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sur 1112 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Depuis longtemps, "Le Dessous de cartes d'une partie de whist", l'une des nouvelles de ce recueil, me trottait dans la tête. J'ai eu envie de la relire, ainsi que les 5 autres textes qui composent Les Diaboliques

J'avais gardé le souvenir d'une interminable description jusqu'aux limites de l'ennui débouchant sur un coup de théâtre obligeant à reconsidérer tout ce que l'on venait de lire.

Des années après, l'effet "choc" dissipé, j'ai relu avec intérêt la longue description des deux (ou trois ?) protagonistes entre lesquels le drame se noue. Tout le talent d'analyste et de peintre de Barbey d'Aurevilly est là, dans la description des tempéraments, des moeurs... et des secrets. le scandale de la découverte finale est toujours là, le coup de force du texte réside dans le fait que le lecteur est obligé d'imaginer ce qui s'est passé. Toutes cartes en main, seule une partie a pu se jouer.

Dans le même registre, celui de la violence des passions, "Le Bonheur dans le crime" et "La Vengeance d'une femme" sont également des chefs d'oeuvres d'intensité, tout comme "À un dîner d'athées". À chaque fois, des femmes osent dépasser non seulement les convenances, mais aussi (et surtout) la morale.

Par l'intensité de l'écriture, le recueil n'est pas vraiment une lecture de vacances, plutôt un bain électrisant dans une littérature dense, intense.
N'espérez pas trouver de répit ou de légèreté, point de "phrases d'ameublement" (comme Satie parlait de "musique d'ameublement"). Chaque phrase porte sa mesure (généralement exacerbée) de sens et d'idées. Il se pourrait que beaucoup de lectures paraissent fades après Les Diaboliques...
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Merveilleuses Diaboliques !

Jules Barbey d'Aurevilly nous plonge au coeur d'histoires stupéfiantes en nous livrant sa réflexion sur les femmes et leurs relations.

L'atout de l'auteur est la précision des mots, qui relèvent souvent de la poésie, tant dans la justesse de leur choix que de leur beauté.

Son talent inouï pour décrire les scènes, l'histoire et la personnalité des protagonistes, donne le sentiment que nous les connaissons nous-mêmes.

Les femmes… les déteste-t-il comme il aimerait nous le faire croire ? Il semble qu'il s'évertue à les haïr alors qu'il les idolâtre dans ses écrits.

Les femmes y apparaissent comme des êtres sublimes, fascinants, presque irréels et surtout, insaisissables.

Sont-elles diaboliques ? Certainement ! Parce qu'elles sont pour lui irrésistibles et il aime, nous le montrer à travers la perception qu'en ont les hommes.

Diaboliques à leur insu, en raison d'une force, d'un charisme et d'une personnalité hors norme, qui les rend si singulières, attirantes et intrigantes.

Ces récits témoignent le désir inavouable de l'auteur de prendre part aux scènes qu'il décrit, de devenir une partie intégrante de la vie de ces femmes.

L'auteur est rempli de contradictions : sa foi chrétienne et son statut, lui interdisent une telle obsession pour les femmes, le libertinage, le sadisme.

Obsession pourtant bien réelle, qu'il nous partage de façon détaillée, tant dans ses descriptions que dans sa perception des événements et des personnes.

À lire !!
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En couverture de cette édition folio : « Tilla Durieux en Circé », détail du tableau peint en 1912 par Franz von Stuck, peintre symboliste allemand traitant des sujets classiques de façon non conventionnelle, ici un portrait d'une actrice célèbre de l'époque. La référence à Circé, personnage mythologique ambiguë, femme et magicienne, constitue un bon choix d'illustration pour ces femmes diaboliques présentes dans chaque nouvelle.

Mais revenons-en au texte. J'ai vraiment été subjugué par le talent de conteur allié à la finesse d'écriture, on a là un véritable orfèvre du genre de la nouvelle. Mais cela se mérite, il faut déguster lentement, patienter avec la promesse que ce sera encore meilleur ensuite. Lire le rideau cramoisi ou le bonheur est dans le crime – deux nouvelles remarquables – en s'imprégnant de l'atmosphère voulue par le conteur est une expérience rare et un véritable délice !

