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Critiques de Saïdeh Pakravan (95)
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Azadi

Saïdeh Pakravan nous permet à travers ce roman fascinant d’appréhender la complexité de la société iranienne et de la vie qui s’y déroule sous le régime de la République Islamique.

Elle concentre son roman sur une période précise qui voit, en juin 2009, jaillir une série de manifestations de protestation, suite à la proclamation par Ahmadinejab de sa réélection à la présidence dès le premier tour, alors que les électeurs attendaient au moins un second tour et la victoire finale d’un de ses opposants Moussavi ou Karroubi.



Considérant avoir été floués une grande partie du peuple et en particulier la jeunesse vont tenter de faire entendre leur voix mais ces rassemblements violemment réprimés, se solderont par des morts et des arrestations sans qu’il y ait de fléchissement du régime qui refuse d’accepter une possible évolution.



C’est plus particulièrement, par les yeux et la voix de trois jeunes, Raha étudiante en architecture de 23 ans, son fiancé Kian, Hossein, membre des gardiens de la révolution chargés de la sécurité intérieure, par celles aussi de leur entourage familial qui a connu le passé, que Saîdeh Pakravan réussit à nous immerger dans la vie quotidienne iranienne avec tous ses codes. Le lecteur se retrouve également plongé au coeur de cette flambée de révolte qui va changer, séparer ou réunir des êtres qui, au départ, n’en mesuraient pas la portée et les conséquences tragiques.



J’ai été bouleversée par les souffrances de Raha jeune femme enthousiaste, courageuse et volontaire qui, bravant les avertissements de ses parents, se retrouve prise dans une rafle et emmenée dans des sous-sols sinistres où elle vivra des moments terribles. Mais dans ces lieux sordides il y a aussi l’inoubliable Mina, la compatissante, gardienne de prison par nécessité, qui va la soutenir et la réconforter.

Bouleversée aussi par l’amour du doux et courageux Hossein qui par deux fois la sauvera et la rendra à sa famille sans rien espérer en retour. Raha fille cultivée d’une famille de la bourgeoisie aisée et Hossein jeune gardien de la révolution, venu de la campagne pauvre n’aurait pas du se rencontrer et pourtant…

Je retiens l’obstination avec laquelle Raha va se reconstruire et lutter contre ceux qui voulait la briser et contre la bêtise issue parfois de ceux qui semblaient être de son côté.



En dehors de Raha et Hossein, il y a beaucoup d’autres personnages qui font de ce roman plein de vie et de passion une représentation bigarrée de la vie iranienne et du déchirement que provoque la violence des convictions des uns et des autres.

Il m’est bien difficile de rendre toute la richesse et l’intérêt grandissant que j’ai pris à sa lecture qui permet de mesurer qu’on ne peut émettre d’avis catégorique, que les contradictions de chacun et celles de la société dans laquelle ils évoluent, ne peuvent se satisfaire de jugements tranchés. J'en suis ressortie pleine d'interrogations.



Merci à l’opération Masse critique et aux éditions Belfond de m’avoir permis de découvrir ce livre passionnant et cette auteure irano-américaine.

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Le principe du désir

Sarah Bly est peintre, Thaddeus Clark est un riche collectionneur, mécène et hommes d'affaires.

Lors d'un vernissage, leur rencontre va être un coup de foudre dont ils sortent bouleversés.



Roman insipide où se succèdent banalités et clichés. 426 pages qui tournent à vide, où se répètent des scènes et des réflexions, où les personnages restent superficiels et convenus comme l'est le milieu dans lequel ils évoluent : celui de l'art et des affaires où comptent principalement la spéculation et l'argent. Même si Thaddeus et Sarah le couple de rêve qui est au centre du "principe du désir", ne se comportent pas comme la plupart de ceux qu'ils côtoient, je ne m'y suis pas du tout attachée. Sarah et ses questionnements répétés m'a vraiment agacée, je n'y ai pas cru une seule minute.



"Elle qui n'a jamais pensé de façon stratégique doit à présent se livrer à des calculs compliqués. Si je lui donnes trop, est-ce qu'il va commencer à se sentir à l'aise dans notre relation ? Si je trouve des excuses pour m'éloigner de temps en temps, jusqu'où l'acceptera-t-il avant de renâcler ? Qu'est-ce qui va l'exciter assez pour lui donner envie de me poursuivre ? Qu'est-ce qui va lui faire lâcher prise ? Et que penser des nombreux signes de son insatisfaction, loin de ce que devrait être un homme amoureux et aimé ?

(...) Cela la chagrine peut-être, mais elle maintient le cap. de temps en temps, elle va vider son coeur au cabinet d'Edward qui continue à essayer de la raisonner ou chez Siobhan qui devient de plus en plus réticente à discuter de la question, voyant que tous ses conseils tombent dans l'oreille d'une sourde." p 282-283



Impossible pour moi d'adhérer à cette histoire "glamour" et encore moins au comportement ambigu de Sarah vis à vis de Thaddeus, jouant la glace et le feu pour soi-disant garder le désir entre eux intact. Elle finira par s'enfermer dans la toile qu'elle a elle-même tissée, malgré les avertissements successifs de sa tante Siobhan et les conseils sévères de Edward, l'ami psychanalyste de Thaddeus. C'est elle qui provoque les rencontres répétées avec eux deux mais à chaque fois rejette la réalité et le bien fondé de leurs remarques.



Autant j'avais lu avec passion Azadi qui se déroulait en Iran et en avait apprécié la qualité, autant celui-là m'a laissée indifférente et profondément déçue. Mais cet avis n'engage que moi et je souhaite à ce roman de rencontrer ses lecteurs.

Merci toutefois aux éditions Belfond qui me l'ont envoyé pour avis.

