Uranus est le dernier livre (paru en 1948) d'une trilogie de Marcel Aymé (après "Travelingue" et "Le chemin des écoliers", de 1941 et 1946). Mais il peut se lire sans avoir connaissance des deux autres.
L'ambiance est celle d'une petite ville de Normandie, détruite à moitié par les bombardements alliés, en 1944. Nous sommes juste après la fin du conflit: la vie renaît à peine des ruines, les prisonniers vont rentrer.
L'auteur nous présente, avec beaucoup d'esprit, les bassesses de cette petite société, dont une bonne partie vient de se retourner: elle avait fêté Pétain quelques années plus tôt, elle se découvre presque résistante. Hypocrisie et couardise sont la règle.
Outre ce que la situation peut éventuellement avoir de cocasse, elle conduit à de véritables drames: les dénonciations de collaborateurs, les règlements de comptes sont la règle des petits clans. Et du côté des officiels, l'arbitraire et les exécutions publiques sont des banalités. Certains mourront pour quelque chose, d'autres pour bien peu, ou une méprise. Et parmi ceux qui s'en tireront, beaucoup de lâches ne seront pas fiers d'eux-mêmes. Accuser l'autre est parfois une façon d'échapper à la même accusation.
La lecture est à deux niveaux: une certaine légèreté, très réaliste, avec les petits incidents du quotidien de la vie de province, et des personnages un peu caricaturaux, mais aussi un fort contenu dramatique.
Soixante quinze ans après, on redécouvre une des facettes de l'époque, très bien croquée. Ce n'est pas la plus glorieuse.
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Terrible vision de l'après guerre. Pleine de cynisme et désillusion.
Un peu dur de rentrer dans le livre qui contient quelques pépites d'humour noir...
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