Le rideau Cramoisi : le mystère des lieux clos est savamment utilisé : la petite fenêtre au rideau cramoisi où a logé le vicomte de Brassard dans sa jeunesse, la diligence en réparation à un relais de poste la nuit avec ses deux voyageurs dont l'un est Brassard, tardant à raconter une histoire non révélée à quiconque auparavant. le sujet : un jeune officier – le vicomte de Brassard – est hébergé chez un couple de bourgeois à Valognes. Leur fille Alberte est au centre du récit. Soumise à l'inaction d'un milieu clos, c'est elle qui prend l'initiative d'une liaison cachée allant jusqu'à traverser, la nuit, tel un fantôme, la chambre de ses parents pour rejoindre son amant… La chute arrive tout à la fin et elle est diabolique !

Le Plus Bel Amour de Don Juan : j'avoue m'être un peu perdu dans le labyrinthe des phrases… Pour cette nouvelle, la magie du conteur n'a pas fonctionné pour moi, ce qui s'est reproduit pour le Dessous de cartes d'une partie de whist, autre histoire d'inceste. Passons vite à celles qui m'ont jeté tout vif dans les griffes de ce diable de conteur nommé Barbey d'Aurevilly.

Le Bonheur dans le crime : chef-d'oeuvre ! Cette histoire de Hauteclaire, fille d'un maître d'escrime, est absolument géniale et peut-être lue à différents niveaux… Que de phrases à double sens ! Cette femme, mystérieuse, belle et puissante, organise l'assassinat de la femme de son amant (tous deux aristocrates d'excellente réputation cela va sans dire...) et vivra heureuse avec celui qui deviendra ensuite son mari : l'honneur des hautes familles et leur valeurs confrontés à l'exact opposé, une licence, un libertinage entièrement dévoué à l'amour, sans aucun frein. Entre les deux, notre auteur semble bien choisir la deuxième proposition, au moins en littérature ! Comme une oscillation entre l'ancien monde qui tarde à disparaître (on est à la Restauration) et un nouveau monde, républicain, plus permissif – pour les femmes aussi –, avec ses valeurs marchandes liées à l'intérêt individuel, rebattant les classes sociales. A lire absolument ! Je n'avais que trop tardé à découvrir cette histoire là.

A un dîner d'athées : Une nouvelle plus longue gardant un rythme soutenu tout du long. On a le temps de s'installer et de profiter des digressions multiples du conteur et de l'autoportrait qu'on devine :

La vengeance d'une femme : une aristocrate, la duchesse de Sierra Leone, pour se venger de son mari, se jette dans la prostitution pour le déshonorer lorsque le scandale éclatera. La nouvelle la plus violente, la plus destructrice du recueil.

Mon avis agacé : J'ai retrouvé beaucoup des stéréotypes qu'on peut attendre d'un écrivain conservateur, royaliste et catholique, avec des femmes décrites comme manipulatrices, et des hommes qui succombent (les pauvres !), ces hommes qui n'ont qu'une vraie et saine passion : faire la guerre (évidemment !). Cette atrocité là, véritable et absolue, est acceptée de Dieu mais le commerce des femmes, non alors, quelle abomination ! Hypocrisie qui est comme une seconde peau à la religion chez certaines âmes humaines. Ma modeste impression de lecteur serait de dire qu'on a là un homme tiraillé entre ses origines familiales pétries de convenances idéologiques, et un culte de la littérature inconciliable avec ces choix.

Mon avis admiratif : En même temps Barbey d'Aurevilly semble dire le contraire de tout cela par le talent qu'il déploie pour décrire la beauté des femmes par exemple, une véritable fascination. L'amour qu'il voit dans certains couples est magnifié avec Hauteclaire et son amant Serlon dans le bonheur dans le crime (appelé par leurs prénoms, le comte Serlon de Savigny perdant son titre aristocratique dans l'amour véritable), avec la duchesse d'Arcos de Sierra-Leone et son malheureux amant Esteban (frémissez bonnes gens à son triste sort) dans La vengeance d'une femme, aussi avec Rosalba et Mesnilgrand dans A un dîner d'athées. L'auteur, un provocateur de génie, ne se prend pas lui-même au sérieux et n'assume aucune responsabilité directe, il rapporte ce qu'il a entendu, ce n'est pas lui qui est à l'origine des abominations racistes, antisémites présentes ici ou là. Même le dandy chez lui est ambiguë car largement passé de mode à cette époque.