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Azadi

L’Iran est un pays qui me fascine et me laisse perplexe à la fois. Il me fascine principalement pour la richesse et la grandeur de son Histoire et pour d’autres raisons liées à cet attrait que je ressens pour les cultures moyen-orientales. Et il me laisse perplexe, enfin plutôt me laissait perplexe, quant à sa situation politique et sociale actuelle. Jusqu’à maintenant, j’avais l’impression d’entendre deux sons de cloche diamétralement opposés. L’un surtout véhiculé par la littérature me laissait entendre que le régime politique iranien était une effroyable théocratie réglementant de façon draconienne la vie quotidienne des iraniens, un régime oppressif et répressif digne des plus célèbres romans dystopiques. L’autre, à travers des documentaires et émissions de voyage comme le célèbre « J’irai dormir chez vous », me renvoyait une image plus adoucie d’un peuple iranien finalement assez libre et dont le souci primordial était, comme tout le monde sur cette Terre, de subvenir à ses besoins élémentaires : se loger, se nourrir, fonder une famille etc… Je ne sais pas pourquoi je voulais absolument que quelqu’un me dise quelle conception était la bonne sans me rendre compte que j’avais eu là les deux versants d’une vision trop manichéenne de la question. Rien n’est tout blanc ou tout noir. Et l’Iran n’échappe pas à la règle. C’est en lisant le roman de Saïdeh Pakravan que j’ai enfin pris conscience de ce fait et que j’ai réalisé que cette ambiguïté que je ressentais était en fait tout à fait normale car voulue par le système iranien au point que les iraniens eux-mêmes vivent dans un flou perpétuel quant aux limites de leurs libertés et à ce qu’ils ont le droit de faire ou non.

Raha est une jeune étudiante issue des quartiers huppés de Téhéran. Comme une grande partie de la jeunesse iranienne, elle n’a connu son pays que sous le régime islamique là où les personnes plus âgées gardent un souvenir nostalgique des années passées sous le régime du shah. Lorsque les élections de 2009 se profilent avec l’espoir naissant que les choses changeront, l’attente est grande et beaucoup souhaitent la fin du « règne » d’Ahmadinejad. Mais lorsque les résultats sont annoncés, c’est la stupeur puis la colère. Les jeunes de Téhéran ne comptent pas en rester là, persuadés que les élections ont été truquées, ils descendent dans la rue et se retrouvent tous sur la place de la tour Azadi ( « Liberté ») afin de manifester leur révolte. Mais les forces de police interviennent et la répression commence. Après avoir été blessée une première fois, Raha persiste dans son engagement mais finit par se faire arrêter. En prison, le cauchemar commence. Libérée grâce à un contact dans la police, elle rentre chez elle brisée et meurtrie. Mais Raha est une jeune femme à la personnalité forte et, pour se reconstruire, décide de traîner ses bourreaux en justice. L’Etat iranien acceptera-t-il de reconnaître les sévices auxquels il soumet ses prisonniers ?

La grande force de ce roman de Saïdeh Pakravan est que, bien qu’elle ait choisi une jeune femme pour personnage central, elle donne la parole à de nombreux personnages annexes apportant ainsi une multiplicité de points de vue, de mentalités, de conceptions, de sensibilités. On n’a donc pas seulement une vision de l’Iran mais plusieurs, parfois contraires, d’autres plus nuancées et c’est ce qui m’a aidée à avoir une image plus claire de ce pays et de ce qu’en pensent ses habitants.

Raha est emblématique de la jeunesse iranienne mais surtout celle issue de milieux favorisés, fortement influencée par le monde extérieur et principalement par les pays occidentaux. Cette jeunesse rêve à un Iran s’inspirant des principes de liberté sur lesquels se fonde l’Occident, aspire à un Iran « civilisé » libéré de l’emprise religieuse qu’il connaît depuis la Révolution. C’est une jeunesse très soucieuse et honteuse de l’image négative renvoyée par l’Iran au monde.

Autour de Raha gravitent d’autres personnages dont son oncle et son amie émigrée aux Etats-Unis et en visite au pays qui, eux, par leur objectivité et leur connaissance du monde apportent un regard plus nuancé, tantôt nostalgique de ce que fut l’Iran sous le Shah et très critique envers le peuple iranien, tantôt fasciné et envoûté par ce pays aux multiples facettes au sein duquel gronde une force et une énergie positives qui ne demandent qu’à émerger.

Et il y a aussi Hossein issu de la province à Téhéran pour travailler au sein des forces de police. Il a la charge de son frère, handicapé après avoir participé à la guerre Iran-Irak et qui s’est réfugié dans une pratique rigoureuse et stricte de la religion. Hossein fait partie de cette catégorie d’iraniens pas forcément favorables au régime mais plutôt manipulés par ce dernier, convaincus que les occidentaux complotent au quotidien pour abattre l’Iran. Pourtant Hossein est loin d’être un fanatique obscurantiste, c’est un garçon lucide et profondément humain qui ne cherche que le bien pour son pays et les siens.

Grâce à ces voix multiples que fait alterner Saïdeh Pakravan, j’ai pu appréhender toute l’ambiguïté et la perversité du système iranien, un système qui veut régenter la vie du peuple mais de façon très sournoise. Ainsi il laisse un semblant de liberté aux iraniens, ils peuvent faire ce qu’ils veulent mais gare à eux s’ils se font prendre. Parfois, ils sont arrêtés pour avoir enfreint des lois dont ils ignoraient complètement l’existence. Toutefois, quand un projet de loi est éventé et que cette loi est complètement farfelue, le peuple parvient à faire pression. J’ai en tête cet exemple lorsque Ahmadinejad a voulu légiférer sur l’utilisation des trottoirs, un côté aurait été réservé aux hommes, celui d’en face aux femmes. Face à la levée de boucliers, il a dû abandonner cette idée. Mais ce qui fait que ce régime perdure malgré les contestations, c’est qu’il est parvenu à diviser le peuple. Les manifestations de 2009 n’ont par exemple concerné que Téhéran et n’ont pas été suivies en Province. La peur des répressions a aussi convaincu certains de rester chez eux. Combien de fois la famille de Raha a-t-elle tenté de la dissuader de se rendre aux manifestations ?

