Trente centimètres d'acier devrait porter en sous-titre La Souffrance du lecteur impuissant. Embarquez dans ce livre et peut-être, comme moi, aurez-vous envie, passées les dernières pages, de bazarder le bouquin par la fenêtre, de le brûler ou de le faire passer à la déchiqueteuse (ce que vous ne ferez pas, naturellement, car vous aurez finalement trop souffert avec ce roman pour pouvoir lui faire ensuite le moindre mal).
Voici le
Premier et Unique de Tanith envoyé sur une planète pour aider une Alliance de nations dans une guerre qui dure depuis quarante ans et qui se révèle être un beau bourbier style 14-18. Au programme, des tranchées, des corps à corps à l'arme blanche dans la boue et les cadavres et des bombardements qui pulvérisent indifféremment morts et vivants. A l'avant, de braves gars noyés dans le désespoir qui vont par centaines ou plus se faire charcuter chaque jour pour gagner cent mètres de terrain ; à l'arrière, de grands stratèges qui n'ont pas compris que la guerre a évolué et qui refusent d'entendre les conseils donnés par les Impériaux venus leur donner un coup de main. Non seulement refusent mais contraignent Gaunt et ses hommes à participer au gâchis général de vies humaines en refusant d'exploiter leurs talents d'infiltration… Vous aurez une première idée du niveau d'exaspération auquel le roman saura vous hisser.
Parallèlement à cela, dans la lignée du tome précédent (Les Armes de Tanith, attention au spoil), Cuu, le Fantôme psychopathe qui a déjà assassiné Bragg Essaye-Encore, refera des siennes. Sanglez-vous avant de lire les passages où il apparaît, vous risquez de bondir sur place et de vouloir casser, de rage, toute la baraque…
Vous le conviendrez avec moi : un roman qui est capable de susciter autant d'ire et de désespoir chez son lecteur est assurément un roman réussi. C'est parce qu'il a su nous rendre attachants et proches des personnages dont on veut la survie ; parce que le récit distille l'exaspération avec une efficacité implacable, dans ses descriptions comme dans ses dialogues et ses retournements de situation. Typiquement, donc, le genre de roman qu'on adore tout en détestant ce qui s'y passe.
S'il y a un seul
Dan Abnett à lire, à mon avis, c'est bien celui-là.