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EAN : 9782490091577
104 pages
VIBRATION (01/03/2022)
4.67/5   12 notes
Résumé :
Je suis Adama, le Peul et le nomade. Je porte en moi la mémoire de chaque ondulation de dune éternellement recommencée. J'ai la mémoire des brûlures aux pieds au contact du sable dévorant, sous le soleil rude de midi ; et des lèvres desséchées au zénith que la salive ne suffit pas à humecter. J'ai la mémoire du sable qui crisse entre les dents et du thé brûlant qui s'infiltre dans le corps asséché. J'ai la mémoire des yeux nimbés d'étoiles et de la fraîcheur des nui... >Voir plus
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Adama.

Sahara…

Ton prénom, toujours, s'est confondu avec le nom de celui qui t'a vu naître.

Quand pousse l'aube aux confins de cette terre gravée en toi, lorsque le sable sous tes pieds se pare de reflets carmin, corail ou tangerine, que se dessinent les ombres éphémères ondulant sur les vagues des dunes et que les premiers rayons de l'astre solaire caressent en pensée les traits fatigués de ta peau, tu te souviens…

Tu es né nomade, fils et petit-fils du peuple Peul. Tu étais l'aîné, celui qui devait porter la voix de ta tribu. Tu as été enfanté pour perpétuer le nom des tiens et la mémoire des griots du désert.

Tu es né dans le coeur battant du Sahara, sous un souffle chaud de sirocco, et ton destin était écrit. Mektoub.

Là où le reste de ta tribu, de tes amis, de ta famille, n'auront eu que le sable pour compagnon d'une vie, celle qui t'a mis au monde aura bravé les coutumes ancestrales du patriarcat pour t'offrir au vent de la liberté.

Tu es né dans le sable du désert, Adama, mais tu as pu voyager. Tu as vu la grande dune au-delà du village de ton peuple, puis tu as vu au-delà de la grande dune… Tu as vu le fleuve tranquille qui t'a porté… Puis le murmure d'un monde nouveau qui t'a accueilli et qui t'a permis de t'instruire.

Tu as appris à lire et à écrire le désert, Adama, pour toi et pour la mémoire de tes frères Touaregs, demeurés sous la menace des terroristes d'AQMI.

Mais la connaissance est-elle réellement la source de la liberté ?



**



Mona Azzam est née et a passé son enfance en Côte d'Ivoire. Aujourd'hui, elle est professeur de lettres dans la région de Montpellier.

Elle est d'ici. Elle est d'Ailleurs. Et elle parle du désert avec les mots du coeur.

Ce désert qui se chante et se conte dans une langue chaude et poétique, incitant au voyage vers cette terre d'ergs, battue par le vent et le feu du soleil, berceau de l'Humanité. Une terre où s'affrontent deux mondes, celui des cultures et traditions ancestrales et celui de la modernité ; deux mondes où il n'est pas facile de cohabiter, sous peine de finir incompris, rejeté, exilé…

Merci pour ce voyage, Mona !
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Lire Nomades, c'est d'abord passer la main sur la magnifique couverture couleur sable qui scintille de petits grains sur lesquels se dresse un superbe masque rituel, en forme d'antilope. C'est ensuite être conduit pour quelques heures au désert. C'est tout oublier pour poser ses pas dans les dunes, sentir le sable crisser sous ses dents. C'est écouter dans le silence le récit d'un Touareg écartelé entre modernité et tradition. C'est s'ouvrir au monde du respect de la parole donnée. C'est suivre le destin d'un peuple en déshérence dont le désert a été défiguré, profané, martyrisé. C'est souffrir avec eux et pleurer les victimes.
Lire Nomades, c'est vivre la traversée d'un désert devenu prison face au monde libre. C'est partager la déchirante lutte intérieure d'un nomade-écrivain. C'est suivre la dure et clivante pérégrination sur le chemin de liberté. Comme il est difficile de devenir libre, libre d'aimer et d'écrire. de devenir un homme libre quand le poids de la Tradition entrave la destinée.

"Tu iras à l'école et tu seras libre car tu sauras lire et écrire."

Telles sont la première injonction et promesse de la mère d'Adama le petit Peul, comme furent celles de la mère de Maïmouna pour la France terre d'asile, dans Ulysse a dit de Mona Azzam. Des mères rêveuses de liberté, planche de salut, pour leurs enfants. Des mères déterminées, visionnaires et maîtres du destin, quoiqu'il en coûte.

