au Liban.





C’est avec une émotion palpable qu’à partir de leur évocation, dans le désordre et souvent dans la contradiction, de leurs souvenirs les plus prégnants, l’auteur se fait une idée de ce qu’ont pu vivre ses parents, depuis leur départ du Liban pour ce qu’ils ignoraient alors un exil définitif. Peu à peu, pour nous comme en autant d’émouvantes séquences de vieux films Super 8, pour eux en une suite de bouffées d’émotions venant crever la surface de leur mémoire, émerge du passé leur réalité, passée au crible de leurs ressentis et de leur subjectivité.





De leur affolement et de leur désarroi de se voir toujours plus indéfiniment séparés de proches restés au coeur d’une tourmente si complexe que plus personne ne finit par plus rien y comprendre, à leur impossibilité de prendre parti quand ceux qu’ils aiment se transforment parfois de victimes en bourreaux, en passant par leur horreur quand la guerre au Liban les pourchasse jusque sur le sol français au travers d’une série d’attentats qui les frôlent d’ailleurs à plusieurs reprises, se met ainsi en place une histoire dont l’auteur s’approprie l’héritage, en une sorte de mythologie personnelle qui lui fera déclarer lors d’une interview : « Cette autofiction m’a permis de me construire une mémoire écrite, qui est en soi totalement fausse et qui est l’histoire que je me raconte. C’est mon Liban à moi. »





Peinture vibrante et fantasmée d’un Liban toujours plus martyrisé que sa diaspora recrée dans le quotidien de foyers reconstruits dans l’exil comme autant de minuscules parcelles détachées de la terre-mère et au travers de vastes communautés en ligne, ce livre est aussi pour l’auteur un cheminement très personnel, une réflexion existentielle sur ses origines, son identité et son appartenance. On le referme le coeur serré pour tous les Libanais dont l’actualité ne finit plus de prolonger le calvaire, et plein d’affection pour ses si humains personnages.


Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Beyrouth entre parenthèses

Il est libanais maronite, est né et a toujours vécu à Paris.

Il a mis Beyrouth entre parenthèses pour aller en Israël.



Il voulait passer de main en main à sa guise, adopter ces parents, ce pays ou un autre selon les périodes.

On lui a imposé : une famille, une origine, une histoire, une terre à porter, à représenter.



Chez lui, petit on lui a appris qu'il faut libérer la Palestine et garder la famille soudée, coûte que coûte, quitte à mentir ou à s'évanouir. 

Chez lui, photographe, pas un visage d'un membre de sa famille accroché sur les murs de son appartement parisien, que des photos d'inconnus dans des cadres...comme s'il cherchait à constituer une autre famille, une différente ascendance.



Arrivé à l'aéroport Ben Gourion, soumis à un hypothétique interrogatoire ( car le vrai est beaucoup plus lourd ) des services secrets , il déballe avec un ton décalé, beaucoup d'humour et un zeste de provocation, ses réflexions sur la question d'identité, source de guerres et conflits absurdes et sans fin, et surtout celle de son propre conflit intérieur. " Me perdre pour mieux me retrouver" confesse-t-il.



C'est fin, brillant et léger pour un sujet complexe et sans issu, "Rien que votre collègue qui m'a interrogé dans l'autre pièce tout à l'heure, celui qui a pris mon nom, mon prénom, le prénom de mes parents et qui m'a demandé si j'étais musulman, il ressemble comme deux gouttes d'eau à l'un de mes cousins, celui qui vend des falafels à Beyrouth. Il ne lui manquait plus que le bonnet et le tablier."

Un livre très court que je conseille vivement.



"Les racines sont utiles pour deux choses- les fuir et les retrouver"

Samuel Brussell





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Beyrouth-sur-Seine

Quand l’idée d’écrire ce récit a germé, Sabyl Ghoussoub a voulu enregistrer son père. Pas facile !

« Il n’arrête pas de jouer avec son micro. L’idée d’être enregistré lui déplait mais pour son fils, il est prêt à faire un effort »

C’est un regard bienveillant et amusé que l’auteur pose sur ses parents, Kaïssar et Hanane. Installés à Paris, ils espèrent toujours revenir à Beyrouth mais se heurtent à l’impossibilité d’un retour dans un Liban déchiré. Alors, en attendant ce jour qui ne viendra jamais, ils recréaient à leur manière le Liban et sa culture dans leur appartement étroit.

Malgré l’éloignement et les deuils, la vie reste gaie et la famille éparpillée est l’ancrage qui remplace un pays disparu.

Il y a les oncles, Elias et Habib et puis Amine pas forcément dans le même camp mais tous ont toujours le sens de la famille.

A travers ce récit de sa famille, l’auteur raconte aussi l’exil et la perte d’un pays déchiré par la guerre civile et des luttes fratricides. Pourtant, dans les albums de famille, ce sont les moments heureux qu’on veut conserver.

L’histoire du pays de ses parents, sa violence, il la découvre à travers des reportages, des témoignages, comme le massacre de Sabra et Chatila et il se pose des questions. Se pourrait-il qu’un membre de la famille y ait participé ?

