Comment ose-t-il? Non, mais comment ose-t-il? Voilà un auteur qui a passé des années à décortiquer des carnets de poilus, qui a lu des centaines et des centaines de pages, et qui ici, vient bafouer la mémoire de ces hommes de la sorte!
Vous allez dire que j'exagère, mais ce qu'il avance à la fin a failli marquer mon arrêt de mort, étouffement après lecture un vendredi soir. Je ne vais pas vous raconter ce qu'il avance, ce ne serait pas drôle, et les autres lecteurs de ce livre vous diront que ce n'est pas si grave, qu'ils ont bien compris son message de paix, mais pour moi, trop c'est trop.
Certes, il est bien écrit Roman sur la couverture, mais je n'avais jamais vu un historien prendre autant d'aises avec l'histoire. A moins qu'il ne m'apporte la preuve de ce qu'il avance... alors, où sont les sources??
Je ne voulais déjà lui mettre que trois étoiles, la fin m'en a fait retirer une supplémentaire. Mais bon, il n'y a pas que cela, parlons du contenu. Il y a aussi beaucoup à dire.
M. Guéno reprend donc l'histoire de sept hommes qui ont participé à la Grande Guerre. Certains ont survécu, d'autres pas. Parmi ces personnes, on arrive sans peine à distinguer ceux qui intéressent le plus l'auteur. Et cela m'a assez gênée. Il y a des sujets plus inspirants que d'autres, j'en conviens, mais la différence d'écriture est énorme, par exemple entre le violoncelliste
Maurice Maréchal et le cas de notre cher
Alain-Fournier.
D'ailleurs, parlons-en, d'
Alain-Fournier. Il a réussi à me révéler une jolie supercherie. Au milieu du texte"écrit" par l'auteur, je retrouve, sans guillemets, comme de la plume de celui-ci, une phrase du Grand Meaulnes... mot pour mot. Vous savez, la fameuse : " j'étais à une hauteur, à un degré de perfection et de pureté que je n'atteindrais jamais plus. Dans la mort seulement, je retrouverais peut-être la beauté de ce temps-là..." Ici il ne nous parle pas d'un domaine mais d'une femme... Mais tout de même, cela m'a amenée à m'interroger sur le reste du livre... si une telle phrase apparaît au milieu du texte, combien d'autres ont été volées aux lettres des Poilus?
Sans compter quelques coquilles plus grosses que moi, comme toujours M. Henri-Alban Fournier qui nous raconte l'année 2013... Par pitié, relisez vos maquettes avant de les publier!
Plus d'officiers que de petites gens (mais on commence à avoir l'habitude), qui ne se gênent tout de même pas pour dénoncer le manque d'humanité et l'ambition sans mesure qui se cache dans le coeur des planqués.
Une question de plus toutefois : pourquoi seulement des Français? Pourquoi pas l'histoire d'un soldat allemand, ou d'un alsacien déchiré entre deux patries? Pourquoi pas un Anglais, un Écossais?
Je ne juge pas, mais j'aurais bien aimé savoir comment et pourquoi ces sept hommes ont été choisis.
Malgré l'intérêt que je porte à cette période de l'histoire, j'ai tout de même trouvé cette lecture assez laborieuse. Je ne saurais l'expliquer, car l'écriture est belle et fluide. Mais j'ai eu beaucoup de mal.
J'ai ressenti un certain malaise tout au long de la lecture, mal au coeur de constater qu'un auteur de cette envergure surfe sur la vague du centenaire pour publier un livre qui n'est pas tout à fait abouti. Un bon coup de pub, en somme. Mal au coeur pour ces hommes qu'on prend comme prétexte pour remplir son tiroir-caisse. Dur constat, j'ai rarement été aussi amère, mais j'ai ressenti cette colère pendant toute ma lecture. J'ai eu l'impression que nos hommes morts pour la France n'étaient plus respectés. Et ça m'a fait mal, surtout venant de cet auteur.
Essayez-le si vous le souhaitez. Pour ma part, plus jamais je ne lirai M. Guéno.
Un gros merci tout de même aux Editions le Passeur. Vous êtes rapides comme l'éclair! Moins de deux jours d'attente, quel sérieux!