AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Svetlana Alexievitch (920)


- Oui, la Victoire nous a coûté bien des souffrances, mais vous devez chercher des exemples héroïques. Il s'en trouve par centaines. Or vous ne montrez de la guerre que la fange. Le linge sale. Avec vous, notre Victoire devient horrible... Quel but poursuivez-vous?
- Dire la vérité.
- Et vous pensez que la vérité, vous allez la trouver dans la vie? Dans la rue? Sous vos pieds? Pour vous, elle est aussi basse que ça ? Aussi terre à terre ? Non, la vérité, c'est ce dont nous rêvons. Ce que nous voulons être !

(Extrait d'un entretien avec un censeur)
Commenter  J’apprécie          254
L’irradiation, la vague de chaleur… Mais personne ne nous avait dit que la contamination radioactive du terrain était le facteur qui affectait le plus l’organisme. Et les officiers de carrière qui nous avaient amenés là, n’en savaient pas plus. Ils n’avaient qu’une seule conviction ferme : la vodka aidait à lutter contre les effets des radiations, il fallait donc en boire le plus possible.
Commenter  J’apprécie          251
L’avenir… il devait être magnifique… il allait être magnifique, plus tard … j’y croyais ! On y croyait à une vie magnifique ! C’était une utopie … Vous, vous avez votre utopie à vous. Le marché. Le paradis du marché. Le marché va rendre tout le monde heureux… C’est une chimère ! Des gangsters se baladent dans les rues en veston rouge avec des chaines en or sur le ventre. C’est la caricature du capitalisme, comme sur les dessins du Crocodile, le journal humoristique soviétique. Une parodie ! Au lieu d’une dictature du prolétariat, vous avez la loi de la jungle : dévore les plus faibles que toi, et rampe devant ceux qui sont forts. La plus vieille loi du monde.

