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Je constate que, depuis un mois, trois des livres que j'ai lu portent sur la vie des gens simples, de ceux d'en bas, les silencieux, les modestes, qu'ils soient de la ville ou de la campagne.
Un hasard ? Dans un sens, oui, et dans l'autre, non. Comme on a subitement envie d'oranges parce que l'on a des carences en vitamine C, sans doute ai-je eu inconsciemment besoin de ces histoires-là pour combler mon désir de revenir à une réalité brute, sans fioritures ni délayages.
Parce qu'il fût un temps, pas si lointain, où les psychologues et autres sociologues, ne s'étaient pas encore abattus sur la vie des gens pour la décortiquer, l'analyser, et trouver des causes et des explications à tout et à rien. On retrouve, d'ailleurs, leur influence dans de nombreux romans actuels où, de mon point de vue, la pesante insistance sur la psychologie des personnages enlève à l'histoire, tout son charme, toute sa magie.

J'ai aimé ce roman et ses personnages - que d'aucuns, aujourd'hui, jugeraient "bruts de décoffrage" - parce qu'ils sonnent vrai. Même les plus vils d'entre eux ne trichent pas avec ce qu'ils sont. La vie était déjà assez compliquée pour ne pas y ajouter la culpabilité d'être ce que l'on était et de faire ce que l'on pouvait.
Marcel Aymé écrit, raconte, il "n'explique" pas. Il me laisse à lire, à voir, entendre, imaginer...
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A Cantagrel, un village de la campagne comtoise, on distingue les hommes des bois de ceux de la plaine. Les premiers vivent au hameau de Cessigney qui se situe au milieu de la forêt. Les hommes sont bucherons et se livrent au braconnage et à la contrebande. Les différends se règlent à la chevrotine. Les familles du hameau sont très croyantes. Leur foi mêle la doctrine catholique à des rites païens.
Quant au bourg, il s'étend au milieu des champs de blé. Les hommes de la plaine sont principalement des paysans cossus car la terre ici est riche. La politique a divisé le village deux groupes : les calotins attachés à l'Église et les Républicains, anticléricaux, qui gèrent la mairie.

Ces clivages vont être le moteur de deux intrigues qui tourneront autour d'un personnage : Urbain Coindet. C'est un paysan respecté pour sa vaillance, élu au conseil municipal sous l'étiquette républicaine. Un jour, en rentrant de la foire, il trouve son épouse Aurélie pendue à une corde. La défunte était très pieuse mais un suicide empêcherait une cérémonie religieuse. Sa famille cherche donc à convaincre les villageois qu'il s'agit plutôt d'un meurtre commis par son époux. Quelques semaines plus tard, le veuf envisage de se remarier avec Jeanne, une fille des bois. Mais son frère sorti depuis peu de prison le refuse. Il accuse Coindet de l'avoir dénoncé aux gendarmes et décide de se venger.

Le roman est remarquablement construit et écrit ; on ne peut que s'étonner de sa faible notoriété. La vie campagnarde est décrite avec une ironie mordante et un grand souci de réalisme. Il est question d'amour, d'amitié, de jalousie, de commérages et de vengeance. Tout débute avec une scène d'une grande force. L'histoire conserve ensuite une grande intensité et il faut attendre les dernières pages pour en connaitre le dénouement. « La Table-aux-crevés » est un véritable chef d'oeuvre que je vous recommande vivement.
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Pour mieux faire une étude de comportements dans les campagne, voici un livre qui nous le sert aussi bien. Il a fallu que Coindet vienne trouver sa femme pendue dans la cuisine pour que des conflits fulminent de part et d'autre dans ce petit village. Déjà les avis se divisent sur la mort mystérieuse de la femme de Coindet, les uns croient à son suicide mais d'autres pensent que c'est un meurtre, que Coindet a assassiné sa femme surtout pour la belle famille, surtout quand Coindet voudra après épouser le jeune Jeanne dont le frère s'oppose farouchement à cette liaison...

Simplement une agréable lecture!