Sabyl Ghoussoub, « né à Beyrouth dans une rue à Paris «, a tenté de retourner au Liban pour s’y installer. En vain. Il sera toujours écartelé entre deux pays, deux cultures. Il nous explique les oppositions entre clans, les personnalités politiques, les assassinats et la corruption. On se perd un peu parmi tous ces personnages et ces dates d’évènements qui ponctuent l’histoire du Liban. Je me suis embrouillée dans cette géopolitique du Liban.

Le style de l’auteur est direct et frise parfois la candeur comme s’il redevenait petit garçon en racontant ses parents.

C’est un sujet grave que l’auteur a choisi de traiter avec humour et dérision mais il n’est pas arrivé à maintenir mon intérêt jusqu’à la dernière page et je me suis ennuyée dans ce récit que j’ai trouvé parfois superficiel.

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Beyrouth-sur-Seine

Paris 2020, à l'âge de 31 ans , Sabyl ne connaît rien du passé de ses parents, de leur arrivée à paris, de leur guerre du Liban, de la souffrance qu'a été l'exil pour eux. Il ne sait même pas les métiers qu'ils ont exercés. Il a le projet de les interroger afin d'écrire un livre inspiré de leur vie.

À partir de leurs témoignages, de cartes postales, de photos, de lettres, de notes, de poèmes ou d'articles rédigés par son père, Sabyl Ghoussoub nous raconte l'histoire d'un exil, celui de ses parents et à travers eux ce beau pays aux gens charmants et généreux, un pays ravagé par les guerres, les attentats, un peuple éparpillés aux quatre coins du monde, triste de voir leur pays se décomposer peu à peu. Plus qu'un roman, un témoignage sur l'immigration, sur le retour impossible. Un travail de mémoire.

J'ai eu de la difficulté à lire ce récit, le sujet est intéressant mais il manque l'émotion, le souffle romanesque. Les années se mêlent et s'entremêlent, il n'y a aucune chronologie, l'ensemble m'a semblé un peu brouillon.



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Beyrouth-sur-Seine

En découvrant ce livre , je l'avoue , j'ai immédiatement pensé au sublime " Mayrig " de Verneuil et je me suis précipité sans aucune hésitation . Une famille libanaise réfugiée en France allait sûrement m'émouvoir et m'aider à comprendre , une fois de plus , cette terrible épreuve de l'émigration dans un pays qui n'est pas le sien , cette atroce douleur de quitter les siens , la douceur perdue d'une vie ancestrale , la famille , les beautés , les odeurs , la chaleur unique d'un pays perdu pour se réfugier dans un univers gris , dans l'indifférence d'une capitale comme Paris , ville lumière dont le rayonnement est devenu bien terne au point même qu' il existe désormais un phénomène connu sous le nom de " syndrome de Paris " . Un livre salué par le Goncourt des lycéens , public averti et grandement crédible qui m'a touché...mais pas coulé . Pour illustrer mon avis , c'est cet extrait relevé page 185 qui a ouvert la voie à ma réflexion . Je cite:.".La vie de mes parents , c'est comme la guerre au Liban . Plus je m'y plonge , moins j'y comprends quelque chose . J'arrive à situer les protagonistes , quelques moments marquants me restent , puis , ensuite , je me perds . Trop de dates , d'évènements , de trous , de silences , de contradictions .Je me demande si cela m'intéresse vraiment d'y comprendre quelque chose . Finalement , à quoi bon ? Est - ce que cela m'apporterait de tout savoir , tout comprendre , tout analyser ? Rien , je crois fondamentalement que je n'y gagnerais rien , à la limite , je perdrais mon temps ."

Aveu terrible , non ? . Les parents ne veulent rien dire de leur calvaire d'avoir quitté un pays adoré , et c'est trés respectable . Alors pourquoi vouloir absolument ècrire un livre sur leurs non - dits ? Je ne suis pas du tout convaincu sur une démarche qui accumule des dates , des évènements que l'auteur reconnaît ne pas comprendre , des sentiments bien timides ...J'avoue avoir " pataugé ".

il conviendrait , dans un tel contexte , de " se laisser aller " , d'assumer , de faire participer les lecteurs .Je n'ai pas laché ce roman mais j'ai attendu vainement cette étincelle qui m'aurait touché , fait vibrer , révolté . C'est bien écrit , facile à lire mais jamais , non jamais je n'ai senti la moindre émotion . J'en suis vraiment désolé .Je n'ai vraiment pas compris - les parents non plus , apparemment - la nécessité de raconter ce qui a été un drame , de façon aussi banale .

L'histoire du Liban me reste toujours aussi obscure ( je ne suis qu'un lecteur ) mais si ceux qui l'ont vécue n'en savent pas plus que moi ...

Allez , les amis et amies , à demain pour un prochain rendez - vous .Si vous voulez bien .Moi , je serai là avec ....Bon , on verra bien ceux qui restent . Bonne nuit .

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Beyrouth-sur-Seine

C'est avec tendresse et drôlerie que Sabyl Ghoussoub nous fait partager avec « Beyrouth-sur-Seine » un récit familial, celui des origines et de la mémoire, mais aussi celui des déracinés, des exilés : la diaspora libanaise.