Qui est réellement Jules Barbey d'Aurevilly ? le mystère très présent dans ses fictions s'applique à l'auteur lui-même : torturé, aux oeuvres assez sombres, antimoderne... Né en 1808 en Normandie, il est souvent décrit comme solitaire et malheureux, aspirant à l'élitisme... mais sans le sou ; royaliste et catholique… rejeté par ceux-ci car trop diabolique ; désirant ardemment la célébrité mais très souvent rejeté par ses pairs ; séducteur … se décrivant comme laid ; timide trouvant dans la littérature un outil à sa (dé)mesure afin d'exprimer ses fantasmes de puissance. Un nostalgique de l'ancien régime qui met en scène la libération de la femme, exécration de façade et fascination démesurée à la fois, se flagellant d'avoir cette attirance…

Il reste une oeuvre inclassable dont on a pu dire qu'elle annonçait Dostoïevski, un maître de l'écriture de nouvelles dont il serait vraiment dommage de faire l'impasse. L'avez-vous lu ? Apprécié ?
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Chronique complète, avec composition personnelle de la couverture du livre et cette Circé magnifique, sur Bibliofeel. Lien direct ci-dessous...
Lien : https://clesbibliofeel.blog/..
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LES DIABOLIQUES de JULES BARBEY D'AUREVLLY
Un recueil de 6 nouvelles dans une langue française d'une qualité désormais disparue. Dans la Normandie chère à Maupassant, des récits de jalousie, de peur, de terreur. L'aristocratie règne encore, les femmes sont encore réduites à un rôle accessoire, une époque largement révolue. Un auteur peu lu aujourd'hui, mais si vous aimez vous régaler d'une langue riche, alors n'hésitez pas, on touche ici aux sommets.
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Une dizaine de nouvelles, formidablement écrites, décrivant des femmes au sort souvent funeste. L'objectif de l'auteur, selon sa préface, est de peindre les vices dans toute leur horreur afin de décourager le lecteur de s'y adonner. A-t-il réussi? Rien n'est moins sûr, mais quel plaisir de lecture, tout de même!
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Barbey d'Aurevilly, ce fantasque et non moins génial dandy des Lettres françaises – voir son impeccable article consacré au Fleurs du Mal de Baudelaire pour s'en convaincre –, peut toujours se justifier dans une préface morale, il n'empêche qu'il a du goût pour ces Diaboliques femmes, souvent secondées par des hommes qui ne sauraient se contenter d'afficher leur faiblesse face au Beau sexe pour se dédouaner de leurs propres diableries. Quant à ceux qui se maintiendraient dans une lecture effarée, eh bien, je leur dédie cette phrase de la baronne de Mascranny : « Décidemment, vous avez un vilain genre d'imagination, ce soir. »

Cependant, nul ne saura contester le mystique de cette oeuvre, où le Diable et le Ciel semblent se renvoyer la balle, d'accords au moins sur ce point : « le mot diabolique ou divin, appliqué à l'intensité des jouissances, exprime la même chose, c'est-à-dire des sensations qui vont jusqu'au surnaturel. »

Et pourtant, Barbey ne dissimule pas plus ici qu'ailleurs son « amour pour les choses du catholicisme » ; il est juste joueur, voilà tout. Un jeu qui lui fait raconter toutefois les errances charnelles paroxystiques d'une Rosalba, par exemple, « singulière catin arrosée de pudeur par le Diable ». J'ai dit « joueur » ? Autant dire « voyeur », tout comme nous les lecteurs…

Ce qui est certain c'est que rien n'est tiède ici puisque règnent les sens : « C'était enivrant et dégrisant tout à la fois, mais c'était terrible ! » confesse ainsi le vicomte de Brassard au souvenir d'une jeune fille qui venait le rejoindre dans sa chambre au rideau cramoisi, tandis qu'il était hébergé sous le toit des parents de celle-ci.

