Abandonner cette logique du "moi, moi, moi d'abord" n'est pas une mince affaire. Il est pourtant mille occasions d'arrêter de nourrir un ego vorace.
Matthieu Ricard :
Gandhi disait que, si l'on pratiquait le principe d'oeil pour oeil, dent pour dent, le monde entier serait bientôt aveugle et sans dent.
L'amitié guérit de bien des maux, elle donne des ailes et console. (Alexandre Jollien)
Alexandre : Dans le métro, lorsque des gens ricanent à mon passage, je profite de l'occasion pour me rappeler que je ne me réduis pas aux apparences, que le fond de mon être échappe à tous les regards.
Quand on observe ceux chez qui l'estime de soi semble bien fonctionner, on s'aperçoit qu'ils n'ont pas du tout un ego boursouflé. Ils ne se demandent pas plus que nécessaire ce qu'on peut penser d'eux et ils s'engagent dans l'action, le lien, sans se poser incessamment des questions sur eux-mêmes. Les Américains parlent de quiet ego : un ego tranquille, débarrassé de l'obsession du "qu'est-ce qu'on va penser de moi ? est-ce que je suis à la hauteur ?"
Même le plus grand progrès intérieur est vain si
il ne nous rend pas plus solidaires.
Hâtons-nous de suivre le conseil de Nietzsche pour qui le meilleur moyen de bien inaugurer la journée consiste à se demander, dès son réveil, si aujourd'hui on peut faire plaisir à au moins un homme.
Prends soin des minutes et les heures prendront soin d'elles-mêmes.
Le bouddhisme et la psychologie positive autorisent aussi un espoir: nous avons la possibilité de déprogrammer la peur, la méfiance, le sentiment d'insécurité. Chaque jour, nous devons nous renouveler et réitérer ce lent désapprentissage. (Alexandre Jollien)
Il faut se désemplir en partie de soi pour bien écouter. Se désemplir de ses peurs, peur de ne pas savoir quoi dire, peur de ne pas avoir de réponses à donner. Se désemplir de ses certitudes. Se désemplir de ses lassitudes. Mais on a des limites en matière d'ecoute : il y a aussi des moments où l'on a juste besoin d'être seul, pour se ressourcer!
Mes filles sont aussi, par moments, mes maîtres. La deuxième, par exemple, est une enthousiaste, une joyeuse, alors que je suis spontanément - si je ne fais pas d'efforts - un dépressif qui peut traîner des pieds, et raisonner de travers pour justifier ma vision du monde. Avant, je trouvais que les gens enthousiastes se mettaient en danger, parce qu'ils s'exposaient à la déception. Soit ils m'agaçaient (je trouvais qu'ils n'avaient pas compris la vraie nature de la vie), soit ils m'inquiétaient (j'avais peur pour eux). J'ai eu longtemps peur pour ma fille, peur de son enthousiasme, de sa tendance à la joie quoi qu'il arrive, peur qu'elle ne soit blessée ou déçue, et qu'elle ne s'en relève pas. Et puis, il y a quelques années, à force de me remettre en question, j'ai compris que c'était elle qui avait raison! (Christophe André)