Les parents de Sabyl Ghoussoub sont des Libanais qui se sont installés en France en 1975. Kaïssar, le père, est un intellectuel amoureux des livres, à la fois journaliste, écrivain et metteur en scène. Lorsqu'il part à Paris pour ses études avec sa jeune femme Hanane, Kaïssar compte bien revenir vivre au Liban deux ans plus tard. Mais c'était sans compter sur la guerre qui allait durer 15 ans… En 2020, Sabyl Ghoussoub veut recueillir l'histoire de ses parents et en faire un livre. A coup de souvenirs, d'anecdotes, de photographies personnelles et d'archives, l'auteur retrace une vie, celle de ses parents et de sa nombreuse famille, et nous donne à voir un pan de l'histoire du Liban.



Sabyl Ghoussoub n'est pas né au Liban mais il voit en ses parents tout ce qu'il n'en a pas connu. L'auteur, obsédé par ce pays aux multiples contrastes, l'aime autant qu'il le déteste. Mêlant l'histoire intime à celle plus officielle, l'auteur rend hommage à ses parents et à sa famille restée au Liban tout en tentant de comprendre un pays secoué par des conflits internes incessants et des pressions extérieures des pays frontaliers. Tout comme l'auteur, le lecteur ne viendra pas à bout de l'histoire compliquée et violente du Liban. Mais là n'est pas l'enjeu. Les anecdotes et les souvenirs sont tout autant de récits qui nous donnent à voir d'un côté l'histoire des parents de l'auteur, et de l'autre sa perception du Liban. Les uns et l'autre se fondent ensemble, Paris devenant le Liban, le Liban devenant sa famille de là-bas.

Très émouvant, drôle, incisif, « Beyrouth-sur-Seine » est pour le lecteur une formidable plongée dans un pays en guerre et dans une famille exilée où l'application Whatsapp prend une toute autre dimension à nos yeux après avoir lu ce récit.. C'est surtout une incroyable déclaration d'amour de l'auteur à ses parents et également celle, malgré lui, à une ville martyre, Beyrouth.



Une très belle découverte.
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Beyrouth-sur-Seine

Est-ce qu’on juge un bouquin réussi à l’aune de ce qu’on en attendait ? Heureusement non, in fine, mais cette simple question montre à quel point on définit ses lectures avant même de les entamer, on y cherche ce qu’on a déjà prévu d’y trouver. De Beyrouth-sur-Seine, j’attendais le portrait plein d’humour d’une famille d’origine libanaise qui aurait mêlé son identité à celle du pays qui était désormais aussi le sien. Un peu à la manière élégante et drôle de Chadia Chaïbi-Loueslati dans Famille nombreuse. Il y aurait eu des moments touchants, d’autres difficiles (la guerre au Liban, je n’en comprenais à peu près rien mais je sais que ça fait mal), des scènes de bouffe joyeusement colorées par l’huile d’olive, les épices et les noms enlevés de mets inconnus, on aurait mieux compris ce conflit interminable au Liban, vécu de l’intérieur ses conséquences et on se serait alors trouvé autorisé à éprouver des émotions qu’auraient légitimé les personnages de ce roman. A la fin, on se serait trouvé rassénéré de voir tant d’intelligence, d’humour et de sensibilité nous aider à constituer un avenir prometteur pour ce vieux pays parfois si dégueulasse qu’est la France.



Bon, ça, c’était le script que je m’étais fait.

Dans Beyrouth-sur-Seine, il y a un peu de cela. Le titre, déjà, contient l’amusante promesse d’un monde libanais patiemment recréé à Paris. Avec tout ce que cela induit d’impossibilités - le soleil de Beyrouth à Paris, gageure -, de bricolages émouvants avec la mémoire, les objets, les photos. On y trouve du sumac aussi, un peu d’origan, une mère excessive, un père drôle parce que volcanique, de grands élans, et la guerre, la guerre, la guerre.



Sabyl Ghoussoub entreprend ainsi de nous raconter la vie de ses parents depuis leur arrivée en France dans les années 70. L’incipit pose l’ambiance : « « Tu veux que je te raconte ma vie en arabe ou en français ? » m’a demandé mon père et il a ajouté « Tu comprends l’arabe ? » alors qu’il a été mon professeur d’arabe pendant trois longues années où je vivais chacune de ses leçons comme un calvaire sans fin. Je venais de brancher un micro sur sa chemise de pyjama qu’il traîne depuis mes cinq ans. »



Parents impossibles, contradictoires qui prennent à rebours l’intention du narrateur, se défilent et préfèrent partir sur leurs grands chevaux à la recherche de leurs thèmes favoris : l’importance de la famille pour sa mère, les livres pour son père. Les chapitres sont courts. Heureusement. Ils ne suivent rien de chronologique. Ils ne permettent pas non plus une progression logique dans les événements. Ils confrontent le plus souvent les parents de Sabyl Ghoussoub avec les faits de guerre qui se déroulent ces années là au Liban. Ou les attentats à la bombe qui endeuillent les rues de Paris dans les années 80. Ils racontent un peu aussi la sœur de Sabyl Ghoussoub qui surfe et semble étanche à toute atteinte de nostalgie libanaise, sa vie à lui, Sabyl aussi. Les quelques années où il a tenté de vivre au Liban, la manière dont il a dû en revenir.



