AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Nicolas Richard (Traducteur)
EAN : 9782264019189
190 pages
10-18 (24/09/1993)
3.24/5   17 notes
Résumé :
Keith Abott fut pendant dix-huit ans l'un des plus fidèles compagnons de Brautigan. Cette biographie est donc un formidable témoignage sur les sixties psychédéliques de San Francisco, la vie échevelée à Haight Street, et les happenings beatniks. On y apprend l'adulation dont Brautigan était l'objet de 1967 à 1974, la maniaquerie avec laquelle il rédigeait ses ouvrages. Ensuite, c'est sa vie dans la ferme du Montana. Puis vient le temps de la paranoïa. Brautigan est ... >Voir plus
Que lire après Brautigan, un rêveur à BabyloneVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Témoignage d'un ami, cette biographie est aussi une tentative de réhabilitation de Richard Brautigan, cinq ans après sa mort. Compagnon du succès et spectateur de la chute.
C'est un livre personnel de souvenirs. Keith Abbott fut très proche de l'écrivain et poète américain pendant 18 ans. Sa fréquentation assidue dans des années soixante à San Francisco l'autorise à relater de nombreuses anecdotes personnelles. Il le suit de la période des vaches maigres au succès rapide. Quelques analyses générales des écrits généralement piochées dans des articles ou des livres permettent de témoigner du travail littéraire déroutant de Brautigan. C'était un passionné du travail d'écriture. Il connut une gloire fulgurante. Une admiration en demi-teinte par Keith Abbott, on ne peut pas parler d'un fan inconditionnel. Tout juste s'il ne justifie pas les refus lorsque les éditeurs vont commencer à retoquer nouveaux travaux.
Plus tard, lorsque la gloire ne sera plus que l'écho d'un passé lointain, Brautigan se retire dans le Montana. L'auteur assiste très épisodiquement à la longue agonie d'un homme à l'orgueil blessé. Rongé par l'alcool, les dérives, les comportements excessifs et violents, Brautigan s'enfonce dans la solitude et le déni jusqu'à son suicide en 1984.
Point positif de l'ouvrage, vue de notre fenêtre, cinquante ans plus tard, la restitution de cette période hippie où les expériences les plus originales et loufoques étaient recherchées. Au rendez-vous des performances mémorables ou des échecs pitoyables. Qu'importe ! Il y avait une sorte de folie libératoire dans l'air que l'auteur rapporte sans édulcorer la situation.
A la mort de Brautigan peu de voix s'élèveront pour rendre hommage au poète déchu, à son oeuvre ou à l'homme généreux qu'il fut un temps. le livre est bienveillant et l'auteur insiste sur son désir de rétablir une image plus positive. L'autodestruction de Brautigan est toujours remise en perspective, expliquée par les traumatismes d'une enfance malheureuse, par l'addiction à l'alcool. La charge reste lourde. Est-elle réelle? est-elle trop mise en avant ? On ressort avec un sentiment mitigé.
Pas sûr que Brautigan ait apprécié cette biographie.

Commenter  J’apprécie          190
Moins une biographie qu'un témoignage, Un rêveur à Babylone est publié en 1989, soit quatre ans après la mort de Brautigan. Abbott revient sur leur passé commun, leurs moments partagés, sans chercher à éclairer particulièrement les zones d'ombre ou les inconnues de l'équation. le choix de l'image de couverture par les éditions Cambourakis apparaît particulièrement judicieux : sous le grand chapeau, Brautigan semble prêt à disparaître, avec son visage sans contours et son regard dissimulé par de grandes lunettes mates. C'est que malgré les explications que tente d'accumuler son ami, il reste une grande question, un plein mystère…

Le livre commence par nous plonger dans le San Francisco des années 1960 et 1970, plein de tentatives sociales et artistiques, « cocktail de résultats mitigées et de coups de génie ». le jeune Abbott rencontre bientôt Brautigan, le bizarre Brautigan qu'il s'affaire à décrire sous toutes les coutures. Plusieurs mots, plusieurs idées reviennent, comme un leitmotiv : l'excentricité, la marginalité. L'orgueil, mais aussi la candeur. D'origine très modeste, Brautigan croit en sa vocation d'écrivain, y cherche même une forme de validation perpétuelle que la réception de ses ouvrages, fondamentalement aléatoire, ne peut jamais satisfaire tout à fait. Auteur boudé par la critique officielle, qui sans être passé par elle connaît bientôt le succès, il semble pris d'un besoin de revanche sur la vie qui le mène à trop écouter les sirènes de la gloire.