Azadi est donc le récit du combat d’un peuple mais aussi celui d’une femme décidée à faire valoir ses droits, à faire condamner les sous-fifres de ce système oppressif et par là-même à affronter la douleur, la médiatisation, les jugements, les amis qui lui tournent le dos, les menaces, les insultes, le harcèlement, les questions odieuses des juges. A cette occasion on a encore l’illustration de cette division au sein du peuple entre ceux qui soutiennent Raha et la perçoivent comme une héroïne qui ose défier l’Etat et ceux pour qui elle est une ennemie de l’intérieur travaillant au fameux complot américano-sioniste.

Pourtant ce roman me laisse quelques interrogations. La première concerne la nature des populations ayant participé aux manifestations. L’auteur prend le soin au détour d’une phrase de nous préciser que ce mouvement de contestation touchait toutes les catégories sociales et n’était pas seulement le fait des plus favorisés. Pourtant lorsqu’elle évoque les participants, ce sont toujours des étudiants issus des classes privilégiées, des enseignants, des médecins etc… D’ailleurs, Saïdeh Pakravan n’a-t-elle pas choisi ses personnages contestataires au sein même de ces milieux aisés ? N’a-t-elle pas choisi un jeune homme d’origine très modeste pour incarner le représentant du système ? J’aurais aimé avoir aussi le point de vue d’un de ces habitants des quartiers sud ( pauvres) de Téhéran souvent qualifiés de « racailles » et savoir ce qu’il en est réellement. Y a-t-il vraiment une division nette entre milieux modestes partisans du régime d’un côté et riches occidentalisés de l’autre ? Pourtant les cadres du régime proviennent de ces mêmes classes riches usant de leur position pour se sortir d’affaire et transgresser allègrement ces lois qu’ils sont censés faire appliquer.

Autre point sur lequel je voulais revenir, celui de la religion. Bien entendu c’est la religion qui réglemente la vie quotidienne des iraniens. Saïdeh Pakravan nous donne à de nombreuses reprises des exemples de cette domination sur une population vivant sous l’ombre perpétuelle des Gardiens de la Révolution islamique. Tantôt en uniforme, tantôt en civil, ils rappellent à l’ordre tout manquement aux « bonnes mœurs » : comportement, tenue vestimentaire etc… Mais la question religieuse est encore une fois l’occasion de voir à quel point le peuple iranien ne manque pas de ressources. Saïdeh Pakravan évoque dans son roman la fête de l’eyd que j’avais d’abord confondue avec l’Aïd-el-Kebir. Et j’ai été surprise d’apprendre que cette fête est d’origine païenne et que l’ayatollah Khomeini avait en son temps tenté de l’interdire mais la farouche opposition du peuple l’a contraint à renoncer. Cette fête traditionnelle a encore cours de nos jours et est restée très populaire. Concernant la foi, là encore la diversité règne au sein du peuple iranien. Raha est le parfait exemple de la jeune femme athée et Saïdeh Pakravan montre bien que nombreux sont ceux à faire semblant d’avoir une pratique religieuse rigoureuse.

Magnifique panorama de la situation politico-sociale de l’Iran d’aujourd’hui, Azadi est un roman qui permet de mieux comprendre ce pays tant décrié et dresse à travers la figure d’une femme forte destinée à éveiller et maintenir l’espoir dans le cœur d’un peuple le portrait d’un pays très complexe. Un très grand roman que je conseille fortement !



"C'est ça l'Iran, dit Djamchid. Un tissu de contradictions."



Un grand merci à Babelio et aux éditions Belfond.


Lien : http://cherrylivres.blogspot..
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Azadi

Probablement le plus proche que je n’irai jamais de Téhéran ! Un roman qui nous amène au cœur d’un pays qui semble écartelé entre le moyen-âge et le 21e siècle, entre la police de la moralité et le téléphone cellulaire, entre le fanatisme religieux et l’athéisme indifférent.



Suite à des élections aux résultats douteux, des protestations populaires, des manifestations étudiantes, puis la répression et les arrestations. On y assiste à travers les yeux de Raha, étudiante en architecture à l’université, à travers les yeux de son fiancé, de sa mère et même d’un jeune policier. Les discussions avec le père, le vieil oncle ou la cousine ajoutent des opinions, des analyses de la situation du pays, de son histoire et de son avenir.



Mais Raha est aussi une jolie jeune femme et son séjour en prison lui réserve donc des tortures particulières. Et lorsqu’on réussit à la libérer, même la guérison est pénible. Il n’est pas facile de survivre et de lutter pour la justice… C’est triste, c’est touchant et parfois révoltant. Au-delà des croyances religieuses, j’ai du mal à comprendre pourquoi toute cette violence envers les femmes...



Grâce à ce texte, j’ai l’impression d’avoir fait une visite éclair en Iran. J’y ai vu du pire et du meilleur, de l’amour et de la haine, de l’hypocrisie dans la vie quotidienne et de la corruption dans le système politique, de la résignation, mais aussi beaucoup d’espoir pour un avenir meilleur.



Peut-être pourrons-nous un jour retourner dans un Iran réconcilié…

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Azadi

En recevant ce livre, j'ai tout de suite été sous le charme de sa première de couverture sobre et belle.

Sur cette couverture, la représentation d'un monument l'Azadi qui se trouve au centre de Téhéran. Azadi signifie Liberté en persan.

Ce livre raconte à plusieurs voix, la révolte de la population après les élections truquées de juin 2009. Et surtout, ce livre raconte Raha, jeune étudiante en architecture qui participe avec beaucoup d'espoir et une certaine insouciance à toutes les manifestations organisées, en compagnie de ses amis et son fiancé Kian.

Lors de la première grande manifestation sur la place Azadi, quand tout le monde était dans la rue, Raha évanouie est secourue par Hossein gardien de la révolution. Hossein qui éprouve des sentiments pour la jeune femme, ne le dira jamais, mais l'aidera toujours. Surtout après l'arrestation de Raha quand tout bascule dans sa vie, qu'elle est accusée de comploter contre la république islamique , d'obéir aux ordres de maîtres occidentaux et que le pire arrive.