Empêtrée dans ce livre qui plombait tout espoir, à force de bombes, d’attentats terroristes au Liban et en France, répliques insupportables d’un conflit déporté, j’ai failli laisser tomber. C’est là qu’est arrivé ce passage : « Mon père, lui, je ne comprends pas ce qu’il fait durant ces années. Il reste vague. La vie de mes parents, c’est comme la guerre du Liban. Plus je m’y plonge, moins j’y comprends quelque chose. J’arrive à situer les protagonistes, quelques moments marquants me restent, puis, ensuite je perds. Trop de dates, d’événements, de trous, de silences, de contradictions. Je me demande si cela m’intéresse vraiment d’y comprendre quelque chose. Finalement, à quoi bon ? » Ah, ce soulagement à savoir qu’on était deux à être paumés !



Ceci posé, une fois que l’on admet tout ce qu’on ne trouvera pas dans ce livre, on peut être sensible à tout ce qui s’y trouve. L’hommage plein d’amour d’un homme pour ses parents, la manière dont ils traversent cette existence qu’ils n’ont pas choisi. « A côté de ces hommes qui donnent constamment leur avis sur Facebook ou dans des blogs, le silence de mon père est immense. Il n’est sur aucun des réseaux sociaux. Il n’a même pas de smartphone. Mon père n’est d’aucun milieu, d’aucun monde. Mon père est un homme seul, dans ce que la solitude a de plus grand. Je l’admire mon père. Un jour, je deviendrai muet comme lui. » Le constat à peine amer que, pour beaucoup de Français, Libanais, Irakiens, Iraniens, c’est du pareil au même, des bougnouls. L’apaisement peut-être de comprendre que le Liban qu’aime Sabyl Ghoussoub, c’est celui qui vit, à Paris, dans l’immeuble de son enfance. Que le Liban, ce sont ses parents.

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Le nez juif

Le livre date de 2018 et pourtant, j'ai l'impression qu'il est d'un autre siècle. Aleph, le narrateur, qui a bien des traits communs avec l'auteur, est d'origine libanaise. Ses parents sont arrivés en France 13 ans avant sa naissance, fuyant un pays ravagé par la guerre civile. Aleph, comme le titre du roman l'indique, a un nez qui fait que sa mère le trouve laid et la plupart de ses interlocuteurs le croient juif.



Prenant ce motif avec une dérision et un humour que l'on pourrait identifier aux mêmes origines que son nez, Aleph égrène les situations durant lesquelles il a été assigné à ce qu'il n'était pas. Elève de l'ultraconservateur collège Stanislas (le même qui a récemment défrayé la chronique au passage éphémère d'une calamiteuse ministre), il subit l'affront improbable ou à tout le moins illégitime de tags antisémites. Il devient alors résolument propalestinien. Dans les soirées parisiennes, il est fêté, connu des physionomistes et des gens de la nuit parce que juif. Juif il se fait donc. Plus tard, ses incursions dans une vie professionnelle d'artiste, de journaliste seront à l'avenant, dans un incessant jeu de masques. « Ce qui m'intéressait, c'était plaire. On me trouvait tellement moche à la maison qu'une fois le pied dehors, c'était ma guerre : je voulais plaire à tout le monde. »



Antijuif pour séduire une petite copine qui ne « les » supporte pas, en tout cas dans son lit. Propalestinien à se fâcher avec ses parents traumatisés par les souvenirs de guerre. Juif à nouveau puisqu'arabe, ça ne fait pas recette, jusqu'à vouloir offrir ses services au Mossad. Libanais, bien sûr même s'il n'y comprend rien. Français jamais complètement. Forcément avec un nez pareil. « Toi le Français, tu ne peux pas comprendre » lui dit son oncle après un échec professionnel alors qu'il essayait de réaliser un film libanais ayant à son générique des noms juifs. Inacceptable pour des Libanais. D'où peut-on être pour avoir une idée pareille ? Ce qui vaut à sa grand-mère, chez qui il est domicilié, la visite d'une voiture de la sureté générale et des menaces de représailles très claires.



En fait, peu importe ce qu'il fait « organiser des fêtes, créer des marques, vendre des tee-shirts, tout était bon à attirer le regard des filles. (…) Chaque semaine je couchais avec une fille différente. Des blondes, des brunes et des rousses. Des blacks, des blanches et des arabettes. » Vous voyez ce que je veux dire à propos d'un discours qui, même au nom d'un humour plein d'autodérision, crisse bien plus sous les dents en 2024 qu'il ne le faisait sans doute en 2018 ? Avec quelle insouciante apparente le narrateur se campe alternativement dans une foule d'identités ! Et comme nous nous sommes vite crispés sur de nouvelles susceptibilités identitaires (religieuses, ethniques, féministes...) et avons rapidement adhéré à de nouveaux tabous !



La vie d'Aleph se poursuit. Beyrouth, New-York, Paris, des rencontres, des opportunités et, pour les saisir, de nouvelles affiliations. Y passent toutes les identités en lien avec ce que son visage peut accrocher de représentations. Avec une conviction, une mauvaise foi et un opportunisme bien trop outranciers pour être pleinement assumé. Ce qui est drôle, intelligent, montre bien les louvoiements auxquels invitent les assignations, la manière dont on se joue des regards pré-pensés et dont on en fait la matière pour penser, avec, contre, ce que l'on est. Mais qui semble presqu'impossible à écrire dans un monde qui, en quelques années, est devenu bien plus outré, susceptible à propos des usurpations, du droit à se dire tel ou tel en fonction de ses origines réelles.



