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EAN : 9782081223912
865 pages
Flammarion (25/05/2009)
4.29/5   19 notes
Résumé :
Sombre repoussoir des Lumières et de la modernité, le Moyen Âge peine à se défaire de sa mauvaise réputation. Pourtant, au cœur de ce millénaire se loge une singulière période d’essor et d’élan créateur, déterminante pour la destinée du monde européen.

Réputé anarchique, le système féodal repose en fait sur une organisation sociale efficace. L’Église, colonne vertébrale de la société, assure la cohésion des entités locales tout en conférant à la chrét... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Une excellente introduction à cette période si vaste qu'est le Moyen Âge. Cet ouvrage permet de se faire une idée de cette période loin des nombreux préjugés. L'approche choisie et le découpage est tres original et pertinent. le style d'écriture est certes assez complexe mais on s'y fait.
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Clair, bien écrit, complet: indispensable!
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Ce livre est très instructif et plutôt bien écrit, mais attention, il est TRES épais.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
Derrière le combat des vices et des vertus se profile une autre lutte, plus fondamentale encore. Ce sont en effet le diable et ses troupes démoniaques qui tentent les hommes et les induisent au péché, tandis que Dieu et ses armées célestes s'efforcent de les protéger et de les inciter à la vertu. Le monde est le théâtre de cet affrontement permanent et dramatique entre le Créateur et Satan. Celui-ci est l'une des créations les plus originales du christianisme : pratiquement ignoré dan., s l'Ancien Testament, son rôle est surtout valorisé par l’Évangile qui en fait « le prince de ce monde » (J n 12), « le dieu de ce siècle » (II Cor 4). Il fédère alors la multitude des esprits démoniaques qui pullulent dans le judaïsme populaire, tout en procédant de la dissociation de la figure ambivalente de Yahvé, dieu de colère et de châtiment autant que bienfaisant. C'est alors, en recourant principalement à la littérature apocryphe juive (surtout le Livre d'Hénoch, du 11e siècle avant J.-C.), qu'est précisé le mythe de la chute des anges, qui constitue l'acte de naissance du diable et marque l'entrée du mal dans l'univers. Si, dans le récit initial, la chute est la conséquence du désir des démons, qui ont été séduits par la beauté des femmes, à partir du ive siècle elle est expliquée par l'orgueil du premier des anges, Lucifer, désireux d'égaler Dieu et pour cela chassé du ciel, en même temps que tous les anges rebelles ralliés à sa folle prétention.

Au cours du Moyen Âge, l'importance de la figure du Malin se renforce constamment, tant dans les textes que dans les images, où il n'apparaît guère qu'à partir du IXe siècle. (pp. 539-540)
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A mesure que s'approfondit l'unification du groupe chevaleresque, se consolide aussi son code de valeurs. Celles-ci sont notamment exaltées, dès la première moitié du XIIe siècle, par les chansons de geste (telle La Chanson de Roland), ces récits épiques que jongleurs et troubadours chantent dans les cours seigneuriales et princières, puis un peu plus tard, par les romans de chevalerie (premier genre littéraire non chanté du Moyen Age, mais destiné à être récité durant les festivités châtelaines). Les premières de ces valeurs sont la « prouesse », c'est-à-dire la force physique, le courage et l'habileté au combat, et, de manière plus spécifique à la société féodale, l'honneur et la fidélité, sans oublier un solide mépris des humbles, fréquemment comparés à la monture que le noble chevauche et mène à sa guise. Son éthique repose aussi sur la largesse. À l'opposé de la morale bourgeoise de l'accumulation, un noble se distingue par sa capacité à dépenser et à distribuer. Il se livre volontiers à la rapine sur le dos de ses voisins, de sorte que les non-nobles le décrivent comme un rapace avide et plein de convoitise. Mais s'il fait du butin, c'est pour pouvoir se comporter avec plus de panache, pour entretenir un entourage plus nombreux qui rehausse son prestige, pour manifester sa générosité à l'égard des pauvres (sans oublier la nécessité de faire face aux dépenses militaires indispensables pour tenir son rang. Ainsi, même si les gestes qu'elle suscite peuvent parfois lui ressembler, la largesse aristocratique se distingue de la charité, vertu chrétienne par excellence qui doit plutôt s'accomplir dans l'humilité d'un lien fraternel. Pour l'aristocrate, il s'agit de distribuer et de consommer avec excès et ostentation, pour mieux affirmer sa supériorité et son pouvoir sur les bénéficiaires de sa prodigalité.

Mais ces valeurs essentielles ne tardent pas à se révéler insuffisantes. Car, très tôt, l'Eglise joue un rôle important dans la structuration de la chevalerie et son unification autour d'un même idéal. Cela suppose de distinguer entre les mauvais chevaliers, pillards, tyranniques et impies, et ceux qui mettent leur force et leur courage au service de causes justes, telles que la protection de l'Église et la défense des humbles. (pp. 150-151)
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Un constat essentiel est cependant susceptible de faire l'unanimité : lorsqu'on atteint le XIe siècle, l'esclavage, qui constituait la base de la production agricole dans l'Empire romain, a cessé d'exister, de sorte que, entre la fin de l'Antiquité tardive et celle du haut Moyen Âge, intervient indéniablement la disparition de l'esclavage productif (en revanche, l'esclavage domestique, qui ne joue aucun rôle dans la production agricole, continue d'exister, notamment dans les villes de l'Europe méditerranéenne, jusqu'à la fin du Moyen Âge et au-delà). Mais l'accord cesse dès lors que l'on soulève trois questions déterminantes pour comprendre la disparition de l'esclavage : pourquoi ? quand ? comment ?