Commenter  J’apprécie          252
Chacun d'entre nous a son cimetière dans sa mémoire...
Commenter  J’apprécie          251
Je restais près de lui à l'hôpital et je me disais : « il va mourir. » Par la suite, j'ai compris que je ne devais pas penser ainsi. J'allais aux toilettes pour pleurer. Aucune mère ne pleure dans la chambre de son enfant, mais aux toilettes, dans la salle de bains. Je revenais toute gaie.
-Tes joues sont roses. Tu vas guérir.
-Maman, fais-moi sortir de l'hôpital. Je vais mourir. Ici, tout le monde meurt.
Où puis-je pleurer ? Aux toilettes ? Mais il y a la queue, là-bas... Et ils sont tous comme moi.
Page 150
Commenter  J’apprécie          242
Une fois de plus, je passe d’un homme à un autre, d’un document à une image. Chaque confession est comme un portrait peint : c’est plus qu’un document, une « image ». On évoque le côté fantastique de la réalité. Nous devons créer le monde non pas selon les lois de la vraisemblance quotidienne, mais « à notre image et à notre ressemblance ». L’objet de ma recherche reste toujours l’histoire des sentiments et non de la guerre proprement dite. Que pensaient ces gens ? Que voulaient-ils ? Qu’est-ce qui leur causait de la joie ? Que craignaient-ils ? Qu’ont-ils retenu ?
Hélas, de cette guerre deux fois plus longue que la Grande Guerre patriotique, nous ne savons que ce qui ne risque pas de nous troubler, car si nous pouvions nous voir tels que nous sommes vraiment, nous nous ferions certainement peur à nous-mêmes.
Commenter  J’apprécie          240
Ils ont éparpillé notre chagrin à travers le monde. Seuls les morts reviennent ici. On n’autorise que le retour des morts. Les vivants, eux, se faufilent la nuit. Par la forêt...
Commenter  J’apprécie          240
Une Ukrainienne vend au marché de grandes pommes rouges. Elle crie pour attirer les clients : " Achetez mes pommes ! De bonnes pommes de Tchernobyl ! "
Quelqu'un lui donne un conseil : " Ne dis pas que ces pommes viennent de Tchernobyl. Personne ne va les acheter.
- Ne crois pas cela ! On les achète bien ! Certains en ont besoin pour la belle-mère, d'autres pour un supérieur ! "
Commenter  J’apprécie          232
Les gens n'ont pas envie d'entendre parler de la mort. De l'horrible...
Mais moi, je vous ai parlé d'amour... De comment j'aimais.
Commenter  J’apprécie          230
À la morgue, ils me demandèrent : "Voulez-vous voir comment nous l'avons habillé ?" Bien sûr, je le voulais ! Il était revêtu de sa grande tenue, la casquette posée sur sa poitrine. On n'avait pas pu le chausser car personne n'avait pu trouver de chaussures à sa taille : ses pieds étaient trop gonflés... Il avait fallu également couper l'uniforme, car il était impossible de le lui enfiler, il n'avait plus de corps solide... Il n'était plus qu'une énorme plaie... Les deux derniers jours, à l'hôpital, je lui ai soulevé le bras et l'os a bougé, car la chair s'en était détachée...
Commenter  J’apprécie          232
Nous nous préparions à la guerre. À la guerre nucléaire. Nous construisions des abris. Nous voulions nous cacher de l’atome comme des éclats d’obus. Mais il est partout… Dans le pain, dans le sel…Nous respirons de la radiation, nous mangeons de la radiation…
Commenter  J’apprécie          230
Personne ne sait ce qu’il y a dans l’autre monde. Ici, c’est mieux… On connaît. Comme disait ma mère : on se montre, on passe du bon temps et l’on fait ce que l’on veut.
Commenter  J’apprécie          230
Vous ne devez pas oublier que ce n'est plus votre mari, l'homme aimé, qui se trouve devant vous, mais un objet radioactif avec un fort coefficient de contamination.
Commenter  J’apprécie          230
Un événement raconté par une seule personne est son destin. Raconté par plusieurs, il devient l'Histoire.
Commenter  J’apprécie          220
- Nous avons vu de tout, m’ont-ils dit. Des victimes d’accident de la route, des personnes assassinées au couteau, des cadavres d’enfants calcinés dans des incendies… Mais une chose pareille, c’est bien la première fois ! Les Tchernobyliens meurent de la façon la plus horrible…
Commenter  J’apprécie          220
Dans les premiers jours, la question « qui est coupable ? » nous semblait la plus importante. Plus tard, lorsque nous avons appris plus de choses, nous nous sommes demandé : « Que faire ? » Comment se sauver ? Maintenant que nous nous sommes faits à l’idée que cela va durer non pas un an ou deux, mais plusieurs générations, nous avons commencé à retourner mentalement en arrière.
Commenter  J’apprécie          220
Et les quatre cent mineurs qui creusaient jour et nuit une galerie sous le réacteur ? Il fallait creuser ce tunnel pour y verser de l'azote liquide et congeler un coussin de terre, comme disent les ingénieurs. Autrement, le réacteur aurait risqué de s'enfoncer dans les eaux souterraines. Ces mineurs venaient de Moscou, de Kiev, de Dniepropetrovsk. Ils ne sont mentionnés nulle part. Nus, accroupis , ils poussaient devant eux des wagonnets. La température atteignait cinquante degrés, et la radiation, des centaines de röntgens.
Maintenant, ils agonisent... Et s'ils n'avaient pas fait cela ? Ce sont des héros et non pas des victimes de cette guerre qui ne semble pas avoir eu lieu. On parle de catastrophe, mais c'était une guerre. Les monuments de Tchernobyl ressemblent à des monuments de guerre.
Page 140
Commenter  J’apprécie          224
Un Russe, ça tient sur trois béquilles : "on sait jamais", "on verra bien", et "on s'en sortira toujours".
Commenter  J’apprécie          220
Et puis une grue soulève la maison et la dépose dans la fosse...Les poupées, les livres, les bocaux de verre gisent par terre...Une pelleteuse repousse tout dans le trou, puis on le comble avec du sable, de l'argile et l'on dame la surface. A la place du village, il n'y a plus qu'un champ. Et dessus, on a semé de l'orge. Notre maison est enterrée là-bas.
Commenter  J’apprécie          213
Je n’ai pas peur de la mort en elle-même, mais je ne sais pas comment je vais mourir. J’ai vu agoniser un ami. Il a gonflé. Il est devenu énorme, comme un tonneau… Et un voisin. Il était là-bas lui aussi. Opérateur d’une grue. Il est devenu noir comme du charbon et a rétréci jusqu’à la taille d’un enfant. Je ne sais pas comment je vais mourir. La seule chose que je sache avec certitude, c’est que ma vie ne sera pas longue avec ce que j’ai. Si seulement je pouvais sentir l’approche du moment, je me tirerais une balle dans la tête… J’ai fait l’Afghanistan, également. C’était plus simple d’y recevoir une balle.
Commenter  J’apprécie          210



Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Svetlana Alexievitch Voir plus

Quiz Voir plus

Les classiques de la littérature sud-américaine

Quel est l'écrivain colombien associé au "réalisme magique"

Gabriel Garcia Marquez
Luis Sepulveda
Alvaro Mutis
Santiago Gamboa

10 questions
372 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature sud-américaine , latino-américain , amérique du sudCréer un quiz sur cet auteur

{* *}