Lui, le narrateur, les origines réelles, ce n'est pas qu'il s'en fiche, c'est qu'elles sont loin d'être claires. L'histoire du Liban dans lequel il n'a jamais vécu mais qui le constitue est d'une complexité abyssale. Même au sein de sa famille, il s'y perd et l'oncle qu'il croyait héroïquement propalestinien laïc est bien plus sombrement mêlé à des histoires peu glorieuses et corrompues. Son père a résolu la question en refusant tout endoctrinement ce qui semble défendable mais amène le narrateur à se sentir renié par lui dès qu'il cherche, dans une succession paradoxale et contradictoire de postures, c'est vrai, à se définir d'un camp ou d'un autre.



Renié ou au moins incompris de ses parents dont il fuit la vie d'expatriés, jamais pris pour ce qu'il est, revendiquant une identité opportune pour parvenir à une position qu'il ne peut assumer, la vie d'Aleph est de ces impossibles clivages, de cette multiplicité foisonnante et schizophrène qui dit mieux que tout la clôture impossible à un seul. En ce sens, et quoi qu'il en dise, son histoire m'a paru très proche de celle d'un certain Ajar tel que le voit Delphine Horvilleur.



Et si la judaïcité, au sens universel d'un rapport à soi et à l'identité, n'était pas seulement une histoire de nez ? Mais plutôt de manque et de trop plein de propositions subtilement inadéquates. Pourvu qu'on puisse encore s'autoriser à avoir de telles pensées, à les écrire à la manière de ce drôle de petit roman d'un grinçant légèrement paumé et que la rencontre à soi et aux autres reste un endroit mobile fait de découvertes et de multiplicités ouvertes !

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Beyrouth-sur-Seine

Sabyl Ghoussoub a décidé de filmer et d’interroger ses parents, venus du Liban et réfugiés en France en 1975. C’est à travers leurs réponses, plus ou moins contraintes qu’il raconte la guerre du Liban. Le narrateur raconte donc ce que ses parents lui ont raconté alors qu’ils étaient en France. Moui… Et le recours à Wikipédia n’est pas d’une grande aide, tant les rebondissements, retournements des uns et des autres, sans oublier les assassinats n’ont cessé de rebattre les cartes.

Beyrouth-sur-Seine donne l’impression d’être un livre écrit pour l’auteur et non pour ses lecteurs :

« J’ai besoin de l’écrire cette guerre, de la raconter, de comprendre ce que mes parents ont ressenti et vécu. »

Il n’y a aucun mal à ça, dommage néanmoins d’oublier le lecteur qui a les mêmes attentes. Nous aussi, nous aurions besoin de comprendre, et un peu plus, mais ce livre est absent d’émotion. C’est pourtant un hommage vibrant d’amour à ses parents.

Sabyl Ghoussoub explique qu’il a lui-même vécu au Liban, mais il n’en parle pas si ce n’est pour écrire qu’il n’a pas envie d’y retourner.

L’auteur ne suit pas l’ordre chronologique (ce que je déteste) et compte tenu de la complexité de cette guerre (lui-même a du mal à s’y retrouver quand il se renseigne), cela n’aide pas le lecteur.

Je n’ai pas compris. Je n’ai pas compris qui était son père (un peu mieux qui était sa mère) et encore moins pourquoi le narrateur rêve de vivre en Israël.


Lien : https://dequoilire.com/beyro..
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Beyrouth-sur-Seine

Biographie de l'auteur partagé entre deux pays : le Liban et la France, deux religions, deux langues, deux façons de vivre. Ses parents ne devaient rester que deux ans en France, le temps pour son père de passer son doctorat à la Sorbonne. Mais la guerre est arrivée au Liban... Donc ils ont recréé à Paris leur petit Beyrouth. Vous me direz un récit de plus sur le déracinement ? Bien sûr on y croise le racisme, l'intégration, etc. Seulement l'auteur le décrit de façon tendre, sincère et avec beaucoup d'humour.

Prix Goncourt des lycéens 2022.
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Beyrouth-sur-Seine

J'ai l'impression de bien connaître le Liban. Parce que j'y suis allé plusieurs fois, parce que j'ai lu plein de livre de M. Maalouf, parce que je cuisine le houmous, le baba ganoush, les falafels etc...

Sérieusement, cette autobiographie a le mérite de nous plonger dans la suite des crises qui ont secoué ce petit pays ayant le malheur d'être situé dans ce proche orient épicentre des tensions que l'on connaît.

Mais de manière superficielle, sans vraiment entrer dans les détails, grâce aux yeux d'un témoin indirect puisque né à Paris de parents libanais et vivant entre France et Liban...

Il y de la dérision, de l’autodérision dans la narration de l’aventure familiale. De la tendresse aussi lorsqu’il évoque ses parents. De la tristesse lorsqu’il se moque de l’intégralité de la classe politique Libanaise, tous bords confondus, de ces ploutocrates qui ont conduit le pays au chaos d’aujourd’hui, bien aidés par ses voisins problématiques.

Le ton est léger et on se replonge dans l’histoire de cette région et des ramifications politiques et terroristes s’étendant jusqu’en France, jusqu’à Paris, jusqu’à la Seine... On n’y trouvera pas de grandes explications géopolitiques, ce n’est pas l’objet du livre, mais le rappel de tous les attentats sera l’occasion de prendre conscience qu’on ne peut véritablement jamais être sûr de qui a fait quoi quand le nombre de protagonistes étatiques susceptibles d’agir est si grand. Et du coup, cela invite à la réflexion, à la modestie dans l’expression de nos certitudes.