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« La Table-aux-crevés » est le quatrième roman écrit par Marcel Aymé, mais il a déjà marqué de son style un genre qui, après lui, ne sera plus tout à fait le même. le drame paysan, la tragédie rustique, le crime à la campagne, chez Marcel Aymé, c'est carrément une « comédie humaine », à la fois profondément véridique et pathétique, et en même temps d'une rare corrosivité, d'un esprit satirique implacable qui met à jour aussi bien les beautés que les noirceurs de l'âme humaine.
L'histoire se passe juste après la guerre de 14, à Cantagrel, petit village du Jura. le personnage principal du roman s'appelle Urbain Coindet, et le moins qu'on puisse dire, c'est qu'il n'a pas de veine : il rentre du marché, qu'est-ce qu'il trouve ? Sa femme Aurélie pendue dans la cuisine. C'est déjà un choc. Choc doublé quand il se voit pointé du doigt comme assassin. Choc triplé quand son beau-frère, Frédéric Brégard, qui sort de prison pour contrebande, l'accuse de l'avoir dénoncé. Comme dans tous les villages, il y a de multiples dissensions entre les habitants : entre les cléricaux (les calotins) et les républicains (Urbain, élu au conseil municipal en fait partie), et surtout entre les gens de Cantagrel et ceux du village d'à-côté, Cessigney, entre ceux de la plaine, et ceux des bois (comme qui dirait les Longeverne et les Velrans, dans « La guerre des boutons »). Urbain doit ses débattre dans tout ça, d'autant plus qu'une fille de Cessigney, Jeanne Brégard, la soeur de Frédéric et d'Aurélie, s'est amourachée de lui, et le sachant veuf, veut profiter de l'occasion…
Depuis Balzac et Zola, jusqu'à Giono et Pagnol, on sait que la campagne n'a rien à envier à la ville en fait de moeurs inavouables, de crimes, de turpitudes et de situations plus ou moins sordides. le Jura ne fait pas exception à la règle : la galerie de portraits que dresse Marcel Aymé est tout sauf monotone : vous y trouverez des villageois chafouins et rusés, un curé qui cherche à rameuter ses ouailles, un garde-champêtre ivrogne, un beau-père et un beau-frère à la gâchette facile, comme le soupirant éconduit de la Jeanne, des commères à chaque coin de rue… C'est avec une ironie mordante et une grande jubilation que Marcel Aymé met tous ces gens dans un chaudron et qu'il remue joyeusement avec une grande louche.
L'exercice n'est pas facile : à naviguer ainsi entre roman de moeurs et roman satirique, il est facile de tomber dans l'excès dans un sens ou dans l'autre. Tout l'art de Marcel Aymé consiste à maintenir un équilibre entre l'étude de moeurs sans complaisance, la description au scalpel des petites faiblesses humaines, et une verve à la bonne humeur communicative, même quand l'histoire n'est pas drôle.
Marcel Aymé n'a pas de mal à trouver cet équilibre, parce qu'il est un peintre de la vie : fin observateur de ses contemporains, il sait retenir les grandes lignes et aussi souligner les détails : les personnages qu'il décrit sont criants de vérité. Et comme ils nous sont montrés dans toute leur humanité, bonne ou mauvaise, ils nous touchent, nous émeuvent, deviennent à nos yeux aimables ou haïssables, parce que finalement, ils nous ressemblent.
« La Table-aux-crevés » a fait l'objet d'une adaptation au cinéma en 1951 : le réalisateur Henri Verneuil et son co-scénariste André Tabet (qui signera les dialogues du « Corniaud » et de « La Grande vadrouille ») ont pris le parti de mettre ne place une distribution toute provençale (Fernandel, Andrex, Fernand Sardou, Henri Vilbert…) qui tire le film plutôt du côté de Pagnol, mais ça marche quand même.
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Urbain Coindet, en rentrant de la foire de Dôle, trouve sa femme Aurélie, pendue dans la cuisine.
Le même jour, Frédéric Gari est arrêté pour contrebande de tabac et jure de se venger de son délateur.
Urbain, veuf, fait bientôt la cour à la belle Jeanne, qui se trouve être la soeur du contrebandier arrêté.
De son côté l'ex beau-père d'Urbain accuse son gendre d'avoir tué Aurélie et Capucet, le représentant de la loi du village, ouvre une enquête...
Marcel Aymé situe son intrigue dans un lieu qu'il connaît et qu'il aime, son pays, sa campagne. Il prend plaisir à imaginer ces rivalités de village sur fond de soupçon et d'affrontements entre républicains et cléricaux.
Ce roman est un de ceux qui ont fait de lui un écrivain qui compte dans la littérature, il lui a d'ailleurs valu le prix Renaudot en 1929.
Une adaptation cinématographique formidable a été tiré de cette superbe histoire avec un Fernandel réellement inspiré dans le rôle d'Urbain Coindet.
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"La cuisine était propre. Au milieu, l'Aurélie pendait à une grosse ficelle, accrochée par le cou." En ces quelques mots, Marcel Aymé pose l'intrigue de son récit et fait revivre pour nous Cantagrel, petite bourgade franc-comtoise dans les années 20. Autour de cette mort et de Coindet, époux de l'Aurélie, c'est tout le village qui va s'agiter, intriguer et s'affronter.

