(...) je cite un texte qui est tout à fait prophétique parce qu’il annonce, je dirais, tout le fonctionnalisme contemporain et même le structuralisme : « Il y a grand doute qu’il se peut trouver évident profit au changement d’une loi reçue telle qu’elle soit, s’il n’y a de mal à la remuer. Longtemps une police – c’est-à-dire un ordre social – c’est comme un bâtiment de diverses pièces jointes ensemble d’une telle liaison qu’il est impossible d’en ébranler une que tout le corps ne s’entasse. »
Et donc les coutumes d’un peuple forment un tout et ça ne sert à rien d’en critiquer une parce que si on en critique une, c’est tout le reste qui va s’effondrer et qu’à ce moment-là c’est donc l’effondrement d’une culture au lieu d’avoir son assiette et son évolution.
Et alors, si la première orientation de sa pensée conduit à la théorie du bon sauvage, si la deuxième orientation, qui serait celle de construire à partir de zéro une société rationnelle, conduit au Contrat social, alors la troisième conduit au relativisme culturel intégral, et nous retrouvons, évidemment, les trois cultures, les trois manières d’envisager les problèmes dans les doctrines de l’ethnologie contemporaine.
Il y aurait encore, évidemment, bien des choses à dire sur ce chapitre et en particulier sur la manière dont Montaigne entreprend de décrire les sauvages du Brésil. »
Lukas Bärfuss présente "Le carton de mon père – Réflexions sur l'héritage", en librairie dès le 2 février 2024.
À la mort de son père, il y a vingt-cinq ans, Lukas Bärfuss refuse l'héritage, constitué essentiellement de dettes. Il ne garde qu'un carton, rempli d'une triste paperasse. Quand, à la faveur d'un grand rangement, il l'ouvre et passe en revue ce qu'il contient, c'est toute son enfance précaire qui défile.
À la lumière de la Bible, Darwin, Claude Lévi-Strauss ou Martine Segalen, l'écrivain décortique les notions de famille et d'origine, ces obsessions dangereuses de notre civilisation. Il en profite pour évoquer les "biens jacents", ces biens sans propriétaires que sont les océans, les animaux sauvages, et surtout les déchets. Dans cet essai qui est sans doute son livre le plus personnel, Lukas Bärfuss démontre une fois encore son esprit critique acéré.
https://editionszoe.ch/livre/le-carton-de-mon-pere
Réalisation: Fran· Gremaud
Tournage réalisé dans les locaux de la HKB Berne
Avec le soutien de Pro Helvetia
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