Pour apprécier pleinement ce livre, il vaut mieux connaître un peu ces épisodes mais on peut aussi se contenter du regard désabusé et bienveillant porté par l’auteur sur l’histoire de ses parents, sur la découverte d’une saga familiale d’immigrants comme il en existe tant.

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Beyrouth-sur-Seine

Je ne lis que très rarement des biographies, surtout contemporaines ! Si j’en lis une, en général, la personne n’est plus de ce monde… Enfin, vous comprenez mon idée, je pense. Pourtant , Beyrouth-sur-Seine m’a tout de suite donné envie de plonger dans la vie de Sabyl Ghoussoub, enfin surtout celle de ses parents !



Et puis franchement, ce titre est tellement bien trouvé, évocateur, que je ne pouvais pas passer à côté.



Sabyl Ghoussoub donne la parole à ses parents, à ces hommes et ces femmes, tiraillés entre deux pays. L’exil au péril de sa vie. Un pied en France, un pied dans leur pays. Comment se sentir épanoui, heureux, lorsque la moitié de son cœur est ailleurs.



L’auteur, nous fait découvrir à la fois ses parents, leur humilité, leurs peurs, mais aussi tout un pan historique que ce soit du Liban ou de la France sur plusieurs décennies. On apprend, beaucoup de choses sur la politique qu’elle soit libanaise, ou française et j’ai trouvé ça excellent !



J’ai retrouvé quelques parallèles entre ce que j’ai pu vivre, ressentir mais aussi ce qui a parsemé ces années où la guerre au Liban touchait tout Paris. Le monde intellectuel était largement influencé par la culture libanaise avec une sensation de fusion entre le Liban et Paris.



L’auteur décortique les évènements libanais, et leur influence sur la capitale française tout en analysant les réactions, les peurs de ses parents, mais aussi, chose complètement folle, il met en exergue les attentats qui ont eu lieu à Paris, et les combats qui ont lieu au Liban. Les scènes de combats versus les images sanglantes des rues de Paris. C’est franchement fou et diablement bien construit, on est saisie d’effroi et en même temps c’est une illumination.



Un texte court, dense, triste et beau à la fois. Un hymne à ses parents, un livre plein d’amour, tout en retenu, car l’auteur n’omet rien. Il y parle de ses oncles, impliqués dans la politique libanaise, pas forcément dans le même camp qui font l’Histoire de son pays.



A travers ce récit, il raconte l’exil mais aussi le deuil d’un pays déchiré par la guerre et les luttes fratricides.



C’est un histoire d’une rare finesse, tout en profondeur, qui évoque à la fois des sujets politiques, géopolitiques, qui malgré leurs complexités, sont rendus accessibles par les descriptions et la vulgarisation que l’auteur apporte. Un livre nécessaire sur l’identité, l’exil, l’appartenance, l’enracinement.



« Mes références viennent d’ailleurs et beaucoup du monde arabe, pourtant j’ai grandi en France. J’ai alors l’impression bancale d’avoir grandi ailleurs tout en ayant grandi ici. »



A lire si vous voulez tenter de comprendre le déracinement. Si j’osais, je dirais que ce livre devrait faire partie des œuvres obligatoires du cursus scolaire au lycée.




Lien : https://julitlesmots.com/202..
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Beyrouth entre parenthèses

L’histoire, c’est quand les hommes violent la géographie. Parce que des deux côtés de la frontière entre le Liban et Israël, près de Metulla, les oliviers sont identiques, le miel a le même goût et quand les hommes veulent s’insulter ils disent « kess emek » (la chatte à ta mère). C’est d’ailleurs le nom d’un projet de l’auteur, photographe, qui s’était mis en tête de mêler les visages de deux familles, l’une arabe, l’autre juive, pour montrer que, bordel de merde, ils sont tous sémites.

De ces images, et de toutes les autres, il devra rendre compte à l’aéroport Ben Gourion, dans la salle d’interrogatoire, face à la douanière qui lui demande des centaines de fois qui sont ses ancêtres et d’où il vient.

« D’où je viens ? » demande Sabyl Ghoussoub. Elle est bien là, la question. Je suis suif, libanais, palestinien, chrétien maronite, j’habite cette terre de mes accents et de mes doutes, et je n’ai aucune envie de trancher, car vos haines ne me concernent pas. Ma grande aspiration c’est, selon l’expression populaire, devenir un mec qui boit de l’arak sous son arbre. Pas de vieilles rancunes, pas de politique. À l’image de cette nouvelle génération que le récit des guerres du passé a lassée.

Pour aimer ce livre, il faut avoir été touché par des films comme « Valse avec Bachir », « Incendies » ou plus récemment « l’insulte », bref ressentir le déchirement des Libanais, prisonniers de leurs compromis, et en éprouver une profonde empathie. J’ai eu la chance d’assister à un mariage chrétien maronite à Beyrouth, il y a quelques années. Messe catholique en arabe, arak sous les oliviers et musique de Bachar Mar-Khalifé. Inoubliable. Ce sont peut-être ces souvenirs que « Beyrouth entre parenthèses » a réveillés en moi.

