Les voyageurs

Daniel Walther (1940 – 2018), est un journaliste et un écrivain français de science-fiction et de fantastique. Il est l'auteur d'une oeuvre importante, une trentaine de romans et plus de deux cents nouvelles. Il est l'une des voix les plus singulières du fantastique français. Les Voyageurs, une novella, vient d'être rééditée.
Décembre 1966. Daniel, le narrateur, sorti de longues années de dépression noyées dans la boisson, accepte l'invitation d'un ami, le seul qui lui reste, résidant en Allemagne ; Il embarque dans un train. Bien que presque vide, un voyageur, Werner Kosnow, s'installe à ses côtés, entame une discussion tournant autour de l'hypnotisme et fait surtout parler Daniel qui se livre à cet inconnu, à son grand étonnement, lui le taciturne. Un léger mystère plane déjà. Quand Kosnow montre la photo d'une jolie femme à Daniel, la qualifiant de « fille du Mal », lui offrant un poignard à manche d'ébène dans une gaine de cuir écarlate et lui intimant l'ordre de la tuer pour sauver sa propre vie, le mystère monte d'un cran et ne fera que s'amplifier page après page...
Durant toute la suite du récit, rédigé dix ans plus tard par notre héros, Daniel ne sait jamais s'il rêve ou s'il vit une aventure extraordinaire autant que périlleuse : Kosnow disparait, le train s'arrête subitement dans une petite gare imprévue où Daniel descend, irrésistiblement attiré ou poussé par une volonté extérieure, vers une demeure aux volets clos dont la porte d'entrée est surplombée de l'inscription en latin « Ici habite la Succube » !
Daniel Walther entraine avec maestria le lecteur dans une histoire digne de Lovecraft, un héros agissant comme un pantin manipulé par une entité supérieure, des voix qui lui parlent, des décors de neige et de brumes, des acteurs secondaires aux réactions étranges qui semblent en savoir plus que notre malheureux Daniel et enfin la confrontation finale, le but ultime de la mission qui lui a été confiée.
Un excellent texte, superbement écrit pour servir un scénario montant en puissance et mystère page après page. le lecteur comme le héros sont hypnotisés par cet environnement lugubre et plein d'inconnues agréablement ponctué d'érotisme quand la succube entrera en scène (« J'étais dans un état de trouble sexuel extrême et dans des dispositions viriles proprement fantastiques ») mettant Daniel au bord de l'épectase.
Je découvre cet écrivain, vite je vais poursuivre avec un roman.

"Le poignard qui file appartient encore à qui l'a lancé et déjà à qui va le recevoir". Cette citation de Louis Scutenaire en exergue des Voyageurs aura eu raison de ma bonne résolution de ne rien acheter ce jour-là en librairie à Paris. Cette incapacité une fois la première page tournée à reposer le livre sur la table parce que quelque chose vous a happé. L'incipit étant à la mesure de la phrase précédente... j'étais foutue.

D'autant plus qu'une histoire qui commence dans un train se prête à une lecture ferroviaire. Notre héros se rend en Allemagne pour voir un ami de longue date. Un voyage cent fois reporté pour cause d'addiction à l'alcool et d'angoisses récurrentes. Mais cette fois, il est assis dans ce train qui roule vers les retrouvailles. Sauf qu'un tout autre démon s'installe à ses côtés, qu'un pacte va se nouer bien malgré lui et qu'une chasse impromptue à la succube le dévie de son but initial.

C'est un texte étrange. Fantastique dans tous les sens du terme. Et d'une efficacité féroce. Une centaine de pages pour plonger le lecteur dans un univers sombre et ésotérique, érotique aussi. Ce héros bien malgré lui replonge dans des abîmes d'angoisse pour mener à bien une quête quu n'est pas la sienne et qu'il ne comprend. Vaille que vaille, il se bat contre cette femme monstre qui cherche à le dévorer.

Comme beaucoup, je ne connaissais pas Daniel Walther. Pourtant, cet auteur a tout pour me plaire. Au point qu'à peine ma lecture terminée (entre Lisieux et Caen) j'ai fouiné dans le catalogue de ma bibliothèque pour voir si d'autres textes étaient disponibles. Les maîtres du fantastique sont trop rares pour qu'une fois découvert, on les laisse s'échapper.

