Dans "Les Nétanyahou", l'écrivain américain Joshua Cohen revient sur un épisode anecdotique de l'enfance de "Bibi" Netanyahou : le recrutement du père dans une université américaine. Une anecdote métaphorique questionnant le sionisme et l'identité juive-américaine avec humour.
Dans ce nouvel ouvrage inspiré de faits réels, l'héritier de la tradition littéraire juive-américaine de Saul Bellow et Philip Roth recouvre la réalité d'un voile de fiction. le critique littéraire Harold Bloom dont les souvenirs inspirent le roman devient Ruben Blum, un historien américaniste spécialiste de la taxation. Avec son épouse Edith et leur fille Judith, les Blum forment une famille américaine moyenne d'origine juive mais ayant délaissé le traditionalisme religieux pour l'académisme et la modernité. Exit les fêtes religieuses passées au temple, place à la télévision en couleurs et au réfrigérateur. Une famille presque parfaitement assimilée.
Or le livre s'ouvre sur le rappel désagréable qu'ils ne le sont pas tout à fait. Ruben Blum devra accueillir un aspirant-professeur venu d'Israël, un certain Ben-Zion Netanyahou, au seul prétexte qu'il est le seul Juif de son université. le plongeon dans les recherches de Ben-Zion Netanyahou est un moyen pour Joshua Cohen d'évoquer l'histoire du sionisme et ses courants variés. Notamment le "sionisme révisionniste" de Ben-Zion qui, plus tard, inspira la politique d'un certain Benyamin Netanyahou, aux commandes d'Israël pendant douze ans.
Puis, dans la deuxième moitié du livre, la rencontre entre les Blum et les "Yahou" donne à voir un choc des cultures entre les Juifs d'Israël et les Juifs de la diaspora américaine une occasion de plus pour sonder l'identité particulière des juifs-américains.
A mi-chemin entre le roman de campus et le roman historique, Joshua Cohen creuse sa page d'une encre humoristique corrosive et terriblement actuelle. Et ce alors que "Bibi" Netanyahou ne quittait le poste de premier ministre qu'en juin 2021, après un règne ayant porté le sionisme révisionniste à son apogée.
Olivia Gesbert invite à sa table l'auteur Joshua Cohen pour présenter son dernier livre.
#JoshuaCohen #Netanyahou #Littérature
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Dans chaque communauté il existe une catégorie de gens infiniment dangereux pour les autres. Je ne parle pas des criminels. Pour eux, nous avons des sanctions. je parle des dirigeants. Les gens les plus dangereux aspirent invariablement au pouvoir.
On peut investir beaucoup d'intelligence dans l'ignorance quand on a vraiment besoin de s'illusionner.
L'homme naît pour devenir orphelin et laisser des orphelins derrière lui...
Celui qui veut gouverner le pays doit d'abord le divertir.
Il se trouve que mon enquête informelle montre que neuf personnes sur dix s’attendent à voir leurs parents dans l’au-delà. Mais suis-je prêt à passer l’éternité avec eux?
(Gallimard, p. 162)
Notre civilisation est une civilisation bourgeoise. Je n'emploie pas ce terme dans son sens marxiste. Dégonflé ! Dans le vocabulaire de l'art moderne et de la religion d'aujourd'hui, il est bourgeois de considérer que l'univers a été créé pour que nous l'utilisions en toute sécurité et pour nos donner confort, bien-être et soutien. La lumière voyage à trois cent mille kilomètres par seconde pour que nous puissions voir, pour nous peigner les cheveux ou pour lire dans le journal que le jambonneau est moins cher qu'hier. Tocqueville considérait le mouvement vers le bien-être comme une des plus fortes tendances d'une société démocratique. On ne peut le blâmer d'avoir sous-estimé les forces destructrices engendrées par cette même tendance. Il faut que tu aies perdu la tête pour écrire au Times comme ça! Il y a des millions d’amers voltairiens dont l'âme est pleine de furieuses satires et qui cherchent sans cesse le mot le plus mordant, le plus venimeux. Au lieu de cela, pauvre imbécile, tu pourrais envoyer un poème. Pourquoi voudrais-tu avoir plus raison dans ta confusion qu'avec leur organisation? Tu voyages bien dans leurs trains, non? Ce n'est pas la confusion qui a construit les chemins de fer. Vas-y, écris un poème, accable-les de ta vertu!
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Non, je suis content d'être débarrassé d'elle. Je ne la méprise même plus guère. Et elle peut garder tout ce qu'elle m'a escroqué, grand bien lui en fasse. Elle a dû mettre mon argent de côté. Parfait ! Qu'elle le garde avec ma bénédiction. Bénie soit la garce ! Bonne chance et adieu.
À Chicago, j’avais des affaires affectives en souffrance. À Boston ou Baltimore, j’aurais continué de penser, quotidiennement et régulièrement, à la même femme - à ce que j’aurais pu lui dire, à ce qu’elle aurait pu me répondre.
Les « objets d’amour », comme la psychiatrie les a baptisés, ne se trouvent pas si fréquemment ni ne s’abandonnent si facilement. La « distance » n’est qu’une formalité. L’esprit ne s’en aperçoit pas vraiment.
Le drame du stade du développement humain que nous vivons semble être le drame de la vengeance contre soi-même. C'est une époque où se joue une comédie d'un genre tout particulier. Ce à quoi nous assistons n'est pas simplement le nivellement que Tocqueville avait prédit, mais le stade plébéien d'une conscience de soi en évolution. Peut-être la vengeance exercée par un grand nombre, par l'espèce, sur nos élans de narcissisme (mais aussi sur notre aspiration à la liberté) est-elle inévitable. Dans ce règne nouveau de la multitude, la conscience de soi tend à nous révéler à nous-mêmes comme des monstres (…) L'individu est contraint, subissant les pressions qu'il subit, de définir le «pouvoir» tel qu'il est défini en politique et d'en tirer des conséquences personnelles pour son propre usage. C'est ainsi qu'il est amené à exercer une vengeance contre lui-même, une vengeance sous forme de dérision, de mépris, de négation de la transcendance. (…) Je suis persuadé qu'il reste des qualités humaines à découvrir. Cette découverte où redécouverte n’est entravée que par des définitions qui maintiennent le genre humain au niveau de l'orgueil (ou du masochisme) et l’amènent à revendiquer trop puis à se haïr lui-même par voie de conséquence.
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Lorsque je revins de la guerre, c'était avec l'idée de devenir éleveur de porcs, ce qui illustre peut-être l'opinion que j'avais de la vie en général.