Paru en 1929, ce livre de Marcel Aymé est particulièrement savoureux et le style très oral de l'auteur y est pour beaucoup. Il nous offre une galerie de personnages simples mais attachants. Comme à son habitude, l'écrivain n'épargne personne et se fait souvent féroce face à la bêtise, les mesquineries et les querelles de clocher des habitants, néanmoins on sent en parallèle une grande tendresse à leur égard.

À défaut de l'intrigue ou de la psychologie des personnages, c'est l'ambiance qui fait le principal atout et le charme un brin vieillot du livre. Avec brio, Marcel Aymé nous fait entrer dans le Cantagrel pittoresque des années 1920 de la même manière que les films sur Don Camillo nous immergent dans le Brescello de l'après guerre.

C'est un roman plaisant mais sans doute pas le meilleur de Marcel Aymé. Concernant cet auteur, je vous conseille davantage Uranus (qui possède des personnages bien plus travaillés et intéressants) ou pour les amateurs de nouvelles le recueil le vin de Paris (qui contient entre autres la célèbre Traversée de Paris).
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Marcel Aymé (1902-1967) est un écrivain, dramaturge, nouvelliste, scénariste et essayiste français. Ecrivain prolifique, il a laissé deux essais, dix-sept romans, plusieurs dizaines de nouvelles, une dizaine de pièces de théâtre, plus de cent soixante articles et des contes. Il a également écrit de nombreux scénarios et traduit des auteurs américains importants : Arthur Miller (Les Sorcières de Salem), Tennessee Williams (La Nuit de l'iguane). Roman paru en 1929, La Tables-aux-Crevés a reçu le prix Renaudot.
Dans un petit village du Jura. A son retour du marché Urbain Coindet trouve sa femme Aurélie pendue. Très vite la belle famille laisse entendre que ce serait le mari qui l'aurait tuée. le même jour, Frédéric Brégard, frère d'Aurélie, est libéré de prison où il purgeait une peine pour contrebande ; Frédéric qui est persuadé d'avoir été dénoncé par Urbain. le conflit entre les deux familles ne peut que s'envenimer et la coupe est pleine lorsque Jeanne, soeur de la morte, décide de se mettre en ménage avec le veuf…
Un drame paysan comme on les aime chez Marcel Aymé. A partir d'un suicide, l'affaire va affecter tout le village avec des répercussions de multiples nature : religieuse, s'il y a suicide l'enterrement ne peut être que civil, d'où conflit entre les calotins et les Républicains du bled, tension générale exacerbée par les commérages et rumeurs non fondées mais qui agitent les langues du pays (« C'était un sujet de conversation assez délectable par l'importance de l'accusation, qu'on fût pour ou contre »). Et quand après quelques semaines à peine, Jeanne et Urbain se mettent en ménage, la fureur est à son comble, d'autant que la mignonne était pressentie par Rambarde. Frédéric et Rambarde s'allient fusil en main pour en finir avec Urbain, mais…
Une intrigue rondement menée, des personnages sympathiques ou non mais fort bien campés, outre ceux déjà cités, les commères et leur langue de vipère, le curé qui tente désespérément de rabibocher les clans tout en cherchant à augmenter sa clientèle à l'église, et ce malheureux Capucet, le garde-champêtre, naïf et porté sur la gnôle. La psychologie des acteurs est finement décrite, nous sommes à la campagne, la pendue est encore chaude mais on n'oublie pas qu'il faut s'occuper des animaux de la ferme, priorité aux vivants ; alliances et mésalliances se jouent aussi sur des intérêts financiers, des espoirs de rachats de terre etc.
Il va de soi que c'est très bien écrit avec ce qui fait, pour moi, le charme de ce type de romans de l'écrivain, les formules ou les expressions placées dans ses dialogues (« Coindet n'était pas habitué à une solitude désoeuvrée et, comme il avait son complet des dimanches, sa pensée ne retrouvait pas ses plis familiers. »
Un très bon roman.
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"La cuisine était propre. Au milieu, l'Aurélie pendait à une grosse ficelle, accrochée par le cou." Ainsi donc cette tragi-comédie agreste s'ouvre-t-elle sur un cadavre toupinant légèrement comme une dinde à son croc de boucher (quel incipit !). La femme à l'Urbain Coindet, bête de somme stérile, débarrasse le plancher des vaches et permet ainsi à son veuf de guigner la Jeanne Brégard, jouvencelle mamelue et peu farouche. Accusé d'uxoricide par sa belle-famille envieuse, Coindet se voit également menacé de mort par le frère de sa dulcinée. Brégard lui reproche non seulement d'être un vulgaire trousseur de jupons mais aussi d'avoir moucharder ses activités de contrebandier à la maréchaussée locale.