Dès que j'ai ouvert ce livre vivant, plaisant avec beaucoup de dialogues, parsemé de mots persans comme une musique tout au long des pages, je n'ai pas pu le lâcher.

Une belle écriture délicate , pour dire tous les espoirs des iraniens et aussi leur courage pour que l'Iran change et qu'ils obtiennent ces "droits qui sont la norme dans les pays civilisés".

Je remercie Babélio et les éditions Belfond pour ce livre et le petit mot qui l'accompagnait, merci Saïdeh Pakravan de m'avoir fait découvrir ce pays dont on ne parle pas en général de cette manière. J'espère que ce livre obtiendra le prix Marie Claire du roman féminin 2015 , pour moi c'est un coup de coeur.
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La trêve

L’année dernière, je découvrais Saïdeh Pakravan. Son roman, « Azadi » qui parlait du traitement infligé aux opposants au régime Iranien avait été l’une de mes plus belles découvertes de 2015. Au travers de ce premier roman écrit en français, cette auteure franco-américaine se révélait au public français. Son nouveau roman « La Trêve », également paru chez Belfond est diamétralement opposé à « Azadi ». Un texte dont l’idée principale est des plus originales.



La trêve, un roman où tout va bien



La Trêve de Saïdeh Pakravan c’est l’histoire surprenante d’un jour où rien ne se passe. L’inspecteur Simon Urqhart en est stupéfié, jamais de sa carrière il n’a vécu de moments si calmes. Pas de meurtres, pas de bagarres, pas de vols, pas de viols… Rien. Comme par miracle, toutes les personnes qui pourraient être amenées à commettre un délit ou un crime se ravisent. Les criminels sont en proie à une prise de conscience, les autres vivent cette trêve dans la liesse générale. Une seule question se pose… combien de temps cela va-t-il durer ?



Mon avis



J’avais tant aimé Azadi, que quand j’ai vu que Saïdeh Pakravan sortait un nouveau roman, j’ai absolument voulu le lire. J’ai été surprise de voir qu’elle avait osé écrire quelque chose de totalement différent du roman qui lui avait valu le Prix Closerie des Lilas et le Prix Marie-Claire.



Je salue la prise de risque mais je trouve que La trêve est un roman qui demande un certain effort au lecteur.



Si je vous dis cela, c’est parce que ce roman, j’ai eu du mal à rentrer dedans. Il commence par des multitudes d’histoires indépendantes les unes des autres si bien, que l’on pourrait les prendre pour des nouvelles.



Chaque chapitre découpe les 24 heures de trêve en ¼ d’heure ou en ½ heure. On y découvre l’histoire d’une personne échappant de justesse à son agresseur, celui-ci se ravisant au dernier moment. Femme sous l’emprise de son mari, prisonnier prêt à se faire lyncher, joggeuse passant à côté du viol, patronne subissant le harcèlement d’un amant éconduit, ici on n’entre pas dans la vie d’un personnage, on est simplement spectateur de cet instant qui aurait dû être tragique. Je dois avouer que j’ai trouvé lourd le premier tiers du roman où l’on ne fait que zapper de personnage en personnage. Mais à un moment donné, on se rend compte que Saïdeh Pakravan revient sur l’un d’entre eux et une histoire perdue dans les multiples faits divers se met en place et devient un fil conducteur que j’ai pris eu beaucoup de plaisir à suivre.



Je ne vais pas dire que j’ai adoré « la Trêve », ça serait faux, mais j’ai trouvé ce roman très original dans sa construction. La chute est également extrêmement efficace. Ce roman qui fait tout de même 428 pages est à lire si vous voulez vous plonger dans une expérience littéraire différente de ce que l'on peu lire d'habitude. Il me fait un peu penser aux nouvelles séries qui cartonnent actuellement, celles où une part de mystérieux pèse sur l’ambiance générale, mais dont les personnages malgré tout affrontent les évènements tels qu’ils se présentent.



Un roman original à découvrir, mais si je devais conseiller cette auteure, je vous dirais de lire Azadi.




Lien : http://que-lire.over-blog.co..
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Azadi

Lu d’une traite, ce roman terrible et foisonnant de vie, tout à la fois traité politique, tragédie et étude sociale, m’aura donné une magnifique occasion de plonger par la fiction dans la complexité du réel, celle de la société iranienne contemporaine.

Il ne fallait pas moins que la forme du roman choral pour rendre cette complexité, entre modernité et tradition, orient et occident, et chacune des voix qui s’exprime tour à tour vient apporter sa nuance tout en impulsant un rythme singulier au récit. Même si ce rythme s’essouffle par moment, le cauchemar vécu par Raha ne laisse pas insensible et l’on brûle de savoir si elle parviendra à obtenir réparation dans un univers si masculin, si chahuté et si fanatisé.

Une expérience immersive et enrichissante, loin de mes bases.

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Azadi

Quand le hasard est un bonheur !

Il ne me restait à lire que les dernières pages de "Lire Lolita à Téhéran" de Azar Nafisi lorsque Babelio m'a proposé "Azadi"!

L'action se déroule également à Téhéran, quelques années plus tard.

C'était donc une excellente suite.

Azadi est un roman à plusieurs voix, choral, comme on dit. Trois jeunes gens d'une vingtaine d'années dont deux étudiants, issus d'un milieu aisé , modéré et cultivé et Hossein qui fait partie des Gardiens de la Révolution, très croyant et obéissant mais non violent. "Il est correct et respectueux des autres."

Les voix des proches de Raha qui discutent, argumentent et ont connu la Révolution islamique.

Les étudiants, révoltés par les élections truquées dont ils avaient espéré un peu plus de liberté, se jettent avec enthousiasme dans des manifestations quotidiennes, persuadés que leur opposition massive aura une influence.

"Sans doute que nous avions été naïfs de croire que nos votes pouvaient compter, d'oublier le régime sous lequel nous vivons." dit Kian

Bien sûr qu'elles étaient truquées ces élections:"Ils veulent nous faire croire qu'on a manuellement compté quarante trois millions de votes en quelques heures ?"