Daniel Walther nous amène ici dans une histoire fantastique aux relents gothiques des plus réussis de l'auteur. C'est d'autant plus intéressant en sachant que cette réédition d'une nouvelle déjà parue on ne sait où (comme pour une bonne partie de l'oeuvre des Walther) constitue la première parution de l'auteur depuis son décès en 2018. La simple existence de ce livre témoigne donc de la qualité de la plume de Walther lorsque l'on connait la situation précaire de l'édition des littératures de l'imaginaire dans la francophonie. Si l'on décide de dépenser ces quelques feuilles pour la plume d'un auteur français à titre posthume, c'est qu'elle doit être d'un certain intérêt.

Comme de fait, cette novela est particulièrement délicieuse, et l'on y retrouve l'amour qu'à l'auteur pour le fantastique à chaque page. Je ne pourrai jamais trop le dire, mais la prose de Walther est l'un des aspects de son oeuvre les plus intéressants, comme en témoigne ce récit à la première personne qui nous emporte dans un univers à mi-chemin entre le rêve et une réalité cru, comme à son habitude. On y retrouve d'ailleurs des thèmes chers à l'auteur; le froid, le sang, le sexe, tout cela baigné dans une atmosphère étrange ou chaque détail nous sont rapportés par un narrateur d'une sensibilité particulière, qui exacerbe chaque détail au point de nous rendre fou, ce qui fonctionne très bien avec le récit.

C'est donc une grande réussite qui méritait amplement d'être rééditée, tout comme le sera prochainement la trilogie de Swa, une oeuvre que j'apprécie tout particulièrement et que je recommande à tous ceux qui ont apprécié cette novela.

“NOTRE ROUTE INLASSABLEMENT SE DEROULE DANS UNE NUIT PROFONDE. UNE NUIT INTERMINABLE QUI NE FINIRA QU'AVEC CE MONDE..“

J'ai lu ce livre avec le regard fuyant d'une cavalcade effrénée, comme un train puissamment en marche vers les ténèbres d'une nuit poétique..

Avec une paradoxale lenteur, une apesanteur, quand les yeux s'ouvrent, comme pour reprendre leur souffle, je me suis laissé emporter par la fièvre de ce court récit, et, à vous dire honnêtement, j'en redemande, à être touché par l'étrangeté d'un récit ensommeillé de lugubres desseins, d'un réveil nocturne, la tête cognant sur la paroi de la cabine du train marquant le sortir de la réalité..

“Ce cauchemar-là débuta exactement comme un rêve. Je m'explique : chacun d'entre nous, et pour peu qu'il soit doué d'un minimum de fantaisie ou d'imagination, s'est déjà endormi dans un train en marche, bercé par la chanson monotone et fascinante des rails..“

Ce livre contera t'en bien que mal l'échappée d'un homme qui aura voulu se délivrait, en partance vers une vie qui aurait pu sembler plus saine, mais cet homme voulant s'éloigner de ses angoisses, n'aurait imaginé faire une t'elle rencontre.. celle d'un étrange voyageur.. dès lors une nouvelle dimension s'ouvrira à lui…

Je m'en retourne à cette cabine de train ballotté sur les railles de mon imaginaire, la tête pleine de cette dantesque aventure..

Ami(e)s de l'aventure, l'aventure infernal nous appelle !

Les éditions du Typhon se lancent dans le format poche avec la collection Soleils noirs, dont ces Voyageurs font partie.

Daniel Walther signe ici une histoire à la sauce Lovecraft avec hallucinations et surtout personnage principal qui raconte l'horreur vécue des années plus tôt ! le côté un peu lubrique en plus.

L'histoire d'une rencontre dans un train qui fait vaciller les frontières du réel. le héros se retrouve avec un paquet au contenu particulier et une mission essentielle sortie de nulle part.

Le style est riche, peut-être un peu trop, et l'on pourrait parfois presque penser à une parodie du maître de Providence dans l'emphase horrifique et les mentions répétées des limites de la langue pour exprimer la terreur - #teamindicible.

La postface de Richard Comballot est intéressante et permet de mieux connaître l'auteur, dont bien peu d'oeuvres sont encore en circulation aujourd'hui !

Quelques passages intéressants, mais quelque peu décevant dans l'ensemble.