Pour Adama, comme pour Amine, le petit africain immigré du précèdent roman de Mona Azzam, l'accession à la liberté passe par les mots, par la lecture et l'écriture.

Le chemin est tracé, Adama "qui porte le Sahara en lui, comme une rime, en «a» ", quittera son désert pour la ville et l'école. Bamako puis Abidjan, de brillantes études. Cependant un destin tout tracé peut parfois s'interrompre et les rêves d'une mère changer.
Rattrapé par les événements, la présence d'AQMI et la mort du père, Adama doit quitter brutalement le chemin de liberté. Dès lors, sa mère lui imposera une autre destinée, celle de sacrifier sa liberté et son bonheur naissant pour endosser les responsabilités de chef de la tribu avec toutes les contraintes ancestrales qui s'y rattachent. D'homme libre, il devient ”Adama, le prisonnier du désert dont l'unique liberté se limitait à l'écriture."

A chacun son désert de vie. La vie est don. Vie donnée par ses parents et nourrie par la terre où vous avez vu le jour, puis la vie que l'on choisit, la vie que l'on donne et partage, et aussi celle que l'on rêve et que les événements viennent bouleverser. La vie est une traversée, où l'on avance toujours et encore. Une traversée du désert, d'oasis en oasis. Ne pas se laisser enliser. Et, devant l'épreuve : rester ? déserter ? Non, continuer d'avancer. Avancer sans se retourner, pour vivre, survivre. S'arrêter, c'est mourir. Nous avons tous nos déserts. Nous sommes tous un jour ou l'autre éprouvés, confrontés à des choix de vie difficiles. Notre survie tient à notre capacité à préserver notre espace de liberté. L'écriture en est un. Pour Adama, c'est certain, pour Mona Azzam, c'est une évidence. La lecture en est un autre ; pour moi assurément.

Mona Azzam, la plus africaine des auteurs français, tel un griot, nous conte ici l'histoire d'Adama. Nomades laisse son empreinte sur l'oreiller du sable où il fait bon poser l'oreille du coeur pour entendre, dans le silence des mots chuchotés, le dit d'Adama. Quelque part au désert des mots, j'ai rencontré Nomades et Adama… nous nous sommes tant aimés.

Ah, j'allais oublier, Adama réalisera finalement les deux rêves de sa mère. Je vous laisse le découvrir. Nomades vous attend. Nomades, un livre magnifique qui m'a transportée et fait vibrer. Édité chez Vibration Editions, ce n'est pas un hasard
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Après Maïmouna, Sénoufo Malienne partie à la recherche d'un paradis inaccessible, et Amine qui, débarqué de son Sahel originel, a trouvé le salut en Haute-Savoie, c'est un nouveau destin que nous conte Mona Azzam dans son dernier roman, "Nomades". Elle nous relate l'histoire d'Adama "…enfant Peul, fils de nomade, petit-fils de nomade…"

Une nouvelle fois, l'auteure nous emmène en Afrique, dans "le désert des dunes, infiniment renaissantes, du Sahara." Ce thème cher à son coeur et maintes fois abordé l'est à nouveau avec la même écriture poétique, le même jeu des mots répétés à l'envi, triturés, travaillés. Je ne l'ai pas lu comme un roman mais plutôt comme un conte, une mélopée, une ode à ce désert sans cesse recomposé. Les phrases ondulent à l'image des dunes ridées par le vent.

Des thèmes importants sont abordés à travers la vie de son héros. La liberté, que sa mère veut lui apporter en l'envoyant à la ville apprendre à lire et à écrire "Ma mère a voulu mon départ…"Toi, Adama, tu iras à l'école, a-t-elle dit. L'école, c'est la liberté. Lire et écrire, c'est la liberté. Toi, Adama, tu seras libre. Libre de quitter le désert, d'écrire le désert…" Et Adama, obéissant part à Bamako. Mais libre, le sera-t-il vraiment ? Il demeurera sous la coupe de sa mère jusqu'à la mort de celle-ci. Il acceptera un mariage arrangé, des enfants d'une femme qu'il n'aime pas et la charge de remplacer son père à la tête de la tribu.

Liberté, mais aussi fidélité aux origines. Il n'est pas facile de faire un pas de côté. Pour avoir quitté son désert, pour être allé à l'école, avoir appris à lire et à écrire, Adama est considéré comme un traître par les siens. Et il n'était pas là quand les soldats d'AQMI ont attaqué le campement, tué son père et une partie de sa fratrie. Car de cette organisation terroriste et de ses méfaits. Une mémoire pour ceux qui en sont victimes, une mémoire pour ceux qui luttent.