On a donc plusieurs points de vues dans des conversations édifiantes.

Un personnage que j'ai trouvé intéressant est celui de Gita qui a quitté l'Iran très jeune avec ses parents et vit aux Etats-unis. Bien que très attachée sentimentalement à son pays natal elle ne le reconnaît pas lorsqu'elle y revient pour trois mois. Elle a de ce fait une analyse plus objective.



Au début du roman, je trouvais les chapitres trop courts.

La fréquence des mots parsi me gênait un peu, puis j'ai joué à saute-mouton puisque leur traduction est immédiate.

Sans dévoiler la fin ,je peux dire qu'elle est comme elle devrait être ce qui laisse espérer qu'elle sera un jour possible.



Un très grand merci aux Editions Belfond et à Babelio
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Cent voyages

« Parlez-moi d'moi. Y a qu'ça qui m'intéresse. Parlez-moi d'moi. Y a qu'ça qui m'donne d'l'émoi. » Au vu du titre, j’ai cru que cela parlait de voyages. Les pays sont nommés, c’est tout. Les voyages sont surtout sur elle-même : moi, je, mon prénom, mon corps, mes cheveux, mes dents, ma couleur et ma fleur préférées, j’aime ceci, je n’aime pas cela. A cela s’ajoute ses amours, ses décès. Celui de sa sœur, de son père et surtout de sa fille où elle dit, je cite : « ma fille morte est devenue ma force. »

Le style est bon, quelques réflexions intéressantes. A citer comme exemple de l’écrivain égocentrique.

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Azadi

35 ans après la révolution islamique en Iran et la prise de pouvoir del’Imam Khomeiny, Azadi raconte l’oppression d’une jeunesse iranienne éprise de liberté et décidée à contester la réélection probablement truquée du président Ahmadinejad en 2009. Cette jeunesse descendue spontanément dans les rues de Téhéran à l'annonce des résultats électoraux représente la partie éduquée de la société iranienne, riche d'une deuxième culture, « occidentale », qu'elle s'est constitué grâce à la télévision, à Internet et aux souvenirs de leurs parents qui se rappellent l'Iran d'avant la révolution islamique de 1979.

Dans ce roman choral poignant, Saideh Pakravan fait parler alternativement 3 jeunes gens et leurs familles : Raha, jeune fille éduquée des beaux quartiers de Téhéran, son fiancé Kian et Hossein, un jeune « gardien de la révolution » qui vient en aide à Raha à l’occasion d’une manifestation.

Elle y dénonce avec vigueur le manque de libertés, la condition des femmes, la séparation implacable des sexes et l’aberrante loi du chiisme qui autorise les hommes à prendre des femmes « provisoires », une façon pratique de légaliser le viol…

Raha et ses amis n’ont pas connu l’Iran d’avant la Révolution islamique : ils ne savent pas ce qu’est la liberté mais souhaitent amener le pays vers quelque chose de plus doux, de plus calme, raisonnable.

Outre le contexte politico-religieux, c'est une société tout en contraste et en contradiction que dépeint Saideh Pakravan, et c'est passionnant.



La seule petite chose qui m’a (légèrement) agacée ou gênée est ce parti pris d’utiliser des mots en parsi pour les traduire après…



Azadi est un roman passionnant, un roman féministe, réaliste et sentimental et il ne paraitra pas en Iran… allez savoir pourquoi.



Merci BABELIO !!!

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La trêve

On finit cette première revue de romans français de la rentrée avec " La Trève" de Saïdeh Pakravan qui sort la semaine prochaine, le 25 aout chez Belfond...: 24h chrono, 24 heures dans la vie quotidienne américaine, 24 heures où pour la première fois les flics vont passer leur temps à faire des Sudoku. 24 heures sans crimes, sans violences, sans maltraitance, sans vengeance, sans vol, sans voie de fait, sans sexisme, sans homophobie, sans racisme. Ouis les américains moyens de cette fable vont vivre 24heures d’un rêve éveillé: “Vive la trêve” .



Bon, en effet la fable est ambitieuse, originale et plutôt efficace : on suit les 24 heures de plusieurs personnages qui auraient pu être confrontés à la violence, bourreaux ou victimes, heures et instants décisif où tout bascule.



En bref, voilà un roman certes souvent agréable à lire sans être pour autant transcendant : Saïdeh Pakravan, simplifie, évite de trop approfondir et passe finalement un peu à coté de son sujet ..Dommage!!
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Azadi

Tellement impressionnée par ce livre que je ne sais pas quoi dire. Je ne reviendrai pas sur l'histoire poignante, l'écriture fluide, le fait que je n'aie pas bougé de chez moi pendant deux jours car je ne pouvais plus le lâcher.



C'est pour son 'honnêteté' que je conseille ce livre à tout le monde. L'histoire se passe en Iran pendant les mouvements vite réprimés de 2009, l'auteur ne vit pas en Iran ; je me suis dit 'c'est bon on va enchainer cliché sur cliché, le bien et le mal, les méchants et les gentils, bref là où tombent souvent les auteurs 'originaires de...' qui essaient d'expliquer aux 'occidentaux'.

Et là, il a bien fallu que je m'accroche à mon fauteuil. Quelle finesse, quelle subtilité ! Le fait d'avoir fait parler les protagonistes à la première personne permet d'avoir des opinions contradictoires et d'entamer des réflexions en profondeur : l'islam, l'immigration, la modernité, l'émancipation, la jeunesse, l'exil, la répression...

Ce livre a encore plus de sens avec les événements de janvier à Paris. C'est une des rares fois où je lis une réelle tentative d'expliquer toute l’ambiguïté et les contradictions dans lesquelles sont coincés les musulmans, cette volonté de trouver une solution ; et le tout avec beaucoup de tact de la part de l'auteur, sans en faire des tonnes, sans donner de leçon, sans parti pris.