Bilan : 🌹🌹

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Beyrouth-sur-Seine

"Personne en France ne connaît la différence entre un Arabe et un autre, on ne fait aucune différence entre un Jordanien, un Irakien et un Libanais, ils sont mis dans le même panier, même les Iraniens pour une majorité de Français sont des Arabes.



Beyrouth-sur-Seine 'est un livre très touchant sur l'exil et le déracinement d'un auteur qui, à travers l'histoire de ses parents, nous raconte celle du Liban (et tant de tueries) des années 70 à nos jours.



Très vite le Liban jadis prospère et envié sombre dans une ahurissante guerre civile, interminable et quasi incompréhensible aux yeux de l'extérieur.



Toute personne qui ne comprend pas pourquoi quelqu'un quitte son pays au péril de sa vie devrait lire ce livre Ce texte sonde avec une grand intelligence la question de l'identité, de l'appartenance à un pays, de l'exil.



J'ai aussi beaucoup aimé le regard de l'auteur sur ses parents à la fois très aimant, lucide et plein d'humour parfois.



Le livre est parsemé d allers-retours entre le passé et le présent quipeuvent dérouter mais qui rendent la construction singulière et profondément poignante



On 'apprécie comme très souvent le choix des lycéens pour leur Goncourt 2022



"Mes références viennent d'ailleurs et beaucoup du monde arabe, pourtant j'ai grandi en France. J'ai alors l'impression bancale d'avoir grandi ailleurs tout en ayant grandi ici."


Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Beyrouth-sur-Seine

Sabyl Ghoussoub se rend compte à la trentaine qu'il ne connaît finalement que très peu de choses de la vie de ses parents, libanais arrivés à Paris en 1975, et décide de les interroger pour reconstituer son histoire familiale. Mais l'entreprise s'avère difficile, entre des parents réticents à revenir sur le passé et qui choisissent de ne raconter que certaines anecdotes, et l'histoire d'un pays, le Liban, si embrouillée et entremêlée qu'elle semble incompréhensible à tout un chacun.



Beyrouth sur Seine est un roman que j'ai trouvé particulièrement attachant, l'auteur nous ouvrant dès les premières pages les portes de sa drôle de famille ni tout à fait libanaise ni devenue française, un Beyrouth-sur-Seine mélange de cultures et ancré dans l'exil. Le ton très particulier du récit mêlant humour et nostalgie, avec beaucoup de tendresse pour ses parents et en même temps beaucoup d'incompréhension pour cette histoire qui semble se refuser à lui, participe aussi à rendre cette lecture assez différente des nombreux romans déjà écrits sur le thème de l'immigration et de l'exil. L'auteur procède par petites touches, les chapitres courts se suivent sans forcément respecter l'ordre chronologique et on a plus affaire à un portrait impressionniste qu'à une histoire en bonne et due forme.



Petit à petit, sans doute comme Sabyl Ghoussoub lui-même, on finit par relier les différents fragments et mieux comprendre le destin de cette famille et de ce pays : le déchirement des parents, partis à Paris pour 2 ans et jamais rentrés au Liban, la guerre ayant éclaté peu après leur départ, les frères et proches séparés par la guerre, par l'obligation de choisir son camp, par cette atmosphère de terreur et de fièvre, les bons et les mauvais, les chrétiens et les musulmans, les pro-Palestine et les pro-Israël. Alors que ce roman paraît décousu il nous dit finalement beaucoup en filigrane de ce que fut la guerre du Liban, à quel point la déflagration fut profonde et n'en finit pas, comment elle contamina jusqu'à la France où la famille se sentait jusqu'ici en sécurité avec les attentats et la volonté de porter le conflit en Europe. L'auteur dit beaucoup également sur l'exil, la séparation, avec ces scènes si émouvantes de sa mère maintenant le lien avec son pays et sa famille par tous les moyens, conversations téléphoniques qui n'en finissent plus ou fil WhatsApp regroupant tous les proches et cousins.



Beyrouth-sur-Seine est une lecture que j'ai beaucoup appréciée et qui donne un éclairage très intéressant sur ces événements que l'on a suivi de loin sans forcément les comprendre, guerre au Liban, conflit israélo-palestinien ou attentats de la fin des années 80 à Paris. J'ai adoré son ton et sa construction très originaux, un vrai bon moment de lecture sur un sujet profond et un auteur qui sait tisser humour et nostalgie parfaitement. Cela me donne envie de découvrir les autres romans de Sabyl Ghoussoub et notamment Beyrouth entre parenthèses dont le sujet a l'air passionnant !
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Beyrouth-sur-Seine

L'auteur, né à Paris d'une famille libanaise interroge ses parents sur leur passé, leur histoire, leur rapport au Liban et à la France.

Il décide de les enregistrer, mais ça ne s'avère pas si facile que ça de les faire parler.

On ne sait d'ailleurs pas vraiment s'il poursuit l'expérience.

Et il raconte ses souvenirs, ceux de ses parents, tout ça un peu en vrac.

Il raconte aussi l'histoire du Liban, mais sans aucune chronologie.

Et on s'y perd comme il semble lui-même s'y perdre.

C'est tellement décousu que l'émotion ne passe pas.

Je n'ai pas très bien compris où il voulait en venir, ce qu'il souhaitait écrire exactement.