Pour ce Roméo et Juliette chez les culs-terreux, ce "Gunfight at the Table-aux-Crevés" (riant toponyme d'une des terres de Coindet), Marcel Aymé a trempé sa plume dans le fiel et, entre deux épisodes bucoliques, polit et blaireaute quelques portraits vachards. Ses dialogues dans leur jus sonnent plus vrais que nature ; ils permettent à l'écrivain de ne pas s'encombrer d'analyses psychologiques et trahissent égoïsmes minables, lâchetés ordinaires et rancoeurs inavouables (Humain, trop humain!).

Une séduisante et drôlatique vadrouille dans la campagne franc-comtoise. Aymé et être aimé...

"Sa Table-aux-Crevés il en parlait avec une vénération qui l'agaçait. "De la terre, disait-il. C'est léger, ça te fond dans les mains, c'est pas de ces grosses terres rouges comme j'en connais, qui sont bonnes juste pour faire de la brique.""
Lien : http://lavieerrante.over-blo..
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L'histoire commence par le suicide de "l'Aurélie" dans un petit village reculé du Jura au cours des années 20. le reste du récit portera sur les fâcheuses conséquences de cet acte dramatique.
Avec "La table aux crevés", j'ai découvert un drame d'autant plus crédible qu'il est décrit dans un style rural. On sent une plume d'une autre époque car elle décrit des vies d'un autre temps.
J'ai été un peu déçu car je ne m'attendais pas à ce type d'histoire. Je pensais en effet que l'on apprendrait pourquoi cette pauvre Aurélie s'est suicidée. Mais non. Elle était fatiguée de sa vie, c'est tout et c'est juste le point de départ de l'histoire.
Le moins que l'on puisse dire c'est que cette femme que l'on devine bonne, attentive et besogneuse à la tache n'a pas été gâtée par la vie, ni en amour...et Marcel Aymé insiste bien sur ce point car il fait dire et agir son veuf d'une façon...comment dire ? ...pas très délicate!
Un roman régional assez dure qui -à mes yeux- a le seul mérite de nous rendre concrète la vie des petites gens de la campagne jurassienne de l'entre deux guerre.
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Lire La Table-aux-Crevés ne m'a apporté que du bonheur. J'ai beaucoup aimé la plupart des oeuvres de Marcel Aymé, mais j'ai une faiblesse particulière pour cet ouvrage. Même s'il a obtenu le prix Renaudot, j'imagine qu'il ne peut pas plaire à tout le monde. Pour l'apprécier, par-delà les considérations purement littéraires, il faut sans doute aimer les hommes qui sont de vrais hommes, avec leurs incertitudes, leurs sentiments non exprimés, leurs appréhensions, leur courage et leurs muscles, les femmes qui sont de vraies femmes avec leurs cas de conscience, leur détermination inébranlable, leur raison et leur irrésistible féminité. Et puis, pour goûter un livre comme celui-là, je pense qu'il faut connaître le monde rural, la solidarité, les haines de voisinage, les rivalités ancestrales, politiques, religieuses et les rapports de force, sans oublier le bistro et les campagnes qui changent perpétuellement selon l'heure et les saisons.
Quant à la qualité du français, elle est si parfaite qu'elle dépasse de très loin la force de l'image. Elle vous fait passer un moment riche dans le milieu rural et vous fait oublier que vous lisez. Chaque mot du récit de Marcel Aymé peut cacher un trait d'humour si lisse, si subtil qu'on l'effleure à peine. Mais cet humour apporte à l'ensemble du récit une saveur inimitable qui tourne si facilement le drame en comédie sans amoindrir le tragique de la situation et apporte détente et plaisir.
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