Un grand merci aux éditions Belfond et Babelio pour ce livre difficile mais plein d'espoir.
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Azadi

«  L'Histoire est notre assurance sur l'avenir ». Ce n'est pas rien une telle phrase. Elle est aussi grande que la portée immense du mot Azadi, « Liberté », en langue perse. Parce que l'Histoire est toujours la projection de l'avenir. Ce n'est pas la lecture du passé qui doit mener un peuple, c'est la potentialité de l'avenir que recèle son Histoire qui doit l'éclairer. Le présent ne peut se contenter du passé pour s'acter, pour se justifier. Le présent est un futur antérieur, aucun passé ne peut se simplifier.

La magnificence du roman de Saïdeh Pakravan c'est sa fraternité. Cela paraissait improbable, irréalisable et pourtant par ce roman Saïdeh Pakravan nous l'a confié. Nous avons beaucoup d'ignorance, beaucoup de peur, beaucoup d'incompréhension, et beaucoup, beaucoup d'images. Nous avons des dates, des noms, des noms qui effacent les visages. Des noms de pays. Qui nous font oublier que les mots frontières, régions, drapeaux appartiennent bien plus aux pouvoirs qu'aux peuples. Des noms qui effacent les courbes des montagnes, la poésie du désert, le lourd parfum des sèves, le chant des hommes et le regard des femmes. Des noms devenus terrifiants parce que sous le poids écrasant de toutes les dictatures, beaucoup trop de mots rendent leur âme. Et cela de chaque côté des murs.

Ce roman nous fait entendre plusieurs voix. Voix multiples. Jeunes, belles, anciennes, douces, révoltantes, troublantes, sages, rassurantes, aimantes. Des voix, celles des hommes.

En réécoutant le poème de Saïdeh Pakravan « Tu diras bonjour » (https://www.youtube.com/watch?v=XGENXx-FIOM&feature=share) , je me dis qu'avec ce roman l'auteure adresse un bonjour amoureux à l'ensemble de notre terre d'humains.

L'histoire est terrible, les faits insupportables, les conséquences épouvantables. Mais le possible appartient toujours à l'humain. On peut tenter d'effacer sa mémoire, vouloir inventer son histoire, on ne peut pas détruire sa capacité de résilience.

Azadi, est un magnifique roman qui dépasse le fait géographique et historique.

Si prétexte à guerroyer se voudrait vérité révélée, la matière de l'humain, elle ne pourra jamais perdre sa raison de toujours espérer.

« Opération Babelio Masse critique, janvier 2015 »

Astrid Shriqui Garain

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Le principe du désir

Il serait aisé de ne pas vouloir croire en la perfection de Thaddeus: beau, riche, moral, bienveillant, parfait, reparfait et rereparfait. Mais le principe du désir n'est pas une simple histoire d'amour. Peu à peu , les défauts émergent, infimes tout d'abord, puis de plus en plus grossiers. Telle une tâche qu'on aurait voulu effacer sur un tableau et qu'on aurait transformée en un énorme trou après avoir utilisé une multitude de produits pour la faire disparaitre. Dans un paradoxe étrange on aime et déteste les protagonistes, tantôt pour leur immobilisme, tantôt pour leur élan démesuré. L'art est omniprésent , mais jamais pédant. Et l'histoire d'amour pourrait être transcrite en peinture par Sarah, dans une de ses séries. Thaddeus pourrait alors tomber sous le charme des tableaux et acquérir l'ensemble pour les contempler,parfois les détester ou au contraire les désirer un peu plus chaque jour.

SP
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Cent voyages

Un grand merci à Babelio et aux Editions Belfond de m'avoir permis de retrouver dans ce roman @Cent voyages, l'auteure d'@Azadi et de @L'Emir, deux livres que j'avais beaucoup aimés.



Cent voyages s'est révélé très différent de ce que j'en attendais, même si de nouveau j'ai retrouvé, avec beaucoup de plaisir, la très belle plume de Saïdeh Pakravan.

Il s'agit, dans ce roman en trois parties, chacune du nom d'une personne aimée par la narratrice, de réflexions sur la difficulté à appréhender la vie, la capacité ou non de s'ouvrir aux autres, de voir le bonncôté des choses. Mais Garance, la narratrice, évoque aussi ses difficultés à se sentir chez elle quelquepart- y compris en Iran pays de son père où elle a vécu- sauf peut être à Paris où elle revient toujours après des voyages qui l'emmènent loin, parfois longtemps, à la recherche d'elle-même ?



Les réflexions sont souvent intéressantes, et toujours si bien écrites, mais elles nous parviennent dans un ordre aléatoire, sans qu'on ne sache vraiment ce qui les provoque. Et cette succession de ressentis et de pensées, d'évènements insignifiants et de drames insurmontables, tout cela sur le même ton, est assez destabilisant.

Malgré tout, on retient de belles phrases, de belles pensées, mais c'est à peu près tout.

Car malheureusement, la narratrice, même si par le biais de l'écriture et du talent de l'auteure, trouve grâce à nos yeux, elle n'est pas attachante ni même inoubliable.



Quant aux Cent voyages annoncés, ils ne sont qu'un prétexte, parfois une métaphore, à peine décrits, juste des moyens de fuire lorsque la vie ne sourit plus à la narratrice.

Connaissant la double origine de l'auteure, et très attirée par l'Iran où je suis née, je suis restée sur ma faim.



Le roman est malgré tout très bien écrit, et ce côté intimiste n'est pas dénué d'intérêt. La partie où la narratrice parle de sa fille est même très émouvante. Il a juste manqué le côté romanesque de L'Emir, ou l'attrait historique et social d'Azadi.



https://edenlivre.wordpress.com/2019/03/17/cent-voyages-saideh-pakravan/



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Azadi

Téhéran 2009, malgré l’interdiction et dans un climat particulièrement tendu, des milliers d’iraniens investissent les rues de la ville pour s’insurger contre le résultat des élections. Les policiers sont partout présents, usant de grenades lacrymogènes et de matraques pour disperser les manifestants. Etudiants appartenant à la classe aisée, femmes voilées, personnes de tous âges, enfants, sont vite réprimés par les bassjidjis qui n’hésitent pas à frapper et à emprisonner.