Si ce n'est l'ambiguïté des familles déracinées qui ne savent s'ils sont d'un pays ou de l'autre.

Quand en plus, on est né dans le pays d'adoption des parents, on sait encore moins ou donner de la tête et du cœur.

Même vivant à Paris, dans l'appartement de ses parents il se sent libanais.

« Le Liban, c'est mes parents »

« Je suis né à Beyrouth dans une rue de Paris »

Si tout n'est pas clair pour moi quant à l'objectif de ce livre, reste que c'est un bel hommage à ses parents et au Liban.
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Beyrouth-sur-Seine

L’auteur ,Sabyl, journaliste né à Paris de parents libanais va de France au Liban où il n’a vécu que 8 ans . Il se décide à interroger longuement ses parents sur leur exil (avec micro).

Ils quittent le Liban à la fin des années 70 et racontent longuement les guerres du Proche-Orient qui font partie de leur vie.Ils racontent cette guerre sans fin, par procuration, pour les autres, la guerre civile...en bref le pauvre Liban.

Ce texte bien écrit est teinté d’humour, Hanane la maman est une femme aux mille coeurs, elle s’informe et aide toute sa famille , cousins même les plus éloignés restés là-bas. Merci snapchat ! Elle a même subi une prise d’otages à Paris.

Il paraît que dans les années 80 , quarante journaux arabes étaient édités à Paris dont trente libanais, c’était Beyrouth sur Seine. Les attentats rue de Rennes et rue des Rosiers sont relatés aussi .

Sabyl est amoureux d’Alma beyrouthine également.

Cela fait un beau roman certes, d’ailleurs sur la première liste des Goncourt, mais je suis restée un peu éloignée du sujet alors que le billet de Sabine vibre au récit de cet exil que sa famille a elle-même vécu.

Merci aus Edts Stock pour cette lecture.

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Beyrouth-sur-Seine

Fragmenté, dispersé, éclaté, le récit de Sabyl Ghoussoub ne fait que refléter l'état du Liban après de trop nombreuses années de conflit.



L'auteur "né à Beyrouth dans une rue à Paris" a ressenti le besoin d'aller à la rencontre de ses origines et de réaliser un travail de mémoire. Projetant d'écrire un roman fortement inspiré de la vie de ses parents, il décide de les interroger à tour de rôle afin de reconstituer une histoire qu'il ne connaît pas et tenter de mieux comprendre un pays dans lequel il aurait pu naître.

Le récit débute sur un ton drôle et tendre à la fois et on s'attache rapidement à ces parents exilés qui ont du mal à parler de leurs souffrances et de ce retour impossible qu'ils ont pourtant tant espéré.

En dépit des anecdotes qu'il parvient à recueillir le travail de reconstitution s'avère insuffisant et l'auteur est alors contraint de trouver de nouvelles sources dans les articles écrits par son père, des photos de famille ou encore des archives.

Le récit commence alors à s'embrouiller, à se complexifier à l'image de ce conflit dans lequel même l'auteur a du mal à s'y retrouver.

Beyrouth apparaît comme une obsession, à la fois attraction et répulsion, amour gâté par de trop nombreuses blessures qui l'ont défigurée et rendue méconnaissable.



Ce roman très personnel, drôle et émouvant de tendresse, se laisse envahir progressivement par la gravité des sujets évoqués pour se terminer dans un beau vague à l'âme.

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Beyrouth-sur-Seine

Prix Goncourt des lycéens

C’ est souvent un très bon choix mais je reste mitigé sur ce livre de Sabyl Ghoussoub

Je comprends son intention de retracer l’ histoire de sa famille et de son pays à travers les témoignages de ses parents et à partir d’ autres sources disparates

Mon opinion est très subjective car il y’a très longtemps que je suis l’ histoire de ce pays qui s’est délité au fils du temps , des guerres, des occupations étrangères. En France, nous avons une vision idéalisée du Liban, beau pays de tolérance et de douceur de vivre. Tout cela , c’ était avant .Nostalgie d’un temps révolu.

Le Liban existe-t-il encore en 2023?

Sabyl Ghoussoub ne répond pas pas à cette question

Il reconnaît honnêtement que plus il avance dans sa recherche , moins il comprend l’histoire de son pays d’origine même s’il est né en France

Ses parents ne semblent plus se souvenir du long processus de désintégration du Liban

Pourtant , il y a des dates marquantes , une longue guerre, des bouleversements politiques, des assassinats, des massacres, des occupations étrangères. Il y a aussi le fait religieux , primordial

Sabyl Ghoussoub a du mal à suivre ce long processus historique et le récit est souvent décousu et parcellaire

Certes le sujet est complexe mais j’ aurais préféré une trame plus chronologique

Au bout du livre, j’ai l’impression de ne pas avoir appris grand chose

Il n’y a pas beaucoup d’émotion dans le livre

Je comprends que les lycéens aient plébiscité ce livre car il permet une première approche du Liban mais aussi du déracinement, de la double culture qui n’est pas un problème uniquement libanais

Je suis tout de même surpris de l’absence de réflexion sur le contexte géopolitique de la région qui est indissociable de la vie quotidienne

C’est vrai que le sujet est très délicat et Sabyl Ghoussoub n’a pas osé s’ aventurer sur ce terrain miné

Un Goncourt des lycéens en demi teinte .
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