Les causes religieuses, traditionnellement invoquées, ont vu leur importance limitée par l'historiographie du dernier demi-siècle. De fait, le christianisme est loin de condamner l'esclavage, comme l'attestent les écrits de saint Paul. Il s'emploie au contraire à en renforcer la légitimité, au point que des théologiens comme Augustin et Isidore de Séville, si essentiels pour la pensée médiévale, voient en lui un châtiment voulu par Dieu. Certes, l'Église considère la libération des esclaves (manumissio) comme une œuvre pieuse ; mais elle ne donne guère l'exemple, puisque les esclaves qu'elle possède en grand nombre sont réputés appartenir à Dieu et ne sauraient donc être soustraits à un maître si éminent (sans mentionner le fait qu'un pape comme Grégoire le Grand achète de nouveaux esclaves). Pourtant, bien que l'Église ne s'oppose en rien à l'esclavage, la diffusion des pratiques chrétiennes modifie en profondeur la perception des esclaves et mitige peu à peu leur exclusion de la société humaine. En effet, si dans un premier temps l'Église interdit de réduire un chrétien en esclavage, elle reconnaît ensuite que l'esclave est un chrétien : celui-ci reçoit le baptême (son âme doit donc être sauvée) et il partage, durant les offices, les mêmes lieux que les hommes libres. Une telle pratique, qui réduit la séparation entre libres et non-libres, tend à saper les fondements idéologiques de l'esclavage, à savoir la nature infra-humaine de l'esclave et sa désocialisation radicale (Pierre Bonnassie). (pp. 57-58)
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Un autre aspect de l'œuvre de Max Weber doit être rappelé. À l'opposé des thèses selon lesquelles la modernité ne peut naître que d'une laïcisation de la pensée, il met l'accent sur ce qui, dans la religion, favorise les conduites rationnelles, et se montre « sensible aux potentialités rationalisatrices des religions de la transcendance » (Philippe Raynaud). Sur de telles bases, on en vient assez aisément à attribuer au christianisme un rôle majeur dans la formation de la rationalité occidentale et dans l'expansion européenne. Max Weber ne voit-il pas dans la nouveauté radicale de la temporalité chrétienne l'une des clés de l'expérience unique de l'Occident et de son destin hégémonique ? Quant à l'analyse méthodiquement menée par Marcel Gauchet, elle inscrit au cœur de la dynamique occidentale un phénomène justement situé durant le Moyen Age : la « libération de la dynamique originelle de la transcendance » (entendons par là la logique qui sépare l'humain et le divin, la nature et la surnature, le visible et l'invisible) . Or, c'est en nouant ces ordres de réalité que l'Incarnation en signale l'écart irrémédiable. Et tandis que les religions antérieures se proposaient de régenter l'ici-bas, l'investissement sur l'au-delà qui caractérise le christianisme tend, en dépit des effets contraires induits par l'institutionnalisation de l’Église, à libérer en partie le monde du poids de la religion et à préparer l'acceptation et l'amour des réalités terrestres. Ainsi, à mesure qu'il assume la dynamique de la transcendance - à mesure, si l'on veut, que Dieu se retire du monde -, le christianisme amplifie la possibilité d'une objectivation du réel et d, une connaissance rationnelle de celui-ci. À terme, la dynamique de la transcendance produit une rupture entre l'être et le devoir-être, qui rend capable de s,opposer au monde, pour l'affronter et le transformer.

Pour Marcel Gauchet, le christianisme serait ainsi « la religion de la fin de la religion », et la modernité résulterait non pas de son affaiblissement mais de la radicalisation de ses potentialités. (pp. 766-767)
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Tirant les conséquences du changement de statut de l’Église, Augustin inaugure un processus fondamental, qui se poursuit sur la longue durée du millénaire médiéval. Il engage en effet le christianisme dans une réhabilitation mesurée du mariage, notamment en affirmant que celui-ci a été institué par Dieu dans le paradis terrestre entre Adam et Ève (c'est-à-dire avant le péché originel, dans l'état d,innocence et de perfection de l'humanité, voulu par le Créateur). Une telle évolution s'amorce de manière bien compréhensible, dès lors que s'impose la nécessité de composer avec l'organisation terrestre de la société et en premier lieu de la reproduire physiquement. Il en résulte une conception ambiguë, dans laquelle le mariage et la reproduction sexuée sont à la fois dépréciés par rapport à la chasteté, et néanmoins acceptés, à condition d'être contrôlés et associés à un lien spirituel. Cela conduit à développer un modèle du mariage imposant à la fois monogamie, indissolubilité (déjà affirmée dans Mt 19, 4-6) et une exogamie beaucoup plus forte qu'à Rome, qui toutefois n'est mise en pratique que progressivement.

Une telle combinaison conduit à un modèle de l'alliance inédit et extraordinairement contraignant, qui constitue probablement une exception historique (Alain Guerreau). Il est associé à une première affirmation de la position de l'Église, ne serait-ce que parce que ces contraintes ont pour effet de n1ultiplier le nombre de couples sans descendance. Jointes aux obstacles mis au remariage des veuves (à l'opposé du lévirat antique qui créait une obligation de remariage avec le frère du défunt), elles transforment les modalités de transmission des héritages et favorisent leur concentration au profit de l'Église (Jack Goody). Mais au-delà des avantages matériels que l’Église peut tirer de ces bouleversements, son intervention dans le domaine de la parenté lui fournit un puissant levier dans l’œuvre de conversion et de contrôle de la société. (pp. 641-642)
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