Raha et ses amis comptent parmi eux. Au cours d’une de ces manifestations, Raha sera arrêtée, emprisonnée, et subira les pires sévices. De retour presque miraculeusement dans sa famille, alors que ses projets de vie volent en éclats, elle va tenter de se reconstruire sur les cendres des illusions perdues de son adolescence.

Saïdeh Pakravan raconte. Les protagonistes et les expériences se succèdent pour donner une image assez précise, à plusieurs voix, de l’Iran actuel, mais aussi de celui du Shah, que certains osent à peine regretter, de celui de Khomeiny, instaurateur d’une république islamiste contraignante, liberticide et si peu bienveillante, mais également entre les lignes, de l’Iran de demain rêvé par la jeunesse parfois bien naïve et pourtant souvent optimiste d’aujourd’hui.

Saïdeh Pakravan raconte, à travers les voix de plusieurs personnages vivant dans l’entourage de Raha, étudiante en architecture, issue d’une famille aisée de Téhéran. Les voix se succèdent, en particulier celles de Nasrine, sa mère ; Celle de Gita, qui vit aux Etats Unis et revient quelque temps à Téhéran, spectatrice impuissante dans son propre pays ; D’Homa, chirurgien à l’hôpital, elle voit chaque jour les méfaits du pouvoir ; De Pari, qui vit dans l’opulence, protégée par les excellentes relations de son mari avec le pouvoir en place ; De Mina, gardienne de prison par nécessité, mais qui a un cœur gros comme ça et saura aider Raha ; De Hossein, gardien de la révolution, religieux par tradition familiale plus que par conviction, policier par nécessité, issu d’un milieu modeste, il tombe amoureux de Raha sans pouvoir se l’avouer ni réaliser son rêve ; De Kian, étudiant, fiancé à Raha, qui ne saura jamais dépasser les apparences ni les préjugés.

Des voix qui racontent les gardiens de la révolution, les règles qu’il faut suivre mais qu’on ne connait pas toujours, la police des mœurs qui contrôle la longueur d’un voile, qui vérifie que les femmes circulent bien avec un homme ayant un lien de parenté avec elles, sinon gare à elles.

Qui parlent de la condition des femmes, si peu reconnues, souvent si maltraitées, elles qu’un homme peu violer en toute liberté à condition d’avoir prononcé les mots lui accordant un « mariage temporaire », elles aussi que l’on va violer avant de les exécuter, car sinon vierges, elles entreraient tout droit au paradis. Qui évoquent les contradictions d’un peuple, les moyens de s’évader des contraintes, surtout quand on appartient à la classe aisée, qui présente cette jeunesse qui rêve d’ailleurs et de liberté, d’une piscine privée où bravant les interdits, filles et garçons vont se baigner ensemble, de films téléchargés illicitement, d’internet, des réseaux sociaux qui ouvrent au monde.

C’est particulièrement intéressant d’entendre ces différents points de vue, même si forcément ils sont aussi issus du propre vécu de l’auteur. Au début je me suis un peu perdue dans la multiplicité des personnages, mais au final juste quelques-uns sont importants dans le récit, les autres servant essentiellement à ajouter une opinion, une vision propre à leur condition.

Le rythme du roman est parfois dense, ajoutant à l’intrigue une description de la situation politique du pays, et c’est aussi ce qui fait son intérêt. Les chapitres alternent avec aisance, d’un personnage à l’autre, d’un témoignage à l’autre, on tourne les pages, on vit avec Raha, ses aspirations de jeune femme un peu naïve, d’étudiante, sa chute et son combat. L’insertion de mots persans est agréable car immédiatement traduits, pas en bas de page ou en annotations lointaines, il sont facile à assimiler à mesure de la lecture. Ils sont là comme une mélodie qui donne son rythme au roman, inconnu, singulier, bouleversant, musical.


Lien : https://domiclire.wordpress...
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Azadi

En refermant ce livre, je me rends compte que je viens de lire une histoire que vivent encore aujourd’hui des milliers d’Iraniens. Azadi c’est l’histoire de toute une population, mais surtout de la classe moyenne et intellectuelle en Iran.





Le président Ahmadinejad est réélu, la population se sent bafouée et des manifestations s’organisent. Les étudiants sont en premières lignes, ils critiquent le régime en place et la république islamiste. Privés de beaucoup de droits, ils veulent faire savoir au monde entier que le résultat des élections est probablement truqué.



L’état tente d’étouffer la colère qui gronde en faisant des milliers de prisonniers. Parmi eux, Raha, étudiante architecte, qui n’a rien d’une agitatrice. Instruite, elle est bien sûr outrée de devoir suivre des règles qu’elle juge trop strictes, mais elle sait qu’elle n’a pas d’autres choix que de s’y plier si elle veut vivre. Au cours d’une rafle, Raha sera capturée puis emprisonnée. Lors de sa captivité, elle sera torturée et violée par trois gardiens de prison. Libérée grâce aux contacts haut placés d’un ami, elle va réclamer justice en entamant une procédure judiciaire contre les gardiens, un fait rare en Iran ou tout homme peut violer une femme à condition qu’il ait prononcé une formule de mariage provisoire.



"Azadi" c’est tout d’abord 160 pages qui nous apprennent énormément sur la vie en Iran, sur le comportement des habitants, leurs devoirs, le peu de droits qui leurs est accordé et surtout sur la condition de la femme iranienne et toutes les attaques qu’elles subissent au quotidien.



S’en suivent 300 pages sur l’incarcération et la bataille que va mener Raha pour pouvoir vivre libre à nouveau car n’oublions pas qu’en Iran, une jeune fille qui couche hors mariage peut être soumise aux pires sévices.