Évidemment, si des hommes d'envergure s'immiscent çà et là dans les récits – dont le commandant Mesnilgrand n'est pas le moindre, qui « imposait, comme tous les hommes qui ne demandent plus rien à la vie » –, ce sont les femmes qui raflent la mise. Ces femmes que Barbey gratifie à l'occasion d'aphorismes de sa façon : « Les femmes, lâches individuellement, en troupe sont audacieuses. » Autre morceau de bravoure misogyne (mais Barbey écrit au beau milieu du XIXe siècle, alors gardons-nous de jugements anachroniques imbéciles qui maquillent si mal l'ignorance de ceux qui les émettent !) : « « Et elle était là-dessous d'une beauté pleine de réserve, et d'une noblesse d'yeux baissés, qui prouvait qu'elles font bien tout ce qu'elles veulent de leurs satanés corps, ces couleuvres de femelles, quand elles ont le plus petit intérêt à cela. »

Mais Barbey sait se rattraper et énoncer de ces vérités intangibles, aujourd'hui encore : « En thèse générale, on peut dire que tous les dîners d'hommes où ne préside pas l'harmonieux génie d'une maîtresse de maison, où ne plane pas l'influence apaisante d'une femme qui jette sa grâce, comme un caducée, entre les grosses vanités, les prétentions criantes, les colères sanguines et bêtes, même chez les gens d'esprit, des hommes attablés entre eux, sont presque toujours d'effroyables mêlées de personnalités, prêtes à finir toutes comme le festin des Lapithes et des Centaures, où il n'y avait peut-être pas de femmes non plus. »

Que dire, enfin, du personnage de la duchesse de Sierra-Leone qui se vautre volontiers, et malgré sa nature sublime, dans la fange pour mieux se venger de l'homme qui, par son orgueil cruel, l'y a plongée ? Une figure tragique et résumée dans cette phrase : « Les sentiments comme les miens ont leur folie, mais c'est leur folie qui fait le bonheur ! »

Dans ces pages, on sent aussi poindre la nostalgie d'un autre temps, comme à propos de tel salon où perdure l'art de la conversion « d'autrefois, la dernière gloire de l'esprit français, forcé d'émigrer devant les moeurs utilitaires et occupées de notre temps. » Et, de fait, rien n'est utilitaire dans le recueil de Barbey : la passion ne saurait d'ailleurs être matérialiste.

Mais Barbey n'est pas un auteur de romans policiers, et il n'est pas question pour lui de livrer tout le pourquoi du comment dans chacune de ses nouvelles. Au lecteur, parfois frustré par une chute abrupte, de se débrouiller avec son imagination…


(IMPORTANT : ne surtout pas lire les notes de la présente édition car son auteur – un certain Jacques Petit – croit judicieux d'y révéler des éléments de l'intrigue. Pour ce qui me concerne, je m'en suis rapidement abstenu et cela n'a gêné en rien ma lecture !)
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Dans ce livre, ne cherchez pas la moralité car vous ne la trouveriez pas.

La parité du côté sombre du Mal est extrêmement bien respectée.

Côté homme que ce soit Don Juan ou le vieux militaire qui se remémore avec autant d'effrois que d'émois.

Côté femme, ne croyez pas que cela soit plus moral.

Que ce soit Alberte la soi-disant ingénue ou la fine lame de Haute - Claire, telle la Panthère noire du zoo sont redoutables.

Mais une chose est sûre. C'est que dans chacun de ses personnages, il y a l'âme humaine.

Celle que nous pouvons avoir selon les circonstances.

Que ne fait-on pas par amour ?

" J'irais jusqu'au bout du monde,
Je me ferais teindre en blonde ...
Si tu me le demandais ?"

Voilà ce que l'on peut faire par amour et même devenir une bonne.

Alors qui sont vraiment "Les Diaboliques"?

L'homme ? La femme ? Ou tout simplement l'Amour ?

A vous de vous faire votre propre définition du terme "diabolique" en lisant ce bijou littéraire qui aurait pu être écrit l'année dernière ou dans un millénaire tant ce thème est universel.
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Après une période d'adaptation au style , à la longueur des descriptions, quel enchantement ! Des histoires étonnantes, curieuses, des personnages magnifiquement croqués, fond cette lecture un moment hors du temps.
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Pour moi cet ensemble de nouvelles n'a aucun défaut. On y trouve une richesse de style, une variété dans les histoires, une audace inégalée. Tous les sens sont en éveil, quand la nouvelle prend fin, on croit tomber du haut d'une falaise !
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Une référence à relire.
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