Les églises de Saumur lui doivent quelques embellissements. Madame de Bonfons que, par raillerie, on appelle mademoiselle, inspire généralement un religieux respect. Ce noble cœur, qui ne battait que pour les sentiments les plus tendres, devait donc être soumis aux calculs de l’intérêt humain. L’argent devait communiquer ses teintes froides à cette vie céleste, et lui donner de la défiance pour les sentiments.
— Il n’y a que toi qui m’aimes, disait-elle à Nanon.
La main de cette femme panse les plaies secrètes de toutes les familles. Eugénie marche au ciel accompagnée d’un cortège de bienfaits. La grandeur de son âme amoindrit les petitesses de son éducation et les coutumes de sa vie première. Telle est l’histoire de cette femme, qui n’est pas du monde au milieu du monde ; qui, faite pour être magnifiquement épouse et mère, n’a ni mari, ni enfants, ni famille. Depuis quelques jours, il est question d’un nouveau mariage pour elle. Les gens de Saumur s’occupent d’elle et de monsieur le marquis de Froidfond dont la famille commence à cerner la riche veuve comme jadis avaient fait les Cruchot. Nanon et Cornoiller sont, dit-on, dans les intérêts du marquis, mais rien n’est plus faux. Ni la grande Nanon, ni Cornoiller n’ont assez d’esprit pour comprendre les corruptions du monde.
De là, le tortueux sarment gagnait le mur, s'y attachait, courait le long de la maison et finissait sur un bûcher où le bois était rangé avec autant d'exactitude que peuvent l'être les livres d'une bibliothèque.
Si la lumière est le premier amour de la vie, l'amour n'est-il pas la lumière du coeur.
Il est dans le caractère français de s’enthousiasmer, de se colérer, de se passionner pour le météore du moment, pour les bâtons flottants de l’actualité. Les êtres collectifs, les peuples, seraient-ils donc sans mémoire ?
- Pas du tout ; tu nous feras du bouillon de Volaille, les fermiers ne t'en laisseront pas chômer. Mais je vais dire à Cornouiller de me tuer des corbeaux. Ce gibier-là donne le meilleur bouillon de la terre.
- C'est-il vrai, monsieur, que ça mange les morts?
- Tu es bête, Nanon! Ils mangent comme tout le monde, ce qu'ils trouvent. Est ce que nous ne vivons pas des morts ? Qu'est-ce donc que les successions ?
A force de rouler à travers les hommes et les pays, d'en observer les coutumes contraires, ses idées se modifièrent et il devint sceptique. Il n'eut plus de notions fixes sur le juste et l'injuste, en voyant taxer de crime dans un pays ce qui était vertu dans un autre. Au contact perpétuel des intérêts, son coeur se refroidit, se contracta, se dessécha.
Il est dans le caractère français de s'enthousiasmer, de se colérer, de se passionner pour le météore du moment, pour les bâtons flottants de l'actualité. Les êtres collectifs, les peuples, seraient-ils donc sans mémoire ?
Il arrivait toujours en cravate blanche, et en chemise dont le jabot à gros plis lui donnait un air de famille avec les individus du genre dindon.
Les larmes sont aussi contagieuses que peut l'être le rire.
A l’époque actuelle, plus qu’en aucun autre temps, l’argent domine les lois, la politique et les mœurs. Institutions, livres, hommes et doctrines, tout conspire à miner la croyance d’une vie future sur laquelle l’édifice social est appuyé depuis dix-huit cents ans. Maintenant le cercueil est une transition peu redoutée. L’avenir qui nous attendais par delà le requiem, a été transposé dans le présent. Arriver "per fas et nefas" au paradis terrestre du luxe et des jouissances vaniteuses, pétrifier son cœur et se macérer le corps en vue de possessions passagères, comme on souffrait jadis le martyre de la vie en vue de biens éternels, est la pensée générale ! pensée d’ailleurs écrite partout, jusque dans les lois, qui demandent au législateur : Que payes-tu ? au lieu de lui dire : Que penses-tu ? Quand cette doctrine aura passé de la bourgeoisie au peuple, que deviendra la pays ?