Un roman très bien détaillé sur la justice iranienne et son système judiciaire mélange d’état et de religion. Une histoire poignante, certainement due au fait que le comportement et la façon de penser de l’héroïne ressemblent tellement à celui d’une jeune occidentale si ce n’est qu’elle est très « humble » (entendez par là, voilée et habillée de façon à ne pas attirer les regards masculins). Une histoire où l’on se rend compte que dans certains pays, le meilleur est passé et certainement pas à venir.



A conseiller car en plus de l'histoire admirablement écrite, ce roman est "intellectuellement bénéfique" et ça, parfois, ça fait du bien.


Lien : http://que-lire.over-blog.co..
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La trêve

Et si le monde soufflait un peu ? Et si il s'agissait d'appuyer sur pause..

24 heures de la vie d'un monde.

Pas de la planète entière. Il s'agit là juste des Usa. Pour que cessent les armes, les coups, les injures, la violence, la haine, que les choses restent en suspend mais que la vie continue quand même.

Est ce que le mieux être de l'humanité reposerait sur un état de paix ? Cet univers en serait il bouleverser ? Marcherait il la tête à l'envers dans les sens de ses idées contraires ?

La trêve, une journée sans haine, sans violence, sans heurt. Une trêve qui réglerait les problèmes... Tous ? Vraiment ? Quel autre destin, quel autre chemin ?

Sera t il meilleur ? Faut il accepter la vie dans sa totalité, le bon et le mauvais ?

Est ce là que repose toute l'intelligence du monde ? Dans l'équilibre du bien et du mal. le face à face nécessaire à notre mise en marche.

La trêve peut elle être pour tous désirable ?

Ma paix est elle celle de mon voisin ? La trêve. Personne ne perd ?

Tout le monde y gagne ? Un temps suspendu. Sommes nous capable d'intégrer cette réalité, sommes nous capable de gérer cette Trêve ? Et si cela était qu'en ferions nous ? Cette possibilité semble utopiste. La Trêve, 24 h 00 de paix.

Mais la paix ici est elle possible si elle est impossible là-bas ?

Et il ne pouvait y avoir de naissance sans l'acceptation de la mort ?

Le sujet traité par Saïdeh Pakravan est intéressant. La paix. La trêve .Ce temps béni .

Cette chance, ce coup du sort, ce coup de dé. Cette "tout de même" volonté ?

Ce n'est pas de la science fiction, même si le sujet reste une fiction.

Peu importe la raison de la présence de ce nouveau temps pour les personnages. L'axe choisi par l'auteure porte davantage sur les conséquences que sur la cause . N'est ce pas là le meilleur des choix pour le récit ?

Puisque c'est davantage sur la narration d'une action

psychologique que se base ce roman.

D'où la nécessite d'avoir fait le choix de ce multi-récit.

Pour un multivers. Parce que nous sommes pluriel.

La construction narrative est un enchevêtrement de nouvelles.

C'est du moins comme cela je la visualise.

Un mille feuilles auquel le choix d'une unité de temps et de lieu permet de donner sens et lien entre le devenir possible de chaque personnage.

Le rythme, les voix collent parfaitement à l'univers américain.

On sent que l'auteure a parfaitement intégrer, du moins compris, les couleurs « états-unienne ».

Et j'avoue que j'aime entendre cela lorsque je suis plongée dans le multivers américain.

Après « Azadi » , voici la « Trêve » . Pour celles et ceux qui ont aimé le premier roman ils retrouveront comme moi le regard bienveillant et intelligent que porte l'auteure à notre humanité, quant aux autres voici une occasion de se confronter par ce premier contact au multivers de cette auteure.

Ce second roman est une très belle confirmation.

Parution prévue : 18 aout 2016.

Merci aux Éditions Belfond, ainsi qu'à l'équipe de Babelio.com de m'avoir permis de découvrir en avant première ce second roman de Saïdeh Pakravan .

Agréable rentrée littéraire à toutes et tous.



à lire également :

"Azadi", roman de Saïdeh Pakravan ( 2015 )

http://www.babelio.com/livres/Pakravan-Azadi/671997/critiques/725094



Astrid Shriqui Garain , lecture














Lien : https://dutremblementdesarch..
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Le principe du désir

Un homme beau, riche, intelligent, charismatique, profondément humain, dont sa fille dit de lui :"C'est un homme hors du commun, plus grand que nature "

"ça n'existe pas, ça n'existe pas ".

Une jeune femme, artiste peintre prometteuse, foudroyée d'amour lors d'une première rencontre dans une galerie où elle expose, effrayée à l'idée qu'un amour, même puissant, s'affaiblira au fil des ans, sera remplacé par la lassitude, développe une stratégie originale et perverse qui le maintiendra dans le désir d'elle, dans l'attente d'elle. Longtemps. Toujours.

Voilà, tout est dit. Je n'en dévoilerai pas d'avantage.

Au lecteur de découvrir le développement provoqué par l'auteur.

J'ai lu ce roman d'une traite. Il m'a intéressée mais n'a pas su m'émouvoir.

Les deux protagonistes, images sur papier glacé, ne m'ont pas convaincue.

En revanche, les personnages secondaires sonnent vrais et sont attachants.



Je remercie particulièrement les éditions Belfond.
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Azadi

Azadi signifie LIBERTE en persan. Un tableau de la société iranienne en 2009. Le livre raconte les réactions d'une jeune femme et des personnes qui sont à son contact après les élections jugées truquées par tous et qui ont conduit à des manifestations étudiantes en 2009 à Téhéran ; les chapitres alternent avec les personnages si bien qu'une même situation est considérée

de plusieurs points de vue, ce qui donne une richesse et une profondeur à ce récit. L'écriture est à la fois pudique et très précise.

L’histoire montre que cette femme, qui perd une partie de ses illusions, conserve une force intérieure qui lui permet de rebondir avec de nouvelles perspectives. La toile de fond historique, vécue de l'intérieur, avec des interdits vestimentaires multiples et une police des mœurs stricte permet de constater la chape de plomb qui pèse sur les libertés qui nous paraissent naturelles comme celles d'avoir les bras ou la tête nus et de regarder un homme dans les yeux. Très beau roman, j’ai beaucoup aimé.

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