Peu de pages – trop peu ? – pour dire le désert et sa beauté, mais aussi ses malheurs. L'enfant Peul deviendra grand, diplomate et écrivain. Il rencontrera l'amour mais il restera pour toujours "…Adama, celui qui porte le Sahara en [lui], comme une rima. En « a » …"

"Nomades" est un bel hommage au peuple Peul.
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Je vais à nouveau m'émerveiller sur l'écrin que cette maison d'éditions offre à ses textes.
Le choix d'une couverture de qualité par son grain et son esthétique, son marque-page original, une mise en page qui renforce l'écrit.
Ici tout particulièrement, le texte est découpé en quatre actes et ceux-ci scandés en séquences, qui se terminent en citations qui donnent le clap de fin et offrent aux lecteurs une vision.
Mona Azzam, creuse son sillon, celui des mots et de la liberté qu'ils offrent, surtout pour tous ceux qui au départ sont loin de ce moteur.
Henri Calet écrivait : « ce n'est pas ma faute, si en écrivant, mon stylo se transforme en scalpel. »
Adama, n'est plus l'enfant de 13 ans, qui a vu sa vie chamboulée, par l'obstination de sa mère, qui a décidé seule qu'il devait être éduqué.
« Toi, Adama, tu iras à l'école. L'école c'est la liberté. Lire et écrire, c'est la liberté. Toi, Adama, tu seras libre. Libre de quitter le désert, d'écrire le désert, de lire le désert. »
Il va quitter le désert, son père Moussa et ses trois petits frères.
Lui l'enfant Peul et nomade, fier de cet héritage, ne voit pas pourquoi il doit partir.
Ces quelques années d'études, loin des sien est le prix à payer.
Lorsqu'il reviendra, diplôme en poche, la situation géoponique aura eu l'effet d'une déflagration, seul sa mère et un frère auront survécu.
Sa mère, cette femme forte, qui avait décidé pour lui ses études, va l'adouber chef de tribu, puis décider de son mariage.
Et Adama va subir.
Je ne vous en dirai pas plus.
C'est une mélopée que vous entendrez accompagnée du son si singulier du tam-tam.
Une femme du désert qui n'a pas les mots mais veut que sa tribu, son peuple, vive et que la mémoire soit inscrite dans chaque grain de sable du désert.
Le poids des traditions, est omniprésent dans ce destin, il revient comme un son répété, encore et encore, ce tam-tam lointain dans la nuit de cet immense désert.
Ce sage proverbe Peul : « Il faut creuser les puits aujourd'hui pour étancher les soifs de demain. » dit tout de l'immensité des chantiers à entreprendre pour préserver la mémoire des peuples et évoluer également.
Mona Azzam, a su parfaitement donner à ses mots, ce chant intemporel, ces images si vivantes, qui disent la vie par-delà les continents.
J'ai vibré au rythme de ce tempo venu de la nuit des temps.
J'ai oscillé avec ce désir viscéral de préserver les traditions et la tentation s'aller vers autre chose, avec d'autres moyens de préservation.
J'entends le désert et ces mots vont m'accompagner.
Adama Peul et nomade a inventé le nomadisme de l'écriture et c'est son écho qui se répercute dans cette onde intense qui va vous vriller le coeur.
©Chantal Lafon

Lien : https://jai2motsavousdire.wo..
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Mona Azzam est une artiste, une magicienne, elle jongle avec les mots, c'est une poétesse dans le coeur et dans l'âme, elle a une plume hors du commun, une écriture fluide, sublime, juste, elle est douée, la beauté des mots vous transporte, ils vous font voyager.
Nomades est le quatrième livre de Mona que je lis avec toujours autant de passion, de ferveur et de saveur. Après nous nous sommes tant aimés, Amine et Ulysse a dit des Éditions la Trace, Nomades ce petit opus édité par la maison d'édition Vibrations, cette fiction nous parle du respect des usages et des coutumes. Ce livre nous emmène dans un long voyage dans le désert du Sahara. Mona s'est surpassée, elle a mis son coeur dans ce livre, il est rempli d'émotions fortes, je n'ai pu m'empêcher de pleurer.
En lisant ce live, j'étais là-bas dans le désert, je touchais le sable qui coulait entre mes doigts, je sentais la chaleur du soleil … Immuable présence, le désert m'accompagne, durant ce voyage qui s'étire le long des dunes et des passages de dromadaire. Ce livre m'a marquée, m'a émue.
Nomades, c'est l'histoire d'Adama, enfant Peul, fils, petit-fils, arrière-petit-fils de nomade. Adama a 13 ans, il est né dans le désert. Nomades, c'est l'histoire d'une construction, d'une reconstruction, c'est l'histoire douloureuse d'une famille, c'est l'histoire d'un combat, c'est l'histoire d'une leçon de vie. le désert, encore et toujours, la vie, la survie d'Adama, et celle de son peuple.
Nomades, c'est aussi et avant tout le poids des traditions. Elles sont omniprésentes dans la vie d'Adama, elles jouent un rôle prépondérant dans son destin. Adama va construire son quotidien, partagé entre ses choix de vie qu'il doit exclure et sa volonté de respecter sa mère et les traditions de son peuple.
Extraits du livre : L'écriture devenue un mode de survie. Un moyen de retrouver mon désert. Celui que je ne trouve plus. Depuis que des hommes armés ont profané les sablonneuses étendues virginales. Depuis qu'ils ont assassiné les miens. Depuis qu'ils ont mis fin à mes rêves.
Les mères sont des créatures généralement obnubilées par leur fils, soucieuses de leur bonheur et convaincues qu'elles savent mieux que quiconque, ce qui est bien pour eux.

Nomades, c'est aussi la beauté des mots de Mona en réponse à la cruauté, à la haine, à la guerre. Écrire pour survivre, les mots sont nos armes. L'amour des mots, l'amour du sable, l'amour de la vie… Ne jamais renoncer, poursuivre la recherche de son idéal. Avec Nomades, Mona a rendu un très bel hommage au peuple Peul
Bravo Mona, lisez Nomades, cet opus est à dévorer sans modération. Mariaclara baucere
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
J'ai la mémoire des figues de barbarie dressées à perte de vue et des scorpions qui susurrent des mots dans le désert.
J'ai la mémoire des étendues infinies de sable qui ondulent quand rôde le vent.
Je suis Adama, le Peul et le nomade. Je porte en moi la mémoire de chaque ondulation de dune éternellement recommencée.
J'ai la mémoire des brûlures aux pieds au contact du sable brûlant, sous le soleil rude de midi ; et des lèvres desséchées offertes en sacrifice au zénith irradiant que la salive ne suffit pas à humecter. J'ai la mémoire du sable qui crisse entre les dents et du thé brûlant qui s'infiltre dans le corps.
J'ai la mémoire des yeux nimbés d'étoiles et de la fraîcheur des nuits sans bruit.
Je plonge mes yeux dans les yeux noir charbon de ma mère. J'y trouve Adama. Je m'y retrouve. Et j'ai soudain la mémoire des mots, lus, écrits. Des mots qui ne me parlent que du Sahara.
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Un jour j'ai lu qu'en tibétain, "être humain" se dit "a-groba" : "celui qui part". Je trouve cela très beau. Je ne suis pas Tibétain. Je suis Touareg. Je suis "a-groba". Je suis celui qui part. Je pars donc j'avance. Donc je suis humain. Donc je suis moi. Et je suis le désert. Le désert est en moi. Alchimie qui nous unit, nous réunit, en un souffle qui insuffle le dit guidant mes écrits.
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Entre les lignes invisibles qui traversent le désert, la première phrase lisible est : c’est écrit. La dernière phrase aussi. La même phrase rythme la vie et la mort. Ce "c’est écrit" qui dit tout sans rien dire ; qui explique tout sans rien expliquer. Et qui gouverne tous les écrits. Mon père, mes frères assassinés. Le départ d’Abraham, mon mariage avec Amina, les enfants, la mort d’Amina. Tout était donc écrit. Jusqu’à Myra. Myra aussi était donc un paragraphe de ce grand écrit, œuvre d’une main invisible.
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L’écriture devenue un mode de survie. Un moyen de retrouver mon désert. Celui que je ne trouve plus. Depuis que des hommes armés ont profané les sablonneuses étendues virginales. Depuis qu’ils ont assassiné les miens. Depuis qu’ils ont mis fin à mes rêves.
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Mais le temps perdu ne se rattrape pas. Il passe, fugace. Et jamais ne repasse.
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