Brautigan

Récit d'une déperdition de soi, fruit des démons intérieurs qui criaient toujours plus fort, Un rêveur à Babylone traduit aussi l'admiration de Keith Abbott pour cet ami qui a tant travaillé et qui, contre toute attente, a fini par réussir. Cela m'a rappelé, à plusieurs occasions, le ton d'André Lebey lorsqu'il écrit sur Jean de Tinan, son ami perdu, dans Jean de Tinan, souvenirs et correspondance en 1922 ; et je pense que les deux livres comportent plus d'échos qu'on ne pourrait penser au premier abord. Il est juste dommage que cela passe, parfois, par la condamnation de certains textes, jugés moins réussis, plus maladroits que d'autres. On pourrait penser que je râle car certains de mes textes préférés figurent parmi les oeuvres décriées, mais il y a fort à parier que les amis ne sont pas toujours les meilleurs juges d'une production littéraire. Il y voient trop, peut-être, les liens avec nos peurs, nos souvenirs, nos anecdotes. L'auteur ne manque cependant pas de recul, et il analyse les divergences entre le Brautigan qu'il a connu, le Brautigan médiatique et le Brautigan écrivain. de tout cela, il ressort que la biographie est un roman comme un autre, et que le personnage de Brautigan a de quoi fasciner encore aujourd'hui. Les extraits cités m'ont donné envie de continuer mon exploration de son oeuvre, les critiques disséminées dans le récit m'ont livré quelques clés pour en compléter ma lecture… et si tout peut-être, ou du moins beaucoup de choses, est sujet à caution dans ce petit livre, il m'a apporté quelques bribes de ce que j'aime tant chez cet auteur : une poésie du quotidien, défigurée par les petites fatalités qui traînent.
Lien : https://gnossiennes.wordpres..
Commenter  J’apprécie          10
Ami de Brautigan, l'auteur admet d'emblée qu'il écrit cette biographie pour corriger le traitement médiatique qui a suivi la mort de son collègue écrivain. Malgré cette intention, je n'ai pas senti de parti pris ou de complaisance outrancière au fil des pages. Cette série d'anecdotes dresse un portrait assez impressionniste des années 70 et 80 dans le cercle littéraire de la contre culture américaine et de la poésie de la côte Ouest, de même que du caractère pour le moins volcanique de Brautigan. N'ayant toutefois ni lu quoi que ce soit de cet auteur, ni non plus d'aucun de ses contemporains dont il est question, mon intérêt est resté tout relatif. Description d'une vie tourmentée certes, mais il y a en tellement d'autres aussi que, sans point d'ancrage particulier, je n'ai jamais réussi à connecter vraiment avec ce texte.
Commenter  J’apprécie          30
Je n'ai jamais rien lu d'autre de lui que les extraits de ses livres que place Keith Abbott dans sa biographie, mais le personnage dépeint est très haut en couleur, bien humain et bien vivant, dans cette époque où tout semble assez psychédélique mais néanmoins beaucoup plus simple. On (re)découvre San Francisco des années 60-70, une ville propice aux écrivains de la génération beat, aux manifestations littéraires, aux envies débridées de faire ce que l'on veut. On sympathise avec des groupes de potes qui s'inspirent mutuellement pour leurs romans, qui tentent d'avoir une vie aussi rocambolesque qu'ils aimeraient la montrer dans leurs écrits. Et en dehors de ça, on se rend compte aussi des travers de la célébrité qui accable bon nombre de ceux qui y ont accès et de la difficulté de sortir des schémas imposés par la vie, par la société.

Malgré les aspects assez malheureux des débuts et de la fin de vie de Brautigan, on se prend d'amitié pour cet homme loufoque, attentionné, plein d'idées et complètement dépassé par les choses de la vie. Je dirai presque qu'on se sent d'attaque pour aller faire une bonne partie de pêche à la truite. En tout cas, c'est un récit très intéressant pour peu que vous soyez branchés contre-culture et littérature américaine de cette époque-là, et on retrouve un peu de ces incroyables aventures si propres à la petite bande de Burroughs, Ginsberg, Kerouac et compagnie.

(voir la critique intégrale sur le blog)
Lien : http://lecombatoculaire.blog..
Commenter  J’apprécie          20
Une courte, intense et soigneusement ambiguë biographie de Richard Brautigan.

Sur mon blog : https://charybde2.wordpress.com/2016/11/20/note-de-lecture-brautigan-un-reveur-a-babylone-keith-abbott/
Commenter  J’apprécie          20

Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
En 1966, ce qui était le plus frappant chez Richard, c’était son optimisme constant. Compte tenu de son mode de vie au jour le jour, le terme ne peut traduire l’aura héroïque dans laquelle semblait baigner sa vie quotidienne. D’après ce que j’ai pu constater, son emploi du temps consistait à écrire le matin, passer ensuite une série de coups de fil, puis se lancer à corps perdu dans la vie de San Francisco emplie de joies et d’imprévus. Papillonnant d’un type qu’il connaissait vaguement à une vieille connaissance, d’un bar au café suivant, il était clair qu’il considérait sa vie quotidienne comme la matière première de son art. Une portion de cet art se trouvait reproduite dans ses écrits, une grande partie ne l’était pas. Cette déperdition ne semblait pas le chagriner. Il lui arrivait même de fêter ça. Son style de vie et ses écrits contrastaient assurément avec la confiance qu’il pouvait avoir en sa bonne étoile. J’avais beau personnellement apprécier Le Général sudiste, j’étais à des lieues de soupçonner que Richard pourrait un jour trouver un public assez vaste pour lui permettre de gagner sa vie. Et je n’étais pas le seul de cet avis. Peu nombreux étaient ceux qui pronostiquaient qu’un tel public naîtrait du jour au lendemain.
Commenter  J’apprécie          30
Les gros titres de Rolling Stone évoquaient un passage en hôpital psychiatrique durant sa jeunesse, et insinuaient qu'il s'était adonné à des pratiques sado-maso. L'histoire glauque de son corps en décomposition était étalée au premier plan, de même que ses sordides derniers jours à traîner de bar en bar. On a passé sous silence la spécificité de son écriture, ce qui l'avait momentanément rendu si étonnamment, si bizarrement populaire. (...) Ces articles défiguraient le Richard Brautigan que je connaissais, l'homme sensible (...) Il me manquait, l'auteur appliqué des meilleurs romans, celui qui retravaillait sans cesse sa prose, pour aboutir à cette clarté et cette simplicité qui lui tenait tant à coeur.
Commenter  J’apprécie          60
Lorsqu’au début de l’année 1985, les magazines Rolling Stone et Vanity Fair y sont allés de leur tirade sur Brautigan, on a claironné les aspects sensationnels de sa vie. Les gros titres de Rolling Stone évoquaient un passage en hôpital psychiatrique durant sa jeunesse, et insinuaient qu’il s’était adonné à des pratiques sado-maso. L’histoire glauque de son corps en décomposition était étalée au premier plan, de même que ses sordides derniers jours à traîner de bar en bar. On a passé sous silence la spécificité de son écriture, ce qui l’avait momentanément rendu si étonnamment, si bizarrement populaire. On a mis l’accent sur le personnage de l’auteur californien à la mode qu’il incarna à ses débuts, mais on a assaisonné son image de hippie d’une forte dose de ce cynisme typique des années 1980. Comme si toute personnalité excentrique ne pouvait être que la conséquence de tendances perverses et mauvaises inévitablement mues par quelque force malsaine.
Ces articles défiguraient le Richard Brautigan que je connaissais, l’homme sensible, qui prenait soin de ses amis, généreux à l’extrême, quelqu’un qui aimait se montrer agréable avec les autres. Il me manquait, l’auteur appliqué des meilleurs romans, celui qui retravaillait sans cesse sa prose, pour aboutir à cette clarté et cette simplicité qui lui tenaient tant à cœur.
Peu après ces papiers épouvantables, une émission de radio sur les grandes ondes célébra ses écrits, et donna de lui, cette fois-là, une impression bien meilleure. Il s’agissait non pas de critiques ou d’anciens amis, mais essentiellement de témoignages de ses lecteurs. Un fan a expliqué comment, lorsqu’il était étudiant, il se servait d’expressions de La Pêche à la truite en Amérique telle que par exemple « le pochard qui marchait au Kool-Aid », comme mot de passe avec ses copains pour pénétrer des mondes mystérieux inaccessibles aux autres. Les meilleurs écrits de Richard rayonnaient de ce sentiment de joie qu’on éprouve à détenir un secret. Ce sentiment qui était aussi très présent dans sa vie de tous les jours. Cette courte biographie de Brautigan, c’est dans cet esprit que je l’ai écrite, comme pour redécouvrir un souvenir enfoui dans le passé, un secret partagé pendant les dix-huit années qu’a duré notre amitié.
Commenter  J’apprécie          00
Sa croyance profonde en l'intuition et l'émotion le condamnait à revenir sans cesse à son propre malheur, comme pour rejouer son drame à l'infini. Il ne pouvait, s'en guérir, car son art, tout en lui empoisonnant l'existence, ne lui laissait pas de répit.
Commenter  J’apprécie          30
Il ne se plaignait jamais de sa situation financière, et s’entourait même d’un halo de mystère à ce sujet. Jamais la question ne fut abordée lors de nos promenades dans le Haight. Price me confia que Richard travaillait un ou deux jours par mois dans un labo pour quelque étrange inventeur, il nettoyait des tubes à essai et procédait au mélange de substances chimiques. La veille du règlement de son loyer, il ne manquait jamais d’aller voir à la librairie City Lights si ses recueils de poésie, placés en dépôt, avaient été vendus – Lay the marble tea ou The Octopus frontier. Il faisait ensuite la ronde des bars de North Beach et mettait le grappin sur quiconque était susceptible de le dépanner d’un peu d’argent pour manger. Par la suite, quand il a été riche et un pilier à la terrasse du Enrico’s, sur Broadway, je n’ai jamais vu Richard refuser l’aumône à qui que ce soit.
Commenter  J’apprécie          00

autres livres classés : biographieVoir plus
Les plus populaires : Non-fiction Voir plus

Lecteurs (70) Voir plus



Quiz Voir plus

Les écrivains et le suicide

En 1941, cette immense écrivaine, pensant devenir folle, va se jeter dans une rivière les poches pleine de pierres. Avant de mourir, elle écrit à son mari une lettre où elle dit prendre la meilleure décision qui soit.

Virginia Woolf
Marguerite Duras
Sylvia Plath
Victoria Ocampo

8 questions
1718 lecteurs ont répondu
Thèmes : suicide , biographie , littératureCréer un quiz sur